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17/08/2017 | FRANCE | N°17DA00301

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre - formation à 3, 17 août 2017, 17DA00301


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2016 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination de l'éloignement.

Par un jugement n° 1602706 du 24 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enr

egistrée le 14 février 2017, la préfète de la Seine-Maritime, demande à la cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2016 de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination de l'éloignement.

Par un jugement n° 1602706 du 24 janvier 2017, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2017, la préfète de la Seine-Maritime, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 janvier 2017 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) de rejeter la demande de MmeA... ;

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public.

1. Considérant que MmeA..., de nationalité guinéenne, née le 12 décembre 1997, déclare être entrée en France en décembre 2013 ; qu'elle a été prise en charge à compter du 6 mars 2014 par les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) ; que, le 14 décembre 2015, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 31 mars 2016, la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination de l'éloignement ; que, par le jugement du 24 janvier 2017, dont la préfète de la Seine-Maritime relève appel, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté ;

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : /(...)/ 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ;

3. Considérant que Mme A...fait valoir qu'elle a constitué en France des liens sociaux par le biais de l'aide sociale à l'enfance (ASE), de l'institut départemental de l'enfance, de la famille et du handicap pour l'insertion (IDEFHI) et de missions locales, qu'elle s'efforce de trouver une formation professionnelle dans le domaine de la pâtisserie, qu'elle suit, régulièrement, des cours de français, et qu'elle participe à des ateliers dont le but est de favoriser son insertion sociale ; que, toutefois, elle est célibataire et sans enfant ; qu'elle ne démontre pas être dépourvue de tout lien familial en Guinée, où elle a vécu jusqu'à l'âge de seize ans ; qu'elle n'a pas non plu établi, en France, où elle a résidé seulement pendant un peu plus de deux ans avant le prononcé de la décision en litige, des liens personnels intenses, anciens et stables ; qu'elle ne conteste pas, en outre, mal maîtriser la langue française malgré les réels efforts qu'elle a pu déployer et ne justifie ni de l'obtention d'une qualification professionnelle, ni même d'une progression dans une filière de formation professionnelle en se bornant à faire état de projets ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, son intégration demeurant... ; que, par suite, la préfète de la Seine-Maritime, qui n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce motif pour annuler sa décision refusant un titre de séjour à MmeA..., ainsi que ses décisions l'obligeant à quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire de trente jours ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la requérante devant la juridiction administrative ;

Sur le refus de séjour :

5. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

6. Considérant que la vie privée et familiale constituée en France par Mme A...dans les conditions rappelées au point 3, ainsi que les efforts déployés par la requérante afin d'effectuer son insertion sociale en France pendant plus de deux ans ne constituent pas, dans les circonstances de l'espèce, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 7 que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise la préfète de la Seine-Maritime dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de Mme A...doit être écarté, pour les mêmes raisons ;

8. Considérant que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; qu'il résulte de ce tout ce qui précède que, Mme A...ne pouvant prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, la préfète de la Seine-Maritime n'était pas tenue de consulter cette commission avant de statuer sur sa demande et n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit aux points 1 à 8, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à Mme A...de quitter le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour sur le fondement duquel elle a été prise doit être écarté ;

10. Considérant que si Mme A...soutient qu'elle souffre d'un choc post-traumatique consécutif à la mort de ses parents et de céphalées, à intervalles réguliers, nécessitant un suivi médical, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette situation ait été portée à la connaissance de la préfète de la Seine-Maritime à une date antérieure à celle de l'arrêté lui faisant obligation de quitter le territoire français ; qu'elle ne peut, dès lors, utilement se prévaloir du défaut de consultation du médecin de l'agence régionale de santé ou de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme A...n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant qu'eu égard à ce qui a été dit aux points 9 à 11, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays à destination duquel Mme A...pourra être reconduite d'office devrait être annulée en conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français pour l'exécution de laquelle elle est prise doit être écarté ;

13. Considérant que l'arrêté attaqué précise la nationalité de MmeA..., mentionne le refus d'admission au séjour de la requérante, et énonce que rien ne permet de considérer que serait portée atteinte aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que la décision attaquée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent à l'intéressée de les discuter et au juge de les contrôler, est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que selon les termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

15. Considérant qu'il ne ressort pas des éléments versés au dossier par la requérante, qui ne comportent aucune précision suffisamment circonstanciée et vérifiable et ne sont assortis d'aucun document probant, qu'elle encourrait un risque personnel, direct et actuel de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ; que dès lors la préfète de la Seine-Maritime n'a pas méconnu les dispositions de l'article 3 de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 31 mars 2016, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mme A... et a mis la somme de 1 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il suit de là que la demande présentée par Mme A... devant ce tribunal et, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente en appel au titre des dispositions de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 24 janvier 2017 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Rouen et les conclusions que l'intéressée présente en cause d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me B...C.insuffisante, la décision lui refusant un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi

Copie en sera adressée pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

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N°17DA00301

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00301
Date de la décision : 17/08/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Habchi
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-08-17;17da00301 ?
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