La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2017 | FRANCE | N°17DA01322

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2017, 17DA01322


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation d'une décision de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de l'arrêté du 13 juin 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert vers la Norvège.

Par un jugement n° 1701838 du 29 juin 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

et un mémoire, enregistrés les 5 et 6 juillet 2017 M. B..., représenté par Me A...C..., demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation d'une décision de la préfète de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de l'arrêté du 13 juin 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert vers la Norvège.

Par un jugement n° 1701838 du 29 juin 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 et 6 juillet 2017 M. B..., représenté par Me A...C..., demande à la cour :

1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'annuler l'ordonnance du 15 juin 2017 du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Rouen validant son placement en rétention administrative et d'ordonner la fin de cette mesure ;

2°) d'annuler le jugement du 29 juin 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen ;

3°) d'annuler l'arrêté du 13 juin 2017 de la préfète de la Seine-Maritime ;

4°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 20 euros par jour de retard, à titre principal, de l'autoriser à présenter une demande d'asile sur le territoire français et de lui délivrer à ce titre une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant afghan né le 3 octobre 1994, déclare être entré sur le territoire français le 7 mars 2017 ; que la consultation du système " Eurodac ", a révélé qu'il avait été enregistré comme demandeur d'asile en Norvège le 12 octobre 2015 et en Allemagne le 18 août 2016 ; que, par deux arrêtés du 13 juin 2017, la préfète de la Seine-Maritime a décidé son transfert vers la Norvège et son placement en rétention administrative ; que M. B... relève appel, d'une part, de l'ordonnance du 15 juin 2017 du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Rouen validant son placement en rétention administrative, et, d'autre part, du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen rejetant sa demande en annulation de la mesure de transfert ;

Sur les conclusions dirigées contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention :

2. Considérant qu'il n'appartient pas aux juridictions de l'ordre administratif de connaître de l'appel formé contre la décision du juge des libertés et de la détention se prononçant, en application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur la décision de placement en rétention administrative d'un étranger ; que, par suite, les conclusions de la requête dirigées contre l'ordonnance du 15 juin 2017 du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Rouen validant le placement en rétention administrative de M. B... et la mesure de rétention, ainsi que celles tendant à obtenir le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire en vue de contester cette ordonnance, doivent être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la préfète de la Seine-Maritime à la demande de première instance :

3. Considérant, d'une part, qu'en vertu de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert : " mentionne les voies et délais de recours " ; qu'aux termes de l'article L. 742-4 du même code : " I. - L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. /(...) / II. - Lorsqu'une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert (...) " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 777-3-l du code de justice administrative : " I- Conformément aux dispositions du I de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une décision de transfert fait courir un délai de quinze jours pour contester cette décision. / II - Conformément aux dispositions du II de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification simultanée d'une décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence et d'une décision de transfert fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester ces décisions " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la notification de la décision de transfert contestée et la décision prononçant le maintien en rétention de M. B... lui ont été notifiées simultanément, le 13 juin 2017 à 10 heures 30 ; que, par suite, le requérant disposait du délai de quarante-huit heures à compter de cette notification, prévu par les dispositions du II de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et rappelé au II de l'article R. 777-3-1 du code de justice administrative, pour former un recours contentieux contre la décision de transfert ; que, toutefois, la notification de cette décision mentionnait que l'intéressé disposait d'un délai de quinze jours pour saisir le tribunal administratif de Rouen en vertu des articles R. 777-3 et suivants du code de justice administrative ; que la notification de la décision de placement en rétention comportait quant à elle, en tout état de cause, un simple rappel de la possibilité d'exercer un recours contentieux devant cette juridiction ; que, M. B... ayant ainsi été induit en erreur sur le délai de recours plus bref dont il disposait, ne peut se voir opposer ce délai ; que, dès lors, la préfète de la Seine-Maritime n'est pas fondée à soutenir que la demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Rouen le 16 juin 2017, était tardive ;

Sur la décision de transfert :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 3 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. Lorsque aucun État membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le présent règlement, le premier État membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite est responsable de l'examen. (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 de ce règlement : " 1. Les critères de détermination de l'État membre responsable s'appliquent dans l'ordre dans lequel ils sont présentés dans le présent chapitre. (...) " ; que ces critères sont, par ordre de priorité décroissante, ceux qui s'appliquent aux mineurs, au demandeur dont un membre de la famille a obtenu le bénéfice d'une protection internationale, dont un membre de la famille est demandeur d'une protection internationale, ou qui peut faire l'objet d'une " procédure familiale " conjointe au sens de l'article 11 du règlement, puis ceux relatifs à la délivrance de titres de séjour ou de visa, à l'entrée ou au séjour sur le territoire d'un Etat membre en provenance d'un Etat tiers, à l'entrée sur le territoire d'un Etat membre sous exemption de visa, ou à la demande présentée dans une zone de transit international d'un aéroport ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 26 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Lorsque l'État membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'État membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'État membre responsable (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) " ; que, pour être suffisamment motivée, afin de mettre l'intéressé à même de critiquer, notamment, l'application du critère de détermination de l'Etat responsable de sa demande et, ainsi, d'exercer le droit à un recours effectif garanti par les dispositions de l'article 27 du règlement du 26 juin 2013, éclairées par son considérant 19, la décision de transfert doit permettre d'identifier le critère de responsabilité retenu par l'autorité administrative parmi ceux énoncés au chapitre III ou, à défaut, au paragraphe 2 de l'article 3 du règlement et, le cas échéant, faire apparaître les éléments pris en considération par l'administration pour appliquer l'ordre de priorité établi entre ces critères, en vertu des articles 7 et 3 du même règlement ;

8. Considérant que l'arrêté du 13 juin 2017 qui vise notamment l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, après avoir précisé que M. B... se trouvait en situation irrégulière sur le territoire français, énonce que la consultation du système " Eurodac " a révélé que l'intéressé avait été enregistré comme demandeur d'asile en Norvège le 12 octobre 2015 et en Allemagne le 18 août 2016 ; que, toutefois, s'il cite les dispositions du règlement du 26 juin 2013 relatives au mécanisme de reprise en charge par l'Etat responsable d'un étranger se trouvant en situation irrégulière sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne, l'arrêté contesté ne comporte aucune indication permettant d'identifier le critère hiérarchisé mis en oeuvre par la préfète de la Seine-Maritime pour désigner la Norvège comme l'unique Etat responsable de l'examen de la demande d'asile de M. B... ; que la mesure de transfert vers la Norvège est ainsi insuffisamment motivée ; que les précisions données par la préfète de la Seine-Maritime en défense sur les fondements susceptibles de justifier sa décision ne sont pas de nature à purger cette insuffisance de motivation ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B..., qui n'articule aucun moyen à l'encontre du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions en annulation d'un refus de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en tant qu'elle était dirigée contre la l'arrêté du 13 juin 2017 prononçant son transfert vers la Norvège ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que M. B..., qui n'a pas déposé de demande d'asile en France, soit admis provisoirement à s'y maintenir à ce titre ; que cet arrêt n'implique pas davantage qu'un titre de séjour lui soit délivré sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant doivent, par suite, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1701838 du 29 juin 2017 du tribunal administratif de Rouen est annulé en tant que le tribunal a rejeté les conclusions de la demande de M. B... dirigées contre l'arrêté du 13 juin 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a prononcé son transfert vers la Norvège.

Article 2 : L'arrêté du 13 juin 2017 de la préfète de la Seine-Maritime prononçant le transfert de M. B... vers la Norvège est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., au ministre de l'intérieur et à Me A...C....

Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

4

N°17DA01322


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA01322
Date de la décision : 19/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : TROFIMOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 02/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-12-19;17da01322 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award