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25/09/2018 | FRANCE | N°18DA00214

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 25 septembre 2018, 18DA00214


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 juin 2017 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer un certificat de résidence, à défaut, de proc

éder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1708686 du 20 déce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 juin 2017 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer un certificat de résidence, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 1708686 du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2018, M.B..., représenté par Me A...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 20 décembre 2017 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Nord du 19 juin 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, sous astreinte de 20 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un certificat de résidence, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant algérien né le 22 août 1970, est entré sur le territoire français le 1er juillet 2015, accompagné de son épouse et de leurs deux enfants, à l'issue d'un séjour habituel de cinq années en Belgique. Une première décision l'obligeant à quitter le territoire français, prise le 10 août 2016, n'a pu être exécutée à la suite de l'annulation pour un motif de forme, par un jugement du 28 février 2017 du tribunal administratif de Lille devenu définitif, de la décision du même jour fixant le pays à destination duquel M. B... pourrait être reconduit d'office. A l'issue d'un nouvel examen de la situation de l'intéressé, le préfet du Nord, par arrêté du 19 juin 2017, a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. B...relève appel du jugement du 20 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de séjour :

2. M. B...fait état de la présence auprès de lui de son épouse, de celle de leur fille, âgée de vingt ans à la date de l'arrêté du 19 juin 2017 en litige et poursuivant des études en Belgique, et de celle de leur fils, âgé de dix-sept ans et scolarisé en France. Il est toutefois constant que M. B...et son épouse, qui, comme il a été dit au point 1, sont entrés sur le territoire français le 1er juillet 2015, se sont tous deux vu refuser la délivrance d'un certificat de résidence et font tous deux l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Il en est d'ailleurs de même de leur fille majeure. En outre, M. B...n'établit, ni d'ailleurs n'allègue, qu'il serait dépourvu d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, où résident, selon ses propres déclarations à l'administration, deux de ses frères et une de ses soeurs et où il a lui-même habituellement vécu durant près de quarante ans. Dans ces conditions et malgré la présence en France de plusieurs autres membres de sa famille, dont un frère et quatre beaux-frères et belles-soeurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que des circonstances particulières feraient obstacle à ce que M. B...reconstitue, avec son épouse et leurs enfants, leur vie familiale dans leur pays d'origine, ni, en particulier, à ce que la fille du requérant y poursuive ses études supérieures et son fils, sa scolarité et sa pratique sportive. Dans ces circonstances et eu égard à la faible ancienneté de même qu'aux conditions du séjour de M. B..., la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Cette décision ne méconnaît, dès lors, pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces circonstances, pour refuser de délivrer un certificat de résidence à M. B..., qui n'a fait état devant le juge d'aucune perspective d'insertion professionnelle ni d'aucun effort notable d'intégration, le préfet du Nord n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

3. Aux termes des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant: " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

4. Si le fils de M. B... était inscrit, à la date de l'arrêté contesté, en première année préparatoire au baccalauréat professionnel de technicien du bâtiment au lycée professionnel Georges Guynemer de Dunkerque, après avoir obtenu des résultats honorables, en dépit de nombreuses absences, et s'être vu attribuer, à la session de juin 2016, un certificat d'aptitude professionnelle dans la spécialité de maçonnerie, il ne ressort pas des pièces du dossier, comme il a été dit au point 2, que des circonstances particulières feraient obstacle à ce que celui-ci poursuive un enseignement professionnel dans le domaine du bâtiment dans son pays d'origine, l'insuffisante maîtrise de l'arabe littéraire qui est alléguée ne pouvant suffire à constituer de telles circonstances, eu égard notamment au caractère professionnel de la scolarité suivie par l'intéressé dont l'arabe dialectal est la langue maternelle. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier ni n'est même allégué qu'il serait impossible au fils de M. B... de poursuivre, dans son pays d'origine, sa pratique du judo à un niveau de compétition. Ainsi, pour refuser à M. B... la délivrance d'un certificat de résidence, le préfet du Nord n'a pas porté une attention insuffisante à l'intérêt supérieur du fils de celui-ci, ni n'a méconnu les stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que la décision refusant de délivrer un certificat de résidence à M. B... n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui refusant cette délivrance ne peut qu'être écarté.

6. Il résulte de l'examen des motifs de l'arrêté du 19 juin 2017 en litige qu'avant de faire obligation à M. B... de quitter le territoire français, le préfet du Nord s'est livré à un examen particulier de la situation de l'intéressé, en prenant notamment en compte la présence sur le territoire français, ainsi qu'il l'avait fait valoir auprès de l'administration, de plusieurs membres de sa famille, à savoir d'un frère et de quatre beaux-frères et belles-soeurs. Le seul fait que le préfet n'a pas détaillé, dans les motifs de son arrêté, l'ensemble des éléments caractérisant la situation de M. B... ne peut suffire à établir que son examen aurait été insuffisamment attentif et approfondi.

7. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 2, les moyens tirés de ce que la décision faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que, pour faire obligation à l'intéressé de quitter le territoire français, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Nord.

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N°18DA00214

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00214
Date de la décision : 25/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : ELMOKRETAR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-25;18da00214 ?
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