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27/09/2018 | FRANCE | N°18DA00533

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 27 septembre 2018, 18DA00533


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 janvier 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1800165 du 6 février 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mars 2018, M.A..., représenté Me B...D..., demande à la cour : <

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1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 janvier 2018 ;

3°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 janvier 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1800165 du 6 février 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mars 2018, M.A..., représenté Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 janvier 2018 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 20 euros par jour de retard.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant somalien, né le 1er avril 1996, qui déclare avoir quitté la Somalie en raison de persécutions, serait arrivé en France par l'Italie le 22 octobre 2017. Il a déposé en France une demande d'asile le 7 novembre 2017. La consultation du fichier Eurodac a fait apparaître l'existence d'une prise d'empreintes et d'une demande d'asile en Italie. Ce pays, consulté par la France, a tacitement accepté de le reprendre en charge. M. A... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a procédé à son transfert vers l'Italie.

Sur la régularité du jugement :

2. Le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a pris en considération l'ensemble des éléments soumis à son appréciation et a répondu par un jugement qui est suffisamment motivé à l'ensemble des moyens soulevés dans la demande. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé doit être écarté.

Sur la décision de transfert :

3. Aux termes de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. L'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de :: / a) prendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 21, 22 et 29, le demandeur qui a introduit une demande dans un autre Etat membre ; / b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre Etat membre / (...) ". Aux termes de l'article 25 du même règlement : " 1. L'Etat membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".

4. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des termes même de l'arrêté attaqué, que la préfète a saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge le 10 novembre 2017. En application de l'article 25 du règlement (UE) n° 604/2013 cité au point précédent, l'Italie est réputée avoir tacitement accepté de reprendre en charge l'intéressé le 25 novembre 2017 après une période de 15 jours. Le 18 décembre 2017, la préfète a informé l'Italie de l'existence d'un constat d'accord tacite. Les différentes étapes de cette procédure sont détaillées dans l'arrêté en litige qui ne révèle ni une contradiction dans ses motifs, ni un défaut de motivation.

5. Aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...). / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les Etats membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel (...) est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du compte rendu de l'entretien individuel, que celui-ci s'est déroulé le 7 novembre 2017 dans les locaux de la préfecture de police de Paris et que M. A... a été assisté par un interprète dont le nom et les coordonnées figurent dans le compte rendu, ce que le requérant ne remet d'ailleurs pas en cause. La circonstance que l'interprète n'a pas signé le compte rendu n'est pas de nature à entacher d'illégalité la procédure. En outre, il n'est pas sérieusement contesté que M. A... a été reçu lors de cet entretien par un agent de la préfecture de police, lequel doit être regardé comme une personne qualifiée en vertu du droit national pour mener cet entretien. Aucune disposition n'impose la mention obligatoire sur le compte rendu individuel de l'identité de l'agent qui a mené l'entretien ou sa signature. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 auraient été méconnues doit être écarté.

7. La préfète de la Seine-Maritime produit la copie de la demande de reprise en charge de M. A... adressée par le réseau Dublinet le 10 novembre 2017 aux autorités italiennes ainsi que l'accusé de réception de cette demande. Par suite, le moyen tiré du défaut de saisine régulière des autorités italiennes doit être écarté.

8. La préfète de la Seine-Maritime produit la copie du constat d'accord implicite de reprise en charge de M. A... adressée par le réseau Dublinet le 18 décembre 2017 aux autorités italiennes ainsi que l'accusé de réception de cet envoi. Par suite, le moyen tiré de défaut de constat de l'accord tacite de reprise en charge des autorités italiennes doit être écarté.

9. Aux termes des dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un Etat membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier Etat membre auprès duquel la demande a été introduite, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable devient l'Etat membre responsable ".

10. M. A... fait état de la situation dans laquelle se trouve l'Italie, confrontée à un afflux massif de réfugiés. Il n'établit toutefois pas que ces circonstances exposeraient sa demande d'asile à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ou qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en Italie, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été prise en méconnaissance des dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

N°18DA00533 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00533
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Michel Richard
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : TROFIMOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-27;18da00533 ?
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