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04/10/2018 | FRANCE | N°16DA00121

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 octobre 2018, 16DA00121


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Diffusion Plus a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 septembre 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, a, sur recours hiérarchique, confirmé la décision de l'inspectrice du travail de la 3ème section de l'Eure du 21 mars 2013 lui refusant l'autorisation de licencier pour motif disciplinaire M. D...F....

Par un jugement n° 1303134 du 19 novembre 2015

, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Diffusion Plus a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 septembre 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, a, sur recours hiérarchique, confirmé la décision de l'inspectrice du travail de la 3ème section de l'Eure du 21 mars 2013 lui refusant l'autorisation de licencier pour motif disciplinaire M. D...F....

Par un jugement n° 1303134 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 janvier 2016 et un mémoire enregistré le 9 août 2018, la SA Diffusion Plus, représentée par Me E...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de Rouen ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 septembre 2013 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargé du travail, a, sur recours hiérarchique, confirmé la décision de l'inspectrice du travail de la 3ème section de l'Eure du 21 mars 2013 lui refusant l'autorisation de licencier M. D...F...;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruébo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...A..., représentant la société Diffusion Plus.

Considérant ce qui suit :

1. M. F...a été embauché en 2004 par la société Diffusion Plus, qui a pour activité le conditionnement de prospectus et de courriers publicitaires. Il y exerçait les fonctions de technicien de maintenance et il était titulaire du mandat de membre du comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail lorsque son employeur a demandé l'autorisation de le licencier pour motif disciplinaire. La société Diffusion Plus relève appel du jugement du 19 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 septembre 2013 par laquelle le ministre chargé du travail, a, sur recours hiérarchique, confirmé la décision de l'inspectrice du travail de la 3ème section de l'Eure du 21 mars 2013, lui refusant l'autorisation de licencier pour motif disciplinaire M.F....

2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre du travail de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

3. Aux termes de l'article L. 1232-3 du code du travail : " Au cours de l'entretien préalable, l'employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié ". Et aux termes de l'article L. 1332-1 de ce code : " Aucune sanction ne peut être prise à l'encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui. "

4. Il résulte de ces dispositions que l'employeur est tenu, lors de l'entretien préalable, d'indiquer au salarié les motifs du licenciement envisagé, et que, dès lors, l'inspecteur du travail ne peut retenir des griefs qui n'ont pas été indiqués au salarié. Il ressort des pièces du dossier que le grief de détérioration volontaire du boitier électrique n'a pas été discuté lors de l'entretien préalable du 28 décembre 2012, ni mentionné dans la demande d'autorisation de licenciement de M. F...faite le 25 janvier 2013 par la société Diffusion Plus. Le document résumant l'entretien préalable, signé par le directeur général adjoint et la responsable des ressources humaines de la société Diffusion Plus, reproche seulement à M. F...d'avoir été " présent, sans autorisation, ni mission professionnelle dans la galerie technique, d'avoir fait entrer M. G...par une porte dont l'accès est interdit, sauf autorisation " et " d'avoir violé de façon délibéré plusieurs règles impératives de sécurité dans l'entreprise ". La détérioration volontaire n'a, ensuite, été évoquée que comme conséquence de la méconnaissance de ces règles de sécurité, sans être explicitement imputée au salarié, ainsi que l'établit également la demande d'autorisation de licenciement, uniquement fondée sur le manquement aux règles de sécurité. C'est, dès lors, à bon droit que le tribunal administratif a écarté le moyen de l'erreur de droit qu'aurait commis le ministre chargé du travail en écartant le motif de la détérioration volontaire du boitier électrique.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. F...est entré dans la galerie technique de la société Diffusion Plus, en dehors de son temps de travail, et qu'il y a fait entrer M.G..., délégué syndical CGT, afin de couper le disjoncteur commandant le système de ventilation qui diffusait l'air froid et dont le courant d'air perturbait l'organisation matérielle des élections professionnelle en cours, en dispersant le matériel électoral. La société Diffusion Plus soutient qu'une autorisation spéciale était nécessaire pour entrer dans cette galerie. Toutefois, les attestations produites par le salarié établissent que de nombreuses personnes accèdent à cette galerie technique et qu'il n'existe aucune procédure formalisée de délivrance d'autorisation. M. F...était en outre, technicien de maintenance, ainsi qu'il a été dit au point 1, titulaire d'une habilitation électrique haute et basse tension, de nature à justifier son intervention sur le disjoncteur. Dès lors, ces faits, bien que fautifs, ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement.

6. Il ressort aussi des pièces du dossier que M. F...est monté, accompagné de M.G..., sur un échafaudage, avant de pénétrer, sans protection, dans une cage technique sous tension électrique. Toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, ces faits, dans les circonstances de l'espèce, pour fautifs qu'ils soient, ne sont pas non plus d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement.

7. Ainsi qu'il est dit au point 4, les faits de détérioration volontaire du boitier électrique ne peuvent être imputés à M.F.... Dès lors, les deux fautes relevées à l'encontre du salarié ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, eu égard à ses neuf années d'ancienneté dans la société.

8. La société Diffusion Plus soutient que le comportement de M. F...rend son maintien impossible dans l'entreprise du fait de sa perte de confiance envers son salarié. Toutefois, le niveau de responsabilité exercée par M. F...ne lui permet pas d'invoquer ce motif. Elle ne peut non plus utilement s'en prévaloir, dès lors qu'elle a fondé sa demande d'autorisation de licenciement sur un motif disciplinaire.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Diffusion Plus n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA Diffusion Plus est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Diffusion Plus et à la ministre du travail.

Copie sera adressée, pour information, à M. D...F...et au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie.

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N°16DA00121

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00121
Date de la décision : 04/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL DAMC

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-04;16da00121 ?
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