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31/10/2018 | FRANCE | N°16DA01737

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 31 octobre 2018, 16DA01737


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B..., Mme H...G..., l'entreprise Gellynck, le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Chivot, l'entreprise à responsabilité limitée (EARL) Brebion et l'entreprise Pillon ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 28 février 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune de Berteaucourt-les-Thennes a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1401790 du 28 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a re

jeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B..., Mme H...G..., l'entreprise Gellynck, le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Chivot, l'entreprise à responsabilité limitée (EARL) Brebion et l'entreprise Pillon ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 28 février 2014 par laquelle le conseil municipal de la commune de Berteaucourt-les-Thennes a approuvé le plan local d'urbanisme.

Par un jugement n° 1401790 du 28 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 octobre 2016, Mme E...B...et Mme H...G..., représentées par Me D...I..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette délibération ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Berteaucourt-les-Thennes le versement à chacune d'elles de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement,

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me A...C..., représentant la commune de Berteaucourt-les-Thennes.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 25 février 2011, le conseil municipal de la commune de Berteaucourt-les-Thennes a prescrit la révision de son plan d'occupation des sols et sa transformation en plan local d'urbanisme. Après la phase de concertation, le projet de plan local d'urbanisme a été arrêté par délibération du 26 juillet 2013, l'enquête publique s'étant déroulée du 14 novembre 2013 au 14 décembre 2013. Par une délibération du 28 février 2014, le conseil municipal de la commune de Berteaucourt-les-Thennes a approuvé le plan local d'urbanisme. Mmes B...et G...relèvent appel du jugement n° 1401790 du 28 juin 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette délibération du 28 février 2014.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme relatif à la procédure de concertation :

2. Aux termes de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " (...) La délibération qui prescrit l'élaboration du plan local d'urbanisme et précise les objectifs poursuivis ainsi que les modalités de concertation, conformément à l'article L. 300-2, est notifiée au préfet (par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé) ". Aux termes du I de l'article L. 300-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération du 25 février 2011 : " I - Le conseil municipal (...) délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : / a) Toute élaboration ou révision (...) du plan local d'urbanisme (...) ". Il est précisé au cinquième alinéa du I du même article, applicable au présent litige, que : " Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux a, b et c ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la délibération prévue au premier alinéa ont été respectées. Les autorisations d'occuper ou d'utiliser le sol ne sont pas illégales du seul fait des vices susceptibles d'entacher cette délibération ou les modalités de son exécution ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme doit être précédée d'une concertation associant les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées. Le conseil municipal doit, avant que ne soit engagée la concertation, délibérer, d'une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme, et, d'autre part, sur les modalités de la concertation. Si cette délibération est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir, son illégalité ne peut, en revanche, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoquée contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Ainsi que le prévoit l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, les irrégularités ayant affecté le déroulement de la concertation au regard des modalités définies par la délibération prescrivant la révision du document d'urbanisme demeurent.par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé

4. Par une délibération du 25 février 2011 le conseil municipal de la commune de Berteaucourt-les-Thennes a prescrit la révision du plan d'occupation des sols et sa transformation en plan local d'urbanisme et a décidé d'organiser la concertation exigée par l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, selon les modalités suivantes : " un bulletin municipal spécial, une exposition en mairie avec un cahier des doléances sur lequel chacun pourra y consigner ses remarques, une réunion publique ".

5. Si cette délibération a également prévu qu'une commission municipale d'urbanisme, composée de cinq élus municipaux, dont le maire, serait chargé des études du plan local d'urbanisme, cette commission n'a pas été instituée au titre des modalités de la concertation adoptées en application de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme. Par suite, la circonstance alléguée que M. F..., qui n'était pas membre de cette commission, aurait lors de la phase de concertation participé aux réunions avec le commissaire enquêteur, est sans incidence sur la régularité de la procédure de concertation au regard des modalités définies par la délibération du 25 février 2011.

6. De même, si Mmes B...et G...indiquent, au soutien de leur moyen, que le rapport de présentation ne figurait pas dans les pièces du dossier, cette circonstance est également sans incidence sur le respect des modalités de la concertation qui ne prévoyaient pas la mise à disposition d'un dossier devant comporter de telles pièces.

7. Si, enfin, les appelantes font valoir que les habitants n'ont pas été suffisamment informés de la tenue de cette concertation en amont de celle-ci, elles n'indiquent en quoi les modalités de la concertation auraient été méconnues. Elles ne peuvent en outre, comme il a été dit au point 3, utilement remettre en cause, comme insuffisantes, les modalités de la concertation définies par la délibération du 25 février 2011.

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que Mmes B...et G...ne sont pas fondées à soutenir que la délibération en litige serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière au regard des exigences de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme.

Sur le moyen tiré du caractère incomplet du dossier d'enquête publique :

En ce qui concerne l'absence des avis des personnes publiques associées :

9. Aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou, dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 123-6, le maire. Le dossier soumis à l'enquête comprend, en annexe, les avis recueillis en application des articles L. 121-5, L. 123-8, L. 123-9, et, le cas échéant, du premier alinéa de l'article L. 123-6 (par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé) ".

10. S'il appartient à l'autorité administrative de veiller à ce que le dossier d'enquête publique soit complet et comprenne notamment les avis recueillis dans les conditions fixées par les dispositions citées au point précédent, la méconnaissance de ces dispositions n'est de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

11. Il est constant que n'étaient pas joints au dossier d'enquête publique les avis antérieurement émis par les personnes publiques associées. La circonstance que le commissaire enquêteur a, dans son rapport établi à l'issue de l'enquête publique, fidèlement résumé la teneur de ces avis n'a pas été à elle seule de nature à régulariser l'absence des avis au dossier lors de la consultation par le public dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces résumés auraient pu être consultés par le public pendant cette phase de l'enquête.

12. Toutefois, au sein des personnes publiques associées, à savoir la direction départementale des territoires et de la mer de la Somme, le conseil général de la Somme, Amiens Métropole, le service départemental d'incendie et de secours de la Somme, la chambre des métiers et de l'artisanat de la Somme, et la chambre d'agriculture de la Somme, seule cette dernière a émis un avis défavorable. Cet avis défavorable résultait uniquement de ce que le plan local d'urbanisme ne lui avait pas paru " adapté à l'exercice de l'activité agricole en toute sérénité sur le territoire communal principalement en raison de l'intention de construire des nouveaux bâtiments agricoles sur les sites déjà existants et des extensions d'élevage également existants ". L'avis émis par la chambre des métiers et de l'artisanat de la Somme se bornait à indiquer que celle-ci " n'a aucune remarque à formuler ". L'avis favorable émis par Amiens Métropole, sollicité en tant qu'autorité organisatrice des transports urbains, énonçait que " le service Déplacements n'a pas de remarques particulières à formuler sur le PLU de Berteaucourt-les-Thennes ". L'avis émis par le conseil général de la Somme, qui se prononçait uniquement sur six intersections, sur un cheminement piéton, et sur les espaces boisés et classés, était réservé sur une seule de ces intersections. L'avis émis par le service départemental d'incendie et de secours de la Somme, après avoir rappelé comment les voies de circulation desservant les établissement devaient permettre l'accès et la mise en oeuvre des moyens de secours et de lutte contre l'incendie, et comment les besoins en eau pour la lutte contre l'incendie devaient être satisfaits, indiquait que " la défense extérieure contre l'incendie de la commune de Berteaucourt-les-Thennes est assurée par sept poteaux d'incendie et une réserve naturelle non exploitable ". Il n'est pas allégué et il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du déroulement de l'enquête publique au cours de laquelle onze personnes sur un peu moins de 400 habitants se sont déplacés et des observations qui ont été formulées par celles-ci que, dans les circonstances de l'espèce, l'absence de ces avis au dossier d'enquête publique a été de nature à avoir privé le public d'une information sans laquelle il n'aurait pu participer effectivement à l'enquête ou avoir exercé une influence sur ses résultats, alors que le commissaire enquêteur a pu prendre connaissance de ces avis, ni, par conséquent, sur la décision prise par le conseil municipal.

En ce qui concerne le retrait du rapport de présentation :

13. Le rapport établi par le commissaire enquêteur indique que le dossier soumis à enquête publique comportait, notamment, le rapport de présentation. Si, ainsi que l'a reconnu la commune de Berteaucourt-les-Thennes, le rapport de présentation ne figurait pas, le 2 décembre 2013, au dossier d'enquête publique lorsque Mme G...et deux autres personnes se sont présentées pour le consulter, il ressort des pièces du dossier qu'il avait été momentanément retiré du dossier pour être consulté par le maire et que ce rapport a rejoint le dossier sur la demande des intéressés. Il ne saurait être déduit de cette seule circonstance que le dossier soumis à enquête publique devrait être regardé comme n'ayant pas comporté le rapport de présentation. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que ce retrait momentané n'aurait pas permis au public de consulter ce rapport de présentation ni ce jour là ni au cours du mois de mise à disposition, entre le 14 novembre 2013 et le 14 décembre 2013. Par suite, cette omission temporaire n'a eu pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération, ni n'a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

14. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions citées au point 9 relatives à la composition du dossier d'enquête publique doivent être écartés.

Sur le moyen tiré du caractère insuffisant des conclusions du commissaire enquêteur :

15. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / (...) / Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ".

16. En premier lieu, il n'appartient pas au juge saisi d'un recours dirigé contre une délibération approuvant le plan local d'urbanisme d'apprécier le bien fondé des conclusions du commissaire enquêteur, qu'elles soient favorables ou défavorables au projet. Le moyen tiré du caractère mal fondé des conclusions du commissaire enquêteur ne peut donc qu'être écarté comme inopérant.

17. En second lieu, si la règle de motivation issue des dispositions citées au point 15 n'implique pas que le commissaire enquêteur soit tenu de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, elle l'oblige néanmoins à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

18. Compte tenu des caractéristiques du territoire communal qui ne comprend d'ailleurs aucun espace protégé ou inventorié, la seule circonstance que le commissaire enquêteur n'ait pas pris de position personnelle explicite, dans ses conclusions, sur l'incidence du projet de plan local d'urbanisme sur la préservation des milieux naturels, ne révèle pas un défaut de motivation de celles-ci. Par ailleurs, le commissaire enquêteur a récapitulé les réclamations consignées sur les registres d'enquête publique, et émis un avis suffisamment motivé au regard des exigences posées par les dispositions citées au point 15. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des conclusions du commissaire enquêteur doit être écarté.

Sur le moyen tiré du caractère incomplet du rapport de présentation :

19. Aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le plan local d'urbanisme (...) comprend un rapport de présentation (...) ". Aux termes de l'article L. 123-1-2 du même code : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services. / Il présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers. / Il justifie les objectifs compris dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard des objectifs de consommation de l'espace fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale et au regard des dynamiques économiques et démographiques ". Aux termes de l'article R. 123-2 de ce code : " Le rapport de présentation : (...) / 2° Analyse l'état initial de l'environnement, présente une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et justifie les objectifs de modération de cette consommation et de lutte contre l'étalement urbain arrêtés dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard, notamment, des objectifs fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale, et des dynamiques économiques et démographiques : / (...) / 4° Évalue les incidences des orientations du plan sur l'environnement et expose la manière dont le plan prend en compte le souci de sa préservation et de sa mise en valeur (...) ".

20. Les pages 21 à 68 du rapport de présentation sont consacrées à l'analyse de l'état initial de l'environnement, et exposent, contrairement à ce qui est allégué, de manière suffisamment précise et détaillée cet état initial notamment au regard du milieu physique à travers une présentation de la topographie, de la géologie, du climat, de l'hydrographie, et des risques présents sur la commune. Les milieux naturels et le paysage et ses composantes y sont également analysés. Le rapport procède en particulier au constat qu'il n'existe sur le territoire communal aucune zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique, et prend en compte de la proximité de deux sites Natura 2000.

21. Les pages 241 à 270 du rapport de présentation sont consacrées à l'évaluation des incidences environnementales du projet, et exposent, distinctement pour chaque thème, la manière dont le plan prend en compte la consommation foncière et le respect de l'activité agricole, l'habitat, les infrastructures de transport, le développement économique, les équipements publics, les paysages du cadre de vie, l'eau, les risques, la biodiversité, l'énergie, l'air, les déchets et les servitudes d'utilité publique. En particulier, le rapport, après avoir indiqué qu'il n'existe sur le territoire communal aucune zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique, rappelle que : " l'absence de milieux naturels protégés ou inventoriés ne signifie pas que la commune ne compte pas de milieux à préserver et à mettre en valeur. Le fond de vallée humide de la Luce a été identifié comme tel. (...) ". Il indique en outre les mesures prises à cet effet, au nombre desquelles figurent, notamment, la progression des espaces naturels et la conservation de la majeure partie des espaces boisés classés. Dans ces conditions, Mmes B...et G...ne sont pas fondées à soutenir que le rapport de présentation aurait insuffisamment analysé les incidences des orientations du plan sur la préservation de la faune et des milieux naturels, et notamment sur la vallée humide de la Luce.

22. Il s'en suit que leur moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des 2° et 4° de l'article R. 123-2 du code l'urbanisme doit être écarté.

Sur la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme :

23. L'article L. 121-1 du code de l'urbanisme dispose que : " les plans locaux d'urbanisme (...) déterminent les conditions permettant d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable : / 1° L'équilibre entre : / a) (...) le développement urbain maîtrisé (...) ; / b) (...) la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières (...) ".

24. Le plan local d'urbanisme approuvé par le conseil municipal de la commune de Berteaucourt-les-Thennes prévoit l'ouverture à l'urbanisation d'une zone de 4,7 hectares, mais aussi la suppression de la zone d'activités économiques prévue par l'ancien plan d'occupation des sols, d'une superficie de 4 hectares, et désormais classée en zone agricole. En outre, Mmes B...et G...n'apportent aucun commencement de preuve à l'appui de leur allégation selon laquelle 3 hectares de terres agricoles auraient précédemment disparu du fait d'une opération de lotissement. Dans ces conditions, l'ouverture à l'urbanisation prévu par le plan adopté, qui ne porte que sur 0,17 % de la surface du territoire communal, procède d'un développement urbain maîtrisé et ne traduit pas une atteinte excessive à la préservation des espaces affectés aux activités agricole.

25. La création, en zone agricole, d'un emplacement réservé n° 12, destiné à la création d'un cheminement doux, est également remise en cause par les appelantes. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce cheminement, longeant un boisement, empêchera l'exploitant agricole de circuler sur sa parcelle ni qu'il entraînera un enclavement de celle-ci. Il n'est pas davantage établi que la création de plusieurs haies rendra difficile la circulation des exploitants agricoles sur leurs parcelles, alors, au demeurant, qu'il n'est pas contesté que ces haies permettront de limiter l'érosion des sols, significative sur certaines parties du territoire communal. Dans ces conditions, en tout état de cause, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières n'est pas affectée par cet emplacement réservé.

26. Il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que le plan local d'urbanisme n'est pas incompatible avec l'objectif d'équilibre au regard de la préservation des espaces affectés aux activités agricoles prévu par l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme.

Sur l'erreur de fait concernant la superficie de la parcelle n° 73 :

27. Le rapport de présentation fait figurer parmi " les dents creuses ", avec le n° 3, une partie de la parcelle n° 73. Si la superficie de cette parcelle est de 3 508 m², dont 1 754 m² classés en secteur Nzh, la superficie de 650 m² retenue ne concerne que la partie de cette parcelle qualifiée de dent creuse. Par suite, Mmes B...et G...ne sont pas fondées à soutenir que la délibération reposerait sur une erreur de fait en ce qui concerne la superficie exacte de la parcelle n° 73.

Sur l'erreur de classement de la parcelle n° 6 en zone AU:

28. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions ". Aux termes de l'article R. 123-5 de ce code : " Les zones urbaines sont dites "zones U". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. ". Et aux termes de son article R. 123-6 : " Les zones à urbaniser sont dites "zones AU". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation (par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé) ".

29. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du règlement graphique du plan local d'urbanisme, contrairement à ce qui est allégué dans la requête, que la parcelle n° 6 appartenant à Mme G...a été classée en zone urbaine. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qui aurait été commise en classant cette parcelle en zone à urbaniser manque en fait.

Sur les moyens tirés des erreurs commises au sujet des emplacements réservés :

30. Aux termes du 8° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur, le règlement du plan local d'urbanisme peut " fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d'intérêt général ainsi qu'aux espaces verts ".

En ce qui concerne l'emplacement réservé n° 1 :

31. Sur le fondement des dispositions citées au point précédent, le règlement graphique du plan local d'urbanisme a créé sur la parcelle cadastrée n° 3, d'une superficie de 1 416 m² et appartenant à MmeB..., un emplacement réservé n° 1, destiné à l'extension du cimetière. Cette création se justifie, selon les indications données par la commune, issues du rapport de présentation et non contestées par les appelantes, par la saturation progressive du cimetière existant, liée à un vieillissement de la population communale. Cette justification n'est pas sérieusement remise en cause par l'allégation selon laquelle certaines tombes du cimetière seraient abandonnées.

32. Dans ces conditions, les appelantes ne sont pas fondées à soutenir que la mise en place de l'emplacement réservé n° 1 serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de l'emplacement réservé n° 3

33. Le règlement graphique du plan local d'urbanisme a également créé sur la parcelle cadastrée n° 65, d'une superficie de 1 009 m² et appartenant à MmeB..., un emplacement réservé n° 3, destiné à la création d'une poche de stationnement.

34. Cette création se justifie, selon les indications données par la commune, issues du rapport de présentation, et non sérieusement contestées par les appelantes, par des difficultés actuelles de stationnement pour l'accès au commerce et aux jardins de Lucine, et par le souci de permettre à tout individu qui le souhaite de stationner son véhicule avant d'entreprendre des activités de loisirs. Si les appelantes soutiennent que cette création ne correspond à aucun motif d'intérêt général, l'institution d'emplacements réservés par les auteurs d'un plan local d'urbanisme n'est pas légalement subordonnée à la condition que les équipements envisagés présentent un caractère d'utilité publique. Quant à la circonstance alléguée, sans autre précision, que cet emplacement réservé serait situé à coté d'un bâtiment communal, elle ne suffit pas, à elle seule, à établir que cette création aurait été décidée dans le but exclusif de satisfaire des intérêts privés.

35. Dans ces conditions, les appelantes ne sont pas fondées à soutenir que la mise en place de l'emplacement réservé n° 3 serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la création d'une nouvelle place de village :

36. L'orientation n° 2 du projet d'aménagement et de développement durable traduit la volonté des auteurs du plan local d'urbanisme de " marquer la centralité du village ". L'objectif n° 4 de cette orientation vise à " définir un nouvel espace public central ". Selon les énonciations contenues dans cet objectif, la place de la République, située à l'extrémité de la rue Jules Ferry (route départementale 76), et qui constitue l'actuelle place de village, n'assure pas son rôle de lieu de rencontre en raison de la forte linéarité de la route et du trafic automobile bruyant. Il ressort de ces mêmes énonciations que la création d'une nouvelle place centrale permettrait d'établir un lien entre le tissu urbain ancien et tissu urbain récent, et que cette nouvelle place se situerait en retrait de la route départementale. Pour contester la création de cette nouvelle place de village d'une superficie de 0,8 hectares, les appelantes se bornent, sans aucune autre précision, à soutenir qu'elles ont " du mal à cerner l'utilité d'un tel projet de création ". Mmes B...et G...ne soutiennent pas que le règlement contrarierait cette orientation générale et cet objectif. En l'absence de remise en cause de la cohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durable, leur moyen relatif à la création de cette nouvelle place de ville doit être écarté.

37. Il résulte de tout ce qui précède que Mmes B...et G...ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au procès :

38. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Berteaucourt-les-Thennes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme à Mmes B...etG.par ailleurs invocables à l'occasion d'un recours contre le plan local d'urbanisme approuvé

39. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...et de Mme G...le versement à la commune de Berteaucourt-les-Thennes de la somme globale de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mmes B...et G...est rejetée.

Article 2 : Mme B...et Mme G...verseront à la commune de Berteaucourt-les-Thennes une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B..., à Mme H...G...et à la commune de Berteaucourt-les-Thennes.

N°16DA01737 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01737
Date de la décision : 31/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Jimmy Robbe
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : SCP FRISON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-31;16da01737 ?
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