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31/10/2018 | FRANCE | N°16DA02237

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 31 octobre 2018, 16DA02237


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2016, des mémoires enregistrés les 17 novembre 2017, 13 février 2018, 18 avril 2018 et 23 mai 2018, ainsi qu'un mémoire récapitulatif produit le 13 juillet 2018 au titre de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, l'association des exploitants de l'Espace Coty, représentée par la SELARL Letang Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 septembre 2016 par lequel le maire du Havre a délivré un permis de construire valant autorisation d'exploi

tation commerciale à la SNC Elysées Vauban portant sur la création d'une sur...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2016, des mémoires enregistrés les 17 novembre 2017, 13 février 2018, 18 avril 2018 et 23 mai 2018, ainsi qu'un mémoire récapitulatif produit le 13 juillet 2018 au titre de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, l'association des exploitants de l'Espace Coty, représentée par la SELARL Letang Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 septembre 2016 par lequel le maire du Havre a délivré un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale à la SNC Elysées Vauban portant sur la création d'une surface de vente de 4 336 m² au sein de l'ensemble commercial des " Docks Vauban ", de 19 559 m2 de surface de vente par la réunion de cinq coques préexistantes et la réalisation d'un auvent et d'une marquise ainsi que " l'hermétisation " du site par la fermeture des rues intérieures;

2°) de rejeter les conclusions présentées par la ville du Havre et la SNC Elysées Vauban au titre des frais liés au litige ;

3°) de mettre à la charge de la ville du Havre et de la SNC Elysées Vauban la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me B...F..., substituant Gwenaël Le Fouler, représentant l'association des exploitants de l'Espace Coty, de Me A...E..., représentant la SNC Elysées Vauban, et de Me C...D..., représentant la commune du Havre.

Une note en délibéré présentée par la SNC Vauban a été enregistrée le 11 octobre 2018.

Une note en délibéré présentée par l'association des exploitants de l'Espace Coty a été enregistrée le 12 octobre 2018.

Une note en délibéré présentée par la commune du Havre a été enregistrée le 25 octobre 2018.

Considérant ce qui suit :

Sur la méconnaissance l'article L. 752-1 du code de commerce :

1. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de commerce : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : / (...) / 2° L'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail ayant déjà atteint le seuil des 1 000 m² ou devant le dépasser par la réalisation du projet. Est considérée comme une extension l'utilisation supplémentaire de tout espace couvert ou non, fixe ou mobile, et qui n'entrerait pas dans le cadre de l'article L. 310-2 ; / 3° Tout changement de secteur d'activité d'un commerce d'une surface de vente supérieure à 2 000 m². Ce seuil est ramené à 1 000 m² lorsque l'activité nouvelle du magasin est à prédominance alimentaire ; / (...) / 5° L'extension de la surface de vente d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 1 000 m² ou devant le dépasser par la réalisation du projet / (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier que la SNC Vauban a déposé en mairie du Havre une demande de permis de construire ayant pour objet la création d'un magasin Primark d'une surface de vente de 4 336 m2 par la réunion de cinq cellules commerciales vacantes dans l'enveloppe du centre commercial existant et déjà autorisé des " Docks Vauban " ainsi que la création d'un auvent et d'une marquise et " l'hermétisation " du site par la fermeture des rues intérieures. Le projet contesté qui s'inscrit dans le cadre d'un ensemble commercial dont la surface de vente autorisée demeure constante ne nécessitait ainsi pas d'autorisation d'exploitation commerciale au sens et pour l'application des dispositions du 5° de l'article L. 752-1 du code de commerce visées au point 2. En revanche, l'extension projetée qui répondait aux conditions posées par le 2° du même article devait faire l'objet, comme cela a d'ailleurs été le cas, d'une autorisation d'exploitation commerciale à ce titre. En outre, compte tenu de l'objet du dossier de demande présenté par la SNC Vauban à la commission départementale d'aménagement commercial puis, à la suite du recours exercé par l'association requérante, à la Commission nationale d'aménagement commercial, le permis contesté n'avait ni pour objet et n'a pu avoir, par lui-même, pour effet, même si l'ensemble des surfaces de vente de l'équipement commercial ont été reprises dans le dossier pour la complète information des membres des commissions d'aménagement commercial, de procéder à la régularisation, à supposer d'ailleurs établie qu'elle fût nécessaire, de la situation du magasin Leclerc situé dans une autre cellule commerciale, même voisine, au sein du même ensemble commercial. Dès lors, l'éventuelle illégalité dont pourrait être entachée l'exploitation de ce supermarché de type alimentaire du fait d'extensions internes de surfaces de vente sur des espaces non dédiés au commerce lors de l'ouverture, est sans incidence sur la régularité de l'avis favorable accordé par la Commission nationale d'aménagement commercial au projet en litige. Ce projet, situé dans des cellules commerciales distinctes, est en effet seulement relatif à l'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail différent dans le cadre de regroupement de cellules commerciales existantes qui ne dépendaient pas du magasin Leclerc. Par suite, l'association requérante n'est pas, en tout état de cause, fondée à soutenir que le permis contesté a permis de procéder à la régularisation d'un supermarché de l'enseigne Leclerc exploité illégalement en méconnaissance des dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce.

Sur la méconnaissance des critères de l'article L. 752-6 du code de commerce :

3. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable : " I. L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés aux 2° et 5° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale ".

4. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code.

En ce qui concerne les effets du projet sur l'animation de la vie urbaine :

5. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige prendra place, ainsi qu'il a été dit au point 2, au sein du centre commercial des Docks Vauban, qui par sa situation à proximité immédiate du centre historique du Havre, participe déjà au rééquilibrage de l'offre commerciale vers le centre-ville. Il doit en outre permettre de résorber une friche commerciale existante au sein de cet ensemble commercial en réutilisant cinq cellules vacantes. L'association requérante n'établit pas, par les éléments peu probants qu'elle produit, que le projet aura un effet négatif sur les commerces de proximité implantés sur le territoire de la commune du Havre et sur l'animation urbaine de cette dernière. La circonstance que la commune du Havre fait l'objet d'un important financement du Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce (FISAC) en soutien aux commerces de centre-ville, n'est pas, en soi, de nature à établir l'existence d'un tel impact du fait du projet. En outre, la requérante ne peut utilement invoquer la circonstance, inopérante au regard de l'objectif d'aménagement du territoire fixé par l'article L. 752-6 du code de commerce, que la zone de chalandise comprendrait déjà une offre diversifiée et suffisante. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en raison de ses effets négatifs sur l'animation de la vie urbaine, le projet méconnaîtrait l'objectif d'aménagement du territoire au regard du critère posé au c) du 1° du I de l'article L. 752-6 du code de commerce.

En ce qui concerne la contribution du projet en matière sociale :

6. Il ressort des pièces du dossier que la réalisation du projet est de nature à créer environ 300 emplois dans son environnement immédiat et que la SNC Elysées Vauban a établi un partenariat avec le mission locale de l'agglomération havraise pour l'emploi des jeunes âgés de 16 à 25 ans. En revanche, l'association requérante ne justifie pas la réalité des suppressions d'emplois dont elle fait état. Par suite, le projet ne méconnaît pas, en tout état de cause, le critère du II de l'article L. 752-6 du code de commerce.

7. Il résulte de tout ce qui précède, compte tenu des moyens maintenus dans le mémoire récapitulatif et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir soulevée par la ville du Havre, que l'association des exploitants de l'Espace Coty n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 30 septembre 2016 du maire du Havre ayant accordé un permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale à la SNC Elysées Vauban.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'association des exploitants de l'Espace Coty présentées sur leur fondement.

9. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association des exploitants de l'Espace Coty, partie perdante, la somme de 1 500 euros à verser à la SNC Elysées Vauban et la somme de 1 500 euros à verser à la commune du Havre sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association des exploitants de l'Espace Coty est rejetée.

Article 2 : L'association des exploitants de l'Espace Coty versera à la SNC Elysées Vauban une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : L'association des exploitants de l'Espace Coty versera à la commune du Havre une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association des exploitants de l'Espace Coty, à la SNC Elysées Vauban, à la ville du Havre et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA02237
Date de la décision : 31/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Michel Richard
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : LETANG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-31;16da02237 ?
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