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06/11/2018 | FRANCE | N°16DA01664-17DA001928

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 06 novembre 2018, 16DA01664-17DA001928


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Bois-Guillaume a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, d'une part, la décision du 29 septembre 2014 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a décidé de ramener la somme attribuée à la commune au titre de la dotation forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement au titre de l'année 2014 au montant de 1 327 081 euros, d'autre part, l'arrêté du 1er octobre 2014 par lequel le préfet a fixé le reversement dû par la commune au montant de 493 000 euros et, enfin, de co

ndamner l'Etat à lui verser cette somme en réparation du dommage subi.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Bois-Guillaume a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, d'une part, la décision du 29 septembre 2014 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a décidé de ramener la somme attribuée à la commune au titre de la dotation forfaitaire de la dotation globale de fonctionnement au titre de l'année 2014 au montant de 1 327 081 euros, d'autre part, l'arrêté du 1er octobre 2014 par lequel le préfet a fixé le reversement dû par la commune au montant de 493 000 euros et, enfin, de condamner l'Etat à lui verser cette somme en réparation du dommage subi.

Par un jugement n° 1500401 du 19 juillet 2016, le tribunal administratif de Rouen a annulé ces décisions et condamné l'Etat à verser à la commune de Bois-Guillaume une somme de 493 000 euros en réparation du dommage subi.

Procédure devant la cour :

I. Par un recours, enregistré le 20 septembre 2016, le ministre de l'intérieur demande à la cour d'annuler ce jugement.

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Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me A...B...représentant la commune de Bois-Guillaume.

Une note en délibéré, présentée pour la commune de Bois-Guillaume par Me C...D...a été enregistrée le 24 octobre 2018.

Considérant ce qui suit :

Sur la requête n° 16DA01664 tendant à l'annulation du jugement du 19 juillet 2016 :

1. Par un arrêté du 29 août 2011, le préfet de la Seine-Maritime a créé, à compter du 1er janvier 2012, une commune nouvelle issue de la fusion des communes de Bois-Guillaume et de Bihorel. Cet arrêté a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Rouen du 18 juin 2013, qui a cependant décidé que cette annulation ne prendrait effet qu'à compter du 31 décembre 2013. Par un arrêté du 2 juin 2014, le préfet de la Seine-Maritime a fixé à 1 820 081 euros le montant dû au titre de la dotation globale de fonctionnement pour l'année 2014 à la commune de Bois-Guillaume en application des dispositions de l'article L. 2334-12 du code général des collectivités territoriales relatives au calcul de la dotation en cas de division de communes. Estimant avoir commis une erreur de droit, il a, par une décision du 29 septembre 2014, décidé de réduire de 493 000 euros le montant de cette dotation et fixé le nouveau montant de la dotation globale de fonctionnement attribué à la commune au titre de l'année 2014 à 1 327 081 euros, puis, par un arrêté du 1er octobre 2014, a rendu la commune redevable de la somme de 493 000 euros. La commune a obtenu, par un jugement du tribunal administratif de Rouen du 19 juillet 2016, l'annulation de ces deux décisions et la condamnation de l'Etat à lui verser, en indemnisation du préjudice subi, une somme équivalente de 493 000 euros. Le ministre de l'intérieur interjette régulièrement appel de ce jugement.

S'agissant du motif d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Pour annuler les décisions attaquées, le tribunal administratif de Rouen a estimé qu'à défaut pour le préfet de mentionner le texte sur lequel il s'était fondé pour procéder au nouveau calcul de la dotation globale de fonctionnement devant être perçue par la commune de Bois-Guillaume, ces décisions devaient être regardées comme dépourvues de fondement légal.

3. Il ressort cependant des pièces du dossier que, par la décision du 29 septembre 2014, le préfet de la Seine-Maritime a estimé que l'application à la commune de Bois-Guillaume des dispositions de l'article L. 2334-12 du code général des collectivités territoriales, relatives aux divisions de communes et dérogatoires au droit commun du calcul de la dotation globale de fonctionnement, était entachée d'une erreur de droit, la situation issue de l'annulation d'un arrêté de fusion ne pouvant être assimilée à celle résultant de la division d'une commune. Il a ce faisant nécessairement estimé que la commune de Bois-Guillaume relevait des dispositions de droit commun applicable au calcul de la dotation globale de fonctionnement. L'arrêté du 1er octobre 2014, adopté à la suite de la décision du 29 septembre 2014, vise ainsi, outre l'article L. 2334-12, l'article L. 2334-7 relatif à ces dispositions de droit commun. Le préfet de la Seine-Maritime a encore, dans son courrier du 10 décembre 2014 en réponse au recours gracieux exercé par la commune de Bois-Guillaume, explicité en détail la façon dont il avait procédé au nouveau calcul de la dotation globale de fonctionnement pour l'année 2014, faisant, notamment, référence aux dispositions de l'article L. 2334-7, qui constituent le fondement légal de ce nouveau calcul dont la commune de Bois-Guillaume ne soutient au demeurant pas qu'il serait matériellement erroné ou entaché d'erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a, pour annuler les décisions litigieuses, estimé que le préfet de la Seine-Maritime ne se prévalait d'aucun fondement légal pour calculer le montant de la dotation forfaitaire due à la commune de Bois-Guillaume au titre de l'année 2014 et, par suite, condamné l'Etat à lui verser une somme de 493 000 euros.

5. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la commune de Bois-Guillaume devant le tribunal administratif de Rouen.

S'agissant des moyens soulevés par la commune de Bois-Guillaume en première instance :

6. Ainsi qu'il vient d'être dit, les décisions litigieuses ne peuvent être regardées comme dépourvues de fondement légal.

7. Aux termes de l'article L. 2334-12 dans sa rédaction applicable en l'espèce : " En cas de division de communes, la dotation de base et la dotation proportionnelle à la superficie revenant à chaque commune sont calculées conformément à l'article L. 2334-7 en retenant sa nouvelle population et sa superficie. Les montants mentionnés aux 3° et 4° du I de l'article L. 2334-7 sont calculés au prorata de la population de chaque commune ".

8. Ces dispositions, dont il ressort des travaux préparatoires ayant présidé à son adoption par la loi n° 93-1436 du 31 décembre 1993 portant réforme de la dotation globale de fonctionnement et modifiant le code des communes et le code général des impôts, qu'elles concernent les divisions de communes issues de l'application des dispositions des articles L. 2112-2 et suivants du code général des collectivités territoriales relatives aux modifications des limites territoriales des communes (L. 112-1 et suivants, notamment L. 112-19 et L. 112-20 du code des communes en vigueur à la date d'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1993), et dont l'objectif était d'ailleurs de dissuader les communes de procéder à de telles divisions, ne sont donc pas applicables à la situation particulière des séparations de communes résultant de l'annulation juridictionnelle d'un arrêté de fusion. Est à cet égard sans incidence la circonstance que la commune issue de la fusion des communes de Bois-Guillaume et de Bihorel ait eu une existence légale durant deux ans en raison du report des effets de l'annulation de l'arrêté de fusion du 29 août 2011 par le jugement du tribunal administratif de Rouen du 18 juin 2013, dans la mesure où la division de ces deux communes par l'effet de ce jugement ne saurait être assimilée à une modification de leurs limites territoriales au sens des dispositions des articles L. 2112-2 et suivants du code général des collectivités territoriales, qui imposent au demeurant une manifestation de volonté et le respect d'une procédure précise non suivie en l'espèce. C'est par suite à bon droit que le préfet de la Seine-Maritime a refusé de faire application des dispositions de l'article L. 2334-12 à la situation d'espèce, résultant de l'autonomie recouvrée des communes de Bois-Guillaume et de Bihorel à la suite de l'annulation de l'arrêté de fusion du 29 août 2011 par le jugement devenu définitif du tribunal administratif de Rouen du 18 juin 2013, et qu'il a procédé au calcul de la dotation due au titre de l'année 2014 à la commune de Bois-Guillaume en se fondant, ainsi qu'il a été dit, sur les dispositions de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, sans, au demeurant, que la commune ne conteste le bien-fondé de la méthode de calcul retenue.

9. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision du 29 septembre 2014 et l'arrêté du 1er octobre 2014 du préfet de la Seine-Maritime et a condamné l'Etat à verser à la commune de Bois-Guillaume une somme de 493 000 euros.

S'agissant des conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Bois-Guillaume demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Sur la requête n° 17DA01928 tendant à l'exécution du jugement du 19 juillet 2016 :

11. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel ". Aux termes de l'article R. 921-1-1 du même code : " La demande tendant à ce que le tribunal administratif prescrive les mesures nécessaires à l'exécution d'un jugement définitif de ce tribunal, en assortissant, le cas échéant, ces prescriptions d'une astreinte, ne peut être présentée, sauf décision explicite de refus d'exécution opposée par l'autorité administrative, avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification de ce jugement (...). / Les mêmes conditions de délai s'appliquent à la demande présentée à la cour administrative d'appel soit pour l'exécution d'un arrêt de cette cour, soit pour l'exécution d'un jugement rendu par un tribunal administratif situé dans le ressort de la cour et qui est frappé d'appel devant celle-ci ". Aux termes de l'article R. 921-5 du même code : " Le président de la cour administrative d'appel ou du tribunal administratif saisi d'une demande d'exécution sur le fondement de l'article L. 911-4, ou le rapporteur désigné à cette fin, accomplissent toutes diligences qu'ils jugent utiles pour assurer l'exécution de la décision juridictionnelle qui fait l'objet de la demande. / Lorsque le président estime qu'il a été procédé à l'exécution ou que la demande n'est pas fondée, il en informe le demandeur et procède au classement administratif de la demande ". L'article R. 921-6 dudit code dispose : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle (...) ".

12. La cour annulant par le présent arrêt le jugement du 19 juillet 2016 du tribunal administratif de Rouen, la demande de la commune de Bois-Guillaume tendant à l'exécution de ce jugement est devenue sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1500401 du tribunal administratif de Rouen du 19 juillet 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la commune de Bois-Guillaume devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées en appel par la commune de Bois-Guillaume au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande présentée par la commune de Bois-Guillaume tendant à l'exécution du jugement du 19 juillet 2016 du tribunal administratif de Rouen.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à la commune de Bois-Guillaume.

Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

4

N°16DA01664,17DA01928


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01664-17DA001928
Date de la décision : 06/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-01-07-02 Collectivités territoriales. Dispositions générales. Dispositions financières. Dotation globale de fonctionnement.


Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : SCP LENGLET MALBESIN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-11-06;16da01664.17da001928 ?
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