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22/11/2018 | FRANCE | N°16DA00079

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 22 novembre 2018, 16DA00079


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 avril 2015 par lequel le maire de Bouchain l'a suspendu de ses fonctions pour une durée de quatre mois et d'enjoindre à cette autorité de le réintégrer sous astreinte.

Par un jugement n° 1504062 du 15 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 janvier 2016, 12 mai 2016, 7 s

eptembre 2016, 16 février 2017, 17 et 29 octobre 2018, M.C..., représenté par Me F...D..., deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 avril 2015 par lequel le maire de Bouchain l'a suspendu de ses fonctions pour une durée de quatre mois et d'enjoindre à cette autorité de le réintégrer sous astreinte.

Par un jugement n° 1504062 du 15 décembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 janvier 2016, 12 mai 2016, 7 septembre 2016, 16 février 2017, 17 et 29 octobre 2018, M.C..., représenté par Me F...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 avril 2015 du maire de Bouchain ;

3°) d'ordonner, sous astreinte, son rétablissement dans ses fonctions ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bouchain la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 22 avril 1905 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruébo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me E...G...représentant la commune de Bouchain.

Une note en délibéré présentée par M. C...a été enregistrée le 12 novembre 2018.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...C..., fonctionnaire territorial à la mairie de Bouchain (Nord) depuis juin 2003, a été nommé, par arrêté du 9 janvier 2012 du maire de cette commune, animateur principal de 1ère classe. Il a fait l'objet d'un arrêté du 8 avril 2015 du maire le suspendant pour faute grave pour une durée de quatre mois avec maintien du traitement. M. C...relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Eu égard à la nature de l'office attribué au juge des référés statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative - et sous réserve du cas où il apparaîtrait, compte tenu notamment des termes mêmes de l'ordonnance, qu'allant au-delà de ce qu'implique nécessairement cet office, il aurait préjugé l'issue du litige - la seule circonstance qu'un magistrat a statué sur une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative n'est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu'il se prononce ultérieurement sur la requête en qualité de juge du principal.

3. Par suite, la circonstance que M. Sébastien Degommier, président dans le corps des conseillers de tribunaux administratifs et des cours administrative d'appel, ait rejeté par une ordonnance du 4 juin 2015 la demande de référé-suspension de M. C...à l'encontre de l'arrêté du 8 avril 2015 du maire de Bouchain, sans préjuger de l'issue du litige, puis ait présidé l'audience du 15 décembre 2015 du tribunal administratif de Lille, au cours de laquelle la demande au fond de M. C...contre cet arrêté a été rejetée, n'est pas de nature à établir que le jugement attaqué aurait été rendu de manière irrégulière.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

4. Aux termes de l'article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : "En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline./Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales, est rétabli dans ses fonctions./Le fonctionnaire qui, en raison de poursuites pénales, n'est pas rétabli dans ses fonctions peut subir une retenue qui ne peut être supérieure à la moitié de la rémunération mentionnée à l'alinéa précédent. Il continue, néanmoins, à percevoir la totalité des suppléments pour charges de famille ".

5. Une mesure de suspension de ses fonctions prise à l'encontre d'un fonctionnaire est une mesure conservatoire prise dans l'intérêt du service et ne constitue pas une sanction disciplinaire. Elle n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées par application du 1er alinéa de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, alors en vigueur. La mesure de suspension n'est pas, non plus, au nombre des mesures pour lesquelles le fonctionnaire concerné doit être mis à même de consulter son dossier par application de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation de l'arrêté du 8 avril 2015 du maire de Bouchain et du défaut de consultation du dossier administratif de M. C...doivent être écartés.

6. Les dispositions précitées de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 prévoyant qu'une mesure de suspension peut intervenir en cas de faute grave commise par un fonctionnaire. Ces dispositions trouvent à s'appliquer dès lors que les faits imputés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité.

7. Il ressort des pièces du dossier que le maire de Bouchain a été informé par une lettre 26 mars 2015 de MmeA..., adjointe d'animation municipale, du comportement équivoque et des propos et propositions à caractère sexuel de MC..., qui était l'un de ses tuteurs. Mme A...a déposé plainte le 28 mars 2015 contre M. C...auprès des services de la gendarmerie de Bouchain. Le 30 mars 2015, MmeA..., agent du centre communal d'action sociale de la commune Bouchain, a aussi signalé au maire qu'elle avait été confrontée depuis plusieurs mois à de tels propos de M. C...et a confirmé que Mme A...lui avait aussi confié que M. C...lui tenait des propos déplacés et avait cherché à l'embrasser le 12 mars 2015. Le 3 avril 2015, une institutrice de la commune a encore signalé, dans un courrier au directeur général des services de la commune, qu'elle avait subi plusieurs fois, des avances déplaisantes et inadaptées de M. C...qui avait essayé, à plusieurs reprises, de l'embrasser de force alors qu'elle était venue en mairie faire des photocopies pour sa classe. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les faits reprochés à M. C...quant à la gestion de la régie des droits de place, le maire de Bouchain a pu légalement le suspendre pour les seuls motifs tirés de son comportement envers le personnel féminin, en estimant que les griefs reprochés présentaient un caractère de vraisemblance suffisant, permettant de présumer que celui-ci avait commis une faute grave. Au demeurant, M. C... a ensuite été condamné le 7 septembre 2017 par le tribunal correctionnel de Valenciennes, à six mois de prison avec sursis pour harcèlement sexuel, peine portée à sept mois de prison avec sursis par un arrêt du 3 avril 2018 de la cour d'appel de Douai qui a, de surcroît, retenu la qualification de subornation de témoin.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 15 décembre 2015 en litige, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. C...le versement à la commune de Bouchain d'une somme de 800 euros sur le fondement de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : M. C...versera à la commune de Bouchain une somme de 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la commune de Bouchain.

Copie sera adressée, pour information, au préfet de Nord.

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N°16DA00079

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00079
Date de la décision : 22/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Suspension.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCM GRIFFON

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-11-22;16da00079 ?
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