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29/11/2018 | FRANCE | N°17DA01286

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 29 novembre 2018, 17DA01286


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 19 juin 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités norvégiennes.

Par un jugement n° 1701902 du 26 juin 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2017, M. E...D..., représenté par Me B...F..., demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 19 juin 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a ordonné son transfert aux autorités norvégiennes.

Par un jugement n° 1701902 du 26 juin 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2017, M. E...D..., représenté par Me B...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime de l'autoriser à présenter une demande d'asile en France et de lui délivrer une autorisation temporaire de séjour, ou à défaut de lui délivrer un titre de séjour temporaire pour raisons humanitaires, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 20 euros par jour de retard.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., ressortissant Afghan, est entré irrégulièrement en France le 7 mars 2017. A l'occasion de l'examen de sa situation, la consultation du fichier Eurodac a révélé que l'intéressé avait présenté une demande d'asile en Norvège le 15 novembre 2015. Le 21 mars 2017, les autorités norvégiennes ont accepté de le reprendre en charge sur leur territoire. Par un arrêté du 19 juin 2017, la préfète de la Seine-Maritime a décidé son transfert aux autorités norvégiennes. M. D...relève appel du jugement du 26 juin 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté.

2. Par un arrêté du 29 mars 2017, la préfète de la Seine-Maritime a donné délégation à M. A...C..., directeur de la réglementation et des libertés publiques, à l'effet de signer les décisions de transfert. L'arrêté en litige a donc été pris par une autorité compétente. Il ne ressort d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'agent de la préfecture qui a notifié l'arrêté de transfert doit être spécialement habilité à cet effet. Au demeurant, les conditions de notification d'un acte administratif sont sans influence sur sa légalité. Dès lors, M. D...ne peut utilement invoquer l'incompétence de l'agent lui ayant notifié la décision en litige.

3. Aux termes de l'article 5 du règlement n°604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les Etats membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel (...) est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national (...). "

4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D...aurait présenté une demande d'asile en France. Dès lors, il ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision en litige, de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a bénéficié, le 15 mars 2017, à la préfecture de police de Paris, d'un entretien individuel réalisé par un agent habilité de la préfecture avec l'assistance d'un interprète en langue farsi. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

5. L'arrêté en litige énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Contrairement à ce que soutient M.D..., la préfète de la Seine-Maritime a indiqué avec précision les dispositions du règlement du 26 juin 2013 dont elle entendait faire application. Cet arrêté est dès lors suffisamment motivé.

6. Aux termes de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 : " 2. (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable.(...) /".

7. Si M. D...fait état de l'existence de défaillances affectant les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile en Norvège, les documents qu'il produit à l'appui de ces allégations ne permettent pas d'établir que sa demande d'asile, à supposer qu'elle n'ait pas déjà été examinée, serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités norvégiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que la Norvège est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par ailleurs, le requérant ne peut utilement faire valoir qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour ultérieur en Afghanistan, à l'encontre de la décision litigieuse, qui ne prononce pas son éloignement vers ce pays mais son transfert aux autorités norvégiennes. Si la Norvège a accepté de reprendre en charge M. D...sur son territoire sur le fondement du d) du premier paragraphe de l'article 18 du règlement du 26 juin 2013, qui prévoit la reprise en charge après le rejet d'une demande d'asile, il n'est pas allégué que les autorités de cet Etat n'auraient pas procédé à un examen sérieux et attentif de cette demande. En outre, il ne ressort des pièces du dossier ni que l'intéressé ferait l'objet, de la part des autorités norvégiennes, d'une mesure d'éloignement à destination de l'Afghanistan, ni que, en pareil cas, il ne disposerait pas d'une voie de recours effective contre cette mesure, ni enfin, en tout état de cause, que les autorités norvégiennes n'évalueront pas, avant l'exécution d'une telle mesure, les risques réels et actuels de mauvais traitements qui naîtraient pour lui du fait de son éventuel retour en Afghanistan. Dès lors, M. D...n'est pas fondé à soutenir que son transfert aux autorités norvégiennes méconnaît les dispositions de l'article 3 du règlement du 26 juin 2013 citées au point précédent ou qu'il l'expose à des risques de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise pour information à la préfète de la Seine-Maritime.

N°17DA01286 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA01286
Date de la décision : 29/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Richard
Rapporteur ?: M. Charles-Edouard Minet
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : TROFIMOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-11-29;17da01286 ?
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