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20/12/2018 | FRANCE | N°17DA00384

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 17DA00384


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...D...a demandé au tribunal administratif de Lille, à titre principal, de condamner la commune de Béthune à lui verser la somme de 29 226,44 euros, au titre de la rémunération dont elle estime avoir été privée depuis la rupture de son contrat de travail, à titre subsidiaire, de condamner la commune à lui verser les sommes de 5 225,11 euros à titre d'indemnité de licenciement, et de 1 425,69 euros, au titre du non-respect du préavis, en réparation de la rupture abusive de son contrat, à titre i

nfiniment subsidiaire, de condamner la commune à lui verser la somme de 1 425,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...D...a demandé au tribunal administratif de Lille, à titre principal, de condamner la commune de Béthune à lui verser la somme de 29 226,44 euros, au titre de la rémunération dont elle estime avoir été privée depuis la rupture de son contrat de travail, à titre subsidiaire, de condamner la commune à lui verser les sommes de 5 225,11 euros à titre d'indemnité de licenciement, et de 1 425,69 euros, au titre du non-respect du préavis, en réparation de la rupture abusive de son contrat, à titre infiniment subsidiaire, de condamner la commune à lui verser la somme de 1 425,69 euros en réparation du non-renouvellement de son contrat et en tout état de cause, de condamner la commune à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du caractère vexatoire et discriminatoire de la rupture de son lien contractuel.

Par un jugement n° 1402869 du 7 février 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2017, MmeD..., représentée par Me E...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de condamner la commune de Béthune à lui verser une somme de 29 226,44 euros, correspondant aux traitements non perçus, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi depuis la rupture de son contrat de travail ainsi qu'une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice tiré du caractère vexatoire et discriminant de son licenciement ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Béthune à lui verser les sommes de 5 225,11 euros, à titre d'indemnité de licenciement, et de 1 425,69 euros, au titre du non-respect du préavis, en réparation de la rupture abusive de son contrat et la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice tiré du caractère vexatoire et discriminant de son licenciement ;

4°) à titre infiniment subsidiaire, de condamner la commune de Béthune à lui verser la somme de 1 425,69 euros en réparation du non-renouvellement de son contrat et la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice tiré du refus de renouvellement fondé sur un motif discriminatoire ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Béthune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me A...B..., représentant la commune de Béthune.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D...a été recrutée par la commune de Béthune, en qualité d'agent contractuel à temps non complet, pour exercer des fonctions d'agent d'entretien des écoles sur une période comprise entre décembre 2000 et août 2007. En dernier lieu, elle a été engagée par un contrat à durée déterminée d'un mois du 1er août 2007 au 31 août 2007. Le 18 août 2007, elle a été placée en arrêt de travail pour maladie. Le 28 avril 2008, la commune de Béthune a rempli l'attestation de fin d'emploi " destinée à l'Assédic " et l'a remise à la requérante. Par un courrier du 17 octobre 2010, Mme D...a demandé au maire de la commune de Béthune de la " réintégrer " en qualité d'agent de service. Par un courrier du 29 avril 2014, Mme D...a présenté une demande préalable indemnitaire qui a été implicitement rejetée. Mme D... relève appel du jugement du 7 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Béthune à l'indemniser des préjudices subis du fait de la rupture du contrat l'unissant à son employeur.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne l'existence d'un contrat à durée indéterminée :

2. Aux termes de l'article 3 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 dans sa rédaction applicable en la cause : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité ou d'un congé parental, ou de l'accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. / Ces collectivités et établissements peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel. / Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. /Toutefois, dans les communes de moins de 1 000 habitants et dans les groupements de communes dont la moyenne arithmétique des nombres d'habitants ne dépasse pas ce seuil, des contrats peuvent être conclus pour pourvoir des emplois permanents à temps non complet pour lesquels la durée de travail n'excède pas la moitié de celle des agents publics à temps complet ou pour pourvoir l'emploi de secrétaire de mairie quelle que soit la durée du temps de travail. Dans les communes de moins de 2 000 habitants et dans les groupements de communes de moins de 10 000 habitants, lorsque la création ou la suppression d'un emploi dépend de la décision d'une autorité qui s'impose à la collectivité en matière de création, de changement de périmètre ou de suppression d'un service public, la collectivité peut pourvoir à cet emploi par un agent non titulaire. ". Aux termes de l'article 15-I de la loi n°2005-843 du 26 juillet 2005 : " I. - Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de publication de la présente loi ou bénéficie, à cette date, d'un congé en application des dispositions du décret mentionné à l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux septième et huitième alinéas de l'article 3 de la même loi. / Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse pour une durée indéterminée. / II. - Le contrat est, à la date de publication de la présente loi, transformé en contrat à durée indéterminée, si l'agent satisfait, le 1er juin 2004 ou au plus tard au terme de son contrat en cours, aux conditions suivantes : / 1° Etre âgé d'au moins cinquante ans ; / 2° Etre en fonction ou bénéficier d'un congé en application des dispositions du décret mentionné à l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée ; / 3° Justifier d'une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années ; / 4° Occuper un emploi en application des quatrième, cinquième ou sixième alinéas de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée dans une collectivité ou un établissement mentionné à l'article 2 de la même loi. ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, pour les agents contractuels de la fonction publique territoriale recrutés sur un emploi permanent, en fonctions au moment de l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, le renouvellement de contrat régi par le I de l'article 15 de cette loi doit intervenir selon les règles fixées par les septième et huitième alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 et ne peut donc concerner que les titulaires de contrats entrant dans les catégories énoncées aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de ce même article. Ces dispositions ne sauraient ainsi s'appliquer aux contrats passés au titre du remplacement momentané de titulaires ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi, tels que visés par le premier alinéa du même article 3 de la loi du 26 janvier 1984. Dès lors, seuls les agents bénéficiant de contrats entrant dans les catégories prévues par les quatrième, cinquième et sixième alinéas de ce même article peuvent se voir proposer, par décision expresse, après six années de fonction au moins, un contrat à durée indéterminée.

4. Il résulte de l'instruction que Mme D...a toujours été employée par la commune de Béthune sur le fondement des dispositions de l'alinéa 1 de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, en remplacement d'agents titulaires indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité ou d'un congé parental et non sur le fondement des dispositions des alinéas 4, 5 et 6 de ce même article. Si Mme D...conteste la réalité de certains des motifs contenus dans les arrêtés par lesquels la commune l'a recrutée en contrat durée déterminée et allègue, notamment, que certains agents qu'elle a remplacé, n'auraient pas été en congé maladie, cette circonstance est sans incidence sur la possibilité de regarder Mme D...comme pouvant bénéficier d'un contrat à durée indéterminée. Enfin, les deux attestations d'emplois établies le 31 octobre 2001 et le 19 février 2003, à la demande de MmeD..., par le maire de la commune et mentionnant que l'intéressée est engagée en contrat à durée indéterminée, ne permettent pas de tenir pour établi que Mme D...aurait été, à cette époque, titulaire d'un contrat à durée indéterminée, alors qu'il résulte de l'instruction qu'elle sollicitait, avant chaque période d'été, un emploi d'agent auxiliaire auprès de la commune. A cet égard, Mme D...ne conteste pas sérieusement que ces attestations lui ont été remises, selon la commune, en vue de la recherche d'un logement. Par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'elle bénéficiait d'un contrat à durée indéterminée et que la commune aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en mettant fin sans motif à ce contrat à durée indéterminée.

En ce qui concerne l'existence d'un renouvellement tacite du contrat à durée déterminée :

5. Les contrats passés par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents non-titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, être conclus pour une durée déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse. Par suite, dans le cas où, contrairement à ces prescriptions, le contrat de recrutement d'un agent non-titulaire comporte une clause de tacite reconduction, cette stipulation ne peut légalement avoir pour effet de conférer au contrat dès son origine une durée indéterminée. Le maintien en fonction à l'issue du contrat initial a seulement pour effet de donner naissance à un nouveau contrat, conclu lui aussi pour une période déterminée et dont la durée est soit celle prévue par les parties, soit, à défaut, celle qui était assignée au contrat initial.

6. Mme D...soutient que son dernier contrat de travail du mois d'août 2007 doit être regardé comme ayant été tacitement reconduit, au plus tard, jusqu'au 30 avril 2008 et rompu prématurément le 28 avril 2008, par la réception de l'attestation de son employeur destinée à l'assurance chômage. Toutefois, il résulte de l'instruction et en particulier du contenu de cette attestation que le motif de la rupture mentionnée est une fin de contrat à durée déterminée et que le dernier jour payé a été le 17 août 2007, Mme D...ayant été, ensuite, placée en arrêt de travail. Le contrat à durée déterminée de Mme D...ne contenait, au demeurant, aucune clause de reconduction tacite. La circonstance, aussi regrettable soit elle, que son solde de congés payés ne lui a été réglé qu'en juillet 2008, n'est pas davantage de nature à établir le maintien de Mme D... dans les effectifs de la commune au-delà du 31 août 2007 et, par suite, la reconduction tacite de son contrat à durée déterminée à compter du 1er septembre 2007. Dans ces conditions, Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été licenciée avant le terme d'un contrat tacitement renouvelé et que la commune de Béthune aurait, ce faisant, commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

En ce qui concerne le non renouvellement du contrat à durée déterminée :

7. Aux termes de l'article 38 du décret n°88-145 du 15 février 1988 : " Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : 1° Le huitième jour précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée inférieure à six mois ; (...) ". Il résulte de l'instruction que Mme D...n'a pas été informée d'un renouvellement de son contrat à durée déterminée, en méconnaissance des dispositions précitées. Cette méconnaissance du délai de prévenance est constitutive d'une faute susceptible d'engager la responsabilité de la collectivité, et de nature à justifier l'indemnisation des préjudices qui résulteraient du caractère tardif de cet avertissement. Toutefois, Mme D...a été placée en arrêt maladie à compter du 18 août 2007, puis en congé maternité et enfin en congé parental. Informée de la fin de son contrat en avril 2008, par la réception de l'attestation d'assurance chômage rempli par son employeur, elle n'a sollicité un nouveau poste qu'en février 2010, à l'expiration de son congé parental. Elle ne justifie pas, dans ces conditions, de l'existence d'un préjudice subi du fait qu'elle n'ait pas été avertie du non-renouvellement de son dernier contrat huit jours avant son expiration.

8. Mme D...soutient que son contrat à durée déterminée n'a pas été renouvelé en raison de ses congés de maladie, de maternité et parental. Toutefois, il résulte de l'instruction que Mme D...a demandé au maire de la commune, par lettre du 17 octobre 2010, soit plus de trois ans après la fin de son dernier contrat de travail, à être " reprise dans le service enseignement comme agent de service ". Dès lors, la commune de Béthune doit être regardée comme ayant refusé de procéder à un nouveau recrutement de Mme D...et non comme ayant refusé de renouveler le dernier contrat de MmeD.... Par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la commune de Béthune aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Béthune, que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D...la somme demandée par la commune au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Béthune présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...D...et à la commune de Béthune.

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N°17DA00384


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00384
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: Mme Valérie Petit
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL LELEU DEMONT HARENG

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-12-20;17da00384 ?
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