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22/01/2019 | FRANCE | N°17DA00022

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 22 janvier 2019, 17DA00022


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Groupe C...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la réduction des rappels de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre des années 2008, 2010 et 2011 ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1301834 du 2 novembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 janvier et le 28 février 2017, la SA GroupeC..., représentée par Me Langenfeld, avocat, d

emande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lille du 2 novembre 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Groupe C...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la réduction des rappels de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre des années 2008, 2010 et 2011 ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1301834 du 2 novembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 janvier et le 28 février 2017, la SA GroupeC..., représentée par Me Langenfeld, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lille du 2 novembre 2016 ;

2°) de prononcer la réduction des rappels de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre des années 2008, 2010 et 2011.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue de deux vérifications de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, élargie à l'année 2011, l'administration fiscale a estimé que la société anonyme GroupeC..., société holding, exerçant à la fois une activité de gestion de titres de participation et une activité de prestations de services fournies à ses filiales, devait être soumise à la taxe sur les salaires et a retenu, dans l'assiette de cette taxe, les rémunérations versées en 2008, 2010 et 2011 à Mme Juliette Vivier, président du directoire, M. D...C..., M. B...C...et Mme F...A..., directeurs généraux et M.E..., responsable administratif et financier. La société Groupe C...relève appel du jugement du 2 novembre 2016, par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre des années 2008, 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes. Cet appel est limité à la contestation de ces rappels de taxe sur les salaires et pénalités afférentes en tant qu'elles concernent le président et les directeurs généraux, à l'exclusion du responsable administratif et financier.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

S'agissant du principe de l'assujettissement à la taxe sur les salaires :

2. Aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, les employeurs doivent payer une taxe sur les salaires " (...) lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ".

3. Lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts au sens de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts alors en vigueur, la taxe sur les salaires doit être déterminée par secteur, en appliquant aux rémunérations des salariés affectés spécifiquement à chaque secteur le rapport d'assujettissement propre à ce secteur. Toutefois, la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations, le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total.

4. Il résulte de l'instruction qu'au cours des années en litige, la société anonyme GroupeC..., société holding mixte, exerçait à la fois dans deux secteurs d'activité, l'un de gestion de titres de participation et l'autre de prestations de services fournies à ses filiales.

5. Il est constant que, d'une part, la société anonyme Groupe C...était soumise à la taxe sur la valeur ajoutée pour le secteur des prestations de services fournies à ses filiales et qu'elle n'était pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur 90 % au moins de son chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant chacune des années en litige. Elle était, de ce fait, assujettie à la taxe sur les salaires pour les rémunérations des personnels exerçant dans le secteur relatif à la gestion des titres de participation.

S'agissant des rémunérations relevant de l'assiette de la taxe sur les salaires :

6. En premier lieu, le président du directoire et le directeur général, membres du directoire d'une société anonyme, sont investis, en vertu des articles L. 225-58, L. 225-64 et L. 225-66 du code de commerce d'une responsabilité générale dans la gestion de la société. S'agissant d'une société holding, ces pouvoirs s'étendent en principe au secteur financier même si le conseil de surveillance est chargé d'une mission de contrôle permanent de la gestion menée par les membres du directoire. Cependant, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires.

7. Il est constant, qu'au cours des années 2008, 2010 et 2011, les fonctions de président du directoire de la société Groupe C...étaient assurées par Mme Juliette Vivier, alors que M. D... C..., M. B...C...et Mme F...A...assumaient des fonctions de direction générale. Pour établir que ces derniers n'avaient pas d'attribution dans le secteur financier, la société requérante se prévaut de deux procès-verbaux du conseil de surveillance des 26 mai 2006 et 12 juin 2009, qui indiquent, en substance, qu'à titre de mesure d'ordre intérieur non opposable aux tiers, il est convenu que le président du directoire et les directeurs généraux doivent recueillir l'accord préalable ou solliciter les directives du conseil de surveillance pour les actes, opérations et engagements. Toutefois, il ressort de la lettre même de ces procès-verbaux, que le président du directoire et les directeurs généraux ne sont pas dépourvus de tout pouvoir de contrôle, ni de toute responsabilité dans la prise des décisions relevant du secteur financier. L'obligation qui leur est faite de recueillir l'accord préalable du conseil de surveillance, pour les actes, opérations et engagements à caractère financier, ne fait pas obstacle à ce qu'ils puissent exercer les pouvoirs qui leur sont explicitement reconnus d'agir sur la base de simples directives, qu'ils peuvent d'ailleurs eux-mêmes solliciter. Dans ces conditions, le fait que le président du directoire et les directeurs généraux puissent prendre au quotidien des décisions relevant du secteur financier, implique qu'ils ne sont pas dépourvus de tout contrôle et responsabilité dans le secteur financier.

8. La société Groupe C...soutient, en outre, que l'activité de détention de titres, qui relève en principe du secteur financier, est marginale et, qu'aux termes de la convention de siège versée au débat, les fonctions des dirigeants sont limitées à la réalisation des prestations de services fournis aux filiales. Cependant, la société requérante ne démontre pas que Mme Juliette Vivier, président du directoire, M. D...C..., M. B...C...et Mme F...A..., directeurs généraux, n'auraient eu d'attributions que dans le secteur de la holding soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. Dès lors, en l'absence de stipulations expresses établissant que les pouvoirs des dirigeants se limitaient au seul secteur commercial de la société, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que les intéressés devaient être regardés comme affectés concurremment aux différents secteurs d'activité et que leurs rémunérations devaient, par voie de conséquence, être soumises à la taxe sur les salaires selon le rapport d'assujettissement général de la société.

9. En second lieu, contrairement à ce que soutient la société anonyme GroupeC..., si la taxe sur la valeur ajoutée grevant des biens et services dont les coûts font partie des frais généraux d'une société holding qui, s'immisçant dans la gestion de ses filiales, exerce, à ce titre, une activité économique doit, en principe, être déduite intégralement, en revanche, n'étant pas la contrepartie d'une activité économique, la perception de dividendes n'entre pas, elle-même, dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, même dans l'hypothèse où la société holding qui perçoit les dividendes s'immisce dans la gestion de ses filiales en leur fournissant des prestations de services soumises à cette taxe. Il suit de là que les dividendes doivent, pour l'application des dispositions de l'article 231 précité du code général des impôts, être compris au numérateur du rapport prévu à cet article. Par suite, les rémunérations des personnels affectés à des fonctions transversales correspondant aux frais généraux relatifs à l'activité de gestion des dividendes, doivent être assujetties à la taxe sur les salaires en appliquant, le rapport existant, pour l'entreprise dans son ensemble, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total.

10. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que, pour les années en litige, les rémunérations des personnels dirigeants et du président de la société anonyme Groupe C...étaient imposables à la taxe sur les salaires dans la limite de ce rapport d'assujettissement.

En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :

11. La société appelante invoque la garantie prévue à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, en se prévalant des termes de l'instruction 5-L-1-11 du 22 novembre 2011 aux termes de laquelle " Toutefois, si l'entreprise peut apporter la preuve que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attributions dans le secteur financier, leur rémunération est, par suite, comme placée en dehors du champ de la taxe sur les salaires ". Elle n'est, toutefois, pas fondée à soutenir que les termes de cette instruction, qui ne comportent aucune interprétation différente de la loi fiscale, remettraient en cause le bien-fondé des impositions contestées.

12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir partielle opposée par le ministre des finances et des comptes publics, que la société Groupe C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA Groupe C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Groupe C...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

2

N°17DA00022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00022
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-05-01 Contributions et taxes. Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés. Versement forfaitaire de 5 p. 100 sur les salaires et taxe sur les salaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELAS JURINORD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-01-22;17da00022 ?
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