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07/03/2019 | FRANCE | N°16DA01557

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 07 mars 2019, 16DA01557


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 décembre 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Somme a autorisé son licenciement pour motif économique dans le cadre du plan de redressement de la SAS Etablissements Crimet.

Par un jugement n° 1400510 du 28 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 août

2016, la société d'exercice libéral de mandataires judiciaires (SELAS) Bernard et Nicolas Soi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 décembre 2013 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Somme a autorisé son licenciement pour motif économique dans le cadre du plan de redressement de la SAS Etablissements Crimet.

Par un jugement n° 1400510 du 28 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 août 2016, la société d'exercice libéral de mandataires judiciaires (SELAS) Bernard et Nicolas Soinne agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Etablissements Crimet, représentée par la SELARL Delahousse et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. E...devant le tribunal administratif d'Amiens ;

3°) de mettre à la charge de M. E...le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Un jugement du 20 août 2013 du tribunal de commerce d'Amiens a placé la SAS Etablissements Crimet en redressement judiciaire et fixé la fin de la période d'observation au 21 février 2014. Cette société était spécialisée dans l'achat et la fabrication de meubles en bois, essentiellement des cuisines et des salles de bains. La SELAS Bernard et Nicolas Soinne a été désignée en qualité de mandataire judiciaire et Me A...D...en qualité d'administrateur judiciaire. M. B...E...a été désigné le 14 août 2013 représentant des salariés dans le cadre de la procédure collective. Une ordonnance du 13 novembre 2013 du juge commissaire au redressement judiciaire du tribunal de commerce d'Amiens a autorisé l'administrateur judiciaire à procéder au licenciement pour raison économique de six salariés, consécutivement à la suppression de six des quinze postes de travail existant dans l'entreprise. Cette ordonnance prévoyait la suppression de deux postes de livreurs, deux postes de commerciaux, d'un poste d'installateur et d'un poste de secrétariat. La SELAS Bernard et Nicolas Soinne relève appel du jugement du 28 juin 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 26 décembre 2013 de l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Somme ayant autorisé le licenciement pour motif économique de M. B...E....

2. En vertu des dispositions de l'article L. 621-17 du code de commerce, lorsqu'une entreprise est placée en période d'observation dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, l'administrateur judiciaire ne peut procéder à des licenciements pour motif économique que s'ils présentent un caractère urgent, inévitable et indispensable et après autorisation, non nominative, du juge-commissaire désigné par le tribunal de commerce. Si le salarié dont le licenciement est envisagé bénéficie du statut protecteur, l'administrateur doit, en outre, solliciter l'autorisation nominative de l'inspecteur du travail qui vérifie, outre le respect des exigences procédurales légales et des garanties conventionnelles, que ce licenciement n'est pas en lien avec le mandat du salarié, que la suppression du poste en cause est réelle et a été autorisée par le juge-commissaire, que l'employeur s'est acquitté de son obligation de reclassement, et qu'aucun motif d'intérêt général ne s'oppose à ce que l'autorisation soit accordée.

3. La notion de catégories professionnelles qui sert de base à l'établissement de l'ordre des licenciements concerne l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. La permutabilité des salariés constitue un indice de leur appartenance à une même catégorie professionnelle. Il ressort des pièces du dossier que M. E...était effectivement employé depuis janvier 2004 en tant que responsable du dépôt des Etablissements Crimet. Toutefois, M.E..., dont le bulletin de paie porte la mention " magasinier-chauffeur-livreur ", ne produit aucun élément permettant d'établir que sa formation de base ou complémentaire aurait été différente de celle de MM. F...etC..., salariés de l'entreprise, et qu'il n'aurait pas fait partie de la même catégorie professionnelle des chauffeurs livreurs que ces derniers. MM. F...et C...figurent comme M. E...avec la qualification " ouvrier " et l'emploi de " chauffeur-livreur " dans le procès-verbal de la réunion tenue le 29 octobre 2013 sur le projet de réorganisation de l'entreprise, document signé par M. E...en tant que représentant des salariés. Par suite, les critères d'ordre des licenciements s'appréciant au sein d'une même catégorie professionnelle, c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a jugé que la décision du 26 décembre 2013 de l'inspectrice du travail autorisant le licenciement de M. E... était entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation.

4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E...devant le tribunal administratif d'Amiens.

5. Il ressort des pièces du dossier que les chauffeurs-livreurs des Etablissements Crimet exerçaient des fonctions diverses, marquées par une grande polyvalence, les amenant à réceptionner les marchandises reçues, à les préparer, à les vérifier puis à les livrer. Ainsi qu'il a été dit au point 1, l'ordonnance du 13 novembre 2013 du juge commissaire au redressement judiciaire du tribunal de commerce d'Amiens a prévu la suppression de deux postes de livreurs. Le tableau d'application des critères d'ordre des licenciements attribue 14 points à M.C..., 12 points à M. E...et 9 points à M.F.... Par suite, en application du critère d'ordre des licenciements dans la catégorie professionnelle des chauffeurs livreurs, c'est à bon droit et sans erreur de fait ou d'appréciation que l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Somme a autorisé le licenciement de M.E....

6. Il résulte de tout ce qui précède que la SELAS Bernard et Nicolas Soinne est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 28 juin 2016, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 26 décembre 2013 de l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de la Somme autorisant le licenciement de M.E.... Par voie de conséquence, les conclusions de M. E...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu de faire droit aux conclusions de la SELAS Bernard et Nicolas Soinne présentées sur le fondement de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 28 juin 2016 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La demande de M. E...devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la SELAS Bernard et Nicolas Soinne présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAS Bernard et Nicolas Soinne en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Etablissements Crimet et à M. B...E....

Copie sera adressée, pour information, au ministre du travail.

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N°16DA01557

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01557
Date de la décision : 07/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-03-07;16da01557 ?
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