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07/05/2019 | FRANCE | N°18DA01550

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 07 mai 2019, 18DA01550


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 février 2017 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1706301 du 16 févri

er 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 février 2017 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, d'autre part, de faire injonction à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1706301 du 16 février 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2018, M.A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de cinq jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de procéder à la régularisation de sa situation administrative, au plus tard dans un délai d'un mois à compter de cette date ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention du 26 septembre 1994 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les observations de MeB..., représentant M.A....

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant malien né le 12 juin 1988, est entré régulièrement sur le territoire français le 13 octobre 2013 sous le couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour, qui lui avait été délivré afin de poursuivre des études supérieures en France. Une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " a ensuite été délivrée à l'intéressé le 9 octobre 2014 et a été renouvelée jusqu'au 8 octobre 2016. A l'approche de la date d'expiration de la validité de ce dernier titre, M. A...en a sollicité le renouvellement. Toutefois, par un arrêté du 16 février 2017 du préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A...relève appel du jugement du 16 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Il résulte de l'examen des motifs de l'arrêté du 16 février 2017 en litige que ceux-ci, qui ne se limitent pas à une suite de citations de dispositions susceptibles de s'appliquer à la situation de M.A..., ni à une reproduction de formules préétablies, comportent, avec une précision et un niveau d'intelligibilité suffisants, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquels le préfet du Nord s'est fondé pour refuser d'accorder à l'intéressé le renouvellement de la carte de séjour portant la mention " étudiant " qui lui avait été précédemment délivrée. Ces motifs révèlent ainsi, alors même qu'ils ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de M.A..., que cette situation a fait l'objet d'un examen particulier et suffisamment attentif. Par suite, la décision de refus de séjour est suffisamment motivée au regard de l'exigence posée en la matière par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, dont les dispositions se sont substituées à celles de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 dont elles sont issues. La circonstance que certains des motifs de cet arrêté seraient erronés demeure, à la supposer même avérée, dépourvue d'incidence sur le caractère suffisant de cette motivation.

3. En vertu de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 de ce code, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable, dont les modalités sont fixées à l'article L. 122-1 du même code, qui est issu de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Toutefois, le même article L. 121-1 dispose que se dispositions ne trouvent pas à s'appliquer dans le cas où l'administration se prononce sur une demande.

4. Il est constant que, pour prendre la décision de refus de renouvellement de séjour en litige, le préfet du Nord s'est prononcé au vu d'une demande présentée par M.A.... A cet égard, si la carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " dont cette demande avait pour unique objet d'obtenir le renouvellement conférait à l'intéressé le droit de se maintenir régulièrement sur le territoire français, ce droit était toutefois limité à la durée de validité de ce titre. En outre et quand bien même M. A...se serait trouvé dans l'une des situations, énumérées au II de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui lui auraient permis d'y prétendre de plein droit, ce qu'il ne prétend d'ailleurs pas, ce renouvellement était, en tout état de cause, subordonné à un examen, par l'autorité préfectorale, de sa demande à cette fin. Par suite, le moyen tiré par M. A...de la méconnaissance de ces dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté comme inopérant. En outre, dès lors qu'il ne ressort pas des motifs de l'arrêté du 16 février 2017 en litige que le préfet du Nord aurait entendu refuser de faire droit à la demande de M. A...pour une raison tirée de son caractère incomplet, l'intéressé ne peut faire reproche à cette autorité de ne lui avoir pas demandé de produire des éléments complémentaires, qu'il n'a toutefois nullement été empêché de fournir de sa propre initiative. Il ne peut, dans ces conditions, davantage soutenir que la procédure d'examen mise en oeuvre par les services de la préfecture n'aurait pas suffisamment garanti son droit à organiser sa défense.

En ce qui concerne la légalité interne :

5. Aux termes de l'article 9 de la convention du 26 septembre 1994 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre Etat doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / (...) / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. ". Ces stipulations permettent à l'administration d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies par le ressortissant malien qui sollicite le renouvellement du titre de séjour portant la mention " étudiant " qui lui avait été précédemment délivré pour suivre des études supérieures en France.

6. Pour refuser, par l'arrêté du 16 février 2017 en litige, d'accorder à M. A...le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " étudiant ", qui constituait le seul objet de la demande de l'intéressé, le préfet du Nord a relevé que ce dernier, inscrit, pour les années universitaires 2013/2014 et 2014/2015, en première année de licence " Droit, économie et gestion " (DEG), parcours " Droit ", à l'université de Lille II, s'était de nouveau inscrit en licence DEG dans le même établissement au titre des deux années universitaires suivantes, cette fois en parcours " Science politique ". Cette autorité a relevé, en outre, que M. A...avait été déclaré défaillant aux examens de ces années d'études, faute de s'être présenté à l'ensemble des épreuves. Elle en a déduit que l'intéressé ne pouvait se prévaloir d'une progression dans son cursus et que le caractère réel et sérieux de ses études ne pouvait, dans ces conditions, être regardé comme établi. Ayant, au terme de cette analyse, tiré la conclusion que M. A...ne pouvait prétendre au renouvellement qu'il sollicitait, le préfet du Nord, avant d'assortir ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, s'est assuré qu'une telle mesure d'éloignement ne porterait pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. M. A...soutient que l'analyse, rappelée au point précédent, ayant conduit le préfet du Nord à refuser de faire droit à sa demande serait erronée en ce qu'elle retient, d'une part, l'absence de progression dans son cursus et le défaut de caractère réel et sérieux de ses études, d'autre part, l'absence de lien entre la formation entreprise à la date de l'arrêté contesté et celle entammée à son arrivée en France, enfin, qu'il ne disposerait pas de liens familiaux en France.

8. Toutefois, il résulte de ce qui vient d'être dit au point 6 que, si le préfet du Nord a précisé que M. A..., tout en s'inscrivant pour la troisème fois en première année de licence DEG à l'université de Lille II au titre de l'année universitaire 2015/2016, avait, à cette occasion, changé de parcours, cette autorité ne s'est aucunement fondée sur ce changement, qu'elle n'a pas qualifié de réorientation, pour refuser de renouveler le titre de séjour de l'intéressé. Par ailleurs, s'il ressort des pièces du dossier que M. A... a dû subir, au cours de l'année universitaire 2016/2017, une intervention chirurgicale au niveau de la main gauche et que cet événement l'a contraint à ne pouvoir assister aux cours du 15 octobre 2016 au 4 novembre 2016 inclus, il n'est pas établi que cette absence de trois semaines puisse expliquer, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les suites de cette intervention auraient connu des complications notables, les résultats insuffisants obtenus par l'intéressé au titre de cette année. En tout état de cause, ces difficultés récentes de santé ne peuvent justifier les insuffisances ni les absences de M. A... au cours des années précédentes. Ainsi, pour retenir que l'intéressé ne justifiait pas d'une progression dans son cursus, ce qui est suffisamment corroboré par les pièces du dossier et n'est pas autrement contesté, et que le caractère réel et sérieux de ses études ne pouvait, dans ces conditions, être regardé comme établi le préfet du Nord ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts. Enfin, si, comme il a également été dit au point 6, le préfet du Nord a apprécié l'intensité et l'ancienneté des liens tissés par M. A...depuis son arrivée en France, il n'y a aucunement procédé dans le cadre de son examen du droit de l'intéressé à obtenir le renouvellement qu'il sollicitait, mais seulement pour s'assurer, une fois cet examen achevé, que le refus de séjour pouvait être assorti d'une obligation de quitter le territoire français sans qu'il soit porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive. Il suit de là qu'une erreur de fait affectant le motif rendant compte de cette appréciation serait, à la supposer avérée, sans incidence sur la légalité de la décision de refus de séjour. Au surplus, il ressort des motifs de l'arrêté en litige que le préfet du Nord n'a pas retenu que M. A...ne disposait pas de liens familiaux en France, mais que, célibataire et sans charge de famille, il ne justifiait pas en France d'une situation peronnelle et familiale à laquelle la mesure d'éloignement porterait une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour serait entachée d'erreurs de fait de nature à en affecter la légalité ne peut qu'être écarté.

9. Eu égard notamment à ce qui a été dit aux points 2, 6 et 8, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord ne se serait pas livré à un examen particulier et suffisamment approfondi de la situation de M. A... avant de lui accorder le renouvellement de son titre de séjour.

10. Ainsi qu'il a été dit au point 6, la demande que M. A...a présentée au préfet du Nord avait pour seul objet d'obtenir le renouvellement, sur le fondement des stipulations précitées de l'article 9 de la convention franco-malienne du 26 septembre 1994, de la carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " dont il était précédemment titulaire. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Nord aurait examiné d'office si M. A...pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement, cette autorité n'ayant, comme il a été dit au même point 6, apprécié l'incidence de son arrêté sur la vie privée et familiale de l'intéressé que pour justifier que le refus de titre de séjour soit assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, M. A...ne peut utilement soutenir qu'il aurait pu bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 de ce code. Il ne peut pas plus utilement soutenir que les dispositions de ces articles auraient été méconnues par le préfet du Nord pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, ni que, pour refuser de le faire bénéficier de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

11. Le moyen tiré d'une atteinte au droit à la vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant pour contester le refus de renouveler un titre de séjour en qualité d'étudiant, qui résulte seulement d'une appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies. Il suit de là que M. A...ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision, contenue dans l'arrêté du 16 février 2017 en litige, refusant de renouvellement le titre de séjour portant la mention " étudiant " précédemment mis en sa possession.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 11 que la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... n'est entachée d'aucune des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ne peut qu'être écarté.

13. Ainsi qu'il a été dit au point 1, M. A... est entré régulièrement sur le territoire français le 13 octobre 2013, sous le couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour obtenu par lui afin de poursuivre des études supérieures en France, et il a ensuite bénéficié de façon ininterrompue de la délivrance de cartes de séjour temporaire portant la mention " étudiant " jusqu'au 8 octobre 2016. Il pouvait ainsi se prévaloir, à la date de l'arrêté du 16 février 2017 en litige, d'une durée de séjour d'un peu plus de trois années intégralement effectuée par lui dans des conditions régulières. Outre l'ancienneté et les conditions de son séjour, il fait état de la relation sentimentale qu'il a nouée avec une ressortissante française, avec laquelle il a conclu un pacte civil de solidarité. Toutefois, cet engagement n'a été conclu que le 27 septembre 2017, soit à une date postérieure à celle à laquelle l'arrêté du 16 février 2017 en litige a été pris. En outre, les pièces produites par M. A...ne sont pas de nature à lui permettre d'établir la réalité de la vie commune alléguée à la date de cette arrêté, puisqu'elles révèlent que cette vie commune a débuté au plus tôt le 1er avril 2017, soit à compter d'une date également postérieure à celle à laquelle l'arrêté en litige a été pris. Il en est de même de l'état de grossesse de la compagne de M. A...et de la reconnaissance par ce dernier de la paternité de l'enfant dont celle-ci est actuellement enceinte. Par ailleurs, M. A...n'allègue pas qu'il serait dépourvu, en dépit du décès de ses parents, d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, où il a habituellement vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans. Dans ces circonstances, malgré la relative ancienneté et les conditions en majeure partie régulières du séjour de M. A...en France et en dépit des relations amicales que l'intéressé a tissées sur le territoire français, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive. Par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que la décision de refus de séjour en litige n'est entachée d'aucune des illégalités externes invoquées. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination de cette mesure devrait être annulée en conséquence de ces illégalités ne peut qu'être écarté.

15. Il résulte de ce qui a été dit aux point 12 et 13 que la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français n'est pas entachée des illégalités invoquées. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination de cette mesure devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette dernière ne peut qu'être écarté.

16. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

17. La Cour européenne des droits de l'homme a rappelé qu'il appartenait, en principe, au ressortissant étranger de produire les éléments susceptibles de démontrer qu'il serait exposé à un risque de traitement contraire aux stipulations précitées, à charge ensuite pour les autorités administratives " de dissiper les doutes éventuels " au sujet de ces éléments (28 février 2008, Saadi c. Italie, n° 37201/06, paragraphes 129-131 et 15 janvier 2015, AA. c. France, n° 18039/11). Selon cette même cour, l'appréciation d'un risque réel de traitement contraire à l'article 3 précité doit se concentrer sur les conséquences prévisibles de l'éloignement du requérant vers le pays de destination, compte tenu de la situation générale dans ce pays et des circonstances propres à l'intéressé (30 octobre 1991, Vilvarajah et autres c. Royaume-Uni, paragraphe 108, série A n° 215). A cet égard, et s'il y a lieu, il faut rechercher s'il existe une situation générale de violence dans le pays de destination ou dans certaines régions de ce pays si l'intéressé en est originaire ou s'il doit être éloigné spécifiquement à destination de l'une d'entre elles. Cependant, toute situation générale de violence n'engendre pas un risque réel de traitement contraire à l'article 3, la Cour européenne des droits de l'homme ayant précisé qu'une situation générale de violence serait d'une intensité suffisante pour créer un tel risque uniquement " dans les cas les plus extrêmes " où l'intéressé encourt un risque réel de mauvais traitements du seul fait qu'un éventuel retour l'exposerait à une telle violence.

18. M. A...se borne à alléguer, sans apporter aucune précision circonstanciée au soutien de cette assertion et sans l'étayer par aucun élément, qu'il ne saurait, sans mettre sa vie ou sa sécurité en danger, retourner au Mali, compte tenu de l'instabilité politique et de la menace d'explosion sociale que connaîtrait ce pays. Ce faisant, il n'établit pas de manière probante qu'il pourrait être actuellement et personnellement exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans ce pays. Il ne ressort, au demeurant, d'aucune des pièces du dossier, ni n'est même allégué, que M. A...aurait formé une demande d'asile en France ou dans un autre pays de l'Union européenne. Par suite, le moyen tiré de ce que, pour désigner le Mali comme le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit d'office, le préfet du Nord aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet du Nord.

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N°18DA01550


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01550
Date de la décision : 07/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : INUNGU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-05-07;18da01550 ?
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