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09/07/2019 | FRANCE | N°16DA01425

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 09 juillet 2019, 16DA01425


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de défense de l'environnement et du cadre de vie (DECAVI), M. B...F..., Mme Z...F..., M. K... A..., M. AG...E..., M. N...M..., Mme T...M..., M. V...AH..., Mme I...AH..., M. Q...Y..., Mme C...Y..., Mme AB...L..., M. W...G..., M. Q...D..., Mme P...D..., M. X... U..., M. H...J..., M. AD...AC..., M. S...O..., M. W... AF...et Mme AA...AF...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 17 octobre 2013 par laquelle le préfet du Nord a délivré à M. R... AE...un récépissé

de déclaration pour l'exploitation d'un élevage de 29 990 poulets sur le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association de défense de l'environnement et du cadre de vie (DECAVI), M. B...F..., Mme Z...F..., M. K... A..., M. AG...E..., M. N...M..., Mme T...M..., M. V...AH..., Mme I...AH..., M. Q...Y..., Mme C...Y..., Mme AB...L..., M. W...G..., M. Q...D..., Mme P...D..., M. X... U..., M. H...J..., M. AD...AC..., M. S...O..., M. W... AF...et Mme AA...AF...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 17 octobre 2013 par laquelle le préfet du Nord a délivré à M. R... AE...un récépissé de déclaration pour l'exploitation d'un élevage de 29 990 poulets sur le territoire de la commune de Noordpeene.

Par un jugement n° 1402470 du 2 juin 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2016, et un mémoire, enregistré le 23 janvier 2018, l'association DECAVI, M. K... A..., M. Q...Y..., Mme C...Y..., M. V...AH..., Mme I...AH..., M. W...G..., M. AD... AC..., M. S... O..., M. N... M..., Mme T...M..., M. B... F..., Mme Z...F..., Mme AB...L..., M. X... U..., et M. AG... E..., représentés par la SCP Decoster, Corret, Deloziere, Leclercq, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge des défendeurs la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à agir l'encontre de la décision en litige ;

- ce récépissé a été délivré en méconnaissance des dispositions du III de l'article R. 512-47 du code de l'environnement, le contenu de la déclaration étant insuffisant en ce qui concerne les bruits, les réseaux enterrés et les eaux résiduaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. AE...qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une lettre du 9 mai 2019, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur le principe d'une régularisation dans le cas où la cour accueillerait le moyen tiré du caractère incomplet de la déclaration, en l'absence de précisions sur le mode et les conditions d'utilisation, d'épuration et d'évacuation des eaux résiduaires que constituent les eaux utilisées pour le nettoyage et le rinçage du bâtiment entre chaque bande.

Par un mémoire, enregistré le 23 mai 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire a répondu à cette lettre.

Par ordonnance du 4 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 5 juin 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 17 octobre 2013, le préfet du Nord a délivré à M. AE... un récépissé de déclaration pour l'exploitation d'un élevage de 29 990 poulets sur le territoire de la commune de Noordpeene. L'association DECAVI et autres relèvent appel du jugement du 2 juin 2016 par lequel le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Aux termes du I de l'article L. 514-6 du code de l'environnement relatif au contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " Les décisions prises en application des articles L. 171-7, L. 171-8 et L. 171-10, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-7-3 à L. 512-7-5, L. 512-8, L. 512-12, L. 512-13, L. 512-20, L. 513-1, L. 514-4, du I de l'article L. 515-13 et de l'article L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ". Selon les dispositions de l'article R. 514-3-1 du même code, dans leur rédaction alors en vigueur : " Sans préjudice de l'application des articles L. 515-27 et L. 553-4, les décisions mentionnées au I de l'article L. 514-6 et aux articles L. 211-6, L. 214-10 et L. 216-2 peuvent être déférées à la juridiction administrative : / - par les tiers, personnes physiques ou morales, les communes intéressées ou leurs groupements, en raison des inconvénients ou des dangers que le fonctionnement de l'installation présente pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 dans un délai d'un an à compter de la publication ou de l'affichage de ces décisions (...) ".

3. En application de ces dispositions, il appartient au juge administratif d'apprécier si les tiers personnes physiques qui contestent une décision prise au titre de la police des installations classées justifient d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour en demander l'annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux l'installation en cause, appréciés notamment en fonction de la situation des intéressés et de la configuration des lieux.

4. Il résulte de l'instruction que M. et Mme F...et M. AC...sont voisins immédiats de l'installation projetée. Eu égard à l'importance de ce projet, portant sur un élevage de 29 990 volailles, et aux désagréments qui en résulteront nécessairement, liés notamment à l'utilisation de produits insecticides, qui est invoquée par les épouxF..., apiculteurs, et aux nuisances olfactives et sonores, qui sont invoquées par M.AC..., ces derniers justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'intérêt à agir des autres demandeurs, que la fin de non-recevoir doit être écartée.

Sur la légalité de la décision du 17 octobre 2013 :

6. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 512-8 du code de l'environnement : " Sont soumises à déclaration les installations qui, ne présentant pas de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1, doivent néanmoins respecter les prescriptions générales édictées par le préfet en vue d'assurer dans le département la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1 ". L'article R. 512-47 du même code dispose, dans sa version applicable à l'arrêté en litige, que : " I.- La déclaration relative à une installation doit être adressée, avant la mise en service de l'installation, au préfet du département dans lequel celle-ci doit être implantée. / II.- La déclaration mentionne : / 1° S'il s'agit d'une personne physique, ses nom, prénoms et domicile et, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale, sa forme juridique, l'adresse de son siège social ainsi que la qualité du signataire de la déclaration ; / 2° L'emplacement sur lequel l'installation doit être réalisée ; / 3° La nature et le volume des activités que le déclarant se propose d'exercer ainsi que la ou les rubriques de la nomenclature dans lesquelles l'installation doit être rangée ; / 4° Si l'installation figure sur les listes mentionnées au III de l'article L. 414-4, une évaluation des incidences Natura 2000. / III.- Le déclarant doit produire un plan de situation du cadastre dans un rayon de 100 mètres et un plan d'ensemble à l'échelle de 1/200 au minimum, accompagné de légendes et, au besoin, de descriptions permettant de se rendre compte des dispositions matérielles de l'installation et indiquant l'affectation, jusqu'à 35 mètres au moins de celle-ci, des constructions et terrains avoisinants ainsi que les points d'eau, canaux, cours d'eau et réseaux enterrés. / Le mode et les conditions d'utilisation, d'épuration et d'évacuation des eaux résiduaires et des émanations de toute nature ainsi que de gestion des déchets de l'exploitation sont précisés. La déclaration mentionne, en outre, les dispositions prévues en cas de sinistre. L'échelle peut, avec l'accord du préfet, être réduite au 1/1 000. / IV.- La déclaration et les documents ci-dessus énumérés sont remis en triple exemplaire ". Aux termes de l'article R. 512-48 de ce code, dans sa même version : " Si le préfet estime que l'installation projetée n'est pas comprise dans la nomenclature des installations classées ou relève du régime de l'autorisation ou de l'enregistrement, il en avise l'intéressé. / Lorsqu'il estime que la déclaration est en la forme irrégulière ou incomplète, le préfet invite le déclarant à régulariser ou à compléter sa déclaration ". Et le premier alinéa de l'article R. 512-49 du même code, dans sa même version, dispose que " Le préfet donne récépissé de la déclaration et communique au déclarant une copie des prescriptions générales applicables à l'installation ".

7. Il résulte de la combinaison des dispositions citées au point précédent que, saisi par un exploitant d'une déclaration au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, le préfet doit vérifier que l'installation pour laquelle est déposée la déclaration relève bien de ce régime, qu'elle est régulière en la forme et complète. Si tel est le cas, le préfet est tenu de délivrer le récépissé de déclaration.

8. Il ne résulte ni des dispositions de l'article R. 512-47 citées au point 2, qui précisent de manière limitative les justificatifs devant être fournis, ni d'aucune autre disposition, que le plan d'ensemble produit par le déclarant doit indiquer précisément l'emplacement du groupe électrogène au sein de l'installation, son abri ou encore celui du système de ventilation. Le moyen tiré de ce que la déclaration déposée par M. AE...serait incomplète en l'absence de telles indications sur les plans doit, par suite, être écarté.

9. Le ministre de la transition écologique et solidaire fait valoir, sans être contesté sur ce point, que l'installation en cause sera reliée à un réseau électrique aérien. Dès lors, la circonstance que les plans accompagnant la déclaration ne précisent pas si le réseau est aérien ou enterré est sans incidence. Le moyen tiré du caractère incomplet de la déclaration compte tenu de l'ambigüité qui en résulterait doit, par suite, être écarté.

10. Le plan de masse du dossier à l'échelle 1/1000ème, intitulé " projet ", signale la présence du réseau d'adduction d'eau passant sous la rue Haecke Straete. Les appelants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que, sur ce point, la déclaration serait également incomplète.

11. M. AE...a indiqué, dans la rubrique de la déclaration relative au mode de collecte des déjections et solides vers les ouvrages de stockage, que serait réalisé un " nettoyage du bâtiment entre chaque bande, avec rinçage complet avant curage de la litière, stockage du fumier en bout de champ(s) ". Un tel rinçage implique nécessairement l'utilisation d'eaux de lavage, qui doivent être qualifiées d'eaux résiduaires au sens des dispositions citées au point 6. La déclaration ne comporte aucune précision sur le mode et les conditions d'utilisation, d'épuration et d'évacuation de ces eaux. Les appelants sont ainsi fondés à soutenir que la déclaration déposée par M. AE...est incomplète sur ce point.

12. Il résulte de tout ce qui précède que l'association DECAVI et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2013 par laquelle le préfet du Nord a délivré à M. AE... un récépissé de déclaration pour l'exploitation d'un élevage de 29 990 poulets sur le territoire de la commune de Noordpeene.

Sur les frais du procès :

13. Il n'y a pas lieu en tout état de cause, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'association DECAVI et autres au titre des frais du procès.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 2 juin 2016 du tribunal administratif de Lille et le récépissé de déclaration délivré le 17 octobre 2013 par le préfet du Nord à M. AE...sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association DECAVI, qui a été désignée à cette fin dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à M. R...AE..., et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 20 juin 2019 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Boulanger, président de chambre,

- M. Michel Richard, président-assesseur,

- M. Jimmy Robbe, premier conseiller.

Lu en audience publique le 9 juillet 2019.

Le rapporteur,

Signé : J. ROBBE Le président de la 1ère chambre,

Signé : Ch. BOULANGER

Le greffier,

Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

N°16DA01425 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16DA01425
Date de la décision : 09/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Jimmy Robbe
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : DECOSTER - CORRET - DELOZIERE - LECLERCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-09;16da01425 ?
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