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31/07/2019 | FRANCE | N°17DA01065

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 31 juillet 2019, 17DA01065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 28 juin 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale Nord-Valenciennes a autorisé son licenciement pour motif économique par la société Akers France.

Par un jugement n° 1606061 du 29 mars 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 juin 2017, le 9 novembre 2017

et le 2 juillet 2019, M. B..., représenté par Me D... A..., demande à la cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 28 juin 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale Nord-Valenciennes a autorisé son licenciement pour motif économique par la société Akers France.

Par un jugement n° 1606061 du 29 mars 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 juin 2017, le 9 novembre 2017 et le 2 juillet 2019, M. B..., représenté par Me D... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement;

2°) d'annuler la décision du 28 juin 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale Nord-Valenciennes a autorisé son licenciement pour motif économique par la société Akers France ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B... a été embauché le 22 janvier 2007 en qualité d'ajusteur-marqueur, dans l'établissement de Berlaimont (Nord) de la société par action simplifiée Akers France, spécialisée dans la production de cylindres pour laminoirs. Il détient le mandat de délégué du personnel. Après avoir été placée en redressement judiciaire par un jugement du 3 décembre 2015 de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Thionville (Moselle), la société Akers France, qui comprenait un établissement à Berlaimont et un à Thionville, a été liquidée par un jugement du 30 mars 2016 de ce tribunal. M. B... relève appel du jugement du 29 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 juin 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale Nord-Valenciennes a autorisé son licenciement pour motif économique par la société Akers France.

2. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise. En outre pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence.

3. La décision contestée du 28 juin 2016 comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle vise les demandes d'autorisation de licenciement du 25 mai 2016, les différents jugements du tribunal de grande instance de Thionville, l'ordonnance du 3 mai 2016 du juge commissaire autorisant la suppression de tous les emplois sur les sites de Berlaimont et de Thionville, ainsi que la consultation du comité d'entreprise le 23 mai 2016. La décision affirme que la réalité du motif économique est établie du fait de la suppression de tous les postes de travail, qu'aucune proposition de reclassement interne n'a dès lors pu être effectuée, que le périmètre de reclassement externe, à la date de la demande d'autorisation, ne comprend plus les filiales internationales de la société de droit suédois Akers AB, dont la société Akers France constituait une filiale jusqu'à son rachat par la société américaine Ampco Pittsburgh Corporation, le 3 mars 2016. La décision affirme enfin qu'aucune proposition de reclassement au sein des filiales du groupe Akers implantées à l'étranger n'a été adressée à M. B... et que l'administrateur a procédé à des recherches de reclassement externe au sein des sociétés implantées en France relevant de la même branche d'activité de la transformation des métaux. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté, sans que M. B... ne puisse utilement soutenir, au stade de la motivation, qu'une confusion aurait été opérée entre reclassement interne et reclassement externe, dès lors que ce moyen se rattache au bien-fondé de la décision et qu'il est constant que l'inspecteur du travail a examiné ces deux éléments, ainsi qu'il y était tenu.

4. Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. /Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. /Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ".

5. Pour établir le périmètre du groupe de reclassement à la date de la demande d'autorisation de licenciement, en l'absence de l'acte de rachat de la société Akers AB, l'inspecteur du travail s'est fondé sur un faisceau d'indices établissant la réalité du rachat de cette société par la société Ampco Pittsburgh Corporation, à l'exception de la société Akers France et de ses deux sites de Berlaimont et Thionville, de la société Akers Fraisses (Loire), de la société Akers Sedan et de la société Akers Belgium. Ce rachat est mentionné dans l'accord collectif majoritaire relatif aux conséquences sociales de la liquidation judiciaire de la société Akers France, validant le plan de sauvegarde de l'emploi signé le 19 avril 2016 par les syndicats CGT et FO. Sa réalité est également établie par la production du communiqué de presse de la société Ampco Pittsburgh Corporation, par divers articles de presse et par le jugement du 17 avril 2018 du conseil de prud'hommes de Thionville, rejetant les demandes de salariés invoquant une fraude de la cession. L'inspecteur du travail a pu, dès lors considérer qu'à la date de la demande d'autorisation de licenciement, la société Akers France ne faisait plus partie du groupe Akers AB, ni d'aucun groupe. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation quant au périmètre de reclassement des salariés doit être écarté.

6. Ainsi qu'il vient d'être dit, à la date de la décision contestée, la société Akers France ne faisait plus partie du groupe Akers AB, racheté par la société Ampco Pittsburgh Corporation, à l'exception de la société Akers France et de ses deux sites de Berlaimont et Thionville, de la société Akers Fraisses (Loire) et de la société Akers Sedan. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administrateur et le liquidateur de la société Akers France auraient dû contrôler le périmètre du groupe de reclassement, nonobstant le fait que certains salariés, dont le requérant, avaient donné leur accord pour un reclassement à l'étranger, et opérer des recherches de reclassement au sein du groupe Akers AB, doit être écarté.

7. Il ressort des pièces du dossier que l'administrateur de la société Akers France a aussi saisi les commissions paritaires de l'emploi, nationale et régionale du Nord et de Lorraine, les différents conseils régionaux, les maisons de l'emploi, les organisations et syndicats professionnels de la métallurgie ainsi que des sociétés concurrentes afin de savoir si celles-ci disposaient de postes disponibles. Ces courriers de l'administrateur exposaient le projet de licenciement collectif, transmettaient la liste et les profils des emplois supprimés. L'administrateur judiciaire demandait à être informé de toute proposition de reclassement en précisant la localisation des postes offerts, la fiche de poste, le niveau de formation requis, le niveau de rémunération ainsi que les coordonnées de la personne ayant compétence pour recevoir les candidatures. Il est en outre constant que les propositions recueillies ont été transmises au salarié lors de l'entretien préalable au licenciement. Par suite, l'obligation de reclassement externe n'a pas été méconnue.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 29 mars 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Akers France et de la SCP Noel-Nodée-Lanzetta présentées sur le fondement de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Akers France et de la SCP Noel-Nodée-Lanzetta présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la société Akers France, à la SCP Noel-Nodée-Lanzetta et à la ministre du travail.

Copie en sera adressée, pour information à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Hauts de France.

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N°17DA01065

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17DA01065
Date de la décision : 31/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Jean-Jacques Gauthé
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : KAHN-DESCAMPS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-31;17da01065 ?
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