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17/09/2019 | FRANCE | N°17DA01402

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 17 septembre 2019, 17DA01402


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rouen, par une première demande enregistrée sous le n° 1501173, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 décembre 2013 par lequel le maire de Varengeville-sur-Mer a délivré à M. et Mme F... C... un permis de construire une maison individuelle sur une parcelle cadastrée AD n° 489, située 2 rue des Joncs Marins.

Par une deuxième demande enregistrée sous le n° 1501172, les époux B... ont demandé au même tribunal d'annuler

pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2014 par lequel le maire de Varengeville-sur-M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rouen, par une première demande enregistrée sous le n° 1501173, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 décembre 2013 par lequel le maire de Varengeville-sur-Mer a délivré à M. et Mme F... C... un permis de construire une maison individuelle sur une parcelle cadastrée AD n° 489, située 2 rue des Joncs Marins.

Par une deuxième demande enregistrée sous le n° 1501172, les époux B... ont demandé au même tribunal d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 mars 2014 par lequel le maire de Varengeville-sur-Mer a délivré aux époux C... un permis de construire modificatif.

Par une troisième demande enregistrée sous le n° 1501174, les époux B... ont demandé au même tribunal d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 février 2015 par laquelle le maire de Varengeville-sur-Mer a rejeté leur recours gracieux dirigé contre les arrêtés du 27 décembre 2013 et 31 mars 2014.

Par un jugement nos 1501172,1501173,1501174 du 8 juin 2017, le tribunal administratif de Rouen, après avoir joint ces trois demandes, a annulé les arrêtés des 27 décembre 2013 et 31 mars 2014 ainsi que la décision du 11 février 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2017, et des mémoires, enregistrés les 22 février 2018, 12 avril 2018, 5 juillet 2018, et 25 janvier 2019, M. et Mme F... C... et la commune de Varengeville-sur-Mer, représentés par la SCP Morival, Amisse, Mabire, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par les époux B... devant le tribunal administratif de Rouen ;

3°) de condamner les époux B... à verser aux époux C... la somme totale de 7 000 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ;

4°) de mettre à la charge des époux B..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 5 000 euros à verser à M. et Mme C... et une même somme de 5 000 euros à verser à la commune de Varengeville-sur-Mer.

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jimmy Robbe, premier conseiller,

- les conclusions de M. Charles-Edouard Minet, rapporteur public,

- et les observations de Me D... E..., représentant représentant M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F... C... ont déposé, le 19 novembre 2013, une demande de permis de construire une maison d'habitation sur une parcelle cadastrée AD n° 489, située 2 rue des Joncs Marins à Varengeville-sur-Mer. Par un arrêté du 27 décembre 2013, le maire de Varengeville-sur-Mer leur a accordé ce permis de construire. Par un arrêté du 31 mars 2014, la même autorité leur a délivré un permis modificatif portant sur le déplacement d'une fenêtre en façade et d'un châssis de toit et sur la modification de la teinte de l'enduit extérieur. Les époux C... et la commune de Varengeville-sur-Mer relèvent appel du jugement du 8 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. et Mme A... B..., annulé ces arrêtés des 27 décembre 2013 et 31 mars 2014 ainsi que la décision rejetant le recours gracieux dirigé à leur encontre.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En vertu de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, le délai de recours contre une décision administrative est de deux mois. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier. (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage ". L'article A. 424-17 du même code dispose que : " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : / " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme). / (...) ". L'article A. 424-18 du même code précise que : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier ".

3. S'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a accompli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions citées au point précédent, le juge doit apprécier la continuité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figurent au dossier qui lui est soumis.

En ce qui concerne le permis de construire initial délivré le 27 décembre 2013 :

4. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la photographie annexée à un courriel échangé en interne par les services administratifs du constructeur, en date du 10 janvier 2014 et versé au dossier par M. et Mme C..., que ces derniers ont fait procéder au plus tard à cette date à l'affichage du permis de construire initial sur le terrain d'assiette du projet. Il ressort également de la photographie sur laquelle figure en surimpression la date du 1er août 2014 que le panneau d'affichage comportait les mentions exigées par les dispositions ci-dessus reproduites de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme.

5. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier, notamment des photographies évoquées au point précédent mais aussi de celles sur lesquelles figurent en surimpression la date du 13 juillet 2014 et du 10 août 2014, que le panneau d'affichage du permis de construire initial était installé à proximité de la voie publique, y compris après qu'il ait été déplacé sur la parcelle, dans des conditions conformes aux dispositions ci-dessus reproduites de l'article A. 424-18 du code de l'urbanisme.

6. Enfin, le panneau apparait sur plusieurs photographies prises lors des différentes étapes de la construction de la maison, allant du terrassement à l'édification des murs de façades, ce qui est de nature à établir la continuité de son affichage pendant deux mois, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cet affichage aurait été interrompu entre le 10 janvier 2014 et le mois de juin 2014, au cours duquel ont été prises les premières photographies des travaux versées au dossier et faisant apparaître ce panneau. Cette continuité ne saurait être remise en cause par la seule circonstance invoquée que les dates des photographies versées au dossier par M. et Mme C... apparaissent uniquement en surimpression sur celles-ci et qu'elles ne concordent pas exactement avec l'état d'avancement du chantier tel qu'il ressort d'autres photographies. Si la photographie sur laquelle figure en surimpression la date du 1er aout 2014 fait apparaitre que la partie basse du panneau, celle où étaient mentionnés les voies et délais de recours, était en partie cachée par la végétation, cette circonstance est sans incidence sur le déclenchement du délai de recours dès lors qu'à cette date l'affichage durait plus de deux mois.

En ce qui concerne le permis de construire modificatif délivré le 31 mars 2014 :

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des photographies annexées à un autre courriel toujours échangé en interne par les services du constructeur, en date du 29 avril 2014, que les pétitionnaires ont fait procéder au plus tard à cette dernière date à l'affichage du permis de construire modificatif sur le terrain.

8. D'autre part, la photographie sur laquelle figure en surimpression la date du 1er août 2014, mentionnée au point 4, fait apparaitre que la date de délivrance du permis de construire modificatif a été mentionnée sur le même panneau d'affichage, lequel, ainsi qu'il a été dit au point 5, était installé à proximité de la voie publique, dans des conditions conformes aux dispositions ci-dessus reproduites de l'article A. 424-18 du code de l'urbanisme.

9. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, les pièces du dossier établissent la continuité de l'affichage de ce panneau.

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 9 que l'affichage du permis de construire initial et de son modificatif étant de nature à faire courir le délai de recours contentieux à l'égard des tiers, ces délais ont ainsi commencé à courir respectivement le 11 mars 2014 pour le permis de construire initial, et le 30 juin 2014 pour le permis de construire modificatif. Ainsi, le recours gracieux présenté par M. et Mme B... auprès du maire de Varengeville-sur-Mer le 21 janvier 2015, soit postérieurement à l'expiration de ces délais de recours, n'a pu avoir pour effet de les proroger. Il s'ensuit que les demandes présentées devant le tribunal administratif de Rouen, tendant à l'annulation du permis de construire initial et du permis de construire modificatif, enregistrées le 10 avril 2015, étaient tardives, et par suite irrecevables, et que la demande tendant à l'annulation de la décision rejetant le recours formé tardivement contre ces arrêtés, présentant ainsi le caractère d'une décision purement confirmative, était également irrecevable.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... et la commune de Varengeville-sur-Mer sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a écarté leur fin de non-recevoir tirée de la tardiveté des demandes et annulé le permis de construire initial, le permis de construire modificatif ainsi que la décision rejetant le recours gracieux dirigé à leur encontre.

Sur les conclusions présentées par M. et Mme C... sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

12. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme que M. et Mme C... ont entendu invoquer : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel ".

13. Il ressort des pièces du dossier que la maison, propriété des époux B..., est située à proximité immédiate du terrain d'assiette de la construction autorisée par le permis de construire en litige. Eu égard à la configuration des lieux, la maison à construire est susceptible d'avoir pour effet de diminuer l'ensoleillement et la luminosité de la maison des époux B.... Ni la circonstance que les demandes étaient tardives ni celle que les époux B... ne résident pas habituellement dans cette maison ne caractérisent la mise en oeuvre par les époux B... de leur droit de former un recours dans des conditions traduisant de leur part un comportement abusif. Par suite, les conclusions par lesquelles les époux C... demandent que les époux B... soient condamnés à leur verser une somme d'argent à titre de dommages et intérêts, qui en outre n'ont pas été présentées par un mémoire distinct, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... les sommes réclamées par la commune de Varengeville-sur-Mer et par M. et Mme C... au titre des frais liés au litige.

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Varengeville-sur-Mer et de M. et Mme C..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... réclament au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 8 juin 2017 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Rouen et leurs conclusions présentées devant la cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme C... sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. et Mme C... et par la commune de Varengeville-sur-Mer au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F... C..., à la commune de Varengeville-sur-Mer, et à M. et Mme A... B....

N°17DA01402 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17DA01402
Date de la décision : 17/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Délais de recours.


Composition du Tribunal
Président : M. Boulanger
Rapporteur ?: M. Jimmy Robbe
Rapporteur public ?: M. Minet
Avocat(s) : CABINET DE CHAUVERON VALLERY-RADOT LECOMTE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-09-17;17da01402 ?
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