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14/11/2019 | FRANCE | N°17DA01457

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 14 novembre 2019, 17DA01457


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Unilabs Bioct a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2014 du secrétaire général de la préfecture de l'Aisne portant rejet, d'une part, de sa demande d'autorisation d'acquisition de la totalité des actions de la société d'exercice libéral en commandite par actions (SELCA) Laboratoire d'analyses médicales Roualet, et, d'autre part, de sa demande d'autorisation de fusion par transmission universelle du p

atrimoine de cette société à son profit.

Par un jugement n° 1500494 du 18 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Unilabs Bioct a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2014 du secrétaire général de la préfecture de l'Aisne portant rejet, d'une part, de sa demande d'autorisation d'acquisition de la totalité des actions de la société d'exercice libéral en commandite par actions (SELCA) Laboratoire d'analyses médicales Roualet, et, d'autre part, de sa demande d'autorisation de fusion par transmission universelle du patrimoine de cette société à son profit.

Par un jugement n° 1500494 du 18 mai 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 juillet 2017 et 9 mars 2018, la SELAS Unilabs Bioct, représentée par Maîtres Patrice Frovo et Adrienne Ducos, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2014 du secrétaire général de la préfecture de l'Aisne ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ;

- la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013, notamment son article 10 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la SELAS Unilabs Bioct.

Considérant ce qui suit :

1. Par un contrat portant cession des titres en date du 28 novembre 2013, la SELCA Laboratoire d'analyses médicales Roualet a projeté de céder la pleine propriété de l'intégralité des titres concourant à la formation de son capital social à la SELAS Unilabs Bioct, sous la condition suspensive de l'obtention d'une autorisation de l'agence régionale de santé de Picardie. Par un arrêté du 28 octobre 2014, le secrétaire général de la préfecture de l'Aisne a rejeté, d'une part, la demande de la SELAS Unilabs Bioct d'autorisation d'acquisition de la totalité des actions de la SELCA Laboratoire d'analyses médicales Roualet, et, d'autre part, sa demande d'autorisation de fusion par transmission universelle du patrimoine de cette société à son profit. Par un jugement du 18 mai 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de la SELAS Unilabs Bioct tendant à l'annulation de cet arrêté. La SELAS Unilabs Bioct interjette régulièrement appel de ce jugement.

Sur la légalité de l'arrêté du 28 octobre 2014 :

2. Aux termes de l'article L. 6223-1 du code de la santé publique : " un laboratoire de biologie médicale privé est exploité en nom propre, ou sous la forme : (...) 3° D'une société d'exercice libéral régie par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales (...) ". Aux termes de l'article 10 de la loi du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale : " I. Plus de la moitié du capital social et des droits de vote d'une société d'exercice libéral de biologistes médicaux doit être détenue, directement ou par l'intermédiaire des sociétés mentionnées au 4° de l'article 5 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales, par des biologistes médicaux en exercice au sein de la société (...) ". Aux termes de l'article L. 6223-8 du code de la santé publique, créé par l'article 10 de la loi du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale : " I. - Le premier alinéa de l'article 5-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales n'est pas applicable aux sociétés d'exercice libéral de biologistes médicaux. II. - Les sociétés d'exercice libéral de biologistes médicaux créées antérieurement à la date de promulgation de la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale et qui, à cette date, ne respectent pas le I du présent article ou le I de l'article 10 de la même loi conservent la faculté de bénéficier de la dérogation prévue à l'article 5-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 précitée. (...) ".

3. Aux termes de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales dans sa rédaction alors applicable : " Plus de la moitié du capital social et des droits de vote doit être détenue, directement ou par l'intermédiaire des sociétés mentionnées au 4° ci-dessous, par des professionnels en exercice au sein de la société (...). Dans l'hypothèse où l'une des conditions visées au présent article viendrait à ne plus être remplie, la société dispose d'un délai d'un an pour se mettre en conformité avec les dispositions de la présente loi (...) ". Aux termes de l'article 5-1 de la même loi alors applicable : " Par dérogation au premier alinéa de l'article 5, plus de la moitié du capital social des sociétés d'exercice libéral peut aussi être détenue par des personnes physiques ou morales exerçant la profession constituant l'objet social ou par des sociétés de participations financières de professions libérales régies par le titre IV de la présente loi (...) ".

4. Il résulte des dispositions combinées précitées qu'un laboratoire de biologie médicale ne peut être régulièrement autorisé à fonctionner qu'à la condition que plus de la moitié de son capital social et de ses droits de vote soit détenue par des biologistes en exercice en son sein, sauf si, à la date de l'entrée en vigueur de la loi du 30 mai 2013, il ne remplissait pas la seule condition tenant à la détention de la majorité du capital social.

5. En l'espèce, il est constant que la SELCA Laboratoire d'analyses médicales Roualet a été constituée antérieurement à la promulgation de la loi du 30 mai 2013 et conformément aux dispositions de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990 imposant la détention de la majorité du capital par des professionnels en exercice au sein de la société. Par suite, cette société relevait des dispositions de cet article, et non de celles de l'article 5-1 de la même loi autorisant la détention de plus de la moitié du capital social par des personnes physiques ou morales exerçant la profession constituant l'objet social non pas au sein de la société mais en dehors de celle-ci. Par ailleurs, il résulte des dispositions précitées du I de l'article L. 6223-8 que les dispositions de l'article 5-1 ne sont pas applicables aux sociétés relevant de l'article 5, constituées préalablement à la promulgation de la loi du 30 mai 2013. Si, par suite, la SELAS Unilabs Bioct pouvait acquérir une partie des parts sociales de la SELCA Laboratoire d'analyses médicales Roualet, elle ne pouvait légalement en acquérir la totalité ou la majorité, ni à la date de la décision attaquée, ni à celle du contrat de cession, postérieur à l'entrée en vigueur de la loi du 30 mai 2013.

6. Aux termes du neuvième alinéa de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990 précitée dans sa rédaction alors applicable : " Dans l'hypothèse où l'une des conditions visées au présent article viendrait à ne plus être remplie, la société dispose d'un délai d'un an pour se mettre en conformité avec les dispositions de la présente loi (...) ".

7. Si ces dispositions autorisent une société d'exercice libéral dont la composition du capital viendrait à méconnaître les conditions posées par les alinéas précédents de l'article en cause à régulariser sa situation dans un délai d'un an, elles n'ont ni pour objet, ni pour effet d'autoriser l'acquisition par une société de la totalité des parts sociales d'une société dont le capital est composé conformément à ces alinéas, sauf à contourner l'interdiction de détention majoritaire du capital d'une telle société par une autre société posée au premier alinéa de cet article. La circonstance que cette acquisition serait immédiatement suivie d'une transmission universelle du patrimoine de la société absorbée est à cet égard sans incidence, dès lors que cette fusion ne pourrait en toute hypothèse intervenir que postérieurement à l'acquisition prohibée des parts sociales.

8. Enfin, la circonstance, à la supposer établie, que des opérations de cessions de parts sociales similaires à celle projetée par la SELAS requérante aient été préalablement autorisées par les autorités administratives est sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux.

9. Il résulte de ce qui précède que la SELAS requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2014. Il y a par suite lieu de rejeter sa requête, ensemble les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont elle est assortie.

Sur les conclusions présentées par la ministre des solidarités et de la santé :

10. Il n'appartient pas au juge administratif de constater la nullité pour illicéité de son objet et atteinte à l'ordre public économique d'un contrat de droit privé. Par suite, les conclusions de la ministre des solidarités et de la santé tendant à ce que la cour constate la nullité du contrat de cession des titres de la SELCA Laboratoire d'analyses médicales Roualet au profit de la SELAS Unilabs Bioct doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SELAS Unilabs Bioct est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la ministre de la santé et des solidarités tendant à ce que le contrat de cession des titres de la SELCA Laboratoire d'analyses médicales Roualet au profit de la SELAS Unilabs Bioct soit déclaré nul sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SELAS Unilabs Bioct et à la ministre des solidarités et de la santé.

Copie sera adressée au préfet de l'Aisne et à l'agence régionale de santé des Hauts-de-France.

2

N°17DA01457


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17DA01457
Date de la décision : 14/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-08-01 Santé publique. Divers établissements à caractère sanitaire. Laboratoires d'analyses de biologie médicale.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : SELARL SEGIF D'ASTORG FROVO GONTHIER ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-11-14;17da01457 ?
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