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12/12/2019 | FRANCE | N°18DA01630

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 12 décembre 2019, 18DA01630


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Finalys Environnement a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Oresmaux à lui verser la somme de 4 904 euros toutes taxes comprises en exécution du marché relatif à la restructuration et la gestion du cimetière communal conclu avec cette commune le 23 juillet 2010, assortie des intérêts moratoires. Par des conclusions reconventionnelles, la commune d'Oresmaux a demandé au tribunal administratif d'Amiens la condamnation de la société Finalys Environnement à lui

verser la somme de 15 079 euros en remboursement du prix des prestations inu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Finalys Environnement a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune d'Oresmaux à lui verser la somme de 4 904 euros toutes taxes comprises en exécution du marché relatif à la restructuration et la gestion du cimetière communal conclu avec cette commune le 23 juillet 2010, assortie des intérêts moratoires. Par des conclusions reconventionnelles, la commune d'Oresmaux a demandé au tribunal administratif d'Amiens la condamnation de la société Finalys Environnement à lui verser la somme de 15 079 euros en remboursement du prix des prestations inutiles, la somme de 6 637 euros correspondant au surcoût des prestations de substitution, la somme de 5 600 euros en réparation de la perte de temps et de frais supplémentaires et celle de 31 353,33 euros correspondant à des pénalités de retard.

Par un jugement n° 1601455 du 1er juin 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de la société Finalys Environnement et les conclusions reconventionnelles de la commune d'Oresmaux.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 août 2018 et 1er avril 2019, la commune d'Oresmaux, représentée par Me A..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la société Finalys Environnement à lui verser la somme de 15 079 euros au titre des travaux inutiles, la somme de 21 642 euros au titre du supplément de prix pour reprise des travaux, la somme de 5 600 euros au titre de la perte de temps et frais supplémentaires, et la somme de 31 353,33 euros au titre des pénalités de retard ;

3°) de rejeter les conclusions d'appel incident présentées par la société Finalys Environnement ;

4°) de mettre à la charge de la société Finalys Environnement la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement du 23 juillet 2010, la commune d'Oresmaux a confié à la société Finalys Environnement un marché consistant en la restructuration et la gestion du cimetière communal. Le montant de ce marché s'élevait à 19 983 euros toutes taxes comprises. La société Finalys Environnement, après avoir adressé à la commune un mémoire en réclamation, a demandé au tribunal administratif d'Amiens de la condamner à lui verser la somme de 4 904 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires, correspondant au paiement de sa dernière facture adressée à la commune. A titre reconventionnel, la commune d'Oresmaux a demandé au tribunal administratif d'Amiens la condamnation de la société Finalys Environnement à lui verser la somme globale de 58 669,33 euros qu'elle estime lui être due en raison de la mauvaise exécution du marché. La commune d'Oresmaux relève appel du jugement du 1er juin 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. La société Finalys Environnement demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation de ce jugement en tant que les premiers juges n'ont pas fait droit à sa demande.

Sur l'appel principal de la commune d'Oresmaux :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

2. La commune d'Oresmaux soutient que les premiers juges ont soulevé d'office, sans en informer les parties, le moyen tiré de ce qu'aucune résiliation du marché n'a été prononcée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier de première instance, que si la commune indiquait avoir résilié le marché conclu avec la société Finalys Environnement, elle se référait pour l'établir à une lettre du 5 décembre 2015, laquelle n'avait pour objet que de mettre en demeure la société de se conformer à ses obligations contractuelles avant une possible résiliation. Contrairement à ce qu'allègue la commune, la société Finalys Environnement a fait valoir dans ses écritures, sans être alors contestée, qu'une telle lettre ne pouvait tenir lieu de résiliation du marché. Par suite, alors même que la commune d'Oresmaux établit désormais avoir résilié le marché en produisant, en cause d'appel, une lettre du 29 décembre 2015 par laquelle elle informe son co-contractant de la résiliation du marché aux torts du titulaire, le tribunal administratif n'a fait qu'exercer son office en retenant au vu de l'instruction que le marché n'était pas résilié. Par suite, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune irrégularité sur ce point.

En ce qui concerne l'indemnisation des préjudices subis par la commune d'Oresmaux :

3. La commune d'Oresmaux soutient, en premier lieu, avoir subi un préjudice en réglant inutilement à la société Finalys Environnement la somme de 15 079 euros correspondant aux deux factures établies en octobre et décembre 2011. Ces factures avaient pour objet, d'une part, le paiement de la mission " recensement complet, soutien administratif et juridique et logiciel " et, d'autre part, le paiement relatif à la mission " procédure de reprise ". Toutefois, si la commune d'Oresmaux établit en cause d'appel avoir eu recours au service d'une nouvelle société, il ne résulte pas de l'instruction que les travaux effectués par la société Finalys Environnement et réglés au titre de la première facture auraient été totalement inutiles. Il résulte ainsi du devis émis par cette nouvelle société qu'elle avait pour mission de contrôler la " cohérence des inhumés entre la base Finalys et le terrain ", de " saisir les inhumés en complément ", de contrôler également la " cohérence des concessions entre la base Finalys et les actes de concessions et l'ancien registre ". En revanche, il résulte de l'instruction et notamment de la mise en demeure en date du 5 décembre 2015 adressée par la commune à la société Finalys Environnement, que la procédure de reprise n'a pas été mise en oeuvre dans les formes prévues par le code général des collectivités territoriales et menée à son terme. Elle n'a, par conséquent, eu aucune utilité pour la commune, le nouveau prestataire ayant à nouveau dû assumer cette procédure, ainsi que cela ressort du devis signé le 7 mars 2016 par la commune. Dans ces conditions, la commune d'Oresmaux est seulement fondée à demander la condamnation de la société Finalys Environnement à lui verser la somme de 7 095 euros, correspondant à la facture émise le 19 décembre 2011 pour la " procédure de reprise " précédemment décrite.

4. La commune d'Oresmaux soutient ensuite avoir subi un préjudice du fait de la perte de temps, les travaux venant seulement de se terminer en février 2019, et des frais supplémentaires qu'elle a dû engager. Toutefois, la commune n'établit pas en quoi le délai avec lequel la procédure, qui a finalement été menée à son terme, lui aurait causé un préjudice. Ses allégations selon lesquelles elle a dû faire face au mécontentement de ses administrés ne sont pas établies par un unique courrier d'un administré adressé en décembre 2011 qui au surplus avait la qualité de conseiller municipal. Si la commune soutient avoir dû rédiger, imprimer et distribuer à nouveau des bulletins d'information auprès de ses administrés, il ne résulte pas des termes de la délibération du 15 décembre 2016 du conseil municipal de la commune d'Oresmaux que les diverses mesures de publicité diligentées préalablement à l'opération de reprise des concessions abandonnées, ou destinées à la régularisation de certaines situations aient été rendues nécessaires par des fautes contractuelles commises par la société Finalys Environnement. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que cette démarche de publicité aurait déjà été accomplie par la commune lorsqu'elle était encore liée contractuellement avec la société Finalys Environnement. Elle n'établit pas, dès lors, l'existence de son préjudice, ni le lien de causalité aves les fautes du titulaire du marché, qui ont conduit à la résiliation du marché. Par suite, les conclusions présentées par la commune d'Oresmaux tendant à ce que la société Finalys Environnement soit condamnée à lui verser une somme de 5 600 euros doivent également être rejetées.

5. La commune d'Oresmaux demande également à être indemnisée du surcoût engendré par les prestations de substitution assurées par le nouveau prestataire qu'elle a choisi et correspondant dans le dernier état de ses écritures à la somme de 21 642 euros. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 2, si la commune d'Oresmaux a résilié le marché aux torts de la société Finalys Environnement, elle n'invoque pour autant aucune stipulation contractuelle qui lui permettrait de faire procéder par une autre société à l'exécution des prestations aux frais et risques du titulaire. En outre, et en tout état de cause, le cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, auquel renvoie le marché, prévoit à son article 36 que si le pouvoir adjudicateur peut faire procéder par un tiers à l'exécution des prestations prévues par le marché aux frais et risques du titulaire en cas de résiliation pour faute de ce dernier, c'est à la condition que les documents particuliers du marché le prévoient et que la décision de résiliation le mentionne expressément. Or, il n'est pas contesté, ni même allégué, qu'aucune de ces conditions n'est remplie en l'espèce. Par suite, les conclusions de la commune d'Oresmaux tendant à la condamnation de la société Finalys Environnement au titre du surcoût engendré par les prestations de substitution doivent être rejetées.

En ce qui concerne les pénalités de retard :

6. Aux termes de l'article 4.1 du cahier des clauses administratives et techniques particulières du marché : " Pour chacune des étapes de la mission, l'entreprise devra s'en tenir au planning opérationnel joint au marché. / Prévision de démarrage de la mission : 1er juillet 2010 ". Aux termes de l'article 4.2 du même cahier : " Au cas où la mission ne serait pas terminée dans le délai fixé au marché (planning opérationnel), et sans mise en demeure préalable, sur simple confrontation de la date d'achèvement de la mission avec la date d'expiration du délai contractuel d'exécution, il sera appliqué une pénalité de 3/1000ème par jour calendaire de retard. Le montant global des pénalités ne sera pas plafonné. Ces pénalités s'appliquent à chacune des phases de la mission, définies au calendrier d'exécution. ".

7. Il résulte de ces stipulations que des pénalités de retard courent à compter de l'expiration du délai d'exécution prévu au planning opérationnel du marché qui, aux termes de l'article 3 du règlement de la consultation, devait être proposé par le candidat dans son offre. La commune ne produit toujours pas en cause d'appel le planning opérationnel du marché, qui permet seul de déterminer le délai d'exécution à l'issue duquel sont encourues les pénalités de retard prévues à l'article 4.2 du cahier des clauses administratives et techniques particulières. En outre, elle ne saurait utilement de prévaloir du délai de quatre années mentionné uniquement à l'article 2.5 du règlement de consultation, qui est dépourvu de valeur contractuelle. Par suite, ses conclusions tendant au paiement des pénalités de retard doivent être rejetées.

Sur l'appel incident de la société Finalys Environnement :

8. Aux termes de l'article 3.1.2 du cahier des clauses administratives et techniques particulières du marché en litige : " /.../ Les règlements seront effectués en fonction de l'avancement de la mission. Les prestations seront réglées en totalité à l'achèvement de chacune des étapes de la mission ".

9. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 14 juin 2012, reçu le lendemain par la société Finalys Environnement, la commune d'Oresmaux a contesté la complète exécution des prestations de récolement des concessions. Il ressort des termes de cette lettre que la commune a constaté, notamment, que dans le recensement établi par le titulaire du marché, plusieurs concessions funéraires sont manquantes, des emplacements du cimetière, mentionnés comme libres, font l'objet d'une concession perpétuelle et que des recherches demandées concernant des concessions n'ont pas été effectuées. En cause d'appel, la commune a d'ailleurs produit plusieurs illustrations de la mauvaise exécution des prestations. La société requérante n'a apporté aucune réponse à ce courrier du 14 juin 2012, ni même à la mise en demeure que lui a ensuite adressée la commune, par lettre du 5 décembre 2015. La société Finalys Environnement n'apporte ainsi aucun élément probant tendant à démontrer que ces manquements qui lui sont reprochés résulteraient uniquement du caractère incomplet des documents transmis par la commune. La seule circonstance que la commune ait attendu le mois de décembre 2015 pour mettre en demeure la société Finalys Environnement de respecter ses obligations contractuelles n'est pas de nature à remettre en cause la réalité et l'importance des manquements constatés. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à nouveau en appel par la commune d'Oresmaux, la société Finalys Environnement n'est pas fondée, par la voie de l'appel incident, à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant au paiement de la somme de 4 904 euros.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune d'Oresmaux est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Finalys Environnement à lui verser la somme de 7 095 euros correspondant à la facture du 19 décembre 2011. La société Finalys Environnement n'est pas fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Oresmaux, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Finalys Environnement demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Finalys Environnement le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune d'Oresmaux au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 1er juin 2018 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions reconventionnelles de la commune d'Oresmaux.

Article 2 : La société Finalys Environnement est condamnée à verser à la commune d'Oresmaux la somme de 7 095 euros.

Article 3 : La société Finalys Environnement versera à la commune d'Oresmaux une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune d'Oresmaux est rejeté.

Article 5 : Les conclusions d'appel incident présentées par la société Finalys Environnement ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Oresmaux et à la société Finalys Environnement.

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N°18DA01630

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01630
Date de la décision : 12/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : LEROY-DUPREUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-12-12;18da01630 ?
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