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06/02/2020 | FRANCE | N°18DA00311

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 février 2020, 18DA00311


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cari a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat à lui verser la somme de 168 075,76 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires au taux légal, au titre du règlement du solde du marché public de travaux qu'elle a conclu le 4 octobre 2010 avec cet office public, pour la construction de soixante-dix logements collectifs à Avion.

Par un jugement n° 1404915 du 6 décembre 2017 le tribunal administratif de Li

lle après avoir arrêté le décompte général et définitif du marché public de trav...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cari a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat à lui verser la somme de 168 075,76 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires au taux légal, au titre du règlement du solde du marché public de travaux qu'elle a conclu le 4 octobre 2010 avec cet office public, pour la construction de soixante-dix logements collectifs à Avion.

Par un jugement n° 1404915 du 6 décembre 2017 le tribunal administratif de Lille après avoir arrêté le décompte général et définitif du marché public de travaux conclu le 4 octobre 2010 entre la société Cari et l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat au montant de 3 153 364,09 euros, toutes taxes comprises, a mis à la charge de la société Cari une somme de 79 498,62 euros au profit de l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat, pour solde de tout compte au titre du règlement du marché, ainsi qu'une somme de 1 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Enfin il a rejeté le surplus des conclusions des parties

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 9 février 2018, 16 juillet 2018,

le 4 novembre 2019 et le 21 janvier 2020, la société Cari, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser une somme de 88 200 euros au titre des pénalités pour la non transmission du dossier des ouvrages exécutés ;

2°) arrêter le décompte général et définitif du marché public de travaux conclu, le 4 octobre 2010, entre la société Cari et l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat au montant de 3 230 395,40 euros

3°) dire que la société Cari versera à l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat la somme de 2 467,48 euros toutes taxes comprises pour solde de tout compte, au titre du règlement du marché ;

4°) déclarer irrecevable l'appel incident de l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat ;

5°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 et notamment ses articles 10 et 11 repris dans le code de la commande publique ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;

- et les observations de Me B..., représentant la société Cari, et de Me C..., représentant l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat.

Une note en délibéré présentée par Me C... pour l'office public de l'habitat Pas-de-Calais habitat a été enregistrée le 27 janvier 2020.

Considérant ce qui suit :

1. L'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat a confié à la société Cari le lot " gros œuvre " du marché public de travaux de construction de soixante-dix logements collectifs à Avion pour un montant global et forfaitaire de 2 630 000 euros, hors taxes, par un acte d'engagement du 4 octobre 2010. La réception des travaux du groupement a été a prononcée avec réserves à la date du 17 décembre 2012. La société Cari a remis au maître d'œuvre son projet de décompte final le 17 janvier 2014 et a ensuite mis en demeure le maître de l'ouvrage d'établir le décompte général du marché, par un courrier du 27 mars 2014, auquel l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat n'a pas répondu. La société Cari relève appel du jugement du 6 décembre 2017 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il l'a condamnée à verser une somme de 88 200 euros au titre des pénalités pour la non transmission du dossier des ouvrages exécutés et d'arrêter le décompte général et définitif du marché à la somme de 3 230 395,40 euros. Par la voie de l'appel incident, l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat conclut à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté sa demande de condamnation de la société Cari à lui régler la somme de 23 377,42 euros au titre des retenues.

Sur l'appel principal de la société Cari :

2. D'une part aux termes de l'article 20.6 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux dans sa rédaction issue du décret du 21 janvier 1976 : " Si le marché prévoit des retenues provisoires pour retard dans la remise des documents conformes à l'exécution, dans les conditions précisées à l'article 40, ces retenues sont opérées sur le dernier décompte mensuel. Elles sont appliquées sans mise en demeure préalable et sont payées après la remise complète des documents. " et aux termes de l'article 40 du même cahier : " Documents fournis après exécution Sauf stipulation différente du marché et indépendamment des documents qu'il est tenu de fournir avant ou pendant l'exécution des travaux en application du I de l'article 29, L'entrepreneur remet au maître d'œuvre, en trois exemplaires dont un sur calque : - au plus tard lorsqu'il demande la réception : les notices de fonctionnement et d'entretien des ouvrages établies conformément aux prescriptions et recommandations des normes françaises en vigueur ; - dans les deux mois suivant la réception : les plans et autres documents conformes à l'exécution, pliés au format normalisé A4. ".

3. D'autre part aux termes de l'article 9.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) applicable au marché en litige : " L'entrepreneur remettra au maître d'œuvre, en deux exemplaires, et au coordinateur sécurité santé, en un exemplaire, au plus tard le jour de la réception : (...) b) les plans et autres documents conformes à l'exécution et notamment en ce qui concerne les ouvrages de : fondation, ferraillage des ouvrages béton, détails de maçonneries détails des liaisons, assainissement, menuiseries, charpente, étanchéité, plomberie, sanitaire, chauffage, V.M.C., électricité, téléphone, télévision, gaz, ascenseur, tous ouvrages spéciaux, etc. Il est précisé qu'en cas de retard dans la production de ces documents, la pénalité prévue à l'article 4.3.3 du présent C.C.A.P. sera opérée sur les sommes dues à l'entrepreneur. Elles seront appliquées sans mise en demeure préalable et seront payées après remise complète des documents. ". Aux termes de l'article 4.3.3 du même cahier intitulé " autres pénalités " : " Retards dans la remise des plans et documents visés à l'article 9 du présent CCAP ", " 100 euros HT / jour à compter de la date d'effet de la réception des travaux appliqué sur le dernier décompte mensuel dans les conditions stipulées au 20.0 du CCAG ".

4. Il résulte de l'instruction que l'acte d'engagement a été signé par la société Cari le 2 décembre 2009, à la suite d'un avis d'appel d'offres nécessairement envoyé à la publication antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du nouveau cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics et travaux, intervenue le 1er janvier 2010. Dès lors, le marché en litige est régi par le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux dans sa rédaction issue du décret du 21 janvier 1976.

5. Ensuite, aux termes de l'article 10 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'œuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé alors applicable repris dans les mêmes termes à l'article R2431-17 du code de la commande publique : " L'ordonnancement, la coordination et le pilotage du chantier ont respectivement pour objet : 1° D'analyser les tâches élémentaires portant sur les études d'exécution et les travaux, de déterminer leurs enchaînements ainsi que leur chemin critique par des documents graphiques ; 2° D'harmoniser dans le temps et dans l'espace les actions des différents intervenants au stade des travaux ; 3° Au stade des travaux et jusqu'à la levée des réserves dans les délais impartis dans les marchés publics de travaux, de mettre en application les diverses mesures d'organisation arrêtées au titre de l'ordonnancement et de la coordination. " tandis qu'aux termes de l'article 11 du décret précité alors applicable, repris dans les mêmes termes à l'article R2431-18 du code de la commande publique : " L'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception [AOR] et pendant la période de garantie de parfait achèvement a pour objet : 1°D'organiser les opérations préalables à la réception des travaux ; 2°D'assurer le suivi des réserves formulées lors de la réception des travaux jusqu'à leur levée ; 3°De procéder à l'examen des désordres signalés par le maître de l'ouvrage ;4° De constituer le dossier des ouvrages exécutés nécessaires à leur exploitation.".

6. L'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat, maître d'ouvrage, a confié la maîtrise d'œuvre des travaux au groupement conjoint constitué du cabinet Métropole architecture paysage (MAP) et de la SNC-Lavalain SAS, le cabinet Métropole architecture paysage était désigné comme mandataire, conformément à l'article 1er du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché tandis que la mission " ordonnancement - pilotage - coordination " (OPC) était attribuée à la société " cabinet Plasson ", par acte spécifique du 16 novembre 2010. Ainsi, contrairement à ce que soutient la société Cari, qui conteste uniquement le principe d'avoir à verser des pénalités, les missions d'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) que le " cabinet Plasson " s'était vu exclusivement confier, par acte spécifique, étaient clairement identifiées et distinctes des autres missions de maîtrise d'œuvre, notamment de celles relevant de l'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception (AOR), au nombre desquelles figure la constitution du dossier des ouvrages exécutés nécessaires à leur exploitation.

7. Dès lors, conformément aux stipulation de l'article 9.3 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché en litige, il appartenait à la société Cari de remettre le dossier des ouvrages exécutés non seulement au maître d'œuvre, en deux exemplaires, mais aussi au coordinateur sécurité santé, en un exemplaire. Il résulte également des stipulations du cahier précité que le dossier des ouvrages exécutés devait être remis sans délai au maître d'œuvre et au coordinateur sécurité santé, à compter de la date d'effet de la réception des travaux, et aussi des stipulations de l'article 4.3.3. du même cahier, qu'en cas de retard dans la remise du dossier, une pénalité de 100 euros était prévue par jour de retard, sans que celle-ci, contrairement à ce que soutient la société Cari, présente un caractère provisoire. La réception des travaux a eu lieu le 17 décembre 2012, ce dont attestent les signatures des représentants du maître d'ouvrage, du maître d'œuvre et de la société Cari, sans qu'il puisse être sérieusement admis que celles-ci seraient antidatées comme le soutient la société Cari. Cette réception a en outre été prononcée sous les réserves, en particulier, de la fourniture du dossier des ouvrages exécutés.

8. Enfin, le dossier des ouvrages exécutés a été remis par la société Cari au cabinet Plasson, seulement en charge de la mission " ordonnancement - pilotage - coordination " comme il a été dit, le 23 mars 2013. Aussi, la société Cari, compte tenu de l'absence d'ambiguïté de ses engagements contractuels rappelés aux points précédents, n'établit pas que le dossier des ouvrages exécutés a bien été adressé, conformément aux pièces du marché, au maître d'œuvre et au coordinateur sécurité santé, qui n'en ont jamais eu communication. Au regard de ses engagements contractuels, la société Cari ne peut se prévaloir de la seule circonstance que le cabinet Plasson l'avait mise en demeure de lui remettre le dossier des ouvrages exécutés, par courrier du 11 mars 2013. Le cabinet Plasson a d'ailleurs confirmé à la société Cari, par courrier du 22 mai 2018, qu'il avait bien reçu ces documents, tout en lui rappelant qu'il n'est pas le maître d'œuvre de l'opération et qu'il n'avait qu'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination, et que le maître d'œuvre est la société Métropole architecture paysage. Par suite, en l'absence de remise au cabinet Métropole architecture paysage (MAP) et au coordinateur sécurité santé, du dossier des ouvrages exécutés, l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat a pu faire application des pénalités pour retards dans la remise des plans et documents, visés à l'article 9.3 du cahier des clauses administratives particulières.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Cari n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 6 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille l'a condamnée à verser une somme de 88 200 euros au titre des pénalités pour la non transmission du dossier des ouvrages exécutés.

Sur l'appel incident de l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat et le bien-fondé des retenues de la somme de 28 377,42 euros :

10. L'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat, pour demander que soit portée à son crédit la somme de 28 377,42 euros, toutes taxes comprises, au titre des retenues concernant, sans autre précision, un " Massif grue ", du bordurage, le nettoyage, le " compte inter-entreprises " et la reprise " espaces verts ", verse encore au dossier, comme il l'a fait en première instance, les situations mensuelles n°s 19 et 20, émises par le maître d'œuvre au cours du marché, mais aussi, en cause d'appel, une lettre de la société MAP, maître d'œuvre, du 27 juillet 2016, postérieure de près de quatre années à la réception des travaux, faisant apparaître une erreur de montant et une somme comptée deux fois, dans deux rubriques différentes. Compte tenu de ces erreurs et de l'absence de production des ordres de services mentionnant les points en question, à reprendre et relevés par le maître d'œuvre, ou de tout compte-rendu de chantier entre le maître d'œuvre et les entreprises, notamment la société Cari, les prétentions de l'office ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Cari

Sur les frais liés au litige :

11. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

12. Les conclusions présentées sur ce fondement par la société Cari ne peuvent qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette même société, une somme au titre des frais exposés par l'office public de l'habitat et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Cari est rejetée.

Article 2 : L'appel incident et les conclusions de l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cari et à l'office public de l'habitat Pas-de-Calais Habitat.

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N°18DA00311


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA00311
Date de la décision : 06/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : DHONTE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-02-06;18da00311 ?
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