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12/03/2020 | FRANCE | N°19DA02777

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 12 mars 2020, 19DA02777


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. C... E... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Oise a rejeté sa demande d'autorisation de travail, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n°1902926 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Proc

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2019, M. B..., représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. C... E... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 26 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Oise a rejeté sa demande d'autorisation de travail, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n°1902926 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2019, M. B..., représenté par Me D... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 26 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou à défaut " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... E... B..., ressortissant algérien né le 26 novembre 1980, est entré en France le 14 juin 2013 sous couvert d'un visa de court séjour. Il s'est marié le 21 mai 2016 à une ressortissante française, dont il est séparé depuis 2017. Le 5 juin 2018, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 26 juillet 2019, le préfet de l'Oise a rejeté sa demande d'autorisation de travail, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. B... relève appel du jugement du 21 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration qui ne concernent pas les jugements mais certaines décisions administratives individuelles.

3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le jugement attaqué, qui a répondu de façon suffisamment précise à l'ensemble des moyens développés par M. B..., et notamment à celui tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté, n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés à l'appui de ces moyens. Par suite, le moyen tiré ce que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En vertu de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement. L'arrêté en litige vise les textes dont il fait application et mentionne les faits qui en constituent le fondement. Ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, le préfet de l'Oise a suffisamment motivé son arrêté. Par suite, le moyen doit être écarté.

5. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier et des motifs de l'arrêté en litige que le préfet de l'Oise n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de la situation de M. B..., ni qu'il se serait estimé lié par l'avis du directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France.

6. Aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien : " : " (...) / b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention "salarié" : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Il résulte de ces stipulations que la délivrance du certificat de résidence d'un an portant la mention " salarié " est notamment subordonnée à la possession d'un contrat de travail visé par les services du ministère chargé de l'emploi. En vertu de l'article L. 5221-2 du code du travail, ce visa peut aussi prendre la forme d'une autorisation de travail.

7. Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : ; 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; (...) ; 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; (...) ".

8. M. B... se prévaut d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Sodef en tant qu'employé polyvalent dans le domaine de la restauration rapide. Il ressort des pièces du dossier que ce contrat a été soumis au directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi des Hauts-de-France, qui a émis, le 21 juin 2015, un avis défavorable , à la délivrance d'une autorisation de travail, au motif, d'une part, que M. B... ne justifiait que d'une expérience professionnelle de trois mois en restauration rapide et qu'il ne possédait aucun diplôme en ce domaine et, d'autre part, que son employeur ne respectait pas la réglementation du travail, notamment en matière de tenue de livre et registres obligatoires. Ainsi, alors même que le motif tiré de l'absence d'adéquation entre l'expérience de M. B... et les caractéristiques de l'emploi serait erroné, il ressort des motifs de l'arrêté que le préfet a également tenu compte du fait que l'intéressé ne justifiait pas d'un savoir-faire rare sur le marché du travail, stratégique pour l'entreprise, qu'il maitriserait à la différence des autres demandeurs d'emploi. Ce motif n'est pas contesté par le requérant, pas plus que celui tiré du non-respect par la société Sodef de la législation relative au travail. Par suite, le préfet de l'Oise n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant l'autorisation de travail sollicitée. Il suit de là que M. B..., qui n'était en possession ni d'un contrat de travail visé par le service compétent, ni d'une autorisation de travail, ne pouvait prétendre à la délivrance du certificat de résidence d'un an portant la mention " salarié " prévu par les stipulations précitées de l'article 7 de l'accord franco-algérien.

9. Si l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif aux conditions dans lesquelles les ressortissants étrangers peuvent bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour, ne s'applique pas aux ressortissants algériens, dont la situation est régie de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et si cet accord ne prévoit pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

10. M. B... fait valoir être entré régulièrement en France en 2013, et avoir occupé plusieurs emplois entre le 10 avril 2017 et le 31 juin 2018 et disposer depuis novembre 2018 d'un emploi stable en tant qu'employé polyvalent. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Oise ait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose en ne procédant pas à la régularisation de la situation de M. B....

11. M. B... est séparé de son épouse à la date de l'arrêté contesté. Il est aussi sans enfant à charge. Il n'établit pas non plus, ni même n'allègue être dépourvu d'attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans. Il ne justifie de surcroît de l'intensité des liens personnels qu'il prétend avoir noué par quelques attestations de proches, peu circonstanciées. Quand bien même il a dû se réorienter professionnellement, en raison d'un accident du travail survenu le 16 mai 2018, il ne justifie pas pour autant d'une insertion professionnelle notable, alors qu'il vit en France depuis 2013. Par suite, le préfet de l'Oise n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B... doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Oise.

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N°19DA02777

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02777
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MESTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-03-12;19da02777 ?
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