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02/04/2020 | FRANCE | N°19DA01767

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 02 avril 2020, 19DA01767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la d

ate de notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1900204 du 8 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la date de notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1900204 du 8 juillet 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2019, M. A... B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions du 2°bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cet arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au regard des attaches qu'il a constituées en France et de son insertion sociale et professionnelle.

Par un mémoire enregistré le 20 septembre 2019, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. A... B... n'est fondé.

Par une ordonnance du 10 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Binand, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant marocain né le 2 décembre 1999, est entré sur le territoire français le 3 mars 2015, selon les déclarations, et a été pris en charge, sur décision judiciaire, par les services de l'aide sociale à l'enfance du département du Nord jusqu'à sa majorité. Par un arrêté du 13 décembre 2018, le préfet du Nord a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le Maroc ou tout pays dans lequel il serait légalement admissible comme pays de renvoi. M. A... B... relève appel du jugement du 8 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit: / (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L.311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée (...) ".

3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention "vie privée et familiale", sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

4. Pour rejeter la demande de délivrance de titre de séjour que M. A... B... a présentée dans l'année de son 18ème anniversaire, le préfet du Nord, après avoir relevé que l'intéressé avait été confié à l'aide sociale à l'enfance à l'âge de quinze ans et quatre mois, s'est fondé sur les motifs tirés, d'une part, de l'absence d'assiduité de l'intéressé dans le suivi de sa formation du fait en particulier de ses nombreuses absences injustifiées durant les deux dernières années scolaires, d'autre part, de l'absence d'isolement au Maroc, au regard, notamment des contacts que M. A... B... a conservé avec sa mère. Toutefois, en se fondant sur ces seuls motifs pour refuser de faire application des dispositions citées au point 2 du présent arrêt, le préfet du Nord, du fait qu'il s'est abstenu de procéder à un examen global de la situation de M. A... B... au regard de l'avis émis par la structure d'accueil sur son insertion dans la société française, a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2018 du préfet du Nord.

6. L'annulation par le présent arrêt de cet arrêté, eu égard au motif sur lequel elle repose, implique seulement que le préfet du Nord procède au réexamen de la demande de titre de séjour présentée par M. A... B..., au vu de sa situation globale appréciée conformément aux principes rappelés au point 3 du présent arrêt, et lui délivre, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Nord d'y procéder, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement du 8 juillet 2019 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 13 décembre 2018 du préfet du Nord doivent être annulés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... B... d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 8 juillet 2019 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 13 décembre 2018 du préfet du Nord sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de la demande de titre de séjour présentée par M. A... B... et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à M. A... B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A... B... devant le tribunal administratif de Lille et le surplus des conclusions de sa requête devant la Cour sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., au préfet du Nord et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience publique du 5 mars 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Christophe Binand, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2020.

Le président de chambre,

Signé : C. HEU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Nathalie Roméro

2

N°19DA01767


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01767
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : RAMAS-MUHLBACH

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-04-02;19da01767 ?
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