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09/06/2020 | FRANCE | N°19DA00301

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 09 juin 2020, 19DA00301


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon à lui verser une somme de 501 404,70 euros en paiement de titres de recettes émis entre le 30 août 2009 et le 31 décembre 2012.

Par un jugement n° 1602139 du 11 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique

, enregistrés les 6 février 2019 et 6 janvier 2020, le centre hospitalier intercommunal de Com...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon à lui verser une somme de 501 404,70 euros en paiement de titres de recettes émis entre le 30 août 2009 et le 31 décembre 2012.

Par un jugement n° 1602139 du 11 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 février 2019 et 6 janvier 2020, le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon, représenté par Me B... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de première instance du service département d'incendie et de secours de l'Oise ;

2°) de mettre à sa charge une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- l'arrêté du 24 avril 2009 relatif à la mise en oeuvre du référentiel portant sur l'organisation du secours à personne et de l'aide médicale urgente ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me A... C..., substituant Me B... D..., représentant le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon interjette appel du jugement du 11 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens l'a condamné à verser au service départemental d'incendie et de secours de l'Oise une somme de 501 404,70 euros correspondant au coût des interventions réalisées par cet établissement public au profit des services mobiles d'urgence et de réanimation rattachés aux centres hospitaliers de Compiègne et Noyon avant leur fusion en 2013.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales : " Les services d'incendie et de secours (...) concourent, avec les autres services et professionnels concernés, (...) aux secours d'urgence. / Dans le cadre de leurs compétences, ils exercent les missions suivantes : (...) / 4° Les secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation ". L'article L. 742-11 du code de la sécurité intérieure prévoit que " les dépenses directement imputables aux opérations de secours au sens des dispositions de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales sont prises en charge par le service départemental d'incendie et de secours (...) ". L'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales dispose que " le service départemental d'incendie et de secours n'est tenu de procéder qu'aux seules interventions qui se rattachent directement à ses missions de service public définies à l'article L. 1424-2. / S'il a procédé à des interventions ne se rattachant pas directement à l'exercice de ses missions, il peut demander aux personnes bénéficiaires une participation aux frais, dans les conditions déterminées par délibération du conseil d'administration. / Les interventions effectuées par les services d'incendie et de secours à la demande de la régulation médicale du centre 15, lorsque celle-ci constate le défaut de disponibilité des transporteurs sanitaires privés, et qui ne relèvent pas de l'article L. 1424-2, font l'objet d'une prise en charge financière par les établissements de santé, sièges des services d'aide médicale d'urgence. / Les conditions de cette prise en charge sont fixées par une convention entre le service départemental d'incendie et de secours et l'hôpital siège du service d'aide médicale d'urgence, selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de la sécurité sociale (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 6311-1 du code de la santé publique : " L'aide médicale urgente a pour objet, en relation notamment avec les dispositifs communaux et départementaux d'organisation des secours, de faire assurer aux malades, blessés et parturientes, en quelque endroit qu'ils se trouvent, les soins d'urgence appropriés à leur état " et l'article L. 6311-2 du même code prévoit qu'" (...) un centre de réception et de régulation des appels est installé dans les services d'aide médicale urgente (...) ". Aux termes de l'article R. 6123-15 du même code : " Dans le cadre de l'aide médicale urgente, la structure mobile d'urgence et de réanimation mentionnée à l'article R. 6123-1 a pour mission / : 1° D'assurer, en permanence, en tous lieux et prioritairement hors de l'établissement de santé auquel il est rattaché, la prise en charge d'un patient dont l'état requiert de façon urgente une prise en charge médicale et de réanimation, et, le cas échéant, et après régulation par le SAMU, le transport de ce patient vers un établissement de santé. / 2° D'assurer le transfert entre deux établissements de santé d'un patient nécessitant une prise en charge médicale pendant le trajet. / Pour l'exercice de ces missions, l'équipe d'intervention de la structure mobile d'urgence et de réanimation comprend un médecin. ". L'article R. 6123-16 du même code dispose que : " Les interventions des SMUR et celles des antennes de SMUR mentionnées à l'article R. 6123-5 sont déclenchées et coordonnées par le SAMU. / L'équipe de la structure mobile d'urgence et de réanimation informe à tout moment le SAMU du déroulement de l'intervention en cours. ". L'article D. 712-73 du même code, aujourd'hui repris à l'article D. 6124-12, permet aux services d'incendie et de secours de mettre des équipages et véhicules à disposition d'une structure mobile d'urgence et de réanimation dans le cadre, qui régit alors cette mise à disposition, d'une convention avec l'établissement de santé autorisé à disposer d'une telle structure. Il résulte enfin de l'article R. 6312-15 du même code que ces services, indépendamment de la conclusion d'une telle convention, peuvent être amenés à intervenir pour effectuer des transports sanitaires d'urgence faute de moyens de transport sanitaire.

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que les services départementaux d'incendie et de secours ne doivent supporter la charge que des interventions qui se rattachent directement aux missions de service public définies à l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales, au nombre desquelles figurent celles qui relèvent des secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes, y compris l'évacuation de ces personnes. Les interventions ne relevant pas directement de l'exercice de leurs missions de service public effectuées par les services départementaux d'incendie et de secours peuvent donner lieu à une participation aux frais des personnes qui en sont bénéficiaires, dont ces services déterminent eux-mêmes les conditions.

5. Il résulte également de ces dispositions qu'il incombe aux services d'aide médicale urgente de faire assurer aux malades, blessés et parturientes, en quelque endroit qu'ils se trouvent, les soins d'urgence appropriés à leur état et, à cette fin, au centre de réception et de régulation des appels, dit " centre 15 ", installé dans ces services, de déterminer et déclencher, dans le délai le plus rapide, la réponse la mieux adaptée à la nature des appels, le cas échéant en organisant un transport sanitaire d'urgence faisant appel à une entreprise privée de transport sanitaire ou, au besoin, aux services d'incendie et de secours. Les interventions ne relevant pas de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales qui sont effectuées par les services départementaux d'incendie et de secours à la demande du centre 15, lorsque celui-ci constate le défaut de disponibilité des transporteurs sanitaires privés, sont décidées, sous sa responsabilité, par le médecin régulateur du service d'aide médicale urgente, qui les a estimées médicalement justifiées compte tenu des informations dont il disposait sur l'état du patient. Elles font l'objet d'une prise en charge financière par l'établissement de santé siège des services d'aide médicale d'urgence, dans des conditions fixées par une convention -distincte de celle que prévoit l'article D. 6124-12 du code de la santé publique en cas de mise à disposition de certains moyens- conclue entre le service départemental d'incendie et de secours et l'établissement de santé et selon des modalités fixées par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de la sécurité sociale.

6. En l'espèce, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise et les centres hospitaliers de Compiègne et de Noyon, ont, par deux conventions en date respectivement des 11 septembre et 10 octobre 2003, défini les modalités de mise à disposition des moyens du service départemental d'incendie et de secours de l'Oise au profit des services mobiles d'urgence et de réanimation, conditionnant notamment le recours aux véhicules du service départemental d'incendie et de secours de l'Oise à la " carence " des services mobiles d'urgence et de réanimation. Ces conventions, fondées sur les dispositions de l'article R. 712-73 du code de la santé publique alors applicable, aujourd'hui reprises à l'article R. 6124-12 du même code, constituent le fondement légal autorisant le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise à facturer aux centres hospitaliers de Compiègne et de Noyon le coût desdites interventions. Elles n'ont été dénoncées par les centres hospitaliers de Compiègne et de Noyon qu'après le 31 décembre 2012.

7. Si le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon, venant aux droits des centres hospitaliers de Compiègne et de Noyon fusionnés en 2013, soutient qu'à la suite de l'arrêté du 24 août 2009 relatif à la mise en oeuvre du référentiel portant sur l'organisation du secours à personne et de l'aide médicale urgente, les services mobiles d'urgence et de réanimation des deux centres hospitaliers ont été " autonomisés " et que, par suite, les interventions du service départemental d'incendie et de secours de l'Oise après l'entrée en vigueur de cet arrêté ne pouvaient plus être fondées sur les conventions de 2003, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucune précision de nature à en apprécier le bien-fondé. Il ne précise notamment ni la date, ni les modalités de la prétendue " autonomisation " des services mobiles d'urgence et de réanimation des deux centres hospitaliers, et, en tout état de cause, n'apporte aucun élément de nature à établir que le recours aux véhicules du service départemental d'incendie et de secours de l'Oise ne pourrait plus être regardé, après l'arrêté du 24 août 2009, comme motivé par la " carence " de ces services mobiles. A cet égard, la circonstance, au demeurant non établie, selon laquelle l'agence régionale de l'hospitalisation de Picardie aurait cessé, à compter de l'année 2010, de verser aux centres hospitaliers les dotations devant permettre le paiement des titres de recettes émis par le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise sur le fondement des conventions de 2003, n'est pas de nature, à elle seule, à établir l'absence de carence de leurs services mobile d'urgence et de réanimation. En tout état de cause, il appartenait au centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon, d'établir, pour chacun d'entre eux, que les titres de recettes émis par le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise entre le 30 août 2009 et le 31 décembre 2012 ne correspondaient pas à des interventions fondées sur les stipulations des conventions signées en 2003. En s'abstenant, une nouvelle fois, d'apporter sur ce point les précisions nécessaires, le centre hospitalier ne met pas le juge en mesure d'apprécier la portée du moyen qu'il soulève.

8. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens l'a condamné à verser au service départemental d'incendie et de secours de l'Oise une somme de 501 404,70 euros en paiement des interventions réalisées par ce service entre le 30 août 2009 et le 31 décembre 2012. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier requérant une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours de l'Oise et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon est rejetée.

Article 2 : Le centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon versera au service départemental d'incendie et de secours de l'Oise une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon et au service départemental d'incendie et de secours de l'Oise.

2

N°19DA00301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00301
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Services publics locaux - Dispositions particulières - Services d'incendie et secours.

Santé publique - Protection générale de la santé publique - Transports sanitaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : HOLLEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-06-09;19da00301 ?
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