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17/07/2020 | FRANCE | N°19DA02072

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 17 juillet 2020, 19DA02072


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler pour excès de de pouvoir la décision du 3 janvier 2017 par laquelle la préfète de la Seine-Maritime a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait présentée afin que son fils, A... D..., soit autorisé à le rejoindre en France, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime d'autoriser le regroupement familial ainsi sollicité, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement

à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler pour excès de de pouvoir la décision du 3 janvier 2017 par laquelle la préfète de la Seine-Maritime a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait présentée afin que son fils, A... D..., soit autorisé à le rejoindre en France, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime d'autoriser le regroupement familial ainsi sollicité, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1701549 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 3 janvier 2017 de la préfète de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime d'autoriser le regroupement familial sollicité en faveur de son fils, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SELARL B... et Inquimbert de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Binand, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... C..., ressortissant de la République du Congo né le 7 juin 1980, a présenté, le 5 novembre 2015, une demande d'autorisation de regroupement familial afin que son fils, A... D..., né le 26 janvier 2000, soit autorisé à séjourner en France à ses côtés. Par une décision du 3 janvier 2017, la préfète de la Seine-Maritime a refusé de faire droit à cette demande au motif que le niveau de ressources dont M. C... avait fait état était insuffisant et que la situation de son fils ne justifiait pas qu'il soit fait droit à sa demande à titre exceptionnel. Par un jugement du 28 mai 2019 dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cette décision.

Sur les conclusions en annulation :

2. Il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que, pour rejeter la demande de regroupement familial dont elle était saisie, la préfète de la Seine-Maritime s'est exclusivement fondée sur le fait que les ressources dont M. C... justifiait n'atteignaient pas un niveau suffisant au regard des prescriptions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 411-4 de ce code.

3. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorisation d'entrer en France dans le cadre de la procédure du regroupement familial est donnée par l'autorité administrative compétente après vérification des conditions de logement et de ressources par le maire de la commune de résidence de l'étranger ou le maire de la commune où il envisage de s'établir. (...) ". L'article L. 421-3 de ce code dispose que : " A l'issue de l'instruction, le maire émet un avis motivé. Cet avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la communication du dossier par l'autorité administrative. (...) ".

4. M. C... soutient que sa demande de regroupement familial n'a pas été soumise, pour avis, au maire de la commune du Havre, en méconnaissance des dispositions citées au point précédent. Cette assertion n'est contredite ni par la motivation de la décision contestée, qui se borne, par une formulation stéréotypée, à mentionner " le recueil des avis réglementaires du maire de votre commune ", sans comporter aucune précision sur la teneur de ces avis ou même sur la date à laquelle ils auraient été rendus, ni par aucune autre pièce du dossier, ni même par la préfète de la Seine-Maritime, qui s'est bornée à faire valoir, en première instance, que, si la condition de logement était satisfaite, le niveau de ressources de M. C... était inférieur au seuil mentionné à l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans justifier pour autant de l'existence d'un avis, formel ou implicite, du maire de sa commune de résidence. Par suite, le vice de procédure allégué par M. C... doit être tenu pour établi.

5. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la préfète de la Seine-Maritime ne s'est fondée, pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. C..., sur aucun autre motif que l'appréciation portée sur le niveau des ressources de l'intéressé et n'a pas davantage fait valoir, devant les premiers juges comme en cause d'appel, que la décision contestée aurait été justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement retenu. Par suite, M. C... est fondé à soutenir qu'il a été effectivement privé de la garantie procédurale tenant à ce que l'autorité préfectorale, lorsqu'elle entend rejeter une demande de regroupement familial pour un motif ayant trait aux ressources du demandeur, recueille préalablement l'avis motivé du maire de la commune de résidence, qui doit être émis au terme de la procédure définie, notamment, par les dispositions de l'article L. 421-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En conséquence, l'illégalité dont est entachée la décision de la préfète de la Seine-Maritime, quand bien même elle n'aurait emporté, comme le soutient cette autorité, aucune influence sur le sens de cette décision, est de nature à entraîner son annulation.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 janvier 2017 de la préfète de la Seine-Maritime, et à demander l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

7. Le présent arrêt implique seulement, compte tenu du motif d'annulation de la décision attaquée, que le préfet de la Seine-Maritime procède de nouveau à l'examen de la demande de regroupement familial présentée par M. C.... Par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de procéder à ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais non compris dans les dépens :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui doit être regardé comme la partie perdante, le versement d'une somme de 1 000 euros à la SELARL B... et Inquimbert sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 28 mai 2019 du tribunal administratif de Rouen et la décision du 3 janvier 2017 de la préfète de la Seine-Maritime sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Maritime de procéder au réexamen de la demande de regroupement familial présentée par M. C..., dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à la SELARL B... et Inquimbert sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., au préfet de la Seine-Maritime, au ministre de l'intérieur et à Me B....

4

N°19DA02072


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02072
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Procédure consultative.

Étrangers - Séjour des étrangers.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Contrôle du juge de l'excès de pouvoir.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Christophe Binand
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL ANTOINE MARY et CAROLINE INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-17;19da02072 ?
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