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27/07/2020 | FRANCE | N°19DA00616

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (ter), 27 juillet 2020, 19DA00616


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2016 par lequel la préfète de la région Normandie a refusé de lui accorder l'autorisation d'exploiter une superficie totale de 33 ha 57 a 42 ca de terres situées sur les communes de La Roquette, Vatteville et Daubeuf-près-Vatteville, dans le département de l'Eure, dont 12 ha 76 a 22 ca étaient précédemment mises en valeur par l'EARL de Roncherolles et 20 ha 81 a 20 ca par l'EARL de Senneville.

Par un ju

gement n° 1700189 du 14 janvier 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... G... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2016 par lequel la préfète de la région Normandie a refusé de lui accorder l'autorisation d'exploiter une superficie totale de 33 ha 57 a 42 ca de terres situées sur les communes de La Roquette, Vatteville et Daubeuf-près-Vatteville, dans le département de l'Eure, dont 12 ha 76 a 22 ca étaient précédemment mises en valeur par l'EARL de Roncherolles et 20 ha 81 a 20 ca par l'EARL de Senneville.

Par un jugement n° 1700189 du 14 janvier 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mars 2019, M. G..., représenté par Me C... J..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2016 de la préfète de la région Normandie ;

3°) de lui accorder l'autorisation d'exploiter demandée ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 ;

- le décret n° 2015-713 du 22 juin 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. G..., associé exploitant de la SCEA de Cailly la Boulaye, de la SCEA G... P et MN et de l'EARL des Bucquets, élevage porcin, a demandé, le 27 juillet 2016, l'autorisation d'exploiter, d'une part, une superficie totale de 33 ha 57 a 42 ca de terres, dans le département de l'Eure, dont 12 ha 76 a 22 ca mises jusque-là en valeur par l'EARL de Roncherolles ayant MM. I... et E... comme associés et, d'autre part, une superficie de 20 ha 81 a 20 ca de terres, mises en valeur par l'EARL de Senneville, ayant Mme B... H... comme associée. Après un avis défavorable émis par la commission départementale d'orientation de l'agriculture le 3 novembre 2016, la préfète de la région Normandie a refusé d'accorder à M. G... l'autorisation demandée, par un arrêté du 23 novembre 2016. M. G... relève appel du jugement du 14 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, la préfète de la région Normandie a donné délégation à M. A... D..., directeur régional de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt, à l'effet de signer les actes et décisions relevant de la compétence de la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt à l'exception des notifications de subventions attribuées à des tiers sur crédits européens déconcentrés, des conventions avec les collectivités territoriales et leurs établissements publics à l'exclusion de celles découlant d'une notification individuelle préalable d'attribution d'aide faite par la préfète de région au bénéficiaire, par un arrêté n° 16-32 du 4 janvier 2016, publié au recueil n° R28-2016-003 des actes administratifs spécial de la préfecture du 5 janvier 2016. En conséquence, M. D... disposait d'une délégation à l'effet de signer la décision de refus d'autorisation d'exploiter au titre du contrôle des structures agricoles contestée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

3. En deuxième lieu, le schéma régional des exploitations agricoles de la région Normandie étant entré en vigueur le 2 avril 2016 et la demande d'autorisation d'exploiter ayant été formulée par M. G... après cette date, la décision en litige doit être examinée au regard des dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime dans leur version en vigueur postérieurement à la publication de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le tribunal en se fondant sur les dispositions de ce schéma régional doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité administrative (...) vérifie, compte tenu des motifs de refus prévus à l'article L. 331-3-1, si les conditions de l'opération permettent de délivrer l'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 et se prononce sur la demande d'autorisation par une décision motivée. ". Aux termes de l'article R. 331-6 du même code : " (...) II.- La décision d'autorisation ou de refus d'autorisation d'exploiter prise par le préfet de région doit être motivée au regard du schéma directeur régional des exploitations agricoles et des motifs de refus énumérés à l'article L. 331-3-1. (...) ". Aux termes de l'article L. 331-3-1 de ce code : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : (...) 2° Lorsque l'opération compromet la viabilité de l'exploitation du preneur en place ; 3° Si l'opération conduit à un agrandissement ou à une concentration d'exploitations au bénéfice d'une même personne excessifs au regard des critères définis au 3° de l'article L. 331-1 et précisés par le schéma directeur régional des structures agricoles en application de l'article L. 312-1, sauf dans le cas où il n'y a pas d'autre candidat à la reprise de l'exploitation ou du bien considéré, ni de preneur en place ; (...) ".

5. L'arrêté préfectoral attaqué, après avoir visé notamment les articles L. 331-1 à L. 331-11 du code rural et de la pêche maritime applicables, indique le nombre de sociétés dans lesquelles M. G... est associé exploitant, que la demande présentée vise à un agrandissement et que les reprises de terres sont considérées comme un agrandissement excessif contraire aux orientations du schéma régional des exploitations agricoles de Normandie après avoir examiné et comparé la situation respective du demandeur et des preneurs en place. Cette motivation satisfait aux exigences fixées par les dispositions précitées des articles L. 331-3 et L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté en litige doit être écarté.

6. En quatrième lieu, M. G... réitère son moyen tiré de ce que l'arrêté fixant la composition de la section spécialisée pris par le préfet de l'Eure le 4 avril 2016 ne comporte qu'un suppléant au lieu des deux prévus par les dispositions précitées de l'article R. 313-2 du code rural et de la pêche maritime pour le représentant des fermiers-métayers. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que, si cet arrêté du 4 avril 2016 ne désigne qu'un représentant suppléant pour les fermiers-métayers sur les deux requis, ce vice n'a cependant pas privé M. G... d'une garantie et n'a eu aucune influence sur l'avis émis par la commission départementale d'orientation de l'agriculture dès lors qu'il ressort du procès-verbal de la réunion de la section " structures, économie et agriculteurs en difficultés " de cette commission du 3 novembre 2016, lors de laquelle le projet de reprise de M. G... a été examiné, que le représentant titulaire des fermiers-métayers a siégé lors de cette réunion, ne nécessitant ainsi pas la présence des représentants suppléants. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article 1 de l'arrêté relatif au schéma directeur régional des exploitations agricoles de la région Haute-Normandie : " Définitions : (...) / Pour fixer les critères d'appréciation de l'intérêt d'une opération, on entend par : (...) / preneur en place : exploitant agricole individuel mettant en valeur, à titre exclusif ou non, une exploitation agricole en qualité de titulaire de tout bail rural sur les terres de ladite exploitation. Lorsque le bien pris à bail est mis, par son détenteur, à disposition d'une société d'exploitation dans laquelle il est associé, il y a lieu de prendre en compte, en comparaison de la situation du demandeur- preneur, la situation de la société ". Il résulte de ces dispositions que, contrairement à ce que soutient M. G..., si M. I..., un des associés de l'EARL de Roncherolles s'est vu notifier un congé pour le bail concernant les terres, objet de la reprise, ce congé n'est cependant intervenu que postérieurement à la constitution de l'EARL de Roncherolles et ces terres avaient été mises à disposition de cette EARL. Il en résulte que l'EARL de Roncherolles, composée de deux associés, a ainsi la qualité de preneur en place. Par suite, la préfète, en recherchant si la reprise des terres en cause affectait la viabilité économique de cette EARL du fait de sa qualité de preneur en place, n'a pas entaché l'arrêté en litige d'une erreur de droit.

8. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : (...) 2° Lorsque l'opération compromet la viabilité de l'exploitation du preneur en place ; 3° Si l'opération conduit à un agrandissement ou à une concentration d'exploitations au bénéfice d'une même personne excessifs au regard des critères définis au 3° de l'article L. 331-1 et précisés par le schéma directeur régional des structures agricoles en application de l'article L. 312-1, sauf dans le cas où il n'y a pas d'autre candidat à la reprise de l'exploitation ou du bien considéré, ni de preneur en place ; (...) ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté relatif au schéma directeur régional des exploitations agricoles de la région Haute-Normandie : " 1) - Les critères d'appréciation de l'intérêt économique et environnemental énoncés à l'article L. 312-1 sont : 1 - la dimension économique et la viabilité des exploitations agricoles concernées ; (...) La dimension économique visée au 1° sera appréhendée au travers d'un EBE potentiel par actif, calculé comme décrit en annexe au présent arrêté, afin de départager les dossiers de même rang de priorité. (...) / 3) Les agrandissements et concentrations d'exploitations excessifs : / Seront considérés comme excessifs au sens de l'article L. 312-1 les agrandissements (...) conduisant après reprise à une surface par actif exploitant supérieure à 150 ha ou à une surface d'exploitation supérieure à 300 ha. ".

9. M. G... soutient que la préfète de la région Normandie s'est fondée sur des motifs erronés en ce qu'elle a retenu qu'il participait aux travaux de façon effective sur une surface totale de 342 ha 40 ca sans tenir compte de la perte pour la SCEA de Cailly la Boulaye dont il est associé, d'une superficie de 57 ha 6 a 86 ca et du nombre de salariés de chaque structure. Toutefois, quand bien-même la préfète aurait pris en compte cette perte de superficie et estimé que M. G... n'aurait pas participé aux travaux de cette SCEA et de celle de la SCEA G... P et M, de façon effective, que sur une superficie de 323 ha 38 a au lieu de 342 ha 40 ca, ces circonstances sont cependant sans incidence sur l'appréciation du motif retenu par la préfète tiré de ce que les reprises de terres envisagées constituent un agrandissement excessif contraire aux orientations du schéma régional des exploitations agricoles de Normandie dès lors que la superficie par actif exploitant s'élève alors 281 ha 74 a et demeure toujours supérieure à celle de 150 ha fixé par les dispositions précitées du 3) de l'article 5 de ce schéma.

10. M. G... réitère le moyen en appel tiré de ce que la reprise de terres n'a pas pour effet de compromettre la viabilité de l'exploitation de l'EARL de Roncherolles et de celle de l'EARL de Senneville. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, la préfète de la région Normandie aurait pris la même décision de refus en se fondant sur le motif tiré de ce que les reprises envisagées constitueraient un agrandissement excessif au regard du schéma précité qui, contrairement à ce que soutient le requérant, est au nombre des critères fixés par les dispositions précitées de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie sera adressée au préfet de la région Normandie.

2

N°19DA00616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 19DA00616
Date de la décision : 27/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : LEROUX-BOSTYN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-07-27;19da00616 ?
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