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08/10/2020 | FRANCE | N°19DA01908

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 octobre 2020, 19DA01908


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 février 2017 par laquelle le maire de la commune de Bolbec l'a placé en disponibilité d'office du 27 mai 2015 au 26 février 2017.

Par un jugement n°1700943 du 16 juillet 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 août 2019 et 11 août 2020, M. E..., représenté par Me C... D..., d

emande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 février 2017 par laquelle le maire de la commune de Bolbec l'a placé en disponibilité d'office du 27 mai 2015 au 26 février 2017.

Par un jugement n°1700943 du 16 juillet 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 août 2019 et 11 août 2020, M. E..., représenté par Me C... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision du 9 février 2017 ;

3°) d'enjoindre à la commune de Bolbec de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant l'arrêt à intervenir et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bolbec la somme de 1 500 euros au titre de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;

- l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie ;

- l'arrêté du 30 juillet 1987 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie (régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... A..., présidente de chambre,

- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., adjoint technique territorial employé par la commune de Bolbec, a été victime le 12 novembre 2003 d'un accident de service en se blessant à l'épaule gauche. Par un jugement du 12 mars 2013, devenu définitif, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 18 avril 2011 par lequel le maire de Bolbec a refusé de reconnaître la pathologie de M. E..., à savoir une lésion du bourrelet glénoïdien de l'épaule gauche, comme imputable au service. Le 27 mai 2014, M. E... a demandé que soient reconnus imputables au service ses arrêts de travail à compter de cette date, en raison d'une rechute selon lui de la pathologie dont il est atteint à l'épaule gauche. Par un arrêté du 22 septembre 2016, le maire de la commune de Bolbec, après un avis défavorable de la commission de réforme, a refusé de faire droit à sa demande. Par un second arrêté du 9 février 2017, le maire l'a placé en disponibilité d'office du 27 mai 2015 au 26 février 2017. M. E... relève appel du jugement du 16 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ne ressort pas du dossier de première instance qu'une pièce relative à l'information de M. E... quant à la tenue de la réunion du comité médical du 1er février 2017 n'aurait pas été soumise au contradictoire. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier pour un tel motif doit être écarté.

Sur la légalité de la décision du 9 février 2017 :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. Aux termes de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le comité médical départemental est chargé de donner à l'autorité compétente, dans les conditions fixées par le présent décret, un avis sur les questions médicales soulevées par l'admission des candidats aux emplois publics, l'octroi et le renouvellement des congés de maladie et la réintégration à l'issue de ces congés, lorsqu'il y a contestation. / Il est consulté obligatoirement pour : a) La prolongation des congés de maladie au-delà de six mois consécutifs ; (...) f) La mise en disponibilité d'office pour raison de santé et son renouvellement ; (...) Le secrétariat du comité médical informe le fonctionnaire : - de la date à laquelle le comité médical examinera son dossier ; - de ses droits concernant la communication de son dossier et de la possibilité de faire entendre le médecin de son choix ; - des voies de recours possibles devant le comité médical supérieur. L'avis du comité médical est communiqué au fonctionnaire sur sa demande. / (...)".

4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la mesure supplémentaire d'instruction ordonnée par la cour que M. E... a été informé, par un courrier du 19 janvier 2017, de la date de la séance du comité médical du 1er février 2017, dont l'objet était de se prononcer sur la prolongation de son congé de maladie au-delà des six mois. Il a en outre également été informé par un courrier du 19 décembre 2016 de la séance du comité médical du 4 janvier 2017 relative à la question de son aptitude. Ces convocations précisent son droit à consulter son dossier, à demander à un médecin de son choix d'assister à cette réunion pour y être entendu et la possibilité d'exercer un recours auprès du comité médical supérieur. Le requérant n'apporte aucun élément de nature à laisser supposer qu'il n'aurait pas reçu ces convocations. S'il soutient également qu'il n'a pas été informé de la teneur des avis, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait demandé à en obtenir la communication, comme le prévoit l'avant-dernier alinéa de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure aurait été menée irrégulièrement en méconnaissance des dispositions de l'article 4 du décret du 30 juillet doit être écarté.

5. Il ne résulte d'aucune disposition légale ou réglementaire, ni d'aucun principe, que l'avis du comité médical départemental devant être recueilli préalablement à une décision de mise en disponibilité d'office ou à son renouvellement devrait être motivé. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'avis du comité médical départemental du 1er février 2017 est inopérant et ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

6. Aux termes de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. (...) ". Aux termes de l'article 57 de la même loi : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) /2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) ; / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (...) ; 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. " Aux termes de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. /Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. ". Aux termes de l'article 24 du même décret : " Lorsque l'autorité territoriale estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs d'un fonctionnaire, que celui-ci se trouve dans la situation prévue à l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée, elle peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 25 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive attaché à la collectivité ou établissement dont relève le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier. " Aux termes de l'article 25 : " Pour bénéficier d'un congé de longue maladie ou de longue durée le fonctionnaire en position d'activité, ou son représentant légal, doit adresser à l'autorité territoriale une demande appuyée d'un certificat de son médecin traitant spécifiant qu'il est susceptible de bénéficier des dispositions de l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée. "

7. Si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, l'administration peut, en dérogation à cette règle, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation.

8. Aussi regrettable que soit le délai écoulé entre la demande d'imputabilité au service de ses arrêts de travail à compter du 27 mai 2014 et la décision de rejet de cette demande prise le 22 septembre 2016, la décision par laquelle le maire de la commune de Bolbec a placé M. E... en disponibilité de manière rétroactive à compter du 27 mai 2015 avait pour objet de régulariser sa situation compte tenu de l'épuisement de ses droits à congé ordinaire depuis le 27 mai 2015, ce qu'admet d'ailleurs l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait illégale du fait de sa rétroactivité doit être écarté.

9. M. E... soutient qu'il n'avait pas épuisé ses droits à congé dès lors qu'il pouvait éventuellement bénéficier d'un congé de longue maladie. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait présenté une demande en ce sens. D'autre part, il se prévaut en appel d'un extrait des conclusions d'expertise rendues le 2 octobre 2015, menée à la demande de la commune dans le cadre de l'imputabilité au service de ses arrêts maladie à compter du 27 mai 2014, au terme duquel l'expert estime que l'état pathologique actuel de M. E..., un rhumatisme invalidant chronique, pourrait être pris en charge au titre d'un congé de longue maladie. Toutefois, la teneur de ce seul document ne permet pas de considérer que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité. L'expert indique d'ailleurs qu'aucun " soin particulier ne se dégage à l'horizon de M. E... ". En outre, au vu de ce seul document, la commune a pu ne pas estimer qu'il se trouvait dans la situation prévue au 3° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et ne pas provoquer l'examen médical de l'intéressé, comme l'y autorisent les dispositions de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987 citées au point 6. Par suite, et alors que M. E... ne conteste pas qu'il avait épuisé ses congés au titre de la maladie ordinaire faute de reconnaissance de ses arrêts comme imputables au service, le moyen tiré ce que la décision serait entachée d'une erreur de droit au motif qu'il n'avait pas épuisé ses congés prévus au 3° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 doit être écarté.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. E... n'est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bolbec, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. E... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... la somme demandée par la commune de Bolbec au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Bolbec au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et à la commune de Bolbec.

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N°19DA01908

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01908
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SELARL PHELIP et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-08;19da01908 ?
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