La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2020 | FRANCE | N°18DA01893

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 13 octobre 2020, 18DA01893


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C..., l'association Les habitants de Canteleu et l'association Bien vivre à Canteleu ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir :

1°) les délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015 par lesquelles le conseil municipal de la commune de Lambersart a, d'une part, constaté la désaffectation matérielle des parcelles du territoire communal cadastrées AW 319, 322, 323 et 332 et prononcé leur déclassement, d'autre part, décidé de les aliéner et au

torisé le maire à engager la procédure de cession ;

2°) la délibération n° 21 du 21 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C..., l'association Les habitants de Canteleu et l'association Bien vivre à Canteleu ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir :

1°) les délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015 par lesquelles le conseil municipal de la commune de Lambersart a, d'une part, constaté la désaffectation matérielle des parcelles du territoire communal cadastrées AW 319, 322, 323 et 332 et prononcé leur déclassement, d'autre part, décidé de les aliéner et autorisé le maire à engager la procédure de cession ;

2°) la délibération n° 21 du 21 décembre 2015 par laquelle le conseil municipal de la commune de Lambersart a approuvé l'aliénation au profit de la société Atreo des parcelles du territoire communal cadastrées AW 319, 322, 323 et 332 et a autorisé le maire à signer l'acte de vente ;

3°) le permis de construire n° 059328 16 S0035 délivré le 25 novembre 2016 par le maire de la commune de Lambersart à la société Atreo pour la construction de trois immeubles comprenant 41 logements collectifs sur les parcelles cadastrées AW 319, 322, 323 et 332 situées avenue de l'Hippodrome.

Par un jugement nos 1510041,1601437,1703309,1703310 du 12 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté l'ensemble de ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2018, et un mémoire complémentaire, enregistré le 19 septembre 2019, M. C..., l'association Les habitants de Canteleu et l'association Bien vivre à Canteleu, représentés par Me A... F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif, d'une part, en tant qu'il a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015 et de la délibération n° 21 du 21 décembre 2015, d'autre part, en tant qu'il a mis à leur charge les sommes respectives de 400 euros, 1 600 euros et 400 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015 et la délibération n° 21 du 21 décembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lambersart la somme de 1 000 euros à verser à chacun d'eux sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Claire Rollet-Perraud, président-assesseur,

- les conclusions de M. Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me A... F..., représentant M. C..., l'association Les habitants de Canteleu et l'association Bien vivre à Canteleu, et de Me B... E..., représentant la société Atreo.

Considérant ce qui suit :

1. Par des délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015, le conseil municipal de la commune de Lambersart a, d'une part, constaté la désaffectation matérielle et prononcé le déclassement de plusieurs parties des parcelles cadastrées AW 319, 322, 323 et 332 situées avenue de l'Hippodrome, d'autre part, décidé de les aliéner et autorisé le maire à engager la procédure de cession. Par une délibération n° 21 du 21 décembre 2015, le conseil municipal a approuvé l'aliénation de ces terrains au profit de la société Atreo. M. C..., l'association Les habitants de Canteleu et l'association Bien vivre à Canteleu ont relevé appel du jugement du 12 juillet 2018 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015 et de la délibération n° 21 du 21 décembre 2015.

Sur les désistements de l'association Bien vivre à Canteleu et de M. C... :

2. Les désistements de l'association Bien vivre à Canteleu et de M. C... sont purs et simples. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. La requérante soutient que le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de ce que les conseillers municipaux n'avaient pas été informés des raisons pour lesquelles l'exécutif communal a retenu l'offre de la société Atreo, au profit de laquelle l'aliénation des parcelles a été approuvée par la délibération n° 21 du 21 décembre 2015. Toutefois, il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'avaient pas à se prononcer sur l'ensemble des arguments invoqués par les intéressés à l'appui de ce moyen, ont répondu de manière suffisamment précise au point 6 au moyen tiré de ce que les membres du conseil municipal n'avaient pas bénéficié d'une information préalable suffisante au sens des dispositions des articles L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales. Par suite, l'association Les habitants de Canteleu n'est pas fondée à soutenir que le jugement du tribunal administratif de Lille est entaché d'une irrégularité à ce titre.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les délibérations n° 27 et n° 28 du 30 septembre 2015 :

S'agissant de l'information donnée aux conseillers municipaux :

4. Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...) ". L'article L. 2121-13 du même code dispose : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ".

5. Il résulte de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

6. Il n'est pas contesté que la commune de Lambersart a joint à la convocation des membres du conseil municipal à la séance du 30 septembre 2015 au cours de laquelle ont été adoptées les délibérations en litige, d'une part, l'ordre du jour mentionnant le point suivant : " Désaffectation et déclassement des parcelles AW 319, 322, 323 et 332 (parties) sises avenue de l'Hippodrome - Stade Guy Lefort " et, d'autre part, le rapport du maire contenant les projets de délibération.

7. En premier lieu, si les membres du conseil municipal tiennent de leur qualité de membres de l'assemblée municipale appelés à délibérer sur les affaires de la commune, le droit d'être informés de tout ce qui touche à ces affaires dans des conditions leur permettant de remplir normalement leur mandat et s'ils doivent disposer des projets de délibérations et des documents préparatoires qui les accompagnent au début des séances au cours desquelles ces projets doivent être soumis au vote du conseil municipal, ni les dispositions de l'article L. 2121-13 précitées, ni aucun principe n'imposait au maire de communiquer aux conseillers municipaux, en l'absence d'une demande de leur part, le constat d'huissier du 22 décembre 2015 portant sur la désaffectation des parcelles préalablement à la séance du conseil municipal. Au demeurant, le rapport du maire susmentionné indiquait que " les parcelles ont fait l'objet d'une désaffectation matérielle suivant la décision n° 20150116 du 18 septembre 2015 et d'un constat d'huissier ".

8. En second lieu, le rapport du maire relatait le contexte du projet de cession, précisait quelles étaient les parcelles en cause et les surfaces concernées pour chacune d'elles et permettait ainsi aux conseillers municipaux de mesurer les implications de la décision soumise à leur vote même si le plan également transmis aux conseillers municipaux présentait un caractère provisoire, dès lors que ce document était suffisamment lisible et précis pour illustrer les informations contenues dans le rapport du maire.

9. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante information des conseillers municipaux doit être écarté.

S'agissant de l'intérêt général justifiant la décision de déclassement et du moyen tiré du détournement de pouvoir :

10. Aux termes de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Un bien d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1, qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement. "

11. Il ressort des pièces du dossier qu'il a été décidé, par l'arrêté municipal n° 20150116 du 18 septembre 2015, de fermer l'accès au public de plusieurs parties des parcelles cadastrées AW 319, 322, 323 et 332 situées avenue de l'Hippodrome, sur lesquelles se trouvait un city-stade et qui, jusqu'alors affectées à l'usage du public, relevaient du domaine public communal. Ainsi l'accès à ces parties de parcelles a été empêché le 21 septembre 2015 par la pose d'une clôture.

12. Il ressort des termes mêmes de cet arrêté, ainsi que de la délibération n° 27 du 30 septembre 2015 constatant la désaffectation matérielle et prononçant le déclassement des parcelles, que la commune " a l'intention de proposer à trois opérateurs de réaliser la construction de logements ". Il ressort, en outre, des écritures produites en première instance et réitérées en cause d'appel par la commune de Lambersart, que ce projet s'inscrit dans une volonté d'entreprendre, conformément aux recommandations de la Cour des comptes, " une gestion dynamique du patrimoine communal " et permettrait de dégager environ 1,8 million d'euros de recettes, rendant possible notamment la réalisation de travaux d'aménagement sur plusieurs sites sportifs de la ville, dont celui où sont situées les parcelles en litige.

13. De tels motifs d'intérêt général étaient au nombre de ceux qui pouvaient légalement justifier une décision de déclassement du domaine public alors même que cette décision avait pour conséquence de priver les habitants du quartier de Canteleu de la jouissance du city-stade. Par suite, les moyens tirés de ce que les décisions en litige n'auraient pas été édictées dans un but d'intérêt général et seraient entachées de détournement de pouvoir doivent être écartés.

En ce qui concerne la délibération n° 21 du 21 décembre 2015 :

14. L'association requérante soutient qu'en violation des dispositions citées au point 4 les membres du conseil municipal n'ont pas disposé des informations nécessaires préalablement au choix de l'acquéreur des parcelles décidé par cette délibération du 21 décembre 2015.

15. Il n'est pas contesté que le rapport du maire, repris dans la délibération en litige, a été communiqué aux élus préalablement à la réunion du conseil municipal du 21 décembre 2015. Ce document indiquait la volonté d'aliéner les parcelles au candidat ayant présenté l'offre la plus haute, soit 1 800 000 euros net vendeur, pour la réalisation d'une " résidence privée composée de trois petits immeubles de 12 à 15 appartements " avec un stationnement majoritairement situé en sous-sol. Par ailleurs, ce document auquel était joint un plan, précisait les parcelles concernées par la délibération en litige. Enfin, cette délibération se bornait à désigner leur acquéreur, le principe même de leur cession ayant été adopté par la délibération du conseil municipal n° 28 du 30 septembre 2015, autorisant le maire de la commune à engager la procédure de cession et à rechercher des acquéreurs.

16. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des dispositions citées au point 4 doit être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance, que l'association Les habitants de Canteleu n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 12 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des délibérations n° 27 et n° 28 du conseil municipal de la commune de Lambersart du 30 septembre 2015, d'autre part, de la délibération n° 21 du 21 décembre 2015 du même conseil municipal.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lambersart, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par l'association Les habitants de Canteleu au titre des frais qu'elle a exposés.

19. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière et de M. C..., sur le fondement des mêmes dispositions, une somme globale de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Lambersart. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune présentées sur le même fondement à l'encontre de l'association Bien vivre à Canteleu.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des demandes de l'association Bien vivre à Canteleu et de M. C....

Article 2 : La requête de l'association Les habitants de Canteleu est rejetée.

Article 3 : L'association Les habitants de Canteleu et M. C... verseront à la commune de Lambersart une somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Lambersart est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à l'association Les habitants de Canteleu, à l'association Bien vivre à Canteleu, à la société Atreo et à la commune de Lambersart.

N°18DA01893 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01893
Date de la décision : 13/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Claire Rollet-Perraud
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SCP SAVOYE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-13;18da01893 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award