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17/11/2020 | FRANCE | N°19DA01472

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 17 novembre 2020, 19DA01472


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association syndicale libre (ASL) des Clairières de la Fortelle, Mme K... S..., M. M... Q..., M. A... J..., Mme F... et M. I... E..., Mme P... R... et M. L... H... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la délibération du 5 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal d'Houlbec-Cocherel a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble le rejet tacite du recours gracieux qu'ils ont formé à l'encontre de cette délibération.

Par un jugement nos 1801363,1801431 du 23 a

vril 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procéd...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association syndicale libre (ASL) des Clairières de la Fortelle, Mme K... S..., M. M... Q..., M. A... J..., Mme F... et M. I... E..., Mme P... R... et M. L... H... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la délibération du 5 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal d'Houlbec-Cocherel a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble le rejet tacite du recours gracieux qu'ils ont formé à l'encontre de cette délibération.

Par un jugement nos 1801363,1801431 du 23 avril 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 juin 2019, et un mémoire, enregistré le 26 avril 2020, l'association syndicale libre (ASL) des Clairières de la Fortelle, M. M... Q..., M. A... J..., Mme F... et M. I... E..., Mme P... R... et Mme K... S..., représentés par Me Pierre-Etienne Bodart, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération du 5 octobre 2017 par laquelle le conseil municipal d'Houlbec-Cocherel a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble le rejet tacite du recours gracieux qu'ils ont formé à l'encontre de ladite délibération ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Houlbec-Cocherel le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la délibération en litige a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière au regard des dispositions de l'article L. 123-9 du code de l'urbanisme ;

- le secteur Nh délimité par la délibération attaquée ne présente pas une taille et une capacité d'accueil limitées ni ne présente un caractère exceptionnel, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme ;

- à supposer même que ce secteur Nh puisse être regardé comme un secteur de taille et capacité d'accueil limitées, il n'a pas été justifié dans le rapport de présentation du plan local d'urbanisme et il n'a pas fait l'objet en tant que tel de l'avis prévu de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers ;

- à supposer même que les auteurs du plan local d'urbanisme aient entendu délimiter un secteur de taille et capacité d'accueil limitées, la règle par laquelle ils autorisent potentiellement la destruction de la moitié de la superficie boisée de cette zone n'est pas compatible avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone ;

- l'inclusion de la parcelle ZB 378 en zone Nh du plan local d'urbanisme est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale de la communauté d'agglomération des Portes de l'Eure et avec le schéma de cohérence écologique de la vallée de l'Eure adopté par le préfet le 18 novembre 2014.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 11 octobre 2019 et 26 mai 2020, la commune d'Houlbec-Cocherel, représentée par Me Baron, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des appelants la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Busidan, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Chloé Guilbeau, représentant l'ASL des Clairières de la Fortelle et autres, et Me Quentin André, représentant la commune d'Houlbec-Cocherel.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

1. L'association syndicale libre (ASL) des Clairières de la Fortelle, M. Q..., M. J..., Mme F... et M. E..., Mme R... et Mme S... relèvent appel du jugement du 23 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Houlbec-Cocherel du 5 octobre 2017 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune.

En ce qui concerne le plan local d'urbanisme dans son ensemble :

2. Aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au plan local d'urbanisme d'Houlbec-Cocherel : " I. - Le plan local d'urbanisme respecte les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1. Il comprend un rapport de présentation, un projet d'aménagement et de développement durables, des orientations d'aménagement et de programmation, un règlement et des annexes. (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 123-9 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Un débat a lieu au sein (...) du conseil municipal sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (...) au plus tard deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme. (...)".

4. Il résulte de ces dispositions que les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable doivent faire l'objet d'une inscription à l'ordre du jour d'une séance du conseil municipal se tenant au moins deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme et que les membres du conseil municipal doivent être mis à même de discuter utilement, à cette occasion, des orientations générales envisagées.

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du compte-rendu de la séance du conseil municipal d'Houlbec-Cocherel du 10 juin 2015, d'une part, que les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables ont été inscrites à l'ordre du jour d'une séance du conseil municipal se tenant au moins deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme, d'autre part, qu'au cours de cette séance le maire a d'abord présenté de manière détaillée les orientations prévues, qu'il a ensuite " déclaré le débat ouvert ", que les conseillers municipaux ont pu alors prendre la parole et qu'une remarque a ainsi été faite sur l'orientation 3.1 " préserver et créer les continuités écologiques ", de sorte que les conseillers municipaux ont bien été mis à même de discuter utilement des orientations envisagées.

6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, sur le fondement de l'article L. 123-9 du code de l'urbanisme, de ce qu'en l'absence d'une invitation formelle à débattre faite par le maire aux conseillers municipaux, un véritable débat n'aurait pas eu lieu, doit être écarté.

En ce qui concerne le secteur Nh :

7. Aux termes de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération en litige : " Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions ; (...) Il précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions, permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. (...) Ces secteurs sont délimités après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. ".

8. Il résulte tant des travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de cette disposition que de ses termes mêmes que la création d'un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées doit présenter un caractère exceptionnel, de manière à éviter le mitage des espaces naturels.

9. Le titre V " dispositions applicables aux zones naturelles et forestières (N) " du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Houlbec-Cocherel indique que " La zone N comporte deux secteurs particuliers : Un secteur naturel d'habitat isolé, Nh, défini sur les lieux-dits Cocherel, du Bois des Pointes et de la Grande Fortelle, Un secteur naturel protégé, Np, regroupant l'ensemble des espaces identifiés comme ayant une sensibilité patrimoniale naturelle (ZNIEFF, Natura 2000) ".

S'agissant de la condition de taille limitée :

10. Il ressort du rapport de présentation du plan local d'urbanisme que le secteur Nh ainsi créé couvre une superficie de 48,1 hectares, ce qui représente 12,3 % des 390,52 hectares de l'ensemble de la zone N et 4,06 % du territoire de la commune. Si ce secteur, que d'ailleurs ni le rapport de présentation ni le règlement du plan n'ont qualifié de secteur de taille et de capacité d'accueil limitées, a été concentré sur trois hameaux seulement du territoire communal, il résulte des données chiffrées qui précèdent mais aussi des documents graphiques formant le plan de zonage que la condition de taille limitée du secteur posée à l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme n'est pas remplie.

S'agissant de la condition de capacité d'accueil limitée :

11. D'une part, l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme relatif aux " occupations et utilisations des sols soumises à des conditions particulières " se borne à exiger, pour les nouvelles constructions à destination d'habitation dans le secteur Nh, " qu'au moins 50 % de l'unité cadastrale soit conservée en zone boisée ", sans préciser si cette unité cadastrale doit être appréciée une fois pour toutes à la date de l'entrée en vigueur du plan ou bien sur un plan cadastral susceptible de connaître des modifications successives, de sorte que l'application de cette disposition peut entraîner une altération marquée du caractère naturel du secteur.

12. D'autre part, aux termes de l'article N9 du même règlement relatif à l'emprise au sol : " Pour le seul secteur Nh : L'extension mesurée des constructions existantes à destination d'habitation ne doit pas excéder 30 % de l'emprise au sol des constructions existantes sur l'unité cadastrale à la date d'approbation du PLU. / L'emprise au sol des nouvelles constructions à destination d'habitation est fixée à 0,10 ". Contrairement au premier alinéa de cette disposition, son deuxième alinéa n'a pas défini la date à laquelle l'unité cadastrale à prendre en compte doit être appréciée, de sorte que l'application de cette disposition peut aussi entraîner une altération marquée du caractère naturel du secteur.

13. Dans ces conditions, compte tenu des dimensions et superficies assez vastes de nombreuses parcelles incluses dans la zone Nh ainsi délimitée, la condition de capacité d'accueil limitée posée à l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme n'est pas davantage remplie.

14. Il résulte de ce qui précède d'abord que la délimitation du secteur Nh par le plan local d'urbanisme litigieux était entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de cet article, ensuite que la réglementation prévue pour ce secteur n'a pas fait une exacte application de la même disposition.

15. Pour l'application de l'article L. 60041 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature, en l'état de l'instruction, à entraîner l'annulation, totale ou partielle, de la délibération en litige.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande, seulement en ce qu'il n'a pas annulé la délibération du 5 octobre 2017 pour avoir délimité un secteur Nh, dans lequel a été classée une partie de la parcelle ZB 378, et pour avoir réglementé ce secteur, ensemble la décision ayant rejeté le recours gracieux formé contre cette délibération.

Sur les frais non compris dans les dépens :

17. D'une part, les dispositions de l'article L. 7611 du code justice administrative font obstacle à ce que les appelants, qui ne sont pas la partie perdante, versent à la commune d'Houlbec-Cocherel la somme que celleci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

18. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la commune le versement aux appelants de la somme globale de 1 500 euros au titre de ces mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La délibération du 5 octobre 2017 portant approbation du plan local d'urbanisme de la commune d'Houlbec-Cocherel en tant qu'elle délimite et réglemente le secteur Nh de ce plan ainsi que, dans la même mesure, la décision implicite rejetant le recours gracieux formé contre cette délibération sont annulées.

Article 2 : Le jugement du 23 avril 2019 du tribunal administratif de Rouen est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : La commune d'Houlbec-Cocherel versera aux appelants une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La demande présentée par la commune d'Houlbec-Cocherel au titre des frais exposés et non compris dans les dépens est rejetée.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale libre des Clairières de la Fortelle et à la commune d'Houlbec-Cocherel.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01472
Date de la décision : 17/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-03-03-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans. Légalité interne. Appréciations soumises à un contrôle d'erreur manifeste. Classement et délimitation des ones.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Hélène Busidan
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : BODART

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-11-17;19da01472 ?
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