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23/03/2021 | FRANCE | N°19DA02799

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 23 mars 2021, 19DA02799


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier de Douai à lui verser une somme totale de 14 271,80 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis lors de sa prise en charge au sein de cet établissement le 10 septembre 2013.

Par un jugement n° 1703978 du 23 octobre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande, mis à la charge de l'Etat les frais et honoraires d'expertise au titre de l'aide juridictionnelle et rejeté les conclusion

s de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai.

Procédure devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier de Douai à lui verser une somme totale de 14 271,80 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis lors de sa prise en charge au sein de cet établissement le 10 septembre 2013.

Par un jugement n° 1703978 du 23 octobre 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande, mis à la charge de l'Etat les frais et honoraires d'expertise au titre de l'aide juridictionnelle et rejeté les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2019, M. D..., représenté par Me B... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Douai à lui verser une somme totale de 14 155 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis lors de sa prise en charge au sein de cet établissement le 10 septembre 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2017 ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Douai une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public,

- et les observations de Me B... A..., représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., alors âgé de trente-neuf ans, a été adressé par son médecin traitant au centre hospitalier de Douai le 10 septembre 2013 en raison d'un syndrome douloureux abdomino-pelvien droit avec brûlures mictionnelles, en vue de la réalisation d'une échographie. En raison d'une suspicion de pyélonéphrite ou de colique néphrétique et d'appendicite et à la suite d'examens biologiques ayant montré un syndrome inflammatoire modéré, il a été décidé de réaliser le jour même un scanner avec injection d'un produit de contraste iodé. A la suite de la survenue d'un oedème de la face avec érythème et d'une sensation d'étouffement, M. D... est revenu le lendemain au service des urgences et un traitement antihistaminique lui a été administré. M. D... a recherché la responsabilité du centre hospitalier de Douai et saisi, le 17 juillet 2014, la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux qui, par une décision du 10février 2015, s'est déclarée incompétente après avoir relevé que les conséquences dommageables subies par l'intéressé n'atteignaient pas les seuils de gravité requis par l'article D. 1142-1 du code de la santé publique. M. D... relève appel du jugement du 23 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Douai à lui verser une somme totale de 14 271,80 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis lors de sa prise en charge au sein de cet établissement le 10 septembre 2013.

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Douai :

2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. "

3. M. D... soutient que le radiologue du centre hospitalier de Douai lui a injecté un produit de contraste iodé alors qu'il l'avait informé qu'il était allergique à l'iode et qu'ainsi, le centre hospitalier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Il ressort du rapport de l'expertise ordonnée le 13 janvier 2016 par la cour administrative d'appel de Douai que M. D... a présenté le lendemain de sa première hospitalisation du 10 septembre 2013 une réaction cutanée et respiratoire secondaire au scanner pratiqué la veille avec une injection de produits iodés et que les signes de cette réaction ont été constatés lorsque l'intéressé est revenu le 11 septembre 2013 au service des urgences. Si l'expert, le docteur Hicter-Ledieu, indique que " l'allergie à l'iode n'existe pas " et que les phénomènes allergiques immuno-dépendants sont très rares aux produits de contraste à l'iode, elle précise cependant que l'injection de produits de contraste iodés peut entraîner certaines réactions urticantes par un mécanisme non allergique et conclut à l'existence d'un lien direct entre les troubles présentés par M. D... et le produit injecté lors de ce scanner. Par ailleurs, l'expert a indiqué que, dans le doute et en raison de l'alerte donnée par le patient au sujet d'une éventuelle allergie, d'autres examens de diagnostic auraient dû être proposés par le radiologue telle une échographie abdominale ou un scanner sans injection. Il résulte de ces constatations que le centre hospitalier de Douai a commis une faute dans la prise en charge médicale de M. D... de nature à engager sa responsabilité, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.

4. Il y a donc lieu d'examiner les demandes de M. D... et de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.

Sur l'évaluation des préjudices de M. D... :

5. Il ressort du rapport d'expertise judiciaire que l'état de santé de M. D... est consolidé à la date du 2 octobre 2013.

6. M. D... a subi un déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 2, soit 25 %, de quinze jours, du 11 au 25 septembre 2013 et un déficit fonctionnel temporaire partiel de classe 1, soit 10 %, de sept jours, du 26 septembre au 2 octobre 2013. En se fondant sur un taux de 13 euros par jour, il y a lieu d'allouer à M. D... la somme totale de 57, 85 euros.

7. Les douleurs éprouvées par M. D... ont été estimées par le rapport d'expertise à 2 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en allouant à M. D... une somme de 1 850 euros.

8. Il ressort du rapport d'expertise que M. D... demeure atteint d'un déficit fonctionnel permanent évalué à 5 % en raison des signes post-traumatiques ressentis par l'intéressé. M. D... étant âgé de trente-neuf ans à la date de consolidation de son état de santé, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en lui allouant la somme de 5 600 euros.

9. L'expert se borne à mentionner que M. D... se plaint depuis son hospitalisation d'une baisse de la libido. Cependant, il n'est pas établi que ce chef de préjudice soit en lien avec la faute commise par le centre hospitalier. M. D... n'est ainsi pas fondé à demander une indemnisation au titre de son préjudice sexuel.

10. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier de Douai le versement à M. D... de la somme de 7 507,85 euros en indemnisation de l'ensemble de ses préjudices. Cette somme portera intérêts à compter du 1er février 2017, date de réception de sa demande préalable.

Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai :

11. Il résulte des écritures de la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai et de l'attestation d'imputabilité établie par le médecin conseil de l'assurance maladie, que celle-ci justifie avoir exposé des dépenses d'hospitalisation le 11 septembre 2013 imputables exclusivement à la faute du centre hospitalier de Douai pour un montant de 112,17 euros. Il y a lieu, dès lors, de condamner le centre hospitalier de Douai à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai la somme de 112,17 euros au titre des dépenses de santé actuelles. Cette somme portera intérêts, comme elle le demande, à compter du 23 octobre 2019, date du jugement attaqué.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

12. Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. (...). A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 4 décembre 2020 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour 2021 : " Les montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 109 € et à 1 098 € au titre des remboursements effectués au cours de l'année 2021 ".

13. En application des dispositions précitées et compte tenu de la somme dont la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai a obtenu le remboursement, il y a lieu de lui allouer la somme de 109 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Sur les frais liés à l'instance :

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Douai le versement à M. D... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1703978 du tribunal administratif de Lille du 23 octobre 2019 est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier de Douai est condamné à verser à M. D... la somme de 7 507,85 euros en indemnisation de l'ensemble de ses préjudices. Cette somme portera intérêts à compter du 1er février 2017, date de réception de sa demande préalable.

Article 3 : Le centre hospitalier de Douai est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai la somme de 112,17 euros en remboursement de ses débours et une somme de 109 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. La somme de 112,17 euros portera intérêts à compter du 23 octobre 2019.

Article 4 : Le centre hospitalier de Douai versera à M. D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au centre hospitalier de Douai et à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai.

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N°19DA02799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02799
Date de la décision : 23/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier. Existence d'une faute.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : DUBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-03-23;19da02799 ?
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