La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/2021 | FRANCE | N°19DA02346

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 25 mars 2021, 19DA02346


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D..., épouse G... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite du 12 octobre 2016 par laquelle le président du centre communal d'action sociale de Roubaix a rejeté son recours administratif du 12 août 2016, d'enjoindre au même centre de reconstituer sa carrière depuis le 1er juillet 2009, sur la base d'un contrat d'agent non titulaire rémunéré par référence à un traitement indiciaire et bénéficiant du régime indemnitaire applicable aux agents non titulaires,

dans le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D..., épouse G... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision implicite du 12 octobre 2016 par laquelle le président du centre communal d'action sociale de Roubaix a rejeté son recours administratif du 12 août 2016, d'enjoindre au même centre de reconstituer sa carrière depuis le 1er juillet 2009, sur la base d'un contrat d'agent non titulaire rémunéré par référence à un traitement indiciaire et bénéficiant du régime indemnitaire applicable aux agents non titulaires, dans le délai de deux mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de condamner le centre communal d'action sociale de Roubaix à lui verser une somme de 75 000 euros en réparation du préjudice économique subi, à tout le moins de condamner le même centre à lui verser une somme équivalente à la différence entre la rémunération, incluant le régime indemnitaire, à laquelle elle aurait pu prétendre en qualité d'agent non titulaire et les sommes qui lui ont été effectivement versées durant toute la durée de son contrat du 1er octobre 2009 au 30 octobre 2013 et de la renvoyer devant le centre communal d'action sociale de Roubaix pour la liquidation de ce préjudice, de condamner le centre communal d'action sociale de Roubaix à lui verser une indemnité de 20 000 euros en réparation du préjudice moral subi et enfin de mettre à la charge du centre communal d'action sociale de Roubaix une somme de 2 000 euros à verser à Me F..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1609631 du 28 mai 2019 le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 12 octobre 2016 par laquelle le président du centre communal d'action sociale de Roubaix a refusé de requalifier l'engagement de Mme B... D..., épouse G..., en contrat d'agent non titulaire, enjoint au centre communal d'action sociale de Roubaix de régulariser la situation de Mme B... D..., épouse G..., dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement, et de mettre en oeuvre les mesures de régularisation exposées au point 20 du jugement, condamné le centre communal d'action sociale de Roubaix à verser à Mme D..., épouse G..., les rappels d'indemnité de résidence au titre de la période non couverte par la prescription quadriennale, condamné le même centre à verser à Mme B... D..., épouse G... , la somme de 7 289,04 euros à titre de dommages et intérêts, mis à la charge du centre communal d'action sociale de Roubaix le versement à Me F..., avocat de Mme B... D..., épouse G..., de la somme de 1 500 euros, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat et enfin a rejeté le surplus des conclusions de la requête, ainsi que les conclusions présentées par le centre communal d'action sociale de Roubaix au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 17 octobre 2019 et le 6 avril 2020, Mme B... D..., épouse G..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement en ce qu'il a d'une part limité à la somme de 7 289,04 euros la condamnation du centre communal d'action sociale de Roubaix au titre des dommages et intérêts et d'autre part limité la période de versement des rappels d'indemnité de résidence à celle courant à compter du 1er janvier 2012 ;

2°) de condamner le centre communal d'action sociale de Roubaix à lui verser la somme de 48 494,61 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 2 février 2016 et capitalisation à chaque date anniversaire ;

3°) de condamner le centre communal d'action sociale de Roubaix à lui verser les rappels d'indemnité de résidence pour la période courant du 1er juillet 2009 au 31 juillet 2013 ;

4°) mettre à la charge du centre communal d'action sociale de Roubaix une somme de 2 500 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me F... renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. A... C..., M. C..., rapporteur-public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... D..., épouse G..., a été recrutée par le centre communal d'action sociale de Roubaix, par un contrat à durée déterminée d'une durée d'un mois, pour exercer, du 1er juillet au 31 juillet 2009, les fonctions d'aide à domicile. Elle a ensuite été maintenue de façon ininterrompue dans ses fonctions par des contrats successifs d'une durée d'un mois dont le dernier expirait le 31 juillet 2013. Estimant que sa situation contractuelle était irrégulière, Mme D..., épouse G..., a demandé au président du centre communal d'action sociale de Roubaix la requalification de son engagement de vacataire en contrat d'agent non titulaire et le versement d'une indemnité correspondant aux pertes de rémunération et de régime indemnitaire ainsi qu'au préjudice moral qu'elle estimait avoir subis. Par un jugement du 28 mai 2019 le tribunal administratif de Lille a annulé la décision implicite du 12 octobre 2016 rejetant sa demande, enjoint au centre communal d'action sociale de Roubaix de régulariser sa situation, et de mettre en oeuvre les mesures de régularisation prévues par le jugement, condamné le centre communal d'action sociale de Roubaix à lui verser les rappels d'indemnité de résidence au titre de la période non couverte par la prescription quadriennale, la somme de 7 289,04 euros à titre de dommages et intérêts, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. Mme D..., épouse G..., relève appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif de Lille a, d'une part, limité à la somme de 7 289,04 euros la condamnation du centre communal d'action sociale de Roubaix au titre des dommages et intérêts et d'autre part, limité la période de versement des rappels d'indemnité de résidence à la période courant à compter du 1er janvier 2012. Elle demande la condamnation du centre communal d'action sociale de Roubaix à lui verser d'une part la somme de 48 494,61 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 2 février 2016 et capitalisation à chaque date anniversaire et d'autre part les rappels d'indemnité de résidence pour la période courant du 1er juillet 2009 au 31 juillet 2013. Le centre communal d'action sociale de Roubaix demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de réformer ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme D..., épouse G..., une somme de 2 144,52 euros au titre de la prime de référence, une somme de 2 144,52 euros au titre de la prime métier, une somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral.

Sur la double fin de non-recevoir opposée par le centre communal d'action sociale de la commune de Roubaix :

2. La décision par laquelle l'administration rejette une réclamation tendant à la réparation des conséquences dommageables d'un fait qui lui est imputé lie le contentieux indemnitaire à l'égard du demandeur pour l'ensemble des dommages causés par ce fait générateur, quels que soient les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime et que sa réclamation ait ou non spécifié les chefs de préjudice en question.

3. La personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle.

4. Mme D..., épouse G..., demande le versement la prime de fin d'année. Cette demande, relève du même fait générateur que celui invoqué en première instance, tiré de ce qu'elle a subi un préjudice résultant de son maintien illégal en tant qu'agent vacataire et cette prétention demeure dans la limite du montant total de l'indemnité demandée en première instance. Par suite, la double fin de non-recevoir tirée de ce qu'il s'agit d'une demande nouvelle en appel et que le contentieux n'est pas lié opposée par le centre communal d'action sociale de Roubaix doit ainsi être écartée.

Sur l'exception de prescription quadriennale :

5. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Le délai de prescription quadriennale de la créance dont se prévaut un agent du fait du retard mis par l'administration à le placer dans une situation statutaire régulière court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle est intervenu l'acte ayant régularisé sa situation.

6. Mme D..., épouse G..., qui a été recrutée de manière continue du 1er juillet 2009 au 31 juillet 2013, par des contrats à durée déterminée d'une durée d'un mois pour assurer les fonctions d'aide à domicile, a effectué des missions qui ne présentaient pas le caractère d'un acte déterminé et qui répondaient à un besoin permanent de la collectivité. Ainsi, nonobstant les termes de son engagement et le mode de rémunération horaire, Mme D..., épouse G..., occupait non pas un poste de vacataire, mais un emploi permanent. Le délai de prescription de la créance dont elle se prévaut, relative notamment aux indemnités qu'elle aurait dû percevoir en tant qu'agent non titulaire, court à compter de la date où elle a été placée dans une situation régulière, qui ne saurait en tout état de cause être antérieure au 28 mai 2019, date du jugement du tribunal administratif de Lille enjoignant la régularisation de sa situation. Par suite, l'exception de prescription quadriennale de cette créance doit être écartée.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme D..., épouse G..., est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que la créance dont elle se prévalait relative aux indemnités réclamées dans son courrier du 11 aout 2016, reçue le 12 août était prescrite pour les années 2009 à 2011.

Sur les sommes dues à Mme D..., épouse G... :

8. L'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors applicable, dispose que : " (...) les agents non titulaires recrutés pour exercer les fonctions mentionnées aux articles 3 (...) de la présente loi (...) sont régis notamment par les mêmes dispositions que celles auxquelles sont soumis les fonctionnaires en application des articles.... 20, premier et deuxième alinéas du titre Ier du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales (...) Les agents contractuels qui ne demandent pas leur intégration ou dont la titularisation n'a pas été prononcée continuent à être employés dans les conditions prévues par la législation et la réglementation applicables ou suivant les stipulations du contrat qu'ils ont souscrit en tant qu'elles ne dérogent pas à ces dispositions légales ou réglementaires ". Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire (...) / Le montant du traitement est fixé en fonction du grade de l'agent et de l'échelon auquel il est parvenu, ou de l'emploi auquel il a été nommé ".

En ce qui concerne l'indemnité de résidence :

9. Aux termes de l'article 9 du décret du 24 octobre 1985 susvisé : " L'indemnité de résidence (...) est calculée sur la base de leur traitement soumis aux retenues pour pension, en fonction de l'un des taux fixés ci-après. / Les agents dont le traitement est inférieur ou égal à celui correspondant à l'indice majoré 295 (indice brut 308) perçoivent l'indemnité de résidence afférente à cet indice./ L'indemnité de résidence évolue dans les mêmes proportions que le traitement soumis aux retenues pour pension./Les taux de l'indemnité de résidence sont fixés suivant les zones territoriales d'abattement de salaires telles qu'elles sont déterminées par l'article 3 du décret du 30 octobre 1962 susvisé (...) ".

10. Les agents non titulaires des collectivités territoriales occupant un emploi permanent ont droit à un traitement fixé en fonction de cet emploi, à une indemnité de résidence. Aussi Mme D..., épouse G..., dont la rémunération était calculée en référence à l'indice afférent au grade d'agent social de 2ème classe soit à l'indice brut 292 majoré 297 en 2009 à l'indice brut 297 majoré 309 en 2013, est fondée à demander le versement de cette indemnité pour la totalité de la période en litige soit du 1er juillet 2009 au 31 juillet 2013. Toutefois, la cour n'étant pas en mesure de procéder elle-même à la fixation des montants correspondants, il y a lieu de renvoyer l'intéressée devant l'administration pour que cette dernière procède à la détermination et au versement de ces sommes.

En ce qui concerne les primes :

S'agissant de la responsabilité :

11. Ainsi qu'il a été dit au point 6, l'illégalité du maintien de Mme D..., épouse G..., en tant que vacataire pour occuper de façon ininterrompue un emploi permanent de la collectivité, et non en qualité d'agent non titulaire, est constitutive d'une faute susceptible d'engager la responsabilité du centre communal d'action sociale.

12. L'article 3 de la délibération n° 20-03-2003 C-01 du centre communal d'action sociale de Roubaix prévoit, pour " l'ensemble des agents fonctionnaires, stagiaires et non titulaires de catégorie C.. un régime indemnitaire composé pour chaque grade, .....d'une " prime de référence " versée à tous les agents susvisés, d'une " prime métier " destinée aux agents de catégorie C exerçant un métier exigeant, intrinsèquement ou compte tenu de leur grade, d'une " indemnité pour conditions spéciales de travail " allouée aux seuls agents soumis à des conditions particulières de travail répertoriées lors des négociations sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (travail de nuit ou en horaires décalés) ".

13. Mme D..., épouse G..., demande la réparation de la privation du bénéfice du régime indemnitaire auquel les agents non-titulaires, occupant un emploi permanent, assimilés aux agents sociaux territoriaux sont éligibles en application des délibérations du 20 mars 2003 et du 8 novembre 2007 du centre communal d'action sociale de Roubaix. Si Mme D..., épouse G..., fonde le montant des sommes qu'elle estime lui être dues sur la fin de ses fonctions au 30 septembre 2013, elle reconnait toutefois que celles-ci ont en fait pris fin le 31 juillet 2013 comme le fait observer le centre intimé.

S'agissant de la prime de référence :

14. Mme D..., épouse G..., a droit à une indemnité correspondant au versement de la prime de référence, versées à tous les agents de la catégorie C sans condition. L'article 2 de la délibération n° 08 11 2007 C 07 du 8 novembre 2007 fixant le montant de cette prime, pour les agents sociaux, à 100 euros bruts mensuels indexés sur l'évolution de la valeur du point d'indice, soit la somme non contestée de 102,12 euros, elle est dès lors fondée à obtenir, sur l'intégralité de sa période d'engagement, la somme nette correspondant à la somme brute de 5 005,86 euros.

S'agissant de l'indemnité pour conditions spéciales de travail :

15. Selon l'article 6 de la délibération du 20 mars 2003 précitée, seuls " les agents exerçant leur activité professionnelle exclusivement de nuit ou soumis exclusivement, en raison même de leur activité, à des horaires irréguliers et fluctuants " sont éligibles à l'indemnité pour conditions spéciales de travail. S'il n'est pas contestable que Mme D..., épouse G..., avait des horaires fluctuants entre elle ne démontre pas en quoi ses horaires étaient irréguliers. Par suite, Mme D..., épouse G..., n'est pas fondée à obtenir le versement d'une indemnité correspondante.

S'agissant de la prime métier :

16. Il résulte des dispositions de l'article 3 de la délibération du 20 mars 2003 précitée, que l'ensemble des agents non titulaires de catégorie C employés par le centre communal d'action sociale de Roubaix assimilés au cadre d'emplois des agents sociaux et " exerçant un métier exigeant, intrinsèquement ou compte tenu de leur grade " sont susceptibles de percevoir une " prime métier ". Compte tenu des efforts physiques particuliers requis par les fonctions d'aide à domicile, la requérante était éligible à cette indemnité dont le montant mensuel, indexé sur l'évolution de la valeur du point d'indice, est calculé sur la base de la prime de référence multiplié par un coefficient variant de 0 à 3, en application de la délibération n° 08 11 2007 C 07 du 8 novembre 2007.

17. Mme D..., épouse G..., soutient qu'elle aurait dû bénéficier d'une prime métier affectée d'un coefficient 3. Toutefois elle n'établit pas avoir porté des charges et effectué des travaux d'entretien dans des zones difficiles d'accès comme elle l'allègue. Par suite, ainsi que l'a estimé le tribunal administratif de Lille, la prime doit être calculée avec un coefficient fixé à 1. Il convient ainsi de lui allouer une indemnisation équivalente à la somme nette correspondant à la somme brute de 5 005,86 euros.

S'agissant de la prime de fin d'année :

18. Il résulte d'une délibération n° 08 11 2007 C du 8 novembre 2007 que le conseil d'administration du centre communal d'action sociale de Roubaix a approuvé le maintien d'une prime de fin d'année applicable à tous les personnels, cette prime, d'un montant initial de 1 184,00 euros brut par an indexé sur l'évolution du point d'indice de la fonction publique, étant versée en deux fractions, l'une en mai, l'autre en novembre. La première fraction correspond à la période courant du 1er novembre de l'année N-1 au 30 avril de l'année N, la seconde fraction comprend la période allant du 1er mai au 30 octobre de l'année N. Le montant de la prime est alors calculé au prorata temporis de la présence de l'agent. Au titre des années 2009 à 2013, Mme D..., épouse G..., a ainsi droit au versement d'une indemnité équivalente à la somme nette correspondant à la somme brute de 4 730,70 euros.

Sur le préjudice moral :

19. En vertu de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les collectivités locales et leurs établissements publics ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de fonctionnaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison notamment d'un congé de maladie, d'un congé de maternité, d'un congé parental ou d'un congé de présence parentale, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu . Aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 15 février 1988, dans sa rédaction applicable jusqu'au 1er janvier 2016 : " L'agent non titulaire est recruté, soit par contrat, soit par décision administrative. L'acte d'engagement est écrit. Il précise l'article et, éventuellement, l'alinéa de l'article de la loi du 26 janvier 1984 précitée en vertu duquel il est établi. Il fixe la date à laquelle le recrutement prend effet et, le cas échéant, prend fin et définit le poste occupé et ses conditions d'emploi. Il indique les droits et obligations de l'agent. ".

20. Il résulte de l'instruction que plusieurs des contrats de travail ont été soumis à la signature de Mme D..., épouse G..., et signés par le centre communal d'action sociale de Roubaix postérieurement à leur entrée en vigueur voire pour celui se rapportant au mois d'août 2011, après sa période d'exécution, en méconnaissance des dispositions de l'article 3 du décret du 15 février 1988. Mais l'appelante ne justifie d'aucun préjudice direct et certain qui en aurait résulté.

21. L'article 2 du décret du 28 août 1992 portant statut particulier du cadre d'emplois des agents sociaux territoriaux prévoit que " En qualité d'aide-ménagère ou d'auxiliaire de vie, ils sont chargés d'assurer des tâches et activités de la vie quotidienne auprès de familles, de personnes âgées ou de personnes handicapées, leur permettant ainsi de se maintenir dans leur milieu de vie habituel ". Mme D..., épouse G..., fait valoir qu'elle s'est vu confier des missions telles que des soins et des toilettes qui ne relèvent pas de son cadre d'emplois mais relevant d'un cadre d'emplois nécessitant l'obtention de diplômes spécifiques. Il n'est toutefois pas établi que son employeur lui ai demandé d'effectuer des soins, ce qu'il conteste. Si Mme D..., épouse G..., a versé en première instance une attestation d'un bénéficiaire reconnaissant que celle-ci avait effectué sa toilette, il n'est pas établi par cette seule production que le centre communal d'action sociale de Roubaix lui ait expressément demandé de réaliser la toilette de bénéficiaires des services du centre précité.

22. Dans les circonstances de l'espèce, le tribunal administratif de Lille n'a pas fait une inexacte évaluation des préjudices subis par Mme D... épouse G... du fait du préjudice moral résultant de la précarité de son statut et de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de bénéficier des droits reconnus aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, en lui accordant une indemnité d'un montant de 3 000 euros.

23. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D..., épouse G..., est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a estimé que ses demandes étaient prescrites pour la période allant de 2009 à 2011. Le centre communal d'action sociale doit être condamné à lui verser la somme réparant la perte de l'indemnité de résidence au titre de l'ensemble de sa période d'engagement du 1er juillet 2009 au 31 juillet 2013, à charge pour le centre de procéder au calcul de cette somme. Il doit également être condamné à lui verser la somme nette correspondant à la somme brute de 14 742,42 euros correspondant aux primes de référence, prime métier et prime de fin d'année. Il doit enfin être condamné à lui verser la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

24. Mme D..., épouse G..., a droit aux intérêts au taux légal qu'elle demande uniquement sur les sommes mises à la charge du centre communal d'action sociale de Roubaix au titre des dommages et intérêts pour l'absence de versement de primes et l'indemnisation de son préjudice moral, à compter du 12 août 2016, date de réception de sa demande par le centre communal d'action sociale de Roubaix.

25. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. Toutefois, cette demande prend effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 17 octobre 2019. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter de cette date, à laquelle était due une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.

Sur les frais d'instance :

26. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par le centre communal d'action sociale de Roubaix doivent dès lors être rejetées. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre communal d'action sociale de Roubaix une somme de 1 500 euros au profit de Me F..., avocat de Mme D..., épouse G..., sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre communal d'action sociale de Roubaix est condamné à verser à Mme D..., épouse G..., les rappels d'indemnité de résidence au titre de l'ensemble de la période du 1er juillet 2009 au 31 juillet 2013.

Article 2 : La somme que le centre communal d'action sociale de Roubaix a été condamné à verser à Mme D..., épouse G..., par l'article 4 du jugement attaqué est portée à la somme nette correspondant à la somme brute de 14 742,42 euros à laquelle s'ajoute la somme de 3000 euros.

Article 3 : Les sommes mentionnées aux articles 2 et 3 seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 12 août 2016. Les intérêts échus à la date du 17 octobre 2019, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : Le jugement n° 1609631 du 28 mai 2019 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le centre communal d'action sociale de Roubaix versera à Maître F... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celui-ci renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Me F... pour Mme B... D..., épouse G..., et à Me E... pour le centre communal d'action sociale de la commune de Roubaix.

2

N°19DA02346


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02346
Date de la décision : 25/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : GUILMAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-03-25;19da02346 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award