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01/04/2021 | FRANCE | N°19DA00222

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 01 avril 2021, 19DA00222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de leur accorder la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2013.

Par un jugement n° 1603592 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens, d'une part, a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à la suite du dégrèvement par l'administration, à hauteur de la somm

e de 5 727 euros, de la pénalité prévue par le a. de l'article 1729 du code général de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de leur accorder la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2013.

Par un jugement n° 1603592 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens, d'une part, a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à la suite du dégrèvement par l'administration, à hauteur de la somme de 5 727 euros, de la pénalité prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts dont avaient été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge au titre de l'année 2013, d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 25 janvier et 16 septembre 2019, M. et Mme C..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 ;

2°) de prononcer la décharge des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... A..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 28 janvier 2011, M. et Mme C... ont cédé, pour 345 000 euros, 380 des parts qu'ils détenaient dans la SAS Cefur, auto-école dont Mme C... est la présidente, représentant 38 % du capital social de cette société. Ils n'ont pas porté le produit de cession sur leur déclaration de revenu global et n'ont pas souscrit la déclaration spéciale des plus-values ou moins-values réalisées. Le 25 juillet 2014, le pôle de contrôle et d'expertise d'Amiens Nord-Est a adressé à M. et Mme C... un courrier les invitant à souscrire, notamment, leur déclaration des plus-values ou moins-value réalisées au titre de l'année 2011. Les intéressés ont déposé cette déclaration le 30 septembre 2014, en y portant la plus-value réalisée à l'occasion de la cession des droits sociaux de la SAS Cefur, corrigée de diverses moins-values, pour un montant de 229 389 euros. Estimant, d'une part, que le prix d'acquisition des parts sociales de la SAS Cefur retenu par M. et Mme C... pour le calcul de cette-plus-value était surévalué et, d'autre part, que le montant des pertes portées par les intéressés sur leur déclaration spéciale était supérieur à celui des pertes qu'ils avaient effectivement supportées, l'administration a informé les intéressés, par une proposition de rectification en date du 12 décembre 2014, du rehaussement de leur base d'imposition au titre de la plus-value nette réalisée en 2011 et de son intention d'appliquer aux impositions supplémentaires résultant de ce rehaussement les intérêts de retard, ainsi que la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts. Les observations formulées par M. et Mme C... sur les majorations ainsi envisagées ont fait l'objet, le 19 mars 2015, d'une décision de rejet. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme C... ont, en conséquence, été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que les pénalités correspondantes, ont été mises en recouvrement le 30 septembre 2015. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 31 décembre 2018 en tant que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de leur demande tendant à la décharge de la majoration de 40 %, prévue par les dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts, dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Sur la majoration initialement appliquée par l'administration :

2. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

3. Pour justifier l'application de la majoration prévue par ces dispositions aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux assignées à M. et Mme C... au titre de l'année 2011, l'administration s'est fondée sur ce que les intéressés ne pouvaient ignorer avoir manqué à leurs obligations déclaratives. A cet égard, elle fait valoir que les intéressés n'ont déclaré la plus-value réalisée en 2011 qu'après y avoir été invités par le service, et relève l'importance de cette plus-value, l'absence conjointe de dépôt par la SAS Cefur du volet 2561 ter du formulaire unique prévu par les dispositions l'article 49-1 de l'annexe III du code général des impôts, la minoration du montant de cette plus-value dans la déclaration de plus-value tardivement déposée par les intéressés et la double imputation dans cette déclaration d'une moins-value réalisée par M. et Mme C..., au cours de la même année, à l'occasion de la clôture d'un plan d'épargne par actions.

4. Toutefois, l'administration ne conteste pas que M. et Mme C... avaient confié à un cabinet d'avocat la réalisation de la vente des parts sociales de la SAS Cefur et que cette mission incluait la préparation des imprimés destinés aux services fiscaux, comme ils le mentionnent dans un courrier adressé à ce conseil le 19 septembre 2014. Ce dernier indique, dans un courrier du 12 février 2005, s'être abstenu de porter le montant de la plus-value sur l'imprimé spécial règlementaire. Le cabinet comptable de la société, confirme quant à lui, dans deux courriers du 1er juin 2015, n'avoir pu déclarer cette plus-value, qui ne figurait pas sur le formulaire de déclaration qui lui avait été communiqué, et avoir adressé à son assureur une déclaration de sinistre. Compte tenu de ces éléments, produits pour la première fois en appel, du caractère ponctuel de l'opération à l'origine des rectifications, de l'absence de compétence spécifique présentée par les requérants en matière de fiscalité et du devoir de conseil incombant aux professionnels qui les ont assistés, dont, au demeurant, M. et Mme C... ont ultérieurement recherché la responsabilité, l'administration ne saurait, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme établissant que ceux-ci se seraient délibérément soustraits à l'imposition frappant la plus-value non portée sur leur déclaration de revenus globale au titre de l'année 2011, alors-même que les contribuables sont tenus à une obligation d'exactitude de leurs déclarations fiscales Ainsi, M. et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration leur a infligé la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts.

Sur la substitution de base légale demandée par l'administration :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) / b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; / (...) ".

6. Il résulte des termes mêmes du courrier qui, adressé à M. et Mme C... le 25 juillet 2014, les invitait à produire la déclaration spéciale de plus-value au titre de l'année 2011, que celui-ci ne présentait pas le caractère d'une mise en demeure. Au surplus, l'administration n'établit pas la date de réception de ce courrier par les intéressés, ni ne soutient qu'ils auraient été destinataires d'un autre document, constitutif d'une mise en demeure. Dans ces conditions, l'administration n'est pas fondée à soutenir qu'en raison du caractère tardif du dépôt du formulaire spécial de déclaration de plus-value auquel les requérants ont procédé le 30 septembre 2014, les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts auraient été susceptibles de fonder la majoration de 40 % dont elle a assorti les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

7. En second lieu, les dispositions du a. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts prévoient que le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de 10 % en l'absence, notamment, de mise en demeure d'avoir à le produire dans ce délai. Par ailleurs, aux termes de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. / II. - Cette majoration n'est pas applicable : / a) En cas de régularisation spontanée ou lorsque le contribuable a corrigé sa déclaration dans un délai de trente jours à la suite d'une demande de l'administration ; / b) Ou lorsqu'il est fait application des majorations prévues par les b et c du 1 de l'article 1728, par l'article 1729 ou par le a de l'article 1732. ".

8. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que la déclaration spéciale de plus-value, elle-même entachée d'insuffisance de déclaration, a été déposée par M. et Mme C... au-delà des délais prescrits à cet effet, à la suite de l'envoi du courrier, en date du 25 juillet 2014, les invitant à se conformer à leurs obligations déclaratives. Cette régularisation, qui a consisté dans le dépôt de la déclaration spéciale de plus-value non souscrite au titre de l'année 2011, et non pas dans la correction d'erreurs qui auraient affecté une telle déclaration, ne présentait pas un caractère spontané. Par ailleurs, il résulte des indications suffisamment précises, non sérieusement contestées par M. et Mme C..., figurant dans la décision de rejet de leur réclamation que, pour justifier l'application de la majoration de 40 %, initialement infligée aux requérants, l'administration avait retenu le caractère tardif du dépôt de cette déclaration spéciale comme un indice de l'intention délibérée des contribuables d'éluder l'impôt. Ces faits suffisaient à justifier tant l'application des dispositions précitées du a. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts que celle de l'article 1758 A de ce même code, aux droits supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux assignés à M. et Mme C... au titre de l'année 2011 sur la base des éléments portés par eux sur cette déclaration, même corrigés par le service. Il y a lieu, par suite, de substituer à la majoration au taux de 40 %, initialement retenue par l'administration sur le fondement des dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts, la majoration au taux de 10 % prévue par les dispositions du a. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, ainsi que la majoration au taux de 10 % prévue par les dispositions de l'article 1758 A du même code.

Sur les frais relatifs à l'instance :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais, non compris dans les dépens, exposés par M. et Mme C... dans le cadre de la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La majoration au taux de 10 % résultant de l'application des dispositions du a. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, ainsi que la majoration au taux de 10 % résultant de l'application de l'article 1758 A du code général des impôts, sont substituées à la majoration au taux de 40 %, prévu par le a. de l'article 1729 du code général des impôts dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Article 2 : M. et Mme C... sont déchargés de la différence entre la majoration pour manquement délibéré au taux de 40 % dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 et celles qui lui sont substituées par l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement du 31 décembre 2018 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme C... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... C... et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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No19DA00222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00222
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL BE-LAW et CONSULTING

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-04-01;19da00222 ?
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