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10/06/2021 | FRANCE | N°20DA00027

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3, 10 juin 2021, 20DA00027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat départemental CGT des agents de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Seine-Maritime, le syndicat départemental CGT de l'Eure des agents des services extérieurs du ministère du travail, le syndicat SUD Travail-Affaires sociales, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Haute-Normandie, M. F..

. L..., Mme H... I..., M. A... G..., M. B... D..., Mme E... C... et M. K...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat départemental CGT des agents de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Seine-Maritime, le syndicat départemental CGT de l'Eure des agents des services extérieurs du ministère du travail, le syndicat SUD Travail-Affaires sociales, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Haute-Normandie, M. F... L..., Mme H... I..., M. A... G..., M. B... D..., Mme E... C... et M. K... M... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision implicite, née le 28 avril 2017, par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a refusé de saisir l'inspecteur du travail en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, d'enjoindre audit directeur de saisir l'inspecteur du travail compétent ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de la situation au regard de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982, dans le délai d'un mois à compter du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 euros à verser à chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1701576 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 janvier 2020 et 7 avril 2021, le syndicat départemental CGT des agents de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Seine-Maritime, le syndicat départemental CGT de l'Eure des agents des services extérieurs du ministère du travail, le syndicat SUD Travail-Affaires sociales, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie, M. F... L..., Mme H... I..., M. A... G..., M. B... D..., Mme E... C... et M. K... M..., représentés par Me J..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite, née le 28 avril 2017, par laquelle directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a refusé de saisir l'inspecteur du travail en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ;

3°) d'enjoindre au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie de saisir l'inspecteur du travail compétent ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de leur demande dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 euros à verser à chacun des appelants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner solidairement l'Etat et la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie à payer au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de celle-ci les frais et dépens exposés pour faire valoir leurs droits.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de M. L....

Considérant ce qui suit :

1. Par le vote d'une délibération, le 28 février 2017, les représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie ont demandé la saisine d'un inspecteur du travail en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique. Une décision implicite de rejet est née le 28 avril 2017 du silence gardé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie. M. L..., le syndicat départemental CGT des agents de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Seine-Maritime, le syndicat départemental CGT de l'Eure des agents des services extérieurs du ministère du travail, le syndicat SUD Travail-Affaires sociales, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie, Mme I..., M. G..., M. D..., Mme C... et M. M... relèvent appel du jugement du 7 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision implicite.

2. Aux termes de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique : " Le représentant du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui constate qu'il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l'intermédiaire d'un agent, en alerte immédiatement le chef de service ou son représentant selon la procédure prévue au premier alinéa de l'article 5-5 et consigne cet avis dans le registre établi dans les conditions fixées à l'article 5-8. / Le chef de service procède immédiatement à une enquête avec le représentant du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui lui a signalé le danger et prend les dispositions nécessaires pour y remédier. Il informe le comité des décisions prises. / En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, notamment par arrêt du travail, de la machine ou de l'installation, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail compétent est réuni d'urgence, dans un délai n'excédant pas vingt-quatre heures. L'inspecteur du travail est informé de cette réunion et peut y assister. / Après avoir pris connaissance de l'avis émis par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail compétent, l'autorité administrative arrête les mesures à prendre. / A défaut d'accord entre l'autorité administrative et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur les mesures à prendre et leurs conditions d'exécution, l'inspecteur du travail est obligatoirement saisi. ".

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :

3. Tout membre d'un organisme consultatif est fondé à se prévaloir de cette qualité pour justifier d'un intérêt à contester une mesure prise après sa consultation. Il ressort des pièces du dossier que Mmes I... et C... ainsi que MM. L..., G..., D... et M... sont agents de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie et membres de son comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. La décision en litige du 28 avril 2017 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a implicitement refusé de saisir un inspecteur du travail, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, a été prise à la suite de la réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail en date du 28 février 2017. Dans ces conditions et contrairement à ce que soutient la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en défense, ces six personnes physiques ont un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre de la décision contestée et à faire appel du jugement rejetant leurs demandes en annulation de cet acte. Par suite, la demande de première instance et la requête sont recevables au moins en tant qu'elles sont présentées par eux.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Il ressort des pièces du dossier que, le 25 novembre 2016, lors d'une réunion conjointe des deux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des anciennes régions Haute-Normandie et Basse-Normandie, fusionnées depuis le 1er janvier 2016, un avis de " danger grave et imminent " a été émis par les représentants du personnel, sur le fondement du premier alinéa de l'article 5-7 précité du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, afin d'alerter le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie de l'existence de tensions et de situations de souffrance au travail au sein du pôle " Entreprises Emploi et Economie " de ladite direction. Le 28 novembre 2016, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a lancé la procédure d'enquête prévue par les dispositions du deuxième alinéa du même article.

5. Par un courriel du 16 février 2017 adressé aux membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie les a informés de la modification de l'ordre du jour du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 28 février 2017 pour le consacrer à la situation du pôle " Entreprises Emploi et Economie " de ladite direction et a estimé qu'" au vu de l'ensemble des éléments, il n'y a pas de danger grave et imminent persistant ". Par un courriel du même jour, l'un des représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail à l'origine de l'alerte émise le 25 novembre 2016, a sollicité, du fait de la divergence existant sur la réalité du danger, l'invitation d'un inspecteur du travail à la réunion dudit comité du 28 février 2017, en application du troisième alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 précité. Ainsi, la divergence sur la réalité du danger au sens de cet alinéa a été constatée dès le 16 février 2017. Les circonstances que la demande d'invitation de l'inspecteur du travail à la réunion du comité du 28 février 2017 n'ait pas été satisfaite, que cette réunion ne soit pas intervenue dans le délai de 24 heures prévu par ce même alinéa et que, par courriel du 27 février 2017, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a indiqué qu'il convoquerait ultérieurement un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur la divergence concernant l'existence d'un danger, ce qui n'a au demeurant jamais été fait, ne permettent pas d'estimer que la réunion du 28 février 2017 ne serait pas celle prévue par le troisième alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 précité.

6. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'au cours de la réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie du 28 février 2017, après que le directeur a, de nouveau, estimé que les situations identifiées au cours de l'enquête diligentée n'étaient pas constitutives d'une situation de danger grave et imminent, les membres dudit comité ont, par une délibération du même jour, sollicité la saisine de l'inspecteur du travail en application du cinquième alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 précité. Dans ces conditions, le désaccord sur la réalité du danger et donc a fortiori sur les mesures à prendre par l'autorité administrative pour y remédier, devait conduire, en application de cet alinéa, à la saisine de l'inspecteur du travail. En refusant d'y procéder, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a, par la décision contestée, méconnu les dispositions du cinquième alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 précité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite du 28 avril 2017 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie a refusé de saisir l'inspecteur du travail. Ce jugement et cette décision doivent ainsi être annulés.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. Il ne résulte pas de l'instruction, en l'absence de tout élément au dossier sur ce point, que persisteraient, à la date du présent arrêt, soit plus de quatre ans après les faits en litige, une situation de danger grave et imminent au sein du pôle " Entreprises Emploi et Economie " de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie ainsi qu'une divergence entre l'autorité administrative et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur la réalité de ce danger. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, tendant à ce que le directeur régional saisisse l'inspecteur du travail sur le fondement du dernier alinéa de l'article 5-7 du décret du 28 mai 1982 précité ni à ce qu'il procède au réexamen de cette demande. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les appelants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par ailleurs, la présente instance n'ayant entraîné aucun dépens, il y a lieu de rejeter la demande tendant au remboursement de ceux-ci.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 7 novembre 2019 du tribunal administratif de Rouen et la décision implicite du 28 avril 2017 du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... L... désigné comme représentant unique des appelants, en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Copie en sera adressée au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Normandie.

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N°20DA00027

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20DA00027
Date de la décision : 10/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Comités d'hygiène et de sécurité.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : BESTAUX - BONVOISIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-06-10;20da00027 ?
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