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23/09/2021 | FRANCE | N°21DA00757

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 23 septembre 2021, 21DA00757


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 juin 2020 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2002262 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête, enregistrée le 2 avril 2021, M. B..., représenté par Me Lucile Matrand, demande à la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure:

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 juin 2020 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2002262 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, M. B..., représenté par Me Lucile Matrand, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du 3 juin 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien né le 15 mars 1980, serait selon ses déclarations entré en France le 2 mars 2009. Le 17 juin 2016, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 5 décembre 2016, le préfet de l'Eure a refusé d'examiner cette demande. Par un jugement du 1er février 2019, le tribunal administratif de Rouen a annulé ce refus et a enjoint au préfet de l'Eure d'enregistrer la demande de M. B.... Par un arrêté du 3 juin 2020, le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. B... relève appel du jugement du 1er décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Aux termes de l'article 5 du décret du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles devant les juridictions de l'ordre administratif : " Par dérogation aux articles R. 741-7 à R. 741-9 du code de justice administrative, la minute de la décision peut être signée uniquement par le président de la formation de jugement. ".

3. Il ressort de la minute du jugement produite avec les pièces du dossier de première instance que ce jugement a été signé par le président de la formation de jugement. La circonstance que l'ampliation notifiée à M. B... ne comporte pas la reproduction de cette signature est sans incidence sur la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier pour ce motif doit être écarté.

4. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. / (...) ".

5. Le jugement attaqué contient une analyse des moyens et des conclusions des parties, qui n'est pas sérieusement contestée par M. B.... La critique du jugement en ce que les premiers juges n'auraient pas pris en compte ses pièces de nature à justifier sa durée de présence en France et la réalité de son concubinage se rattache au bien-fondé du jugement et non à sa régularité. Une telle critique n'est, en tout état de cause, pas de nature à constituer une méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative citées au point précédent.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. L'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

7. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier et des motifs de l'arrêté en litige que le préfet de l'Eure n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de la situation de M. B....

8. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".

9. M. B... soutient être arrivé en France en 2009 et vivre en concubinage avec une compatriote depuis 2014, avec laquelle il a eu deux filles, nées respectivement les 12 octobre 2015 et 12 octobre 2017. Toutefois, il n'établit pas la réalité de son séjour en France depuis 2009, en se bornant à produire uniquement pour les années 2010, 2011, 2012 et 2013 des avis d'imposition sur le revenu et une carte d'admission à l'aide médicale valable du 4 mars 2010 au 3 mars 2014 et une ordonnance datant de 2013. S'il verse un certificat de vie commune établi le 18 septembre 2014 par le maire d'Evreux et une attestation d'hébergement du 6 janvier 2017 émanant de sa compagne, des factures d'électricité à leurs deux noms ou des lettres de relance pour des impayés, ces pièces concernent pour la plupart les années 2016, 2017 et 2018. Aucune pièce n'est produite pour l'année 2019 ou le début de l'année 2020. Or, le préfet de l'Eure fait valoir que le rapport d'enquête des services de police du 14 février 2020 constate que le nom de M. B... ne figure pas sur la boîte à lettres du domicile commun déclaré. L'enquête de voisinage a révélé que M. B... ne vit pas de façon habituelle à ce domicile, sa compagne n'ayant d'ailleurs pas déféré à la convocation des services de police. M. B... n'apporte aucun élément pour corroborer ses allégations selon lesquelles sa fille était souffrante le jour où sa compagne a été convoquée. Aucun obstacle sérieux ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue ailleurs qu'en France, M. B... n'apportant à cet égard aucune pièce pour corroborer son allégation selon laquelle la première fille de sa compagne, née d'une précédente union, serait de nationalité française. Il ne justifie pas davantage de la réalité de son emploi du temps qui expliquerait qu'il n'est pas connu de ses voisins. M. B... ne démontre également aucune insertion sociale ou professionnelle. Dans ces conditions, l'arrêté en litige, qui n'est entaché d'aucune erreur de fait, ne méconnaît pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, l'arrêté n'est entaché d'aucune d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

10. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".

11. Eu égard à ce qui a été dit au point précédent, le préfet de l'Eure n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que M. B... ne justifiait pas de circonstances exceptionnelles ou de motifs humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce moyen doit être écarté.

12. Aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission du titre de séjour est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) ".

13. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314- 11, L. 314-12 et L. 431-3 et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Pour les motifs indiqués au point 9, M. B... ne remplissait pas les conditions prévues par ces dispositions. Ainsi, le préfet de l'Eure n'était pas tenu de soumettre sa demande à la commission du titre de séjour précitée avant de la rejeter. Le moyen tiré du vice de procédure à raison du défaut de saisine de cette commission préalablement à l'édiction de l'arrêté attaqué ne peut, dès lors, qu'être écarté.

14. Par ailleurs, M. B... ne justifiant pas non plus d'une résidence habituelle depuis plus de dix ans, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour en application du 2ème alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Lucile Matrand.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.

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N°21DA00757

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00757
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MATRAND

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-09-23;21da00757 ?
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