La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/10/2021 | FRANCE | N°20DA01359

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 14 octobre 2021, 20DA01359


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2017 par lequel le maire de Béthune a fixé le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et du complément indemnitaire annuel pour l'année 2017, ensemble la décision du 30 mars 2017 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux et de condamner la commune de Béthune à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un j

ugement n° 1704854 du 3 juillet 2020 le tribunal administratif de Lille a rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2017 par lequel le maire de Béthune a fixé le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et du complément indemnitaire annuel pour l'année 2017, ensemble la décision du 30 mars 2017 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux et de condamner la commune de Béthune à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1704854 du 3 juillet 2020 le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes et l'a condamnée à verser à la commune de Béthune une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 septembre 2020 et le 1er mars 2021, Mme B... A..., représentée par Me Cattoir, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2017 par lequel le maire de Béthune a fixé le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et du complément indemnitaire annuel pour l'année 2017, ensemble la décision du 30 mars 2017 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Béthune le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

-------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur-public;

- et les observations de Me Cattoir, représentant Mme B... A..., de Me Bertin représentant la commune de Béthune.

Une note en délibéré présentée pour Mme A... par Me Cattoir a été enregistrée le 24 septembre 2021.

Une note en délibéré présentée pour la commune de Béthune par Me Barège a été enregistrée le 5 octobre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., employée depuis 1987 par la commune de Béthune en qualité d'adjoint administratif principal, a demandé l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2017 par lequel le maire de cette commune a fixé les indemnités qui lui seraient versées au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et du complément indemnitaire pour l'année 2017 et de la décision du 30 mars 2017 par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux. Par un jugement du 3 juillet 2020 le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes et l'a condamnée à verser à la commune de Béthune une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité des délibérations fixant les modalités de mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel :

2. Par une délibération du 5 juillet 2016, le conseil municipal de Béthune a décidé la mise en place d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE), déterminée par niveau et versée mensuellement selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions et en tenant compte de l'expérience professionnelle de l'agent, mais également d'un complément indemnitaire annuel, composante facultative du régime indemnitaire liée à l'engagement professionnel et la manière de servir des agents. Deux tableaux procédant à la répartition des fonctions en groupes pour chaque cadre d'emplois et détaillant les montants bruts annuels des seuils et plafonds de ces deux types d'indemnités pour chaque groupe de fonctions étaient annexés à cette délibération. Par une délibération du 13 décembre 2016, le conseil municipal a voté la modification, à compter du 1er janvier 2017, de ces deux annexes.

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ". Si, dans le cadre d'une contestation d'un acte règlementaire par voie d'exception, la légalité des règles fixées par l'acte réglementaire, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. Dès lors, Mme A... ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 24 janvier 2017, le moyen tiré de l'illégalité des délibérations des 5 juillet et 13 décembre 2016 du fait de la teneur de l'information délivrée aux membres du conseil municipal.

4.En deuxième lieu, Mme A... ne saurait utilement se prévaloir des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 et de la circulaire du 5 décembre 2014 de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique et du secrétaire d'Etat chargé du budget, relative à la mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel qui ne sont pas applicables à la fonction publique territoriale.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. (...)". Aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable au litige : " Les organes délibérants des collectivités territoriales (...) fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. (...) Lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, l'organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 précité : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales (...) pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " L'assemblée délibérante de la collectivité (...) fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités (...) ".

6. Il résulte des dispositions de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 6 septembre 1991 qu'il revient à l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité, sans que le régime ainsi institué puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat d'un grade et d'un corps équivalents au grade et au cadre d'emplois de ces fonctionnaires territoriaux et sans que la collectivité soit tenue de faire bénéficier ses fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l'Etat.

7. Il résulte par ailleurs de ces dispositions que les collectivités territoriales qui décident de mettre en place un régime indemnitaire tenant compte, pour une part, des conditions d'exercice des fonctions et, pour l'autre part, de l'engagement professionnel des agents, demeurent libres de fixer les plafonds applicables à chacune des parts, sous la seule réserve que leur somme ne dépasse pas le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. Les collectivités territoriales qui décident de mettre en place le régime de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ne sont pas tenues de définir un régime indemnitaire identique à celui des fonctionnaires de l'Etat et demeurent libres de déterminer les critères d'attribution des primes correspondant à chacune des deux parts.

8. Les délibérations des 5 juillet 2016 et 13 décembre 2016 du conseil municipal de la commune de Béthune prévoient que : " L'IFSE est liée au poste de l'agent et à son expérience professionnellle. Chaque emploi,ou cadre d'emplois est réparti entre différents groupes de fonctions au vu des critères professionnels suivants : fonctions d'encadrement, de coordination de pilotage ou de conception. Expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions. Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. (...) Le Complément Indemnitaire Annuel est une composante facultative liée à l'engagement professionnel et à la manière de servir d'un agent. L'octroi du CIA peut ainsi être lié à la réalisation des objectifs (quantitatifs ou qualitatifs) fixés au moment de l'entretien professionnel. (...) Le montant attribué à l'agent fait l'objet a minima d'un réexamen annuel, notamment à l'occasion de l'évaluation professionnelle pour l'appréciation de l'engagement professionnel et de la manière de servir. Il peut être revu en dehors de l'évaluation professionnelle en cas de circonstances exceptionnelles (rapport circonstancié à l'appui) et après avis de la direction générale. ".

9. Contrairement à ce que soutient Mme A..., aucune disposition n'institue une règle interdisant à une collectivité locale de fixer, dans le respect des dispositions de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 visant à ce que le régime indemnitaire des fonctionnaires territoriaux ne soit pas plus favorable que celui des fonctionnaires de l'Etat, un montant du complément indemnitaire annuel plus élevé que celui de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

10. Enfin, à supposer qu'en mentionnant le risque de " faire primer la servilité d'un agent " Mme A... ait entendu se prévaloir d'un détournement de pouvoir, un tel moyen doit également être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité des délibérations des 5 juillet et 13 décembre 2016 doit être écarté.

En ce qui concerne le vice de procédure :

12. Mme A... soutient que la commune de Béthune a réduit, pour 2017, le montant de son complément indemnitaire annuel de 65 euros par mois avant même la tenue de son entretien annuel. Mais Mme A... se trouvait en position de congé maladie du 13 décembre 2016 au 30 janvier 2017, aussi son entretien professionnel n'a eu lieu que le 20 février 2017. La fixation de son complément indemnitaire annuel pour l'année 2017 a bien été effectuée au regard de son engagement professionnel et de sa manière de servir au cours de l'année 2016. A cet effet, son supérieur hiérarchique avait rédigé le 10 janvier 2017 un rapport circonstancié sur lequel repose la détermination de son complément indemnitaire annuel. La possibilité de revoir le montant du complément indemnitaire annuel en dehors de l'évaluation professionnelle est explicitement prévue par la délibération du 5 juillet 2016. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté.

En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation :

13. Il ressort des pièces du dossier que le montant du complément indemnitaire annuel de Mme A... pour l'année 2017 a été fixé en tenant compte du niveau de prime moyen des agents du service " gestion prévisionnelle des emplois et compétences ". Contrairement à ce que soutient Mme A..., il ne ressort pas des pièces du dossier que ce montant n'aurait pas pris en compte le fait que son temps de travail s'effectue pour 40 % au service des ressources humaines et pour 60 % au service de gestion prévisionnelle des emplois et compétences. En outre, alors qu'un rapport circonstancié a été établi le 10 janvier 2017, le niveau de son complément indemnitaire annuel est conforme à sa manière de servir, et en rapport avec son évaluation professionnelle réalisée ultérieurement lors d'un entretien professionnel du 17 février 2017. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 000 euros au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la commune de Béthune une somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Béthune.

3

N°20DA01359


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01359
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : CATTOIR

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-10-14;20da01359 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award