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23/03/2022 | FRANCE | N°20DA00613

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 23 mars 2022, 20DA00613


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Auto Dépannage a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'agrément accordé le 23 février 2017 par la commission interdépartementale d'agrément des garagistes dépanneurs sur autoroutes concédées à la société ADVI et autorisant la conclusion d'un contrat de sous-concession entre la société ADVI et la société des autoroutes du nord et de l'est de la France (SANEF).

Par un jugement n° 1703680 du 7 février 2020, le tribunal administratif de Lille a reje

té cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 avril 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Auto Dépannage a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'agrément accordé le 23 février 2017 par la commission interdépartementale d'agrément des garagistes dépanneurs sur autoroutes concédées à la société ADVI et autorisant la conclusion d'un contrat de sous-concession entre la société ADVI et la société des autoroutes du nord et de l'est de la France (SANEF).

Par un jugement n° 1703680 du 7 février 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 avril 2020, la SA Auto Dépannage, représentée par Maître Alain Vamour, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cette décision du 23 février 2017 de la commission interdépartementale d'agrément des garagistes dépanneurs sur autoroutes concédées ;

3°) d'enjoindre à la société SANEF de prononcer la résolution, ou, à tout le moins, la résiliation du contrat de sous-concession conclu avec la société ADVI, ou, à défaut, de saisir le juge judiciaire du contrat, afin que ce dernier prononce l'annulation, ou, à tout le moins, la résiliation de ce contrat ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier au regard de l'article R. 741-2 du code de justice administrative compte tenu de l'erreur de date de lecture qui l'entache ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit en retenant que la décision attaquée est insusceptible de recours ;

- la commission était incompétente ;

- la composition de la commission était irrégulière ;

- la commission a entaché son analyse des offres de plusieurs erreurs de droit ;

- la commission a désavantagé la société Auto Dépannage en notant les critères relatifs aux équipements et aux tarifs ;

- l'agrément est illégal du fait de l'irrégularité de la procédure de passation, ce qui entraîne l'annulation du contrat de sous-concession.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la demande d'annulation de l'agrément accordé par la commission interdépartementale est irrecevable compte tenu du caractère non décisoire de l'avis attaqué ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 1er octobre 2021, prise en application de l'article R. 600-7-1 du code de justice administrative, la production de moyens nouveaux devait intervenir avant le 5 novembre 2021.

Par une ordonnance du 29 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat en application des article R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n°2012-1063 du 17 septembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Naïla Boukheloua, première conseillère,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Maître Thibault Mercier représentant la SA Auto Dépannage.

Sur l'objet du litige :

1. La SA Auto Dépannage relève appel du jugement du 7 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'agrément accordé le 23 février 2017 par la commission interdépartementale d'agrément des garagistes dépanneurs sur autoroutes concédées à la société ADVI pour les prestations de dépannage des poids lourds sur les secteurs PL n°16 et 10 des autoroutes A2 et A26, et autorisant la conclusion du contrat de sous-concession en découlant entre la société ADVI et la société des autoroutes du nord et de l'est de la France (SANEF).

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée. ".

3. Il résulte des pièces de procédure, que le jugement attaqué porte des indications contradictoires quant à la date de la lecture de ce jugement. Il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être accueilli.

4. Il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille puis de statuer par la voie de l'évocation sur la demande de la SA Auto Dépannage.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la défense :

5. D'une part, au titre de ses attributions de police générale, il appartient au Premier ministre d'adopter par voie règlementaire les mesures propres à assurer la sécurité des personnes sur les autoroutes et les ouvrages d'art concédés du réseau routier national. Le Premier ministre a ainsi pu apporter à l'exercice de l'activité de service public de dépannage des véhicules en panne ou accidentés sur l'ensemble du domaine ainsi concédé, une restriction qui, en se limitant à l'obtention préalable d'un agrément délivré par le représentant de l'Etat dans les conditions prévues par les contrats de concession, a principalement pour objet de s'assurer que les entreprises sélectionnées seront en mesure de remplir leurs missions dans l'ensemble du périmètre de la concession, et répond aux objectifs de la sécurité routière sur des voies où les conditions de circulation conjuguent vitesse élevée et importance du trafic.

6. D'autre part, l'article 13.1 du cahier des charges de la concession passée entre l'Etat et la SANEF, dans sa rédaction issue du décret du 17 septembre 2012, dispose que " La société concessionnaire est tenue d'assurer ou de faire assurer, sur l'ensemble du domaine concédé, le dépannage des véhicules en panne ou accidentés dans les conditions prévues par les cahiers des charges types arrêtés notamment par les instructions ministérielles. Lorsque la société concessionnaire décide de confier à un tiers cette activité de dépannage, elle publie par voie de presse un avis d'appel à candidatures et met à la disposition des candidats un dossier de consultation indiquant les modalités et les critères de sélection. Tout candidat retenu est soumis à l'agrément du représentant de l'Etat. "

7. Enfin, aux termes de l'article 3 de l'arrêté inter-préfectoral du 10 janvier 1996 relatif à la création d'une commission interdépartementale pour l'agrément des garagistes-dépanneurs sur les parties d'autoroutes concédées des autoroutes A1, A2 et A26 : " La Commission Interdépartementale a pour mission de donner son avis sur : / 1°) Les demandes d'agréments définitifs présentées par le Directeur de la SANEF ou son représentant. (...) ".

8. Il résulte de ce qui précède que l'autorité compétente pour délivrer l'agrément à l'exercice de l'activité de service public de dépannage des véhicules en panne ou accidentés sur les autoroutes concédées est le préfet au nom de l'Etat. Si par un arrêté inter-préfectoral du 10 janvier 1996 une commission interdépartementale pour l'agrément des garagistes dépanneurs sur les parties concédées des autoroutes A2 et A26 a été mise en place, notamment dans le département du Pas-de-Calais, il résulte de cet arrêté que cette commission se borne à rendre un avis à destination du préfet sur ces demandes d'agrément.

9. L'avis rendu dans ce cadre par cette commission le 23 février 2017 ne présente donc pas le caractère d'un acte administratif décisoire susceptible d'être contesté devant le juge administratif par la voie d'un recours pour excès de pouvoir.

10. A cet égard, d'une part, contrairement aux allégations de la société requérante, la circulaire du 25 avril 2013 relative à l'organisation du dépannage sur les autoroutes concédées et les ouvrages d'art concédés du réseau routier national n'énonce pas que cette commission rend une décision validant la délivrance d'un agrément au candidat sélectionné par la société concessionnaire. Cette circulaire énonce, au contraire, que " Le Préfet (...) peut se faire assister, dans l'examen des dossiers d'agrément présentés par les sociétés concessionnaires d'autoroutes ou d'ouvrages d'art, par une commission d'examen des agréments, instituée par arrêté préfectoral (...) ". La société requérante n'est donc, en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir de cette circulaire pour faire valoir le caractère décisoire de l'avis attaqué.

11. D'autre part, il ne peut être davantage déduit des termes de la lettre du 10 février 2017 de la préfète du Pas de Calais, dans laquelle il est question de l'examen des demandes d'agrément définitif présentées par la SANEF lors de la réunion de la commission interdépartementale d'agrément le 23 février 2017, un quelconque caractère décisoire des délibérations de cette commission.

12. Enfin, la circonstance que la préfète du Pas de Calais n'ait pas formalisé sa décision d'accorder un agrément à la société ADVI est sans incidence sur le caractère non décisoire de l'avis attaqué.

13. Il suit de là que les conclusions à fin d'annulation présentées par la société requérante sont irrecevables.

14. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille n° 1703680 du 7 février 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SA Auto Dépannage devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Auto Dépannage et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 1er mars 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes Honoré, présidente-assesseure,

- Mme Naïla Boukheloua, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2022.

La rapporteure,

Signé : N. Boukheloua

Le président de la 1ère chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N°20DA00613

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00613
Date de la décision : 23/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-03 Professions, charges et offices. - Conditions d'exercice des professions.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Naila Boukheloua
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SCP BIGNON LEBRAY et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-03-23;20da00613 ?
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