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26/07/2022 | FRANCE | N°21DA02149

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 26 juillet 2022, 21DA02149


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 29 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité et d'ordonner une expertise visant à déterminer le taux d'invalidité concernant, d'une part, sa blessure à la cheville, d'autre part, la maladie lombaire contractée dans l'exercice de ses fonctions.

Par un jugement n° 1903510 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2021, M. C...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 29 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité et d'ordonner une expertise visant à déterminer le taux d'invalidité concernant, d'une part, sa blessure à la cheville, d'autre part, la maladie lombaire contractée dans l'exercice de ses fonctions.

Par un jugement n° 1903510 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2021, M. C..., alors représenté par Me Anne-Sophie Chartrelle, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 29 novembre 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de lui accorder une pension militaire d'invalidité dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la ministre des armées une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions des articles L. 121-4 et L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre trouvent à s'appliquer à sa demande de concession de pension ;

- les pièces médicales qu'il produit établissent qu'il présente une lombosciatalgie et une instabilité de la cheville droite, contractées en service, qui justifient un taux d'invalidité supérieur à 30%, contrairement à ce qu'a retenu l'expert désigné par le ministre des armées qui s'est prononcé alors que son état de santé n'était pas consolidé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête en appel de M. C....

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués au soutien de la requête de M. C... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère,

- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., né le 17 août 1979, sert sous contrat dans l'armée de l'air depuis mars 1998. Le 2 avril 2013, il a demandé la concession d'une pension militaire d'invalidité pour deux infirmités consécutives à une lombosciatalgie et à une instabilité de la cheville droite. Par une décision du 29 novembre 2016, le ministre de la défense a rejeté cette demande aux motifs que le taux d'invalidité résultant de la lombosciatalgie, maladie contractée en temps de paix, n'atteignait pas 30% et que celui résultant de l'instabilité de la cheville droite, acquise à la suite d'une blessure, n'atteignait pas 10%, s'agissant des deux taux requis pour ouvrir droit à pension. Par un jugement du 8 juillet 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de cette décision. M. C... relève appel de ce jugement.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, devenu l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...)". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité./ Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %./ Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30% ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30% en cas d'infirmité unique ; 40% en cas d'infirmités multiples (...) ".

3. D'autre part, en vertu l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre devenu l'article L. 151-2 de ce code, l'administration doit se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée.

4. En l'espèce, s'agissant de la première infirmité invoquée par M. C..., le Dr A..., expert médical diligenté pour l'instruction de la demande de pension de l'intéressé, a constaté dans son rapport du 9 janvier 2016 l'existence de lombosciatalgies rebelles et invalidantes et un déconditionnement rachidien en lien avec une discopathie et une instabilité discale étagées lombo-sacrées, ainsi que des épisodes de discopathies protrusives provoquées par des mouvements combinés du rachis et le port de charges lourdes imposées par le poste occupé dans le cadre de l'activité militaire. Elle en a déduit un taux d'invalidité de 25% résultant de la nécessité " d'appliquer des principes d'économie totale du rachis dans les gestes quotidiens " et la limitation de port de charges lourdes inférieures à 10 kilogrammes. Or, aucune des pièces médicales versées au dossier par M. C..., en première instance comme en appel, ne permet de remettre en cause cette appréciation du taux d'invalidité qu'a retenu l'administration et qui, étant inférieur à 30%, n'ouvre pas droit à pension, en vertu des principes rappelés au point 2 du présent arrêt, s'agissant d'une maladie contractée en temps de paix et non d'une blessure. M. C... n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration lui a refusé la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre de cette première infirmité.

5. S'agissant en revanche de la seconde infirmité invoquée par le requérant, il ressort des pièces du dossier qu'elle résulte d'une entorse à la cheville droite survenue alors que M. C... arbitrait un match de football le 14 novembre 2000, dans le cadre de son service et de plusieurs autres entorses survenues ultérieurement également en service. M. C... a subi une ligamentoplastie en septembre 2012, reprise en 2014. Il résulte du même rapport d'expertise du 9 janvier 2016 du Dr A... qu'ont persisté des douleurs de la cheville droite de type mécanique au niveau de la malléole externe, une sensation d'instabilité sur les terrains instables et une entorse de la cheville chronique malgré la ligamentoplastie pratiquée en septembre 2012. Si l'expert a relevé que l'examen clinique ne mettait pas en évidence de déficit significatif en dehors de la douleur et de l'instabilité chronique à l'origine des entorses à répétition, il a néanmoins conclu à un taux d'invalidité de 15% qu'aucune des pièces versées au dossier par l'administration ne permet de contredire, en dépit de l'avis de de la commission consultative médicale du 8 novembre 2016 qui a considéré que le taux d'invalidité devait être apprécié comme étant inférieur au seuil de 10%. Dès lors, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration lui a refusé la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité. Il y a donc lieu de prononcer l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Amiens sur ce point, ainsi que l'annulation de la décision du 29 novembre 2016 du ministre de la défense en tant qu'elle a rejeté la demande de pension militaire d'invalidité de M. C... au titre de l'instabilité de la cheville droite, acquise à la suite d'une blessure contractée en service.

6. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre des armées de concéder à M. C... une pension militaire d'invalidité en tenant compte de son infirmité de 15% à la date du 2 avril 2013, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article1er : Le jugement n° 1903510 du 8 juillet 2021 du tribunal administratif d'Amiens est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 29 novembre 2016 du ministre de la défense rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité au titre de l'instabilité de la cheville droite, acquise à la suite d'une blessure.

Article 2 : La décision du 29 novembre 2016 du ministre de la défense est annulée en tant qu'elle a rejeté la demande de M. C... tendant à la concession d'une pension militaire d'invalidité au titre de l'instabilité de la cheville droite, acquise à la suite d'une blessure.

Article 3 : Il est enjoint au ministre des armées de concéder à M. C... une pension militaire d'invalidité en tenant compte de son infirmité de 15% à la date du 2 avril 2013, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience publique du 5 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure,

- Mme Anne Khater, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juillet 2022.

La rapporteure,

Signé : A. KhaterLa présidente de chambre,

Signé : A. Seulin La greffière,

Signé : A.S. Villette La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Anne-Sophie Villette

2

N°21DA02149


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA02149
Date de la décision : 26/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : SCP FRISON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-07-26;21da02149 ?
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