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10/01/2023 | FRANCE | N°21DA01956

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 10 janvier 2023, 21DA01956


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Enedis a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de Loos a décidé de résilier ou de " constater l'expiration " des conventions de concession conclues les 8 février et 1er août 1913 avec la société lilloise d'éclairage et la société électricité et gaz du Nord, de demander à la société Enedis de lui remettre les ouvrages constituant le réseau de distribution d'électricité en h

aute tension A (HTA) et d'autoriser le maire à négocier l'indemnisation de cette derniè...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Enedis a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de Loos a décidé de résilier ou de " constater l'expiration " des conventions de concession conclues les 8 février et 1er août 1913 avec la société lilloise d'éclairage et la société électricité et gaz du Nord, de demander à la société Enedis de lui remettre les ouvrages constituant le réseau de distribution d'électricité en haute tension A (HTA) et d'autoriser le maire à négocier l'indemnisation de cette dernière en contrepartie de la remise des biens, ensemble la décision du 5 avril 2018 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1805025 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Lille a déclaré nulles et non avenues la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 du conseil municipal de Loos ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé par la société Enedis à l'encontre de cette délibération.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire non communiqué, enregistrés les 11 août 2021 et 9 décembre 2022, la commune de Loos, représentée par Me Marie-Thérèse Sur-Le Liboux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de la société Enedis tendant à l'annulation de la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 et du rejet de son recours gracieux ;

3°) de constater l'inexistence de la concession d'Enedis pour l'exploitation de tout ou partie du réseau HTA sur son territoire ;

4°) d'enjoindre à la société Enedis de communiquer l'état du patrimoine appartenant à la commune, en identifiant les différents ouvrages, leur valeur brute et la variation annuelle de cette dernière, leur valeur nette comptable, leur valeur de remplacement, le montant des provisions constituées pour leur renouvellement chaque année et cumulées, la synthèse des passifs spécifiques qui leur sont attachés et les durées d'amortissement, le nombre de départs HTA alimentant Loos, le nombre de départs HTA en transit à Loos, la longueur des réseaux HTA sur Loos, l'historique des sinistre et avaries, la liste des points des services HTA sur Loos, et les informations relatives aux opérations d'investissement et de maintenance du réseau HTA exploité de fait par la société Enedis ;

4°) subsidiairement, de résilier le prétendu contrat tacite entre la commune de Loos et Enedis ;

5°) et de mettre à la charge d'Enedis une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal s'est cru saisi d'un recours pour excès de pouvoir pour rejeter ses conclusions reconventionnelles tendant à obtenir la communication d'un certain nombre de documents et faire constater l'inexistence de la concession d'Enedis pour l'exploitation du réseau ou d'une partie de son réseau HTA alors que par son objet contractuel, il s'agit d'un litige de plein contentieux ;

- le tribunal a statué ultra petita en jugeant qu'il existait un contrat tacite alors que la société Enedis s'est bornée à invoquer une exploitation de fait, à laquelle elle veut précisément mettre fin en sa qualité d'autorité organisatrice de la distribution d'électricité sur son territoire ;

- il n'y a pas eu de prolongation tacite des contrats de concession dès lors qu'une telle prolongation tacite est contraire à la loi n° 46-628 du 8 avril 1946, au code de l'énergie et au code de la commande publique qui dispose que la durée du contrat de concession est limitée ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que les deux conventions de concession conclues en 1913 portaient, à la date de la loi du 8 avril 1946, sur l'exploitation du réseau de distribution d'électricité en HTA (haute tension A) de la commune et qu'en vertu de l'article 8 du cahier des charges annexé à l'autorisation préfectorale du 4 juin 1923, l'exploitation en régie par la commune de Loos était limitée à la distribution d'électricité en BT (basse tension), en effet, l'activité de la régie municipale d'électricité (RME), " pour tous usages ", n'était pas limitée en 1946 à la distribution d'électricité en basse tension de sorte que la RME doit retrouver son périmètre originel, abusivement réduit lors de la nationalisation de 1946 et la commune, retrouver la maîtrise et le contrôle de la distribution d'électricité ;

- les cahiers des charges des concessions conclues en 1913 n'étant plus en vigueur à la date du 8 avril 1946, aucun transfert des droits et obligations n'a pu avoir lieu au profit d'EDF et, par la suite, au profit de la métropole européenne de Lille (MEL) en vertu des articles L. 5217-2 et L. 5217-5 du code général des collectivités territoriales, à cet égard elle produit un projet de délibération visant à modifier la délibération de la MEL du 18 décembre 2015 ainsi qu'une lettre du président de la MEL du 28 juin 2018 précisant qu'étaient exclus de la fusion des contrats de concession, les réseaux basse tension et HTA de la régie de Loos ;

- le conseil municipal n'est pas intervenu dans une matière réservée aux pouvoirs législatif et judiciaire en prononçant la résiliation d'un contrat auquel la commune n'était pas partie, il s'agit d'une décision communale sur l'application locale d'une législation nationale et le but poursuivi est de retrouver la cohérence du réseau de distribution électrique sur le territoire communal, conformément à la législation actuellement applicable, la délibération a été adoptée dans des conditions régulière, les élus ont été suffisamment informés et la délibération a été affichée ;

- à titre subsidiaire, à supposer que la commune soit devenue un tiers par rapport à l'exploitation, par un prétendu contrat tacite, d'une partie du réseau de distribution d'électricité sur son territoire, elle serait néanmoins fondée à demander la résiliation de ce contrat car ayant fait le choix d'une gestion en régie sur son territoire et défendant un intérêt public local, elle est lésée dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par le maintien au profit d'Enedis de ce contrat tacite qui est entaché de graves irrégularités.

Par deux mémoires, enregistrés les 25 avril et 7 décembre 2022, la société Enedis, représentée par Me Michel Guénaire, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la commune de Loos une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal était fondé à écarter les conclusions reconventionnelles de la commune de Loos comme irrecevables dès lors que la demande, qui tendait à l'annulation de la délibération du conseil municipal du 7 décembre 2017, relevait de l'excès de pouvoir et non du plein contentieux ;

- le tribunal n'a pas statué au-delà des conclusions dont il était saisi, en outre, les parties avaient mentionné en première instance l'existence d'un contrat tacite, enfin, la commune de Loos est de mauvaise foi puisque l'existence tacite de contrats de concession est mentionnée dans la délibération litigieuse elle-même ;

- le formalisme exigé par le code de la commande publique ne s'impose qu'aux concessions pour lesquelles une consultation a été engagée (ou un avis de concession publié) à partir du 1er avril 2019, les concessions de 1913 ont été prorogées tacitement en 1943 sans que la loi du 8 avril 1946 y fasse obstacle, la commune n'établit pas qu'elle ou RME aurait pris en charge le réseau HTA à compter de 1943, le monopole légal de 1946 confirme que le réseau HTA de Loos a été exploité par EDF puis Enedis ;

- la reprise du réseau HTA par la RME aurait pour conséquence une extension illégale de son périmètre géographique ;

- en vertu de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales, la MEL est l'autorité organisatrice de la distribution d'énergie (AODE) sur le réseau HTA, elle s'est substituée à la commune de Loos dans les droits et obligations nés des conventions de 1913 pour le réseau HTA, la délibération de la MEL du 18 décembre 2015 a seulement exclu le réseau BT pour la commune de Loos, la transmission des concessions à la MEL était possible bien que les conventions aient été tacitement prolongées ;

- le conseil municipal de Loos est intervenu dans une matière réservée aux pouvoirs législatif et judiciaire en décidant la résiliation des conventions, l'argument tiré de la cohérence du réseau communal ne pourra qu'être écarté ;

- dès lors qu'elle n'a pas la qualité d'autorité organisatrice de la distribution d'électricité HTA, la commune de Loos n'est pas fondée à demander la communication d'éléments intéressant l'exploitation de ce réseau ;

- la demande subsidiaire de la commune doit être rejetée, elle ne pourrait saisir le juge qu'après une décision refusant de faire droit à la demande de mettre fin à l'exécution du contrat.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de l'énergie ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz ;

- la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2014-1600 du 23 décembre 2014 portant création de la métropole dénommée " métropole européenne de Lille " ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public,

- les observations de Me Sur-Le Liboux, représentant la commune de Loos,

- et les observations de Me Guénaire, représentant la société Enedis.

Deux notes en délibéré ont été enregistrées les 21 décembre 2022 pour la commune de Loos et 30 décembre 2022 pour la société Enedis.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux conventions conclues les 8 février et 1er août 1913, la commune de Loos (Nord) a concédé, pour une durée de trente ans, l'exploitation de son réseau de distribution d'énergie électrique en haute tension A (HTA) pour " tous usagers autres que l'éclairage public et privé ", d'une part, à la société lilloise d'éclairage électrique (SLEE), d'autre part, à la société électrique et gaz du Nord (SEGN). Par ailleurs, le 10 octobre 1922, la commune de Loos a créé une régie municipale d'électricité (RME) ayant pour objet la construction et l'exploitation d'un réseau de distribution électrique de basse tension (BT). A compter du 1er janvier 2000, le statut de la RME de Loos a été transformé, en application d'une délibération du 24 novembre 1999 du conseil municipal, en établissement public industriel et commercial ayant pour objet, notamment, la production et l'exploitation des réseaux de distribution d'énergie électrique et la gestion de l'éclairage public et de la signalisation lumineuse. Le réseau de distribution d'électricité est ainsi pris en charge, sur le territoire de la commune de Loos, par la société Enedis, venue aux droits d'EDF en ce qui concerne la distribution d'électricité en HTA, et par la RME en ce qui concerne la distribution de l'électricité en BT et d'une partie de la distribution de l'électricité en HTA.

2. Par une délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017, le conseil municipal de Loos a décidé de résilier ou de " constater l'expiration " des conventions de concession conclues les 8 février et 1er août 1913 avec la SLEE et la SEGN, aux droits desquelles s'est substituée la société Enedis, de demander à cette dernière de lui remettre les ouvrages constituant le réseau HTA situé sur son territoire et d'autoriser le maire à négocier l'indemnisation de la société Enedis en contrepartie de la remise des biens. Par un courrier du 6 février 2018, reçu le lendemain, la société Enedis a sollicité le retrait de cette délibération, ce qui a été refusé par un courrier du maire en date du 5 avril 2018, reçu le 9 avril suivant. La société Enedis a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation de la délibération du 7 décembre 2017 ainsi que celle de la décision portant rejet de son recours gracieux.

3. Par un jugement n° 1805025 du 15 juin 2021, dont la commune de Loos relève appel, le tribunal administratif de Lille a déclaré la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 du conseil municipal de Loos inexistante et de nul effet, par voie de conséquence, a dit que la décision portant rejet du recours gracieux était également nulle et de nul effet et a rejeté les conclusions reconventionnelles de la commune.

Sur le cadre juridique applicable au litige :

4. D'une part, aux termes de l'article 1er de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, dans sa rédaction initiale : " À partir de la promulgation de la présente loi, sont nationalisés : 1° La production, le transport, la distribution, l'importation et l'exportation d'électricité (...) ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La gestion des entreprises nationalisées d'électricité est confiée à un établissement public national de caractère industriel et commercial dénommé "Electricité de France (E.D.F.), Service National ".

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à l'échéance des conventions de concession en 1943 et avant la nationalisation de 1946, la commune de Loos aurait pris en charge tout ou partie de la distribution de l'électricité en HTA, ni que la régie municipale d'électricité aurait élargi son périmètre géographique ou fonctionnel au-delà de la distribution électrique de basse tension prévue à l'article 8 de son cahier des charges approuvé par arrêté préfectoral du 4 juin 1923. La mention figurant à l'article 1er du cahier des charges de la RME d'une " distribution publique de l'énergie électrique pour tous usages " concerne les seules destinations de l'électricité et non la distribution d'électricité à haute et basse tensions. Dès lors, la poursuite de la distribution de l'électricité en HTA par les opérateurs historiques entre l'échéance des contrats de concession en 1943 et la nationalisation des réseaux publics de distribution décidée par la loi n° 46-628 du 8 avril 1946, est de nature à caractériser l'existence de contrats tacites entre les parties. A cet égard, la circonstance que de nouveaux cahiers des charges établis en application de l'article 37 de la loi du 8 avril 1946 n'ont pas été substitués aux cahiers des charges de 1913 est sans incidence sur le caractère tacite de la prolongation des conventions conclues les 8 février et le 1er août 1913. Il suit de là qu'au 9 avril 1946, l'ensemble des droits et obligations nés des deux conventions conclues les 8 février et 1er août 1913, dont l'exécution a été poursuivie par les parties après leur arrivée à échéance en 1943, ont été transférés à l'établissement public Electricité de France (EDF), puis ultérieurement à la société Enedis, venue aux droits d'EDF en ce qui concerne la distribution d'électricité en HTA.

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales : " I. La métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : (...) 6° En matière de protection et de mise en valeur de l'environnement et de politique du cadre de vie : (...) g) Concession de la distribution publique d'électricité et de gaz ; (...) IX. - La métropole assure la fonction d'autorité organisatrice d'une compétence qu'elle exerce sur son territoire. Elle définit les obligations de service au public et assure la gestion des services publics correspondants, ainsi que la planification et la coordination des interventions sur les réseaux concernés par l'exercice des compétences ". L'article L. 111-52 du code de l'énergie dispose : " Les gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité sont, dans leurs zones de desserte exclusives respectives : 1° La société gestionnaire des réseaux publics de distribution issue de la séparation entre les activités de gestion de réseau public de distribution et les activités de production ou de fourniture exercées par Électricité de France en application de l'article L. 111-57 ; 2° Les entreprises locales de distribution définies à l'article L. 111-54 ou les entreprises locales de distribution issues de la séparation entre leurs activités de gestion de réseau public de distribution et leurs activités de production ou de fourniture, en application de l'article L. 111-57 ou de l'article L. 111-58 (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que la compétence des communes membres en matière de concession de la distribution publique d'électricité et de gaz a été transférée de plein droit à la Métropole européenne de Lille (MEL), qui assure la fonction d'autorité organisatrice de la distribution d'énergie. La délibération de la MEL du 18 décembre 2015 excepte du transfert de compétence le seul réseau basse tension, s'agissant de la commune de Loos.

Sur la régularité du jugement attaqué :

8. Il résulte de ce qui a été exposé aux points 4 à 7 que la commune de Loos n'étant pas l'autorité organisatrice de la distribution d'énergie et ayant la qualité de tiers à l'égard des relations entre Enedis et la MEL en ce qui concerne la distribution d'électricité en HTA, elle n'avait pas compétence pour " résilier " ou " constater l'expiration " des conventions de concession conclues les 8 février et 1er août 1913. La délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 ne peut donc s'analyser comme un acte d'exécution d'un contrat. Dès lors, c'est sans entacher sa décision d'irrégularité que le tribunal a considéré qu'il était saisi d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation de la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 et a déclaré irrecevables les conclusions reconventionnelles de la commune de Loos.

9. Par ailleurs, en considérant que la poursuite par les parties de l'exécution des conventions de concession, après leur arrivée à échéance en 1943, constituait un contrat tacite et non une simple gestion de fait et en relevant d'office un moyen d'ordre public pour qualifier la délibération du 7 décembre 2017 et le rejet du recours gracieux d'Enedis d'inexistants, les premiers juges n'ont pas statué sur des conclusions dont ils n'étaient pas saisis. Le moyen tiré de ce que le tribunal aurait statué ultra petita doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

10. Comme il a été dit au point 7, en raison du transfert de plein droit à la MEL de la compétence de ses communes membres en matière de concession de la distribution publique d'électricité et de gaz dans les conditions prévues à l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales, la MEL assure la fonction d'autorité organisatrice de la distribution d'énergie. Ainsi qu'il a été dit, la délibération de la MEL du 18 décembre 2015 excepte du transfert de compétence le seul réseau basse tension de la commune de Loos et, à cet égard, un simple projet de délibération du 15 juin 2018 visant à modifier la délibération du 18 décembre 2015 et une lettre du président de la MEL du 28 juin 2018 sont sans incidence sur le périmètre de ce transfert. Le moyen de la commune de Loos tiré de ce que les contrats de concession de 1913 n'ont pas perduré jusqu'à présent est, en outre, sans incidence sur le transfert opéré par l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales, qui prive la commune de sa compétence en ce qui concerne la distribution publique d'électricité en HTA nationalisée en 1946.

11. Dès lors, la délibération par laquelle la commune de Loos a décidé de résilier ou de " constater l'expiration " des conventions de concession conclues les 8 février et 1er août 1913 avec la SLEE et la SEGN, de demander à la société Enedis de lui remettre les ouvrages constituant le réseau de distribution d'électricité en HTA et d'autoriser le maire à négocier l'indemnisation de cette dernière en contrepartie de la remise des biens, est entachée tant d'incompétence, au regard du transfert opéré à la MEL, que d'illégalité au regard du transfert opéré par la loi de nationalisation du 9 avril 1946 au profit d'EDF puis d'Enedis et méconnaît l'office du juge en prononçant elle-même la résiliation d'un contrat auquel elle n'est pas partie.

12. Enfin, les dispositions des articles L. 3114-1 et L. 3114-7 du code de la commande publique, applicables aux contrats de concession pour lesquels une consultation est engagée ou un avis de concession est envoyé à la publication à compter du 1er avril 2019, sont sans influence sur la solution du présent litige.

13. Il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu de la gravité des vices dont ces actes sont entachés, la commune de Loos n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a décidé que la délibération n° 2017-12-07-28 du 7 décembre 2017 et, par conséquent, le rejet du recours gracieux d'Enedis devaient être regardés comme inexistants et de nul effet et a rejeté ses conclusions à fin d'injonction de communication de documents. Par voie de conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions à fin d'injonction, ni à ses conclusions subsidiaires demandant à la cour " de résilier le prétendu contrat tacite entre la commune de Loos et Enedis ".

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Enedis, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à la commune de Loos la somme que celle-ci réclame à ce titre. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Loos le versement à la société Enedis d'une somme de 2 000 euros au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Loos est rejetée.

Article 2 : La commune de Loos versera à la société Enedis une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Loos et à la société Enedis.

Copie sera adressée à la Métropole européenne de Lille et au préfet de la région Hauts-de-France, préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 13 décembre 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : M. A...La présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au préfet de la région Hauts-de-France, préfet du Nord et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Anne-Sophie Villette

2

N°21DA01956


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01956
Date de la décision : 10/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: M. Marc Baronnet
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : SCP SUR-MAUVENU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-01-10;21da01956 ?
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