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17/05/2023 | FRANCE | N°22DA02272

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 17 mai 2023, 22DA02272


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans

un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à interv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2201844 du 10 août 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2022, Mme D..., représentée par Me Dewaele, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2022 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté contesté, pris dans son ensemble :

- cet arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation ;

En ce qui concerne la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 311-1 et L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

- cette décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation.

La requête a été communiquée le 30 novembre 2022 au préfet du Nord qui n'a pas produit d'observations.

Par une décision du 18 octobre 2022, Mme D... a été admise à l'aide juridictionnelle totale.

Par une ordonnance du 4 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée le 19 juin 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Mathieu Sauveplane, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... D..., ressortissante géorgienne née le 25 juillet 1985 à Dmanissi (Géorgie), est entrée en France le 4 novembre 2018, selon ses déclarations, accompagnée de son époux et de leurs trois enfants. Elle a présenté, le 30 novembre 2018, une demande d'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 26 février 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Par un arrêté du 12 septembre 2019, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 27 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de Mme D... tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme D..., qui n'a pas déféré à cette mesure d'éloignement, a sollicité, le 22 octobre 2019, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'un enfant malade. Par un avis du 9 avril 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé du fils de A... D... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et voyager sans risque vers ce pays. Par un arrêté du 16 juillet 2020, le préfet du Pas-de-Calais lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un jugement du 29 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de Mme D... tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêté du 20 janvier 2022, le préfet du Pas-de-Calais l'a de nouveau obligée à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Mme D... relève appel du jugement du 10 août 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen commun aux décisions contestées :

2. D'une part, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que cet arrêté, en ce qu'il fait obligation à Mme D... de quitter le territoire français sans délai et fixe le pays de renvoi, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles les mesures ainsi édictées par le préfet du Pas-de-Calais se fondent, et satisfait ainsi à l'exigence de motivation posée par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté est entaché d'une insuffisance de motivation doit être écarté.

3. D'autre part, une décision d'interdiction de retour sur le territoire français doit, conformément aux dispositions de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, être motivée et, dès lors, comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse, à sa seule lecture, en connaître les motifs. L'arrêté contesté, en ce qu'il prononce envers Mme D... une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, comporte un énoncé détaillé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et atteste, compte tenu de sa motivation, de la prise en compte par l'autorité préfectorale de l'ensemble des éléments permettant de caractériser la situation de l'intéressée, tant en ce que concerne le principe de cette mesure que sa durée. Par suite, le moyen tiré par Mme D... de l'insuffisance de motivation de la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an n'est pas fondé et doit, dès lors, être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet du Pas-de-Calais, pour faire obligation à Mme D... de quitter le territoire français, a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de Mme D... doit être écarté.

5. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 6 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), définissant les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers : " 1. Pour un séjour prévu sur le territoire des États membres, d'une durée n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours, ce qui implique d'examiner la période de 180 jours précédant chaque jour de séjour, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes: / a) être en possession d'un document de voyage en cours de validité autorisant son titulaire à franchir la frontière (...) / b) être en possession d'un visa en cours de validité si celui-ci est requis en vertu du règlement (CE) no 539/2001 du Conseil (...) / (...) / 2. Pour l'application du paragraphe 1, la date d'entrée est considérée comme le premier jour de séjour sur le territoire des États membres (...) ". Aux termes du 1. de l'article 20 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée le 19 juin 1990 : " Les étrangers non soumis à l'obligation de visa peuvent circuler librement sur les territoires des Parties Contractantes pendant une durée maximale de trois mois au cours d'une période de six mois à compter de la date de première entrée (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Sauf s'il est exempté de cette obligation, des visas exigés par les conventions internationales et par l'article 6, paragraphe 1, points a et b, du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ; / 2° Sous réserve des conventions internationales, et de l'article 6, paragraphe 1, point c, du code frontières Schengen, du justificatif d'hébergement prévu à l'article L. 313-1, s'il est requis, et des autres documents prévus par décret en Conseil d'Etat relatifs à l'objet et aux conditions de son séjour et à ses moyens d'existence, à la prise en charge par un opérateur d'assurance agréé des dépenses médicales et hospitalières, y compris d'aide sociale, résultant de soins qu'il pourrait engager en France, ainsi qu'aux garanties de son rapatriement ; / 3° Des documents nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle s'il se propose d'en exercer une ".

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) ".

7. Si le règlement (UE) 2017/372 du Parlement européen et du Conseil du 1er mars 2017 transférant la Géorgie de l'annexe I (pays soumis à l'obligation de visa) à l'annexe II (pays dispensés de l'obligation de visa) du règlement 539/2001 du 15 mars 2001, entré en vigueur le 28 mars 2017, dispense les ressortissants géorgiens titulaires d'un passeport biométrique de moins de 10 ans, de visa de court séjour pour se rendre dans l'espace Schengen, cette dispense ne vaut que pour les séjours de moins de 90 jours et ne donne en outre pas automatiquement un droit d'entrée sur le territoire français, les ressortissants géorgiens devant être en mesure de présenter à la police aux frontières les documents permettant de justifier du motif et des conditions du séjour en application notamment de l'article 6 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen). Mme D... produit un passeport biométrique délivré par les autorités géorgiennes le 27 septembre 2018, valable jusqu'au 27 septembre 2028, sur lequel est apposé un tampon d'entrée dans l'espace Schengen (DOF) à la date du 3 novembre 2018. Toutefois, Mme D... n'apporte aucune preuve de ce qu'elle aurait présenté aux autorités françaises les documents permettant de justifier du motif et des conditions de son séjour en application notamment de l'article 6 du règlement (UE) 2016/399 du 9 mars 2016, ni qu'elle aurait quitté l'espace Schengen et y serait rentrée depuis moins de 90 jours sur la période de 180 jours prévue par ces dispositions à la date de la décision contestée, le 20 janvier 2022, alors qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la fiche " telemofpra ", que la décision du 26 février 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande d'asile lui a été notifiée par voie postale le 15 avril suivant à une adresse en France et qu'elle a fait l'objet de plusieurs arrêtés, en date des 16 juillet 2020, 5 janvier 2021 et 27 août 2021, par lesquels le préfet du Pas-de-Calais l'a assignée à résidence sur la commune de Berck (Pas-de-Calais). Dans ces conditions, Mme D... doit être regardée comme s'étant maintenue irrégulièrement dans le territoire des Etats membres au-delà d'un délai de 90 jours à compter, au plus tard, du 4 novembre 2018, date de son entrée en France. Par suite, elle entrait dans le champ d'application du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le préfet du Pas-de-Calais pouvait, pour ce seul motif, procéder à son éloignement.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre ou à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. Mme D... fait valoir qu'elle réside en France avec son époux et leurs trois enfants depuis le 4 novembre 2018. Toutefois, Mme D..., qui s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français alors qu'elle avait fait l'objet d'une mesure d'éloignement à laquelle elle n'a pas déféré, n'établit, ni même n'allègue, être dépourvue d'attaches familiales ou personnelles dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans. Elle n'établit pas davantage avoir noué des liens personnels d'une particulière intensité en France. Par ailleurs, Mme D... ne produit aucun élément de nature à établir l'impossibilité pour elle de poursuivre sa vie privée et familiale avec son époux et leurs trois enfants, également en situation irrégulière, dans leur pays d'origine, où ils sont tous légalement admissibles. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes des stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

11. Mme D... soutient que l'arrêté contesté, en ce qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français, porte atteinte à l'intérêt supérieur de son fils, B..., et méconnaît ainsi les stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Elle fait valoir, à ce titre, que son fils présente une paralysie cérébrale infantile avec tétraplégie spastique au niveau des quatre membres se traduisant par un polyhandicap associant une hypotonie musculaire et une déficience intellectuelle. Il ressort toutefois des pièces du dossier que, par un avis du 9 avril 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de l'enfant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Or, il ressort des pièces du dossier que les documents médicaux produits, émanant de professionnels de santé qui suivent l'enfant, se bornent à évoquer la nécessité d'un accompagnement de son polyhandicap décelé dès sa naissance en 2010, sans se prononcer sur la disponibilité de soins appropriés dans son pays d'origine. Si la requérante verse également à l'instance un document médical de la polyclinique des adultes en Géorgie faisant état de " massages " comme seule prise en charge médicale possible de son fils, ce document ne suffit pas à établir que, contrairement à l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, l'enfant ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, l'arrêté contesté ne peut être regardé comme portant atteinte à l'intérêt supérieur du fils de A... D.... Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur la décision portant refus d'attribution d'un délai de départ volontaire :

12. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 et aux points 4 à 11 que Mme D..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Sur la décision fixant le pays de destination :

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 et aux points 4 à 11 que Mme D..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 et aux points 4 à 12 que Mme D..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, n'est pas fondée à invoquer l'illégalité des décisions, contenues dans l'arrêté du 20 janvier 2022, par lesquelles le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français et a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire.

15. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...). ".

16. Mme D... soutient que l'arrêté contesté, en ce qu'il lui fait interdiction de retour sur le territoire français et fixe à un an la durée de cette mesure, est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est disproportionné au regard de sa situation. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme D... n'a pas déféré à la mesure d'éloignement dont elle a précédemment fait l'objet. Par ailleurs, la requérante ne justifie d'aucune insertion particulière sur le territoire français, son époux résidant également irrégulièrement sur le territoire français. Enfin, la décision contestée ne fait nullement obstacle à la reconstitution de la cellule familiale et à la poursuite de la scolarité de ses enfants dans leur pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet du Pas-de-Calais, en faisant interdiction à Mme D... de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, n'a ni méconnu les dispositions précitées des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché cette décision d'une erreur d'appréciation, tant dans son principe que dans sa durée.

17. En troisième et dernier lieu, Mme D... soutient que la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, ce moyen doit être écarté par les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9.

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Dewaele.

Copie en sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 4 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2023.

Le président, rapporteur,

Signé : M. Sauveplane Le président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°22DA02272

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02272
Date de la décision : 17/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Mathieu Sauveplane
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DEWAELE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-05-17;22da02272 ?
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