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01/06/2023 | FRANCE | N°22DA01270

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 01 juin 2023, 22DA01270


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... se disant B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2021 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la date de

notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2200208 du 23 mars 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... se disant B... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2021 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 2200208 du 23 mars 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 juin 2022, M. A... se disant C..., représenté par Me Chartrelle, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2021 par lequel la préfète de la Somme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'irrégularité, faute de justification par l'administration de la consultation du fichier " Visiabo " par un agent habilité ;

- il justifie, contrairement à l'appréciation de la préfète de la Somme, de son état civil ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2022, le préfet de la Somme conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... se disant C... ne sont pas fondés.

M. A... se disant C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour et des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... se disant B... C..., né le 21 octobre 2002 à Beni (République démocratique du Congo), est entré en France le 15 juin 2016, selon ses déclarations. Il a présenté, le 3 juin 2021, une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A l'occasion de l'examen de cette demande, les services de la préfecture de la Somme ont consulté le système de traitement automatisé des données " Visabio ", lequel a révélé que l'intéressé s'était vu délivrer un visa, valable du 15 mai 2016 au 13 juin 2016, par les autorités portugaises en République d'Angola sous l'identité B... D..., né le 27 octobre 2000 à Lubango Huila (Angola). En conséquence, la préfète de la Somme, par un arrêté du 18 novembre 2021, a rejeté la demande d'admission au séjour présentée par l'intéressé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par un jugement du 23 mars 2022, dont M. A... se disant C... relève appel, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 142-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ont accès aux données à caractère personnel et aux informations enregistrées dans le traitement automatisé mentionné à l'article R. 142-1, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître : / (...) / 2° Les agents des préfectures, y compris dans le cadre de la procédure d'évaluation prévue par l'article R. 221-11 du code de l'action sociale et des familles, et ceux chargés de l'application de la réglementation relative à la délivrance des titres de séjour, au traitement des demandes d'asile et à la préparation et à la mise en œuvre des mesures d'éloignement individuellement désignés et spécialement habilités par le préfet. / (...) ".

3. M. A... se disant C... soutient qu'il n'est pas démontré que la personne ayant consulté le système de traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé " Visabio " était habilitée à cette fin. Toutefois, le requérant, qui se borne à soutenir que seul le défendeur peut justifier de la régularité sur ce point de la procédure, ne produit aucun élément de nature à faire naître un doute quant à l'habilitation par le préfet de la Somme de l'agent qui a instruit son dossier alors que les dispositions précitées de l'article R. 142-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile désignent les agents des préfectures comme ayant accès aux données du traitement " Visabio ". Par suite, le moyen doit être écarté.

4. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article R. 142-1 du même code : " Le ministère chargé des affaires étrangères et le ministre chargé de l'immigration sont autorisés à mettre en œuvre, sur le fondement du 1° de l'article L. 142-1, un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé " VISABIO ". / Ce traitement a pour finalités : / 1° De mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, en prévenant les fraudes documentaires et les usurpations d'identité ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 142-2 de ce code : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le traitement automatisé mentionné à l'article R. 142-1 sont : / 1° Les images numérisées de la photographie et des empreintes digitales des dix doigts des demandeurs de visas, collectées par les chancelleries consulaires et les consulats français équipés du dispositif requis ; les empreintes digitales des mineurs de douze ans ne sont pas collectées ; l'impossibilité de collecte totale ou partielle des empreintes digitales est mentionnée dans le traitement ; le traitement ne comporte pas de dispositif de reconnaissance faciale à partir de l'image numérisée de la photographie ; / 2° Les données énumérées à l'annexe 2 communiquées automatiquement par le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé Réseau mondial visas, dans les conditions prévues par l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2001 modifié portant création d'un traitement automatisé d'informations nominatives relatif à la délivrance des visas dans les postes consulaires, lors de la demande et de la délivrance d'un visa ; / (...) ". Enfin, parmi les données énumérées à l'annexe 2, figurent celles relatives à l'état civil, notamment le nom, la date et le lieu de naissance de l'étranger ainsi que sa nationalité, et celles relatives aux documents de voyage du demandeur de visa ainsi que ses identifiants biométriques.

6. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, lorsqu'après avoir relevé les empreintes digitales d'un ressortissant d'un Etat tiers, une des autorités administratives mentionnées à l'article R. 142-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile consulte la base de données " Visabio " en vue d'obtenir des données personnelles relatives à celui-ci, ces données sont présumées exactes. Il appartient à l'étranger de renverser cette présomption, notamment par la production du document de voyage au vu duquel l'autorité consulaire a renseigné la base de données " Visabio ".

7. Il ressort des pièces du dossier que, ainsi qu'il a été dit au point 1, la consultation par l'administration du système de traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé " Visabio " a révélé que le ressortissant étranger qui s'était présenté auprès des services préfectoraux de la Somme sous l'identité de M. B... C... né le 21 octobre 2002, de nationalité congolaise, était en réalité connu sous l'identité de M. B... D..., né le 27 octobre 2000, de nationalité angolaise, et qu'un visa lui avait été délivré par les autorités consulaires portugaises en République d'Angola au vu d'un passeport à ce nom valable jusqu'en 2020. Si l'intéressé soutient que sa véritable identité est M. B... C... et produit, en particulier, d'une part, un acte de naissance, et d'autre part, une attestation de nationalité, aucun de ces documents ne comporte de photographie ou de données biométriques. Par ailleurs, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la copie de la première page d'un passeport, en cours de validité, délivré sous l'identité de M. B... C..., dès lors que ce document, à le supposer authentique, n'est pas une pièce d'état civil mais un document de voyage qui n'est pas de nature à permettre de justifier de son identité. Dès lors, le requérant n'apporte pas d'éléments de nature à renverser la présomption du caractère exact des informations figurant dans la base de données " Visabio ". Dans ce cadre, si celui-ci soutient qu'il réside avec une personne qu'il présente comme sa mère, laquelle est titulaire d'un titre de séjour, ainsi que ses frères et sœurs, le lien de parenté entre le requérant et ces personnes ne peut être regardé comme établi. En conséquence, et alors même que l'intéressé suit une scolarité en France et était inscrit, à la date de l'arrêté contesté, en première année de brevet de technicien supérieur (BTS) " Bâtiment ", la préfète de la Somme, en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette autorité n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur la situation personnelle de l'intéressé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... se disant C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de M. A... se disant C... à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... se disant C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... se disant B... C..., à Me Chartrelle et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.

Le rapporteur,

Signé : B. BaillardLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

2

N°22DA01270


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01270
Date de la décision : 01/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP DUMOULIN-CHARTRELLE-ABIVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-06-01;22da01270 ?
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