La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/2023 | FRANCE | N°22DA00612

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 13 juin 2023, 22DA00612


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) C... E... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 par lequel le préfet de la région Hauts-de-France a refusé de lui accorder l'autorisation d'exploiter une parcelle agricole d'une surface de 8 hectares 3 ares 65 centiares située sur le territoire des communes de Belloy-Saint-Léonard, Avelesges et Avesnes-Chaussoy, de lui accorder l'autorisation sollicitée et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 e

uros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) C... E... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 20 mai 2021 par lequel le préfet de la région Hauts-de-France a refusé de lui accorder l'autorisation d'exploiter une parcelle agricole d'une surface de 8 hectares 3 ares 65 centiares située sur le territoire des communes de Belloy-Saint-Léonard, Avelesges et Avesnes-Chaussoy, de lui accorder l'autorisation sollicitée et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 2102570 du 14 janvier 2022, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 mars et 29 décembre 2022, l'EARL C... E..., représentée par Me Pascal Bibard, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la région Hauts-de-France du 20 mai 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région Hauts-de-France de lui délivrer l'autorisation d'exploiter une parcelle agricole d'une surface de 8 hectares 3 ares 65 centiares située sur le territoire de la commune de Belloy-Saint-Léonard, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance est entachée de nullité dès lors qu'elle est intervenue en l'absence de mise en demeure préalable de produire des pièces justificatives ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article R. 331-1 du code rural et de la pêche maritime dès lors que M. B... ne peut être regardé, à travers l'EARL B... A... dont il est associé unique, comme mettant en valeur les unités de production ;

- il méconnaît les dispositions du 1° de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime et les objectifs fixés par le schéma directeur régional des exploitations agricoles en Picardie dès lors que l'exploitation de l'EARL B... A... ne peut être considérée comme économiquement viable ;

- il méconnaît l'ordre de priorité établi par le schéma directeur régional des exploitations agricoles en Picardie ;

- il porte atteinte à son droit de propriété dès lors qu'il a pour effet de priver d'effet l'ordre successoral et la donation établis entre les membres de la famille B... et ceux de la famille C... et qu'il méconnaît le droit à la reprise des terres du bailleur.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2022, M. A... B... et l'EARL B..., représentés par Me Gonzague de Limerville, concluent au rejet de la requête de l'EARL C... E... et à sa condamnation à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent qu'aucun des moyens soulevés dans la requête n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'EARL C... E... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 31 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 mai 2023 à 12h00.

Par lettre du 10 mai 2023, les parties ont été informées d'un moyen susceptible d'être soulevé d'office tiré de l'irrégularité de l'ordonnance attaquée en ce que les dispositions du 7° de l'article R 222-1 du code de justice administrative étaient inapplicables car la demande comportait des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

M. B... et l'EARL B... ont présenté, le 15 mai 2023, des observations au moyen susceptible d'être relevé d'office par la cour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté du préfet de la région Nord Pas-de-Calais Picardie du 29 juin 2016 portant schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) en Picardie ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère,

- et les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... et Mme D... C... sont propriétaires de deux parcelles agricoles d'une superficie totale de 6 ha 15 a 70 ca situées sur le territoire de la commune de Belloy-Saint-Léonard et de deux parcelles agricoles d'une contenance respective de 69 a 98 ca et de 1 ha 30 a 50 ca situées sur le territoire des communes d'Avelesges et d'Avesnes-Chaussoy qui sont exploitées par l'EARL B... au sein de laquelle M. A... B... est associé unique. Par acte du 18 septembre 2020, M. et Mme C... ont donné congé pour le 31 mars 2022 à M. A... B... du bail rural dont il bénéficiait pour ces parcelles, en vue de la reprise des terres par M. C.... Parallèlement, l'EARL C... E... a sollicité, le 4 février 2021, l'autorisation d'exploiter ces parcelles agricoles, d'une superficie totale de 8 ha 3 ares 65 centiares mais par un arrêté du 20 mai 2021, le préfet de la région Hauts-de-France a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée. Par ailleurs, M. B... a contesté le congé qui lui avait été délivré devant le tribunal paritaire des baux ruraux d'Amiens, lequel a, par jugement du 24 janvier 2022, sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive de la juridiction administrative. L'EARL C... E... relève appel de l'ordonnance du 14 janvier 2022 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a, en en application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les (...) présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ".

3. La demande de première instance de l'EARL C... E... faisait état de ce que le préfet de la région Hauts-de-France, en estimant que la demande d'autorisation relevait d'un rang de priorité inférieur à celui du l'EARL B..., preneur en place, au regard du schéma directeur régional des exploitations agricoles en Picardie, avait méconnu l'ordre des priorités établi par ce schéma conformément à l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime dès lors que l'EARL B..., qui recourrait fréquemment à la sous-traitance, ne pouvait pas être regardée comme exploitante directe des terres litigieuses, qu'elle ne disposait pas du matériel nécessaire à l'exploitation des terres dont elle est revendiquait l'usage, que son représentant légal était en multi activité et tirait des revenus d'autres sources et qu'elle avait connu d'importants retards dans le règlement des fermages liés à l'exploitation des terres litigieuses. Il suit de là que même si l'EARL C... E... s'est bornée à produire l'arrêté litigieux en annonçant que des justificatifs allaient être versés aux débats, ce moyen ne pouvait être regardé comme n'étant manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée du 14 janvier 2022, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté la requête de l'EARL C... E... au motif que le seul moyen invoqué n'était assorti d'aucun élément permettant d'en apprécier le bien-fondé. En outre, la demande de première instance n'entrant pas dans le champ d'application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la décision ne pouvait être rendue que par une formation collégiale. Dès lors, l'ordonnance attaquée en date du 14 janvier 2022 est irrégulière et doit être annulée.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'EARL C... E... devant le tribunal administratif d'Amiens.

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 20 mai 2021 :

5. Aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'objectif principal du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d'installation progressive. / Ce contrôle a aussi pour objectifs de : / 1° Consolider ou maintenir les exploitations afin de permettre à celles-ci d'atteindre ou de conserver une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles ; / 2° Promouvoir le développement des systèmes de production permettant de combiner performance économique et performance environnementale, dont ceux relevant du mode de production biologique au sens de l'article L. 641-13, ainsi que leur pérennisation ; / 3° Maintenir une agriculture diversifiée, riche en emplois et génératrice de valeur ajoutée, notamment en limitant les agrandissements et les concentrations d'exploitations au bénéfice, direct ou indirect, d'une même personne physique ou morale excessifs au regard des critères précisés par le schéma directeur régional des exploitations agricoles ". Aux termes de l'article L. 331-1-1 du même code : " (...) 1° Est qualifié d'exploitation agricole, au sens du présent chapitre, l'ensemble des unités de production mises en valeur directement ou indirectement par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L. 311-1 (...) ". Aux termes de l'article R. 331-1 de ce code : " Pour l'application des dispositions du 1° de l'article L. 331-1-1, une personne associée d'une société à objet agricole est regardée comme mettant en valeur les unités de production de cette société si elle participe aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de ces unités de production ".

6. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : / 1° Lorsqu'il existe un candidat à la reprise ou un preneur en place répondant à un rang de priorité supérieur au regard du schéma directeur régional des structures agricoles mentionné à l'article L. 312-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " (...) III. Le schéma directeur régional des exploitations agricoles établit, pour répondre à l'ensemble des objectifs et orientations mentionnés au I du présent article, l'ordre des priorités entre les différents types d'opérations concernées par une demande d'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2, en prenant en compte l'intérêt économique et environnemental de l'opération (...) ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 29 juin 2016 portant schéma directeur régional des exploitations agricoles en Picardie : " Ordre de priorités - Les autorisations d'exploiter sont délivrées selon un ordre de priorité établi en prenant en compte : / la nature de l'opération, au regard des objectifs du contrôle des structures et des orientations définies par le présent schéma ; / l'intérêt économique et environnemental de l'opération, selon les critères définis ci-dessous (...) / 4° Agrandissement et maintien de la surface pour atteindre 1 fois (inclus)/UTANS le seuil de contrôle après reprise, le cas échéant ; 5° Agrandissement et maintien de la surface entre 1 et 1,5 fois (inclus)/UTANS le seuil de contrôle après reprise le cas échéant. / 6° Agrandissement et maintien de la surface pour atteindre 1,5 à 2 fois (inclus)/UTANS le seuil de contrôle après reprise, le cas échéant. (...) ". Aux termes de l'article 4 du même schéma : " Fixation des seuils de contrôle : /1° Seuil de surface : Le seuil retenu correspond à 94% de la SAU moyenne régionale toutes productions confondues. Il est de 90 ha après opération (...) ". Enfin, l'article 1er de ce schéma dispose que : " (...) On entend par / (...) / preneur en place : exploitant agricole individuel mettant en valeur, à titre exclusif ou non, une exploitation agricole en qualité de titulaire de tout bail rural sur les terres de ladite exploitation. Lorsque le bien pris à bail est mis, par son détenteur, à disposition d'une société d'exploitation dans laquelle il est associé, il y a lieu de prendre en compte, en comparaison de situation demandeur(s)/preneur, la situation de la société (...) / " UTANS : unité de travail annuel non salariée (...) / chef d'exploitation ou associé d'exploitation à titre principal 1 UTANS / chef d'exploitation ou associé d'exploitation à titre secondaire 0,5 UTANS (...) ".

7. En premier lieu, il ressort des mentions de l'arrêté litigieux que le préfet de la région Hauts-de-France a refusé d'accorder à l'EARL C... E... l'autorisation d'exploiter les terres demandées au motif que sa demande n'était pas prioritaire par rapport à la situation de l'EARL B..., preneur en place. Contrairement à ce que soutient l'appelante, il ressort des pièces du dossier et, notamment, des statuts de l'EARL C... E... et de l'attestation de la Mutualité sociale agricole (MSA) du 10 juin 2022 que M. B... a la qualité d'exploitant agricole dès lors qu'il est associé unique au sein de l'EARL B..., laquelle met en valeur des parcelles agricoles d'une superficie totale de 66 ha 12 a 56 ca dont celles pour laquelle l'autorisation d'exploiter est sollicitée. A la date du 20 mai 2021 de l'arrêté attaqué, M. B... était pluriactif et avait la qualité d'exploitant à titre secondaire car il exerçait parallèlement la profession de chauffeur de car. La circonstance qu'il ne disposait ni de matériel agricole, ni d'animaux à titre personnel, n'est pas de nature à démontrer qu'il ne participait pas de façon effective et permanente aux travaux au sein de l'EARL et n'a pas d'incidence sur sa qualité de preneur en place. Par suite, le moyen doit être écarté.

8. En deuxième lieu, l'EARL C... E... n'établit pas que l'exploitation de l'EARL B... ne serait pas économiquement viable alors que cette exploitation représente l'équivalent de 131,34 ha/UTANS. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'ordre des priorités établi par le schéma directeur régional des exploitations agricoles est contraire aux objectifs mentionnés à l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, doit être écarté.

9. En troisième lieu, il résulte des dispositions citées aux points 5 et 6 que le préfet, saisi d'une demande d'autorisation d'exploiter des terres déjà mises en valeur par un autre agriculteur, doit, pour statuer sur cette demande, d'une part, observer l'ordre des priorités établi par le schéma directeur régional des structures agricoles entre la situation du demandeur et celle du preneur en place, alors même que celui-ci n'a déposé aucune demande en ce sens et, d'autre part, le cas échant, mettre en œuvre les critères de départage en cas d'égalité.

10. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, de la demande d'autorisation d'exploiter présentée par l'EARL C... E... que celle-ci est composée d'un seul associé exploitant à titre principal, représentant une unité de travail annuel non salarié. L'exploitation de celle-ci atteindrait après reprise des terres 144 ha 3 ares 65 centiares, ce qui situe son projet entre 1,5 à 2 fois le seuil de contrôle par unité de travail non salariée fixé à 90 ha, correspondant au rang de priorité n° 6 fixé par le schéma directeur régional des structures agricoles applicable en Picardie. L'EARL B..., preneur en place, est composée d'un seul associé exploitant à titre secondaire comptant pour 0,5 unité de travail non salariée, ce qui équivaut à une superficie d'exploitation de 131 ha/UTANS la situant entre 1 et 1,5 fois le seuil de contrôle par unité de travail non salariée, correspondant au rang n° 5. Si l'EARL C... E... se prévaut de ce que son exploitation porte sur 135 hectares en polyculture avec un élevage de 40 vaches allaitantes, qu'elle dispose des bâtiments nécessaires au fonctionnement de l'exploitation, que la maison d'habitation et les hangars de stabulation pour les vaches allaitantes se trouvent à environ 1,5 km des parcelles et qu'elle est à jour de la déclaration de son dossier de politique agricole commune au titre de l'année 2021, ces circonstances n'ont pas d'incidence sur le rang de priorité qui lui a été attribué par l'arrêté litigieux. Par suite, l'autorité administrative a pu, sans méconnaître l'ordre de priorité du schéma directeur, refuser à l'EARL C... E... l'autorisation sollicitée au motif que le preneur en place répondait à un rang de priorité supérieur au demandeur au regard du schéma directeur régional des exploitations agricoles en Picardie.

11. En dernier lieu, si le contrôle des structures agricoles concerne, en principe, l'exploitation d'un bien, il est susceptible d'entraîner indirectement des limitations à l'exercice du droit de propriété, notamment en empêchant un propriétaire d'exploiter lui-même un bien qu'il a acquis faute de disposer de l'autorisation prévue par les dispositions critiquées, ou en faisant en pratique obstacle à ce qu'un propriétaire puisse aliéner ou louer son bien, faute pour l'acquéreur ou le preneur éventuel d'avoir obtenu cette autorisation. Cependant, ces limitations n'ont pas un caractère de gravité telle que le sens et la portée de ce droit en soient dénaturés et sont justifiées et proportionnées aux objectifs d'intérêt général définis à l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime. En outre, la règlementation des contrôles des structures agricoles s'apprécie indépendamment de celle qui régit les baux ruraux, dont l'article L. 411-58 du code rural et de la pêche maritime, qui constitue une législation distincte. Il en résulte que l'EARL C... E... ne peut utilement soutenir que l'arrêté litigieux porte atteinte à son droit de propriété en ce qu'il a pour effet de priver d'effet l'ordre successoral et la donation établis entre les membres de la famille B... et ceux de la famille C... et qu'il viole son droit à la reprise des terres en sa qualité de bailleur.

12. Il résulte de tout ce qui précède que l'EARL C... E... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Hauts-de-France du 20 mai 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'EARL C... E... demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de l'appelante la somme de 1 500 euros sollicitée par M. A... B... et l'EARL B... au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 14 janvier 2022 du président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens est annulée.

Article 2 : La demande présentée par l'EARL C... E... devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.

Article 3 : L'EARL C... E... versera à M. A... B... et à l'EARL B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'EARL C... E..., à M. A... B..., à l'EARL B... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie sera adressée au préfet de la région Hauts de France.

Délibéré après l'audience publique du 16 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2023.

La rapporteure,

Signé : S. StefanczykLa présidente de chambre,

Signé : A. Seulin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Anne-Sophie Villette

2

N°22DA00612


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00612
Date de la décision : 13/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Sylvie Stefanczyk
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : SCP CROISSANT-DE LIMERVILLE-ORTS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-06-13;22da00612 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award