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29/06/2023 | FRANCE | N°22DA00355

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 29 juin 2023, 22DA00355


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement no 1901626 du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février 2022 et le 14 novembre 2022, M. C...,

représenté par Me Delattre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer, à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement no 1901626 du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février 2022 et le 14 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Delattre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015, à titre subsidiaire, la réduction de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a apporté aucune réponse à son moyen tiré de l'erreur commise par l'administration dans l'identification de la catégorie d'imposition des sommes qui lui ont été versées par M. B... ; en conséquence, le jugement attaqué doit être annulé comme entaché d'irrégularité ;

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, il n'a pas bénéficié, en méconnaissance des dispositions des articles L. 47 et L. 50 du livre des procédures fiscales, d'un dialogue contradictoire avec la vérificatrice sur l'ensemble des chefs de rectifications qu'elle envisageait de retenir ; en effet, si trois entretiens se sont tenus avec la vérificatrice, le service n'a obtenu réponse, de la part de l'établissement détenteur de l'un de ses comptes bancaires, à la demande qu'il lui avait adressée, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, que le 29 novembre 2017, c'est-à-dire après le dernier de ces entretiens, qui s'est tenu le 20 novembre 2017 ; ainsi, il n'a pas été mis à même de discuter de cette réponse, qui a fondé l'essentiel des rehaussement en litige ;

- ces éléments de réponse n'ont pas davantage été soumis à un échange écrit avant l'envoi de la proposition de rectification, en méconnaissance des garanties accordées au contribuable, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, par les articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales ;

- il n'a pas été informé, en méconnaissance de l'exigence posée par l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, de l'origine et de la teneur des renseignements ainsi obtenus par le service dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, la proposition de rectification se limitant à comporter une liste insuffisamment précise et complète des documents obtenus ; il n'a, dans ces conditions, pas été mis à même de demander à avoir accès à ces documents avant la mise en recouvrement des impositions en litige ;

- les sommes qui lui ont été versées par M. B... au cours des années d'imposition en litige ont été empruntées par lui auprès de l'intéressé en exécution d'une convention de prêt qui n'avait pas été formalisée par écrit, mais qu'ils ont été contraints de transcrire pour pouvoir répondre à la demande de justifications adressée par l'administration ; un remboursement partiel de cet emprunt est d'ailleurs intervenu en 2017 ; si, en vertu de l'article 242 ter du code général des impôts, de telles conventions doivent faire l'objet d'une déclaration auprès de l'administration fiscale, le défaut d'une telle déclaration ou le dépôt tardif de celle-ci reste sans effet sur la validité du prêt, qui, selon l'article 1128 du code civil, ne doit pas faire l'objet, à peine de nullité, d'un écrit, mais rend seulement applicable l'amende prévue à l'article 1729 B du code général des impôts ;

- ces sommes n'ont pu légalement être imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; en effet, l'administration n'établit pas que ces sommes auraient la nature de profits susceptibles d'être soumis à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux ; l'administration n'établit pas davantage que ces sommes correspondraient à des profits présentant un caractère renouvelable et tirés d'une activité entrant dans le champ d'application de l'article 92 du code général des impôts ; enfin, ces sommes ne constituent pas des revenus non professionnels non commerciaux auxquels il peut être appliqué le coefficient de 1,25 % prévu au 7 de l'article 158 du code général des impôts ;

- les revenus professionnels non-salariés faisant partie des revenus d'activité et de remplacement visés aux articles L. 136-1 à L. 136-5 et L. 136-8 du code de la sécurité sociale, l'administration fiscale était incompétente pour établir les suppléments de prélèvements sociaux en litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2022, et par un mémoire, enregistré le 3 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- par sa requête, dont les moyens ne sont pas dirigés contre le chef de rectification correspondant à la reprise du crédit d'impôt au titre des dépenses d'équipement en faveur des économies d'énergie et du développement durable, M. C... peut, tout au plus, prétendre à une décharge d'un montant de 66 969 euros et non de 71 349 euros ;

- contrairement à ce que soutient M. C..., le tribunal administratif s'est prononcé sur l'imposition, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, des sommes perçues de M. B... ;

- l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, dont M. C... a fait l'objet, a donné lieu à trois entretiens avec la vérificatrice, en prévision desquels l'intéressé a été rendu destinataire, pour chacune des deux années en cause, d'un courrier l'invitant à expliciter l'objet et la cause juridique d'opérations dont une liste détaillée était jointe qui comprenait notamment les versements reçus de M. B... et qui avaient déjà été regardés, avant même la réception des réponses apportées au service par les établissements bancaires, comme consistant en des virements bancaires dont l'émetteur n'était pas, à ce stade, identifié pour toutes ces opérations ; M. C... n'a donc pas été privé de la garantie consistant en la tenue d'un dialogue contradictoire avec le vérificateur, quand bien même les éléments contenus dans l'une de ces réponses, à savoir notamment l'identité de l'émetteur des virements en cause et de plusieurs chèques, n'ont pu être discutés au cours du dernier entretien ; en tout état de cause, le vice de procédure invoqué n'aurait de portée qu'en ce qui concerne ceux des versements bancaires émanant de M. B... qui n'auraient pu être identifiés avant l'obtention de la réponse des établissements bancaires ; il demeurerait, en revanche, sans effet sur les autres versements reçus de M. B... et sur le chef de rectification afférent à la remise en cause du crédit d'impôt ;

- contrairement à ce qu'il soutient, M. C... a été informé, conformément à l'exigence posée par l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus par le service, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des établissements bancaires détenteurs de ses comptes bancaires ; là encore, s'il était regardé comme fondé, ce moyen n'affecterait qu'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige ;

- outre les loyers et les salaires que M. B..., locataire et employeur de M. C..., a versé à ce dernier, M. B... a également versé à l'intéressé, au cours des deux années, 2014 et 2015, en litige, des sommes représentant les montants respectifs de 59 508,76 euros et de 33 080 euros ; si M. C... soutient que ces sommes lui ont été versées dans le cadre de prêts concédés par M. B..., il ne l'établit pas par la production, d'une part, de deux conventions établies pour les besoins de la cause, après les versements dont s'agit, et qui n'ont pas date certaine, d'autre part, du bordereau d'un virement effectué par M. C... au bénéfice de M. B... et dont le libellé fait référence au remboursement d'une dette, dès lors que ce virement est intervenu au cours du contrôle, plus précisément après la réception, par M. C..., de la demande du service visant à obtenir la justification des versements reçus de M. B... ; en outre, la fréquence, durant les deux années d'imposition en litige, de ces versements, ainsi que l'importance des montants correspondants, rendent peu vraisemblable l'affirmation selon laquelle ils correspondent à un prêt consenti à M. C... par M. B... ; c'est donc à bon droit que ces sommes ont été imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et que la majoration d'assiette de 25 % prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts leur a été appliquée ;

- l'administration fiscale était bien compétente pour établir les cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux en litige, à l'instar des cotisations de même nature assises sur des revenus non commerciaux non professionnels, assimilés à des revenus du patrimoine.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C... a fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle portant sur la période allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. A l'issue de ce contrôle, la vérificatrice a estimé qu'il y avait lieu d'intégrer dans les revenus imposables de M. C... au titre des années 2014 et 2015, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, des sommes perçues par l'intéressé, à hauteur des montants respectifs de 59 509 euros et de 33 080 euros, de la part d'un tiers. Elle a retenu, en outre, qu'un crédit d'impôt de 2 000 euros obtenu, en 2014, par M. C... au titre des dépenses d'équipement en faveur des économies d'énergie devait être remis en cause. Enfin, la vérificatrice a estimé que l'intéressé encourait une amende de 1 500 euros pour non déclaration d'un compte bancaire détenu en Belgique. L'administration a fait connaître à M. C... sa position sur ces différents points par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 4 décembre 2017. M. C... ayant présenté des observations qui n'ont pas conduit le service à revoir son appréciation, l'amende de 1 500 euros encourue sur le fondement de l'article 1729 B du code général des impôts a été mise en recouvrement le 15 juin 2018 et les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant des rehaussements notifiés ont été mis en recouvrement le 30 juin 2018, à hauteur d'un montant total, en droits et pénalités, de 71 349 euros. Au vu de la réclamation introduite par M. C..., l'administration a constaté qu'une erreur entachait la liquidation des intérêts de retard assortissant les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à la charge de l'intéressé au titre de l'année 2015. Elle a, en conséquence, prononcé, à concurrence d'un montant de 1 940 euros, un dégrèvement de ces intérêts, mais elle a, dans le même temps, rejeté le surplus de la réclamation. Insatisfait de cette issue partielle, M. C... a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015. M. C... relève appel du jugement du 17 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. C... reproche aux premiers juges de n'avoir pas apporté de réponse expresse à son moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'erreur commise par l'administration dans l'identification de la catégorie d'imposition des sommes qui lui ont été versées par un tiers, en l'occurrence par M. B..., son employeur et locataire, il ressort des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif, après avoir rappelé, au point 4 de ce jugement, les dispositions du 1. de l'article 92 du code général des impôts, définissant les bénéfices non commerciaux, a retenu, au point 6 du même jugement, que, eu égard à la fréquence et au montant des sommes versées, à un autre titre que des salaires et des loyers, par M. B... à M. C... et que M. C... avait rattachées à des prêts en produisant des conventions établies pour les besoins de la cause, l'administration fiscale avait considéré à bon droit que ces sommes constituaient des revenus imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Il suit de là que les premiers juges n'ont aucunement omis d'apporter une réponse à ce moyen, ni entaché le jugement d'insuffisance de motivation.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne le caractère contradictoire de l'examen de situation fiscale personnelle :

3. En vertu de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part, les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal.

4. Le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales, interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 de ce livre, marque l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir.

5. Il résulte de l'instruction que, dans le cadre de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont M. C... a fait l'objet, ce dernier a pu s'entretenir avec la vérificatrice à trois reprises, le 12 janvier 2017, le 6 juillet 2017 et le 20 novembre 2017. M. C... ne conteste pas avoir été rendu destinataire, en prévision du deuxième et du dernier entretien, de courriers, que le service lui a respectivement adressés le 12 juin 2017 et le 12 septembre 2017, afin de lui demander de préciser la cause juridique de crédits bancaires non identifiés perçus par l'intéressé en 2014 et 2015, dont une liste exhaustive, comportant la date, le montant et le libellé de chaque opération, était jointe à chacun de ces courriers. Le second de ces courriers tient compte des qualifications qui ont pu être retenues, depuis le premier, compte-tenu des précisions données, au cours du contrôle, par M. C..., et fait mention de nouveaux crédits inexpliqués identifiés sur les relevés se rapportant à l'année 2015 d'un compte ouvert au nom de M. C... auprès du Crédit du Nord et que le service a pu obtenir de cet établissement le 27 juin 2017 par l'exercice de son droit de communication. Dans ces conditions, M. C... doit être regardé comme ayant eu la possibilité d'apporter à la vérificatrice, et de s'en expliquer de vive voix auprès d'elle, y compris au cours du dernier entretien, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait exclusivement été consacré à dresser la synthèse du contrôle, tous éléments de justification et d'explication concernant l'intégralité des crédits bancaires inexpliqués identifiés par le service. La circonstance que le service n'a obtenu qu'après le dernier entretien entre la vérificatrice et M. C..., les copies d'ordres de virement et de chèques qu'il avait sollicitées auprès du Crédit du Nord afin d'identifier l'émetteur de trois chèques remis à l'encaissement et d'un virement bancaire, est demeurée, dans ces conditions, sans incidence sur le caractère contradictoire du dialogue dont M. C... a pu bénéficier au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle mis en œuvre à son égard. Il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité, sur ce point, de ce contrôle doit être écarté.

En ce qui concerne les garanties de la procédure de rectification contradictoire :

6. Comme il a été dit au point précédent, M. C... n'a eu connaissance de l'identité de l'émetteur de trois chèques encaissés par lui en 2014, pour un montant total de 1 200 euros, et d'un virement de 470 euros perçu par lui en 2015, qu'après le dernier entretien tenu avec la vérificatrice. En outre, il est constant que M. C... n'a pas été mis en mesure, avant la réception de la proposition de rectification qui lui a été adressée le 4 décembre 2017 et qui reprend ces informations, de réagir par écrit sur ces éléments. Toutefois, le requérant ne conteste pas avoir été rendu destinataire, comme il a été dit au point précédent, des deux courriers que le service lui a adressés, le 12 juin 2017 et le 12 septembre 2017, afin de lui demander de préciser la cause juridique de crédits bancaires non identifiés perçus par lui en 2014 et 2015, au nombre desquels figuraient les crédits en cause, quand bien même leur émetteur n'avait, à ce stade, pas encore été identifié par le service. Dès lors, M. C..., qui a été mis à même d'apporter, tant à l'écrit qu'à l'oral, tous éclaircissements et éléments de justification au sujet de ces crédits, avant la clôture du contrôle dont il a fait l'objet, n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé des garanties accordées, par les articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales, aux contribuables faisant l'objet d'une procédure de rectification contradictoire.

En ce qui concerne la régularité de l'exercice, par le service, de son droit de communication :

7. En vertu de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.

8. Il ressort des termes mêmes de la proposition de rectification que l'administration a adressée à M. C... le 4 décembre 2017 afin de lui faire connaître, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, les rehaussements qu'elle envisageait, à l'issue de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont il a fait l'objet, en ce qui concerne ses revenus imposables des années 2014 et 2015, que ce document a informé l'intéressé de l'exercice, par le service vérificateur, de son droit de communication auprès des établissements bancaires détenteurs des comptes bancaires dont il a disposé au cours de la période vérifiée, comprise entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2015. Cette proposition de rectification précise, sous la forme de deux tableaux, la nature des renseignements obtenus par le service dans le cadre de son droit de communication, à savoir, d'une part, les relevés de compte bancaire que M. C... n'avait pas fournis lui-même au service, en précisant, pour chaque établissement sollicité, le numéro du compte concerné, la date de la demande de communication et celle de réception de la réponse obtenue et, d'autre part, la copie d'ordres de virement et de chèques, en précisant les établissements bancaires sollicités, la date des demandes, ainsi que celles auxquelles les réponses ont été obtenues. Quand bien même ces tableaux ne précisent pas le nombre de documents obtenus, ils ont néanmoins mis M. C... à même, par rapprochement avec le tableau des relevés de comptes bancaires fournis par lui, figurant dans la même proposition de rectification, ainsi qu'avec les autres mentions de celle-ci, notamment celles des tableaux figurant en annexe, d'identifier l'origine ainsi que la teneur de ces documents contenant les renseignements utilisés par le service pour établir les impositions et contributions contestées et d'en demander, avant la mise en recouvrement de ces impositions et contributions, la communication. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance, par l'administration, de l'obligation d'information posée par l'article L.76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé des suppléments d'impôt sur le revenu en litige :

9. En vertu du 1. de l'article 92 du code général des impôts, sont notamment considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus.

10. Il appartient à l'administration, lorsqu'elle entend fonder une imposition sur le 1. de l'article 92 du code général des impôts, en dehors de toute procédure de taxation d'office, d'établir que les sommes réintégrées dans les bases imposables du contribuable constituent des revenus. Dans ce cadre, il incombe au juge de l'impôt d'apprécier si l'administration établit la nature de revenus des sommes en cause, compte tenu des éléments de preuve qu'elle présente et, le cas échéant, des éléments que lui soumet le contribuable qui soutient que les sommes en litige ne présentent pas la nature de revenus ou relèvent d'une autre catégorie d'imposition et de ceux que l'administration lui oppose alors en vue d'établir, par tout autre moyen complémentaire, le bien-fondé de l'imposition.

11. Ainsi qu'il a été dit au point 1, la vérificatrice a, notamment, relevé, au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont a fait l'objet M. C..., que l'intéressé avait, au cours de la période vérifiée, allant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, perçu, à de nombreuses reprises, des sommes versées par la même personne physique, à savoir par M. B..., son employeur et son locataire, et qui ont représenté, en faisant abstraction des salaires et loyers identifiés par ailleurs, les montants totaux de 59 509 euros, au titre de l'année 2014, et de 33 080 euros, au titre de l'année 2015. Pour justifier, ainsi que le service le lui avait expressément demandé, la cause juridique de ces crédits bancaires inexpliqués figurant sur ses relevés de compte bancaire, M. C... a indiqué à la vérificatrice que ces versements avaient été effectués par M. B... en exécution de prêts que ce dernier lui avait consentis et il a fourni, à l'appui de ses dires, deux contrats de prêt conclus sous seing privé et de manière manuscrite par les intéressés le 3 janvier 2014 et le 7 janvier 2015. M. C... a fourni, en outre, un récépissé de demande de virement occasionnel établi le 20 juin 2017 par un établissement bancaire auprès duquel il disposait d'un compte, et qui fait mention d'un ordre de virement portant sur une somme de 29 000 euros et précisant, au titre du libellé de l'opération, " Remboursement dette D... ". Toutefois, pour établir, comme la charge lui en incombe ainsi qu'il a été dit au point 10, que les sommes ainsi versées par M. B... présentent la nature de revenus, le ministre fait valoir que les deux contrats produits, qui n'ont fait l'objet d'aucun enregistrement, ni d'aucune déclaration auprès de l'administration, et qui ne peuvent être rapprochés d'aucun document extérieur aux parties signataires, n'ont pas date certaine et portent sur des montants, à savoir, respectivement, 70 000 euros et 35 000 euros, qui ne correspondent pas aux montants totaux des versements identifiés pour chacune des années en cause, à savoir 59 509 euros et 33 080 euros. Le ministre fait valoir, en outre, que l'ordre de virement de 29 000 euros dont M. C... se prévaut, lequel a été établi au cours du contrôle, plus précisément après la réception, par l'intéressé, de la demande du service visant à obtenir la justification des versements reçus de M. B..., ne peut, dans ces conditions, être regardé avec certitude comme correspondant à un remboursement des prêts qui lui auraient été accordés par ce dernier. Dans ces conditions, en faisant valoir le caractère répété des versements en cause sur les deux années d'imposition en litige ainsi que l'importance de ces versements, non rattachables à une autre catégorie d'imposition mais ayant une probabilité de renouvellement importante, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, que les sommes en cause présentent le caractère de revenus imposables, entre les mains de M. C..., dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Par voie de conséquence, l'administration était fondée à faire application, à la base d'imposition à l'impôt sur le revenu correspondante, de la majoration d'assiette de 25 % prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts et visant les bénéfices non commerciaux.

Sur le bien-fondé des prélèvements sociaux en litige :

12. Aux termes de l'article 1600-0 F bis du code général des impôts, applicable au présent litige : " I. - Le prélèvement social sur les revenus du patrimoine est établi conformément aux dispositions de l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale. / (...) ". Aux termes de l'article L. 245-14 du code de la sécurité sociale, applicable au présent litige : " Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à un prélèvement sur les revenus et les sommes mentionnés aux I et II de l'article L. 136-6. (...) ". Aux termes de l'article L. 136-6 de ce code : " I. - Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : / (...) / f) De tous revenus qui entrent dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles au sens du code général des impôts, à l'exception de ceux qui sont assujettis à la contribution sur les revenus d'activité et de remplacement définie aux articles L. 136-1 à L. 136-5. / (...) ".

13. Il résulte de ces dispositions, qui assimilent, pour la détermination de l'assiette des prélèvements sociaux, les revenus non professionnels imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux à des revenus du patrimoine, que les prélèvements sociaux assis sur de tels revenus sont établis sur la base du montant net retenu, par l'administration fiscale, pour l'imposition de ces revenus et qu'ils suivent, en conséquence, le régime prévu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu. Il suit de là que l'administration fiscale était compétente pour établir et mettre à la charge de M. C... les prélèvements sociaux en litige, conjointement avec les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels l'intéressé a été assujetti, sur les mêmes bases, au titre des mêmes années.

14. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Mathieu Sauveplane, président assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé: J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé: C. Heu

La greffière,

Signé: N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°22DA00355

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00355
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heu
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DELATTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-06-29;22da00355 ?
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