La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2023 | FRANCE | N°22DA00775

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 19 septembre 2023, 22DA00775


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2019 par lequel la garde des sceaux, ministre de la justice a prononcé à son encontre la sanction de la révocation, d'autre part, d'enjoindre au ministre de la justice de le réintégrer sans délai, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000523 du 2 mars 2022, le tribunal a

dministratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2019 par lequel la garde des sceaux, ministre de la justice a prononcé à son encontre la sanction de la révocation, d'autre part, d'enjoindre au ministre de la justice de le réintégrer sans délai, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000523 du 2 mars 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2022 sous le n° 22DA00775, M. A... C..., représenté par Me Catherine Degandt, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté de la ministre de la justice du 2 mars 2022 ;

3°) d'enjoindre au ministre de la justice de le réintégrer sans délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 19 décembre 2019 ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne le moyen tiré de ce qu'en méconnaissance des droits de la défense, le rapport de saisine du conseil de discipline ne mentionne pas le grief tiré de ce que son absence a entraîné des risques pour la prise en charge des mineurs participant au camp de rupture dont il était l'un des éducateurs chargé d'assurer l'encadrement ;

- l'arrêté du 19 décembre 2019 est insuffisamment motivé en ce qu'il reprend les motifs de l'avis du conseil de discipline sans expliciter les raisons pour lesquelles la ministre de la justice n'a pas suivi le sens de cet avis, qui ne s'est prononcé en faveur d'aucune sanction ;

- le rapport de saisine du conseil de discipline ne mentionne pas le grief, retenu par la ministre de la justice, tiré de ce que son absence a entraîné des risques pour la prise en charge des mineurs présents au camp de rupture, de sorte que la procédure disciplinaire suivie à son encontre est entachée de méconnaissance des droits de la défense ;

- son absence avait reçu l'autorisation préalable de l'agent qui était alors compétent à cet effet ;

- son absence était justifiée ;

- il n'a pas exercé de pressions sur les mineurs présents dans le camp de rupture afin que ceux-ci témoignent à son profit de faits inexacts ;

- l'utilisation d'un véhicule et d'une carte de télépéage pour se rendre à l'aéroport ne présente aucun caractère fautif ;

- la sanction prononcée présente un caractère disproportionné par rapport aux griefs susceptibles d'être retenus à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2023, le ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère,

- et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., éducateur de 2ème classe de la protection judiciaire de la jeunesse, titularisé à compter du 1er septembre 2013, exerçait ses fonctions au sein du centre éducatif renforcé de Cuinchy (Pas-de-Calais) relevant de la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse Grand Nord. Par un arrêté du 19 décembre 2019, la ministre de la justice a prononcé à son encontre la sanction de la révocation. M. C... relève appel du jugement du 2 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. En premier lieu, M. C... soutient que le tribunal a insuffisamment répondu au moyen soulevé devant lui, tiré de ce qu'en méconnaissance des droits de la défense, le rapport de saisine du conseil de discipline ne mentionne pas le grief tiré de ce que son absence a entraîné des risques pour la prise en charge des mineurs participant au camp de rupture dont il était l'un des éducateurs chargé d'assurer l'encadrement.

4. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué qu'après avoir cité les dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 et celles du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat fixant, en ce qui concerne ces derniers, les modalités d'organisation du caractère contradictoire de la procédure disciplinaire, puis, après avoir précisé la portée tant de ces dispositions que du principe du droit de la défense en matière d'information préalable des agents faisant l'objet d'une telle procédure, le tribunal a, au point 8 de ce jugement, relevé les conditions dans lesquelles M. C... avait eu accès à son dossier individuel. Le jugement précise en particulier que si le rapport de saisine du conseil de discipline du 11 juin 2019 ne mentionnait pas explicitement le grief tiré du " déficit d'encadrement des mineurs ", ce même rapport indiquait toutefois que " par son comportement répréhensible, l'agent a mis en danger les mineurs pris en charge par l'institution et a porté atteinte au bon fonctionnement du service ainsi qu'à la réputation de la protection judiciaire de la jeunesse ", prenant ainsi en compte l'ensemble des circonstances dans lesquelles se sont produits les faits relatifs à ce grief, pour lesquels l'intéressé a été mis à même de s'expliquer. Le tribunal a, ainsi, suffisamment répondu au moyen dont il était saisi.

5. En second lieu, M. C... soutient que le tribunal a insuffisamment répondu au moyen soulevé devant lui, tiré de ce que l'arrêté de la ministre de la justice du 19 décembre 2019 était insuffisamment motivé en ce que, bien que reprenant dans leur quasi-intégralité les motifs de l'avis rendu par le conseil de discipline qui, à l'issue de la séance du 20 juin 2019 ne s'était prononcé en faveur d'aucune sanction, cet arrêté n'énonce pas les raisons pour lesquelles l'autorité disciplinaire a décidé de ne pas suivre cet avis en lui infligeant la sanction de la révocation.

6. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué qu'après avoir cité les dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, prévoyant que la décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée, et après avoir précisé la portée de ces dispositions, le tribunal a, au point 4 de ce jugement, analysé avec précision les termes de l'arrêté contesté pour en déduire que celui-ci comportait un énoncé précis des griefs retenus à l'encontre de M. C.... En relevant, par ailleurs, au même point du jugement, que " la circonstance que cette motivation reprenne, en partie, la motivation de l'avis émis le 20 juin 2019 par le conseil de discipline, n'est, en outre, pas de nature à entacher l'arrêté en litige d'une insuffisance de motivation ", les premiers juges ont, implicitement mais nécessairement considéré que, dès lors qu'une telle motivation ne constituait pas une simple reprise de celle de l'avis du conseil de discipline, la ministre de la justice n'était pas tenue d'apporter dans son arrêté davantage de précisions sur les raisons pour lesquelles elle a estimé pouvoir appliquer à M. C... la sanction de la révocation en s'écartant de l'avis du conseil de discipline. Dans ces conditions, alors même qu'ils ont considéré, au point 15 du jugement, que la matérialité de ce grief n'était pas établie, les premiers juges ne se sont pas crus dispensés d'examiner sur ce point le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté, auquel ils ont ainsi suffisamment répondu.

7. Il résulte de ce qui a été dit aux quatre points précédents que M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé et, par suite, irrégulier.

Sur la légalité externe de la décision contestée :

8. M. C... reprend en appel les moyens, qu'il avait invoqués en première instance et tirés, d'une part, de ce qu'il n'avait pas été mis à même de prendre connaissance, à la lecture de l'avis du conseil de discipline du 20 juin 2019, du grief tiré du " déficit du niveau d'encadrement des mineurs " finalement retenu à son encontre dans l'arrêté du 19 décembre 2019 et, d'autre part, de l'insuffisante motivation de cet arrêté. Il ne présente devant la cour aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur le caractère non fondé de ces moyens par les premiers juges qui, ainsi qu'il a été dit précédemment, ont suffisamment motivé dans leur jugement leur réponse à ces deux moyens. Il y a lieu, par suite, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal.

Sur la légalité interne de la décision contestée :

9. Aux termes de l'article 29, alors en vigueur, de la loi du 13 juillet 1983 : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 89, alors en vigueur, de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / (...) Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office ; la révocation. / (...) Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline ".

10. En l'espèce, pour prononcer à l'encontre de M. C... la sanction de la révocation, la ministre de la justice s'est fondée sur ce que l'intéressé s'était absenté pendant une semaine à la fin du mois de septembre 2017 afin de se rendre à l'étranger pour des raisons personnelles, alors qu'il était chargé d'un séjour de rupture organisé aux Ménuires pour six mineurs sous main de justice, sur ce que cette absence n'avait pas été régulièrement autorisée, sur ce que celle-ci avait entraîné un déficit d'encadrement des mineurs concernés, résultant de ce que le nombre des éducateurs présents avait été réduit à deux et entraînant un risque grave pour leur prise en charge éducative, déficit accru lorsque ces deux éducateurs avaient accompagné M. C... en voiture jusqu'à l'aéroport de B..., sur ce que l'intéressé avait ainsi manqué au devoir de surveillance qui lui incombait en tant qu'éducateur, sur ce qu'il avait, pour se rendre à l'aéroport, utilisé un véhicule et la carte de télépéage du service, sur l'altération du travail éducatif résultant de son absence injustifiée et de ce qu'il avait conduit les quatre mineurs effectivement présents à émettre de faux témoignages pour couvrir son absence, sur ce qu'il avait également impliqué ses collègues dans cette affaire et, enfin, sur ce qu'il avait dissimulé les faits à sa hiérarchie plusieurs semaines après les avoir commis et n'avait pas réalisé la gravité de ses actes.

En ce qui concerne l'exactitude matérielle des faits reprochés à M. C... :

11. Il est constant que M. C... s'est absenté du camp de rupture organisé du 25 septembre au 5 octobre 2017 aux Ménuires pour six mineurs placés sous main de justice, afin de se rendre en Algérie pour des motifs personnels. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que M. C... a quitté le camp de rupture dans la nuit du 25 au 26 septembre 2017, conduit à l'aéroport de B... au moyen d'un véhicule de service par les deux autres éducateurs qui en assuraient l'encadrement, et n'a repris son poste que le 2 octobre 2017, à l'occasion d'une sortie organisée pour les jeunes à B..., l'un de ces deux éducateurs étant venu le chercher à l'aéroport avec le même véhicule.

12. En premier lieu, M. C... soutient, d'une part, que cette absence avait été autorisée par D..., qui assurait alors les fonctions de responsable d'unité éducative en l'absence du cadre de proximité et était chargée, à ce titre, d'émettre les autorisations d'absence des éducateurs placés sous sa responsabilité ou, à tout le moins, de transmettre en sa qualité de coordinatrice les demandes d'autorisation d'absence ou de congés à sa hiérarchie. Il soutient, d'autre part, que son départ en Algérie était motivé par des circonstances familiales impérieuses, constitutives d'un cas de force majeure susceptible de justifier qu'un éducateur puisse être autorisé de s'absenter d'un camp, alors même qu'il participait à l'encadrement de celui-ci.

13. Toutefois, si le ministre de la justice ne conteste pas devant la cour que D... a donné son accord à M. C..., il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a été informée de l'absence de ce dernier que le 28 septembre 2017, alors qu'elle se rendait avec un autre éducateur au camp des Ménuires, afin d'y reconduire un mineur en fugue. Il ressort notamment des attestations établies le 14 mars 2018 par D... et cet éducateur qu'il leur a alors été indiqué que M. C... était absent du camp puisqu'il préparait un bivouac. Ainsi, si D... avait effectivement connaissance le 28 septembre 2017 de l'absence de M. C... du camp de rupture organisé aux Ménuires, n'en a pas immédiatement informé sa propre hiérarchie et a au demeurant fait l'objet d'un blâme infligé le 26 juillet 2021 pour ce manquement à ses obligations déontologiques, il n'est nullement établi qu'elle aurait eu connaissance de cette absence avant le départ effectif de M. C..., qu'elle aurait été informée du réel motif de l'absence de l'intéressé et de sa destination et, qu'ainsi, elle aurait préalablement et régulièrement autorisé cette absence. La seule attestation produite sur ce point par M. C..., qui émane de l'un des collègues l'ayant conduit et ramené de l'aéroport de B..., se borne à indiquer que D... aurait " validé tous [leurs] déplacements dans ce cadre " et ne peut, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme probante sur ce point. Par ailleurs, il ne résulte ni de la circonstance que seule la teneur et non la citation directe des propos tenus par D... aient été retranscrits à l'issue de l'entretien au cours duquel elle a été entendue sur ces événements par sa hiérarchie, ni de celle que le même collègue de M. C... atteste que ses propres déclarations ont été déformées dans le compte-rendu de l'entretien auquel lui-même a été soumis, ne permettent de mettre en cause la matérialité des faits retenus par l'administration. En outre, alors qu'il avait indiqué le 17 novembre 2017 à son supérieur hiérarchique direct avoir été présent durant toute la durée du camp, M. C... n'a reconnu cette absence qu'à l'occasion de la notification de l'arrêté du 21 novembre 2017 portant suspension de ses fonctions.

14. En deuxième lieu, M. C... ne conteste pas en cause d'appel que la réduction à deux du nombre d'éducateurs participant à l'encadrement du camp de rupture, pendant la majeure partie de celui-ci, a fait peser un risque grave sur la prise en charge pédagogique des jeunes. En tout état de cause, un tel risque est suffisamment établi par l'absence concomitante de M. C... et d'au moins l'un des deux autres éducateurs lorsque ceux-ci l'ont conduit à l'aéroport de B... puis ramené de cet aéroport, faits également relevés dans l'arrêté contesté, alors que le directeur territorial de la protection judiciaire de la jeunesse du Pas-de-Calais avait validé ce projet prévoyant la présence de six mineurs et de trois encadrants, et même si un intervenant associatif était présent.

15. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que, lors d'un événement organisé le 2 novembre 2017, quatre mineurs qui étaient présents au camp de rupture ont chacun rédigé en faveur de M. C... une attestation, antidatée au 1er novembre 2017. Il ressort des éléments circonstanciés figurant notamment dans un courriel du 15 novembre 2017 du supérieur hiérarchique du requérant, une attestation du 14 novembre 2017 et un rapport du 21 novembre 2017 du directeur de l'établissement de placement éducatif de l'Artois, ainsi que d'une attestation d'un éducateur du centre éducatif renforcé de Cuinchy, que l'un de ces mineurs a indiqué avoir rédigé l'attestation sous la pression de M. C..., avant que l'ensemble de ces mineurs ne décide de se rétracter. La seule attestation relative à ces faits et produite par le requérant, émanant de l'un des collègues l'ayant aidé à s'absenter durant le camp de rupture des Ménuires et se bornant à indiquer que M. C... " n'a jamais pris le temps de s'isoler avec des jeunes pour discuter et exercer une pression sur eux ", n'est, à elle seule, pas de nature à remettre en cause la matérialité du grief tiré de ce que l'intéressé a utilisé les mineurs pris en charge pour couvrir son absence.

16. En quatrième lieu, M. C... ne conteste pas avoir impliqué dans ses agissements plusieurs collègues, circonstance d'ailleurs établie par les éléments exposés aux points 11 et 13. Il ne conteste pas non plus avoir fait usage à des fins personnelles d'un véhicule et d'une carte de télépéage du service.

En ce qui concerne le caractère fautif des faits reprochés à M. C... et le caractère proportionné de la sanction :

17. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

18. Le fait pour M. C... de s'être absenté sans autorisation préalable régulière et pour une durée significative du camp de rupture dont, non seulement, il assurait avec deux autres collègues, l'encadrement, mais aussi était le responsable pédagogique et financier, de faire ainsi baisser le taux d'encadrement dans des conditions présentant, au moins ponctuellement, des risques pour la prise en charge des mineurs sous main de justice et de conduire les mineurs concernés à émettre en sa faveur des attestations mensongères constitue un manquement au devoir de surveillance et d'éducation inhérentes aux fonctions d'éducateur. Ces mêmes faits, ainsi que celui d'avoir impliqué ses collègues dans ses agissements et utilisé à des fins personnelles un véhicule et une carte de télépéage du service, constituent un manquement aux obligations d'intégrité et de probité incombant à tout fonctionnaire en vertu de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Il s'ensuit que l'ensemble de ces faits revêt un caractère fautif et est de nature à justifier une sanction.

19. Compte tenu de leur gravité, ces faits sont de nature à justifier l'application de la sanction, du quatrième groupe, de la révocation, alors même que la manière de servir de M. C... avait jusqu'alors donné lieu à des évaluations très favorables. En outre, dans les circonstances de l'espèce, ni l'hospitalisation en Algérie de sa mère, âgée de soixante-sept ans, en raison d'une perte de connaissance survenue le 25 septembre 2017, ni la volonté exprimée par l'intéressé d'intervenir sur place et sans attendre pour empêcher ses parents de divorcer ne sont de nature à conférer à cette sanction un caractère disproportionné. Enfin, le certificat médical établi le 17 décembre 2017 selon lequel M. C... présente un état anxio-dépressif ne permet pas d'établir qu'il ait été, à la date des faits, privé du discernement nécessaire pour mesurer la portée de ses agissements.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de la justice.

Copie en sera adressée, pour information, à la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse Grand Nord.

Délibéré après l'audience publique du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.

La rapporteure,

Signé : D. Bureau

La présidente de chambre,

Signé : M-P. Viard

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de la justice ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

N. Roméro

2

No 22DA00775


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00775
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : DEGANDT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-09-19;22da00775 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award