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27/09/2023 | FRANCE | N°22DA02315

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 27 septembre 2023, 22DA02315


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté en date du 12 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de soixante jours et a fixé son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2200492 du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les

2 novembre 2022, 6 mars 2023 et 28 août 2023, M. A..., représenté par Me Magali Leroy, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté en date du 12 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de soixante jours et a fixé son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2200492 du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 novembre 2022, 6 mars 2023 et 28 août 2023, M. A..., représenté par Me Magali Leroy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, ou subsidiairement d'abroger, l'arrêté du 12 juillet 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui remettre une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de huit jours ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de réexaminer sa demande d'admission au séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui remettre une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de huit jours ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 200 euros hors taxes, soit 1 440 euros toutes taxes comprises, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de refus de délivrance de titre de séjour méconnaît le droit à une bonne administration et les droits de la défense, qui incluent le droit d'accès aux informations, le droit d'être entendu et les obligations de motivation et d'examen sérieux de sa demande ;

- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet a fait des liens avec la famille un critère prépondérant, et n'a pas examiné l'ensemble des critères, commettant une erreur de droit ;

- le tribunal devait exercer un entier contrôle sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non un contrôle restreint ;

- cette décision est entachée d'une erreur de fait, et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- il entend reprendre ces moyens, ainsi que ceux développés dans sa demande introductive d'instance, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- il entend exciper de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, car il est désormais père d'un enfant français ;

- saisi de conclusions à fin d'annulation recevables, le juge peut également l'être, à titre subsidiaire, de conclusions tendant à ce qu'il prononce l'abrogation du même acte au motif d'une illégalité résultant d'un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction ; en l'espèce, l'acte étant devenu illégal puisqu'il est devenu parent d'enfant français, il y a lieu d'en prononcer l'abrogation ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2022, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés, et s'en rapporte à ses écritures de première instance.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Baronnet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... A..., ressortissant guinéen né le 29 décembre 2001, entré en France en juillet 2017 à l'âge de quinze ans, a sollicité à sa majorité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 12 juillet 2021, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler cet arrêté. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des motifs mêmes de l'arrêté contesté que cet arrêté, en ce qu'il refuse de délivrer un titre de séjour à M. A..., comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. En particulier, cet arrêté, dont la rédaction n'est nullement stéréotypée et qui n'avait pas à mentionner l'ensemble des éléments de fait permettant de caractériser la situation personnelle, familiale ou professionnelle de M. A..., fait notamment état de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance, du suivi d'une formation professionnelle qualifiante prenant fin le 31 août 2021, de l'absence de liens personnels en France et de l'absence de justification de la privation de tous liens dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour, laquelle ne se confond pas avec le bien-fondé des motifs, doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse n'aurait pas été précédée de l'organisation de la procédure contradictoire préalable prévue par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté comme étant inopérant.

4. En troisième lieu, la décision de refus de titre de séjour ayant été prise en réponse à une demande de M. A..., il ne saurait utilement soutenir que le préfet de la Seine-Maritime aurait dû respecter une procédure contradictoire avant de prendre cette décision.

5. En quatrième lieu, s'il se prévaut de l'article L. 114-5 du code de l'action sociale et des familles, il doit être regardé comme ayant entendu se prévaloir de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, au soutien de son moyen tiré de ce que l'autorité préfectorale aurait dû l'inviter à compléter son dossier. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que sa demande de délivrance d'un titre de séjour, telle qu'elle a été transmise, aurait été incomplète.

6. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 311-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) les avis, prévus par les textes législatifs ou réglementaires, au vu desquels est prise une décision rendue sur une demande tendant à bénéficier d'une décision individuelle créatrice de droits, sont communicables à l'auteur de cette demande dès leur envoi à l'autorité compétente pour statuer sur la demande. Lorsque les motifs de l'avis n'y figurent pas, ceux-ci doivent être également communiqués au demandeur en cas d'avis défavorable. (...) ". Les dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration ont pour objet de faciliter de manière générale l'accès des personnes qui le demandent aux documents administratifs. Les articles R. 311-12 et suivants et R. 343-11 et suivants de ce code définissent les modalités selon lesquelles est assuré le respect de cette obligation, en particulier par la saisine de la commission d'accès aux documents administratifs. Ces dispositions n'ont, en revanche, pas pour objet de modifier les règles particulières qui régissent la procédure de délivrance des titres de séjour et elles ne peuvent donc utilement être invoquées pour contester la légalité d'une décision refusant d'accorder un titre de séjour.

7. En sixième lieu, si les dispositions de l'article L. 311-3 du code des relations entre le public et l'administration instaurent, au profit des administrés, un droit à obtenir la communication des informations contenues dans un document administratif dont les conclusions leur sont opposées, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe ne subordonnait la décision contestée à la communication préalable, à M. A..., du rapport de la police aux frontières pris en compte par l'autorité administrative pour prendre sa décision.

8. En septième lieu, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Si l'article 41 de la charte s'adresse non pas aux États membres, mais uniquement aux institutions, aux organes et aux organismes de l'Union européenne, ainsi qu'il résulte de l'article 51 de cette charte, le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union européenne également invoqué par M. A....

9. Il appartient à l'autorité préfectorale comme à toute administration de faire application du droit de l'Union européenne et d'en appliquer les principes généraux, dont celui du droit à une bonne administration. Parmi ces principes, figure celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Ce droit implique seulement, qu'informé de ce qu'une décision est susceptible d'être prise à son encontre, l'intéressé soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales.

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a pu, à l'occasion de cette demande, préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demandait son admission au séjour et produire tous les éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartenait, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il jugeait utiles. Il lui était également loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il aurait été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise la décision contestée de refus de titre de séjour. Enfin, l'intéressé ne fait valoir aucun élément qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance du préfet de la Seine-Maritime et qui aurait pu avoir une influence sur le sens de la décision contestée. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée méconnaîtrait le principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu avant l'adoption d'une mesure défavorable.

11. En huitième lieu, il ressort des pièces du dossier et, notamment, des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet de la Seine-Maritime, pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A..., a procédé à un examen particulier et circonstancié de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. A... doit être écarté.

12. En neuvième lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté que le préfet de la Seine-Maritime aurait fondé son analyse sur des faits matériellement inexacts. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

13. En dixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française. ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiant de son état civil ; / 2° Les documents justifiant de sa nationalité (...) / La délivrance du premier récépissé et l'intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents. / (...) ". Aux termes de l'article L. 811-2 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité (...) ".

14. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 421-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, le préfet ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

15. Les dispositions de l'article 47 du code civil posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Il incombe à l'administration, si elle entend renverser cette présomption, d'apporter la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non-conforme à la réalité des actes en cause. En revanche, l'administration française n'est pas tenue de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre état afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet état est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié. Par suite, en cas de contestation de la valeur probante d'un acte d'état civil légalisé établi à l'étranger, il revient au juge administratif de former sa conviction en se fondant sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.

16. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du 10 septembre 2020 des services de la cellule de la fraude documentaire de la direction centrale de la police aux frontières, que le tampon humide indiquant le numéro et la date de transcription au dos du jugement supplétif n° 21505 daté du 16 juillet 2019 est vierge, et que la transcription n° 5877 datée du 29 juillet 2019 fait deux références au jugement supplétif du 16 août 2019, date postérieure à cette transcription. A supposer même que la date du 16 août 2019 relèverait d'une simple erreur matérielle, les incohérences ainsi relevées sont de nature à priver de force probante ces documents, ainsi que la carte d'identité consulaire établie sur la foi desdits documents. Dès lors, les documents présentés par M. A... ne sont pas revêtus de garanties d'authenticité suffisantes et les éléments de preuve produits par le préfet de la Seine-Maritime sont suffisants pour établir leur absence d'authenticité au sens de l'article 47 du code civil. Par suite, M. A..., qui a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance alors qu'il ne justifie pas être entré en France en étant mineur, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet s'est fondé sur l'absence de preuve de son identité et de sa date de naissance pour estimer qu'il ne remplissait pas les conditions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

17. La production en appel d'un jugement de rectification d'erreur matérielle du 24 mai 2022 du tribunal de première instance de Dixinn, postérieur à la décision attaquée, est sans incidence sur la légalité de celle-ci. Il appartient le cas échéant à M. A..., muni de ce nouvel acte, s'il s'y croit fondé, d'entamer de nouvelles démarches en vue d'obtenir son admission au séjour sur le territoire français.

18. En onzième lieu, M. A... soutient que la décision de refus de titre de séjour méconnaît le droit au respect de la vie privée et familiale et fait valoir, à cet effet, qu'il a été pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance dès son arrivée en France et s'est impliqué dans son parcours de formation. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est présent en France depuis quatre ans à la date de l'arrêté contesté, est célibataire et sans enfant à charge. Il ne fait état d'aucune relation familiale ni de relations amicales d'une particulière intensité en France et n'établit pas être isolé en République de Guinée où il a vécu jusqu'à l'âge de quinze ans. Dans ces conditions, et en dépit des efforts d'intégration professionnelle du requérant, le préfet de la Seine-Maritime, qui a au demeurant pris soin de ménager un délai de départ volontaire suffisant pour lui permettre d'achever sa formation, n'a pas porté une atteinte disproportionnée, en rejetant sa demande de titre de séjour, à son droit au respect de la vie privée et familiale, au regard des buts poursuivis par cette décision. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

19. En douzième lieu, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A..., aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.

20. En treizième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / (...) ".

21. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à ces articles, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Or, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A... ne justifie pas satisfaire aux dispositions, notamment, de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement. Par suite, le préfet de la Seine-Maritime, avant de se prononcer sur sa demande de titre de séjour, n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure à raison de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ne peut qu'être écarté.

22. En quatorzième lieu, eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit sur le degré de contrôle exercé sur la décision du préfet est inopérant.

23. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

24. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". Il ressort des dispositions de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français et fixe le pays de renvoi. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse portant obligation de quitter le territoire et celle fixant le pays de destination n'auraient pas été précédées de l'organisation de la procédure contradictoire préalable prévue par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté comme étant inopérant.

25. En deuxième lieu, M. A..., qui a sollicité son admission au séjour, a été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures. Il n'indique d'ailleurs pas quels éléments il n'aurait pas été en mesure de faire valoir préalablement à la décision contestée et qui auraient été susceptibles d'en modifier le sens. Par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union européenne, n'a pas été méconnue.

26. En troisième lieu, lorsqu'un refus de séjour est assorti d'une obligation de quitter le territoire français, la motivation de cette dernière se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique. Or, la décision de refus de titre de séjour comporte, ainsi qu'il a été dit au point 2, les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français doit donc être écarté.

27. En quatrième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 23 le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.

28. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier et, notamment, des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet de la Seine-Maritime, pour faire obligation à M. A... de quitter le territoire français, a procédé à un examen circonstancié de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de M. A... doit être écarté.

29. En sixième lieu, pour les motifs mentionnés au point 18, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime, en lui faisant obligation de quitter le territoire français, aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La légalité d'une décision administrative s'appréciant au regard des circonstances de droit et de fait à la date à laquelle elle a été prise, la circonstance que M. A... serait devenu père d'un enfant français postérieurement à celle-ci, au cours de l'année 2023, est sans incidence sur la légalité de la décision en litige. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cette décision, au regard de la situation personnelle de l'intéressé, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

30. En septième et dernier lieu, M. A... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français tirés du défaut de saisine de la commission du titre de séjour et de ce qu'il devrait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Rouen aux points 25 à 27 de son jugement.

31. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

32. En premier lieu, M. A... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Rouen aux points 28 et 29 de son jugement.

33. En second lieu, pour les motifs mentionnés au point 18, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime, en fixant comme pays de renvoi le pays dont il possède la nationalité ou tout pays dans lequel il est légalement admissible, aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cette décision, au regard de la situation personnelle de l'intéressée, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences.

Sur les conclusions subsidiaires tendant à l'abrogation de l'arrêté du 12 juillet 2021 :

34. Saisi de conclusions à fin d'annulation recevables, le juge peut également l'être, à titre subsidiaire, de conclusions tendant à ce qu'il prononce l'abrogation du même acte au motif d'une illégalité résultant d'un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction, afin que puissent toujours être sanctionnées les atteintes illégales qu'un acte règlementaire est susceptible de porter à l'ordre juridique. L'arrêté du 12 juillet 2021 n'étant pas un acte réglementaire mais un acte individuel, le moyen tiré de ce que M. A..., devenu parent d'enfant français le 8 juin 2023 est désormais éligible à un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne pourrait plus faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français à compter de cette date compte tenu des dispositions du 5° de l'article L. 611-3 de ce code est sans incidence sur la légalité de cet arrêté et les conclusions subsidiaires qu'il présente en ce sens ne peuvent, dès lors, être accueillies.

35. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2021 du préfet de la Seine-Maritime. Par suite, les conclusions de M. A... à fin d'annulation de cet arrêté ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent donc être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Magali Leroy.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Thierry Sorin, président de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : M. BaronnetLe président de chambre,

Signé : T. Sorin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Anne-Sophie Villette

2

N°22DA02315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02315
Date de la décision : 27/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Marc Baronnet
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : LEROY

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-09-27;22da02315 ?
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