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31/07/1989 | FRANCE | N°89LY00350

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 31 juillet 1989, 89LY00350


Vu l'ordonnance du président de la 4° sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat en date du 1er décembre 1988 transmettant le dossier de la requête ci-après visée à la cour administrative d'appel de LYON ;
Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 avril 1987, présentée pour M. Michel A..., architecte en chef des monuments historiques, demeurant ... (HAUTS-DE-SEINE), par Me X..., avocat aux conseils, et tendant :
1°) à l'annulation du jugement du 10 février 1987 par lequel le tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND

l'a condamné, d'une part, à verser à la commune de BOIZAT (ALLIER) ...

Vu l'ordonnance du président de la 4° sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat en date du 1er décembre 1988 transmettant le dossier de la requête ci-après visée à la cour administrative d'appel de LYON ;
Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 avril 1987, présentée pour M. Michel A..., architecte en chef des monuments historiques, demeurant ... (HAUTS-DE-SEINE), par Me X..., avocat aux conseils, et tendant :
1°) à l'annulation du jugement du 10 février 1987 par lequel le tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND l'a condamné, d'une part, à verser à la commune de BOIZAT (ALLIER) la somme de 135 628,48 francs majorée des intérêts en réparation de 80 % des désordres consécutifs à la réfection du clocher de l'église de cette commune, d'autre part, à supporter 80 % des frais d'expertise ;
2°) au rejet de la demande présentée par la commune de BIOZAT devant le tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988, et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 6 juillet 1989 :
- le rapport de M. Z..., président-rapporteur ;
- et les conclusions de M. JOUGUELET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par convention en date du 20 août 1973, la commune de BIOZAT (ALLIER), représentée par son maire, a confié à l'Etat, représenté par le conservateur régional des bâtiments de France de la région Auvergne, la direction et la responsabilité des travaux de réparation de la couverture de son église classée monument historique ; que les travaux ont été exécutés par la société anonyme Etablissements DAGOIS sous la direction successive de deux architectes en chef des monuments historiques, M. Y..., puis à partir du 16 mai 1974 M. A... ; que lesdits travaux ont fait l'objet, le 23 juillet 1975, d'une réception qui a été constatée par un procès-verbal du 24 novembre 1975 ; que la société anonyme Etablissements DAGOIS a été mise en règlement judiciaire le 24 avril 1980 et ses biens pris en location-gérance le 13 mai 1980 par la société S.O.C.A.E. à laquelle a été ultérieurement substituée la S.A.R.L. DAGOIS ; qu'à la suite de la dégradation généralisée de la couverture du clocher, qui s'est manifestée par la chute d'un grand nombre d'ardoises, la commune de BIOZAT a demandé, devant le tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND, que l'Etat et, à défaut, MM. Y... et A... soient condamnés solidairement avec la société anonyme Etablissements DAGOIS, la S.O.C.A.E. et la S.A.R.L. DAGOIS à réparer son préjudice évalué par elle à 200 000 francs ; que par jugement du 10 février 1987, le tribunal a rejeté l'ensemble des conclusions de la requête à l'exception de celles dirigées contre M. A..., qui a été condamné à payer à la commune la somme de 135 628,48 francs représentant 80 % du coût de réfection de la couverture du clocher, au motif qu'il avait manqué à ses engagements contractuels en négligeant, avant la réception des travaux, de vérifier leur bonne exécution et d'inviter le maître d'ouvrage à émettre les réserves les plus étendues sur la qualité de la pose des ardoises ; qu'une part de responsabilité de 20 % a été laissée à la charge de la commune en raison de l'imprudence commise par les représentants du maître de l'ouvrage en ne faisant que des réserves mineures lors de la réception des travaux ;
Sur la responsabilité de M. A... :

Considérant que l'article 46 du cahier des clauses administratives générales applicables en l'espèce prévoit une réception provisoire et l'article 47 une réception définitive ; qu'en vertu du 1 dudit article 47, il est procédé à la réception définitive après l'expiration du délai de garantie et qu'aux termes du 2 du même article : "à défaut de stipulation expresse dans le cahier des prescriptions communes ou le cahier des prescriptions spéciales, ce délai est de six mois à dater de la réception provisoire pour les travaux d'entretien, les terrassements et les chaussées d'empierrement et d'un an pour les autres ouvrages" ; qu'aux termes de l'article XVI du cahier des prescriptions spéciales : "les travaux du présent marché ne comportent pas de délai de garantie" et qu'aux termes de l'article XVII : "il est dérogé aux articles ci-après du cahier des clauses administratives générales : ... 47-2 délai de garantie" ; qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations qu'en l'absence de délai de garantie applicable en l'espèce, il ne pouvait y avoir de réception définitive distincte de la réception provisoire et que les travaux litigieux, contrairement à ce que soutient M.JANTZEN, n'étaient soumis qu'à une réception unique, laquelle a fait l'objet du procès-verbal susmentionné du 25 novembre 1975 ;
Considérant que la mission de l'Etat s'est achevée avec la réception des travaux ; qu'après cette réception, la commune de BIOZAT, propriétaire de l'église, avait seule qualité pour mettre en cause la responsabilité de M. A..., architecte, alors même que celui-ci avait été désigné par l'Etat et n'avait conclu aucun contrat avec la commune ;
Considérant qu'en vertu de ses devoirs professionnels M. A... avait l'obligation, lors des opérations de réception, d'appeler l'attention du maître de l'ouvrage sur les défectuosités des travaux de nature à faire obstacle à ce que la réception fût prononcée sans réserves ; qu'il résulte de l'instruction qu'il a manqué à cette obligation, alors que les premiers désordres, qui se sont considérablement aggravés dans les années qui ont suivi, s'étaient déjà manifestés et étaient révélateurs de malfaçons qui ne pouvaient échapper à un homme de l'art ; qu'il a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité envers la commune ;
Considérant que la circonstance que la commune de BIOZAT, qui ne disposait pas de services techniques qualifiés, n'ait formulé que des réserves mineures lors de la réception des travaux ne peut être regardée comme une imprudence fautive susceptible d'être retenue à sa charge pour exonérer M. A... de tout ou partie de sa responsabilité ; que, d'ailleurs, à supposer une telle faute établie, il n'appartiendrait pas au juge d'en relever d'office l'existence, alors qu'elle n'est invoquée par aucune des parties ni en première instance ni en appel ;
Sur la réparation :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert qu'il ne peut être remédié aux désordres litigieux que par la réfection complète de la couverture du clocher de l'église ; que le coût de cette réfection, réalisée avec des ardoises de mêmes caractéristiques que celles posées initialement avec l'accord de l'architecte des monuments historiques, s'élève, selon l'expert dont le rapport a été déposé le 28 mai 1985, à 169 535,61 francs TTC ; que si la commune fait valoir qu'elle aurait été dans l'impossibilité de financer ces travaux dès le 28 mai 1985, elle ne justifie pas avoir fait les diligences requises pour se procurer, le cas échéant par un emprunt, les fonds nécessaires ou s'être heurtée sur ce plan à des difficultés insurmontables ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'évaluer le préjudice à une autre date que celle du dépôt du rapport de l'expert ; que, dans ces conditions, le montant de l'indemnité due par M. A... à la commune de BIOZAT s'établit à la somme de 169 535,61 francs ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant que la commune de BIOZAT a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 169 535,61 francs à compter du 16 décembre 1986, date d'enregistrement au tribunal administratif du mémoire dans lequel elle a sollicité pour la première fois la condamnation de M. A... à réparer son préjudice ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 5 octobre 1987 ; qu'à cette date il n'était pas dû une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de rejeter cette demande ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise à la charge de M. A... ;
Sur les conclusions de la commune de BIOZAT dirigées contre l'Etat, M. Y..., la société anonyme Etablissements DAGOIS, la S.O.C.A.E. et la S.A.R.L. DAGOIS :
Considérant que la situation de la commune de BIOZAT n'est pas aggravée par l'effet de la présente décision ; que, dès lors, ses conclusions dirigées, par la voie de l'appel provoqué, contre l'Etat, M. Y..., la société anonyme Etablissements DAGOIS, la S.O.C.A.E et la S.A.R.L. DAGOIS ne sont pas recevables ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appel principal de M. A... doit être rejeté et que la commune de BIOZAT est fondée à demander, par la voie de l'appel incident, que l'indemnité que M. A... a été condamné à lui verser par les premiers juges soit portée à 169 535,61 francs avec les intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 1986 et que les frais d'expertise soient mis intégralement à la charge de M. A... ;
Article 1er : La somme de 135 628,48 francs que M. A... a été condamné à verser à la commune de BIOZAT par le jugement du tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND du 10 février 1987 est portée à 169 535,61 francs. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 1986.
Article 2 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de M. A....
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND du 10 février 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La requête de M. A... est rejetée ainsi que le surplus des conclusions du recours incident et les appels provoqués de la commune de BIOZAT.


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