La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/1991 | FRANCE | N°90LY00366

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 26 septembre 1991, 90LY00366


Vu, enregistrés au greffe de la cour les 23 et 29 mai 1990, la requête et le mémoire complémentaire, présentés par la SCP PORTEJOIE, BERNARD et FRANCOIS, avocat, pour M. et Mme Michel X..., demeurant ... ;
M. et Mme X... demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur payer la somme de 868 070 francs en réparation du préjudice direct qu'ils ont subi du fait de l'abattage d'une fraction de leur cheptel et d'une somme de 200 000 fra

ncs pour le préjudice indirect ;
2°) de prononcer lesdites condam...

Vu, enregistrés au greffe de la cour les 23 et 29 mai 1990, la requête et le mémoire complémentaire, présentés par la SCP PORTEJOIE, BERNARD et FRANCOIS, avocat, pour M. et Mme Michel X..., demeurant ... ;
M. et Mme X... demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur payer la somme de 868 070 francs en réparation du préjudice direct qu'ils ont subi du fait de l'abattage d'une fraction de leur cheptel et d'une somme de 200 000 francs pour le préjudice indirect ;
2°) de prononcer lesdites condamnations, outre intérêts de droit ;
3°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le décret n° 81-493 du 8 mai 1981 et les arrêtés des 20 décembre 1982 et 6 août 1984 pris pour son application ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 1991 :
- le rapport de Mlle PAYET, conseiller ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions fondées sur les fautes qu'auraient commises l'administration :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté ministériel du 6 août 1984 relatif aux mesures techniques et administratives applicables en matière de lutte contre la leucose bovine enzootique réputée contagieuse : "Pour l'application du présent arrêté, les animaux de l'espèce bovine sont considérés : a) Suspects de leucose bovine enzootique réputée contagieuse lorsque vivants, abattus ou morts, ils présentent des lésions tumorales, ou ganglionnaires, ou viscérales, ne pouvant être rapportées de façon certaine à une autre origine ; b) Atteints de leucose bovine enzootique réputée contagieuse lorsque vivants, abattus ou morts, ils présentent des lésions suspectes et pour lesquels une épreuve d'immuno-diffusion en gélose, ou toute autre épreuve autorisée par le ministre de l'agriculture, pratiquée par un laboratoire agréé à cet effet, a révélé un résultat positif." ; qu'aux termes de l'article 3 du même arrêté : "Lorsque l'existence de leucose bovine enzootique est confirmée par les examens prévus à l'article précédent, le commissaire de la République prend, sur proposition du directeur départemental des services vétérinaires, un arrêté portant déclaration d'infection de l'exploitation d'appartenance s'il s'agit d'un animal de l'espèce bovine vivant, ou de l'exploitation de provenance s'il s'agit d'un animal abattu ou mort." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, qu'à la suite d'un contrôle sanitaire portant sur des génisses vendues à l'exportation, un animal provenant de l'exploitation de M. et Mme X... s'est révélé être infecté de leucose bovine enzootique sous sa forme contagieuse ; que le 29 octobre 1985, le préfet de l'Allier a pris l'arrêté visé à l'article 3 précité, déclarant l'animal immatriculé 03.84.088.779 et l'exploitation de M. et Mme X... infectés de leucose bovine enzootique réputée contagieuse et prescrivant un certain nombre de mesures prophylactiques devant être mises en oeuvre sous le contrôle du médecin vétérinaire désigné par ledit arrêté pour assurer la surveillance sanitaire de l'exploitation en cause ; que sur la proposition du directeur départemental des services vétérinaires, l'arrêté susmentionné a été rapporté le 27 janvier 1986 ;

Considérant que si, à la suite de l'arrêté préfectoral du 29 octobre 1985, M. et Mme X... ont résolu d'abattre une partie de leur troupeau, il ne ressort pas de l'instruction que cette décision ait résulté de directives inappropriées du médecin vétérinaire commis à la surveillance de leur cheptel, ni que ce fonctionnaire ait interprété d'une façon erronée les dispositions réglementaires applicables en la circonstance, ni qu'il ait méconnu ses obligations de conseil et d'assistance ; que la prétendue ambiguité de l'arrêté préfectoral -qui s'est d'ailleurs explicitement référé à l'ensemble des textes devant être mis en oeuvre dans la lutte contre l'enzootie dont s'agit- ne ressort pas des termes de l'acte incriminé ; qu'en se bornant à désigner l'animal atteint et à déclarer l'exploitation infectée, sans donner une liste des animaux devant être abattus, l'arrêté préfectoral contesté n'a pas contrevenu aux dispositions de l'article 3 de l'arrêté ministériel précité ; que le contrôle de leucose préalablement à l'achat de tout bovin n'étant pas obligatoire jusqu'en 1985, un tel contrôle ne pouvait intervenir qu'à l'initiative personnelle des exploitants et que l'administration n'était alors tenue ni de procéder à ces contrôles, ni de subordonner l'octroi des "cartes vertes" aux résultats négatifs de tests sanitaires ni d'informer les éventuels acheteurs des cas de leucose ayant pu être constatés ou suspectés en tel ou tel lieu ; qu'il suit de là que les requérants n'établissent pas que le préjudice résultant de l'abattage d'une grande partie de leur cheptel serait imputable soit à une faute des services administratifs concernés, soit à une irrégularité des mesures prophylactiques prescrites par l'arrêté contesté, de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
Sur les conclusions fondées sur la rupture de l'égalité des citoyens devant les charges publiques :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 214 du code rural, des arrêtés conjoints des ministres de l'agriculture et des finances "fixent les conditions d'indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l'ordre de l'administration." ; qu'en application de cet article et du décret n° 81-493 du 8 mai 1981 ajoutant la leucose bovine enzootique sous sa forme tumorale à la nomenclature des maladies réputées contagieuses, un arrêté interministériel du 22 décembre 1982, modifié par un arrêté du 7 août 1984, a déterminé les indemnités prévues pour l'abattage des animaux de l'espèce bovine marqués au titre de la lutte contre la leucose bovine enzootique ; que si M. et Mme X... demandent à l'Etat réparation du préjudice par eux subi en se fondant sur le principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, les dispositions précitées, qui organisent un régime spécial d'indemnisation des propriétaires d'animaux atteints de leucose et abattus sur ordre de l'administration et qui mettent en partie à la charge de l'Etat le versement des indemnités prévues, font obstacle à l'introduction à l'encontre de la puissance publique d'une action en réparation desdits dommages sur le fondement du principe général susmentionné ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort de l'instruction que les services vétérinaires avaient appelé l'attention de M. et Mme X... sur les répercussions financières d'un abattage massif de leur troupeau, alors que l'arrêté préfectoral ne les contraignait nullement à cette solution ; que, cependant, à un assainissement échelonné de leur cheptel les requérants ont préféré l'élimination immédiate de ceux de leurs bovins "infectés latents", bien que cette solution radicale ne s'imposait que pour les animaux atteints de la forme de leucose réputée contagieuse ; qu'il suit de là que les requérants n'établissent pas avoir été placés dans une situation leur permettant de se prévaloir de la rupture de l'égalité des citoyens devant les charges publiques ;
Considérant qu'il ressort de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les conclusions tendant à l'organisation d'une enquête administrative, que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande ;
Article 1er : La requête de M. et Mme X... est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 90LY00366
Date de la décision : 26/09/1991
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-01-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FAITS N'ENGAGEANT PAS LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE


Références :

Arrêté du 20 décembre 1982
Arrêté du 06 août 1984 art. 1, art. 3
Arrêté du 07 août 1984
Code rural 214
Décret 81-493 du 08 mai 1981


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: PAYET
Rapporteur public ?: HAELVOET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1991-09-26;90ly00366 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award