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17/04/2008 | FRANCE | N°07LY00888

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 6ème chambre, 17 avril 2008, 07LY00888


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 24 avril 2007, présenté pour le PREFET DE L'ALLIER ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701909 en date du 30 mars 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, en premier lieu, son arrêté du 26 mars 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de M. El Hassane X, en deuxième lieu, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et, en dernier lieu, sa décis

ion distincte du même jour le plaçant en rétention administrative ;

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Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 24 avril 2007, présenté pour le PREFET DE L'ALLIER ;

Le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701909 en date du 30 mars 2007, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé, en premier lieu, son arrêté du 26 mars 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de M. El Hassane X, en deuxième lieu, sa décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et, en dernier lieu, sa décision distincte du même jour le plaçant en rétention administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lyon ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2008 :

- le rapport de M. Chabanol, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (...)2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, entré en France le 6 juin 1996 sous couvert d'un visa de court séjour, s'est maintenu sur le territoire français après l'expiration de son visa ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 26 mars 2007, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 2° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré régulièrement sur le territoire français le 6 juin 1996 ; qu'il a connu en 1998 une ressortissante française avec laquelle il vit depuis le mois de juin 2005 et dont l'état de santé justifie la présence permanente de l'intéressé à ses côtés ; qu'un pacte de solidarité civil a été conclu entre eux le 19 mars 2007 ; qu'ainsi, alors même que M. X ne conteste pas avoir encore des liens dans son pays d'origine où vit notamment son frère, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée du séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il a, ainsi, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ALLIER n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 26 mars 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X et, par voie de conséquence, la décision distincte du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et la mise en rétention administrative de l'intéressé ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;

Considérant, qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au PREFET DE L'ALLIER de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au bénéfice de la SCP Borie et associés, conseil de M. X, sous réserve qu'elle renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du PREFET DE L'ALLIER est rejeté.
Article 2 : Il est enjoint au PREFET DE L'ALLIER de réexaminer la situation administrative de M. El Hassane X dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à la SCP Borie et associés, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
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N° 07LY00888


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 07LY00888
Date de la décision : 17/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Daniel CHABANOL
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : SCP BORIE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2008-04-17;07ly00888 ?
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