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05/01/2010 | FRANCE | N°08LY00434

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 05 janvier 2010, 08LY00434


Vu la requête enregistrée, le 22 février 2008, présentée pour le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME représenté par sa présidente en exercice, dont le siège est Maison Départementale des Sports, 29 Côte des Chapeliers à Valence (26000) ;

Le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302387 en date du 18 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 11 avril 2003 du préfet de la Drôme et la décision implicite

du préfet de l'Isère rejetant sa demande d'abrogation de l'arrêté interpréfector...

Vu la requête enregistrée, le 22 février 2008, présentée pour le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME représenté par sa présidente en exercice, dont le siège est Maison Départementale des Sports, 29 Côte des Chapeliers à Valence (26000) ;

Le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302387 en date du 18 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 11 avril 2003 du préfet de la Drôme et la décision implicite du préfet de l'Isère rejetant sa demande d'abrogation de l'arrêté interpréfectoral Drôme-Isère n° 02-2007 du 30 avril 2002 et n° 2002-5517 du 17 mai 2002 déclarant d'utilité publique le projet de mise en conformité des périmètres de protection sanitaire des captages du Trou de l'Aygue et de la source des Neys situés sur les communes de Saint Agnan en Vercors (Drôme) et de Gresse en Vercors (Isère) ;

2°) d'annuler les décisions précitées ;

Il soutient qu'il justifie de son intérêt pour agir ; que le Tribunal administratif aurait dû annuler les décisions contestées en ce qu'elles contribuent à maintenir les prescriptions illégales de l'arrêté interpréfectoral ; que les points de captage du Trou de l'Aygues et la Source des Nays n'ayant pas été mis en conformité dans les délais impératifs prévus par la loi sur l'eau sont donc soumis à la procédure fixée par l'article 5-II du décret du 3 janvier 1989, avec une obligation d'établir le document d'incidence prévu par l'article 29-4) du décret n° 742 du 29 mars 1993 ; que la formalité substantielle prévue à l'article 5-II du décret n° 89-3 du 3 janvier 1989 modifié, visant à protéger notamment les intérêts et les exigences des divers autres usages de l'eau n'a pas été respectée ; que les arrêtés attaqués ont procédé à une interdiction générale et absolue de l'exercice de l'activité spéléologique sur les sites concernés ; que cette interdiction est infondée en droit et en fait et inadéquate au but poursuivi, alors que l'autorité avait d'autres moyens à sa disposition ; que le principe d'égalité des usagers a été méconnu, dès lors que d'autres activités qui ont un impact avéré n'ont pas été interdites ; que le principe de conciliation des usages introduit par la loi sur l'eau a été méconnu, les incidences de l'activité de captage sur l'activité d'intérêt général de la spéléologie n'ont pas été prises en compte ; que les arrêtés attaqués sont entachés de détournement de pouvoir, dès lors que les autorités préfectorales ont édicté des mesures radicales d'interdiction de l'activité spéléologique fondées sur de simples arguments financiers, alors qu'elles ont mis en oeuvre d'importants moyens financiers pour d'autres activités qui demeurent librement pratiquées ; que l'étude prescrite par l'arrêté n'a pas été réalisée en raison du refus du pétitionnaire ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 juillet 2008, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement durable : il conclut au rejet de la requête ; il soutient que les dispositions de l'article 13-1 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 n'ont pas été méconnues, dès lors que le délai de mise en conformité n'était pas prescrit à peine de nullité ; que l'interdiction édictée vise à protéger la ressource en eau destinée à être utilisée pour la consommation humaine ; que le principe d'égalité peut être respecté si des usagers dans des situations différentes sont traités différemment ; que l'autorité administrative n'a nullement méconnu le principe de conciliation entre les usagers en privilégiant un usage vital plutôt qu'un usage sportif ou de loisir conformément aux dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'environnement définissant le principe de la gestion équilibrée ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 juillet 2008, présenté pour le syndicat intercommunal des eaux et d'assainissement du Vercors ; il conclut au rejet de la requête ; il demande que le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME soit condamné à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la demande d'abrogation doit être rejetée dès lors que l'opération concernée n'a pas par suite du changement des circonstances de fait perdu son caractère d'utilité publique et que l'évolution du droit ne la rend pas insusceptible d'être légalement réalisée ; que les délais fixés par l'article 13-1 de la loi sur l'eau et la circulaire n° 97-2 du 2 janvier 1997 sont inapplicables ; que l'ordonnance 2000-914 du 18 septembre 2000 a fait disparaître le délai de 5 ans invoqué par la requérante ; que la condition de délai a été supprimée à compter du 18 septembre 2000, c'est-à-dire avant l'ouverture de l'enquête publique préalable à la prise de la déclaration d'utilité publique ; que la circulaire du 2 janvier 1997 n'a eu pour objet que de rappeler aux responsables publics, leur responsabilité pénale dans l'hypothèse d'une pollution d'un captage non protégé ; que la mesure d'interdiction de la spéléologie n'est pas disproportionnée à l'objectif de protection du captage ; que l'activité spéléologique se déroule en milieu souterrain, directement dans le cours d'eau, situé dans le périmètre de protection immédiate et génère un risque aigu, court et imprévisible, y compris pendant les périodes d'étiage de la ressource où elle peut affecter sa disponibilité ; que les autres activités qui se déroulent en surface génèrent un risque différent, le plus souvent différé et pris en compte par l'installation de traitement de l'eau ; qu'il est excessif d'affirmer que la fermeture du trou de l'Aygue portera atteinte à la spéléologie sur le plateau du Vercors ; qu'il est disproportionné d'opposer l'activité d'intérêt général de la spéléologie à l'intérêt général prioritaire qui s'attache à l'alimentation en eau potable des populations ; que les arguments développés par les requérants ne sont pas fondés sur un détournement de pouvoir mais sur une comparaison des avantages et des inconvénients de l'opération ; que le moyen est infondé eu égard à l'intérêt que présente l'exploitation sécurisée des captages du trou de l'Aygue et de la source des Neys par rapport à l'atteinte portée par cet arrêté à la pratique de la spéléologie ;

Vu l'ordonnance en date du 19 septembre 2008 fixant la clôture d'instruction au 24 octobre 2008, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de santé publique ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le décret n° 89-3 du 3 janvier 1989 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine à l'exclusion des eaux minérales naturelles ;

Vu le décret n° 93-742 du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau ;

Vu le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application de l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau ;

Vu le décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine, à l'exclusion des eaux minérales naturelles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2009 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

- les observations de Me Raynal, avocat du COMITE DEPARTEMANTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME ;

- les observations de Me Martin, avocat du syndicat intercommunal des eaux et d'assainissement du Vercors ;

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que par un jugement en date du 18 décembre 2007, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande du COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME tendant à l'annulation de la décision en date du 11 avril 2003 du préfet de la Drôme et la décision implicite du préfet de l'Isère rejetant sa demande d'abrogation de l'arrêté interpréfectoral Drôme-Isère n° 02-2007 du 30 avril 2002 et n° 2002-5517 du 17 mai 2002 déclarant d'utilité publique le projet de mise en conformité des périmètres de protection sanitaire des captages du Trou de l'Aygue et de la source des Neys situés sur les communes de Saint Agnan en Vercors (Drôme) et de Gresse en Vercors (Isère) ; que le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME relève appel de ce jugement ;

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne prévoit que pour les captages créés avant 1964 pour lesquels des périmètres de protection n'auraient pas été définis dans le délai de 5 ans requis par l'article 13-I de la loi 92-3 du 3 janvier 1992, la totalité de la procédure de déclaration ou d'autorisation doit être reprise ; que la circulaire n° 97-2 du 2 janvier 1997, qui se borne à rappeler l'obligation de détermination de périmètres de protection des points de prélèvement d'eau destinés à la consommation humaine et les responsabilités susceptibles d'être engagées, n'a pas en tout état de cause de valeur réglementaire et ne présente pas non plus le caractère d'une directive ; que le requérant ne peut en conséquence fonder son argumentation sur les orientations qu'énonceraient cette circulaire pour contester la légalité des décisions attaquées ; les captages existants n'ayant ainsi pas à faire l'objet d'une nouvelle autorisation ou d'une déclaration, le requérant ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de décisions instituant des périmètres de protection immédiate et rapprochée, d'une méconnaissance de l'article 4 du décret 93-742 du 29 mars 1993 relatif à la production d'un document d'incidence dans le cadre du dépôt d'une déclaration et de l'article 5 du décret n° 89-3 du 3 janvier 1989 relatif à la procédure d'instruction d'une demande d'autorisation ;

Considérant, en second lieu, que les articles 5 et 6 de l'arrêté attaqué délimitent un périmètre de protection immédiate et un périmètre de protection rapprochée et interdisent l'accès libre au réseau du trou de l'Aygue pour des activités sportives ou d'exploration tout en prévoyant que des modalités de visite pourront le cas échéant être élaborées, au vu des résultats d'une étude scientifique évaluant l'impact de la fréquentation spéléologique sur la qualité des eaux captées, avec l'accord préalable du syndicat intercommunal des eaux et d'assainissement du Vercors (SIEAV) et de l'autorité sanitaire ; qu'il ressort ainsi des termes de l'arrêté interpréfectoral attaqué, que contrairement à ce que soutient le requérant, aucune interdiction générale et absolue de l'activité spéléologique n'a été édictée ; que si le requérant soutient que le principe d'égalité des usagers a été méconnu dès lors que d'autres activités ont été autorisées dans les périmètres de protection, ce principe général d'égalité, ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ; qu'il ressort des pièces du dossier, que l'activité de spéléologie, se déroulant au sein même des périmètres de protection institués peut engendrer une contamination directe de l'eau dans des cavités dans lesquelles les processus d'auto-épuration biologique des rejets n'ont pas la même efficacité qu'en surface ; que par suite en interdisant un accès libre les préfets de la Drôme et de l'Isère n'ont pas, compte-tenu, des spécificités de l'activité spéléologique et des impératifs de sécurité et de santé publique en matière de prélèvement d'eau destinées à la consommation humaine, méconnu ni le principe d'égalité des usagers ni celui de conciliation des usages mentionné à l'article L. 211-1 du code de l'environnement ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en se bornant à soutenir que les mesures d'interdiction ont été fondées sur de simples arguments financiers alors qu'auraient été mis en oeuvre d'importants moyens financiers pour d'autres activités, le requérant n'établit aucun détournement de pouvoir ;

Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que l'étude scientifique mentionnée à l'article 5 de l'arrêté et destinée à organiser les modalités de visite n'ait pas été effectuée est, s'agissant de l'exécution de l'arrêté attaqué, sans incidence sur sa légalité ;

Considérant, que le COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 08LY00434 du COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat intercommunal des eaux et d'assainissement du Vercors tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au COMITE DEPARTEMENTAL DE SPELEOLOGIE DE LA DROME, au syndicat intercommunal des eaux et d'assainissement du Vercors et au et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Fontbonne, président de la formation de jugement,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 5 janvier 2010.

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N° 08LY00434


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00434
Date de la décision : 05/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FONTBONNE
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : RAYNAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-01-05;08ly00434 ?
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