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19/08/2010 | FRANCE | N°09LY01632

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 19 août 2010, 09LY01632


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 juillet 2009, présentée pour Mme Aïcha A, ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702950-0705955, en date du 19 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 16 mai 2007 par laquelle le préfet de la Drôme a rejeté la demande de regroupement familial qu'elle avait formulée au profit de son époux, M. Taieb A, d'autre part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le même préfet a rejeté

son recours gracieux formé contre la décision du 16 mai 2007, à ce qu'il soit en...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 juillet 2009, présentée pour Mme Aïcha A, ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702950-0705955, en date du 19 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 16 mai 2007 par laquelle le préfet de la Drôme a rejeté la demande de regroupement familial qu'elle avait formulée au profit de son époux, M. Taieb A, d'autre part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le même préfet a rejeté son recours gracieux formé contre la décision du 16 mai 2007, à ce qu'il soit enjoint audit préfet d'examiner à nouveau sa demande et de délivrer en attendant une autorisation provisoire de séjour à l'intéressé et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet intervenue le 20 novembre 2007 ;

3°) de faire injonction au préfet de la Drôme de procéder à un nouvel examen de sa demande et de délivrer en attendant à M. A une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à son profit, une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le refus qui a été opposé à sa demande méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où le préfet n'a pas examiné la situation de son conjoint, qui dispose d'un titre de séjour en Espagne et séjournait temporairement en France sous couvert de ce titre ; ils sont mariés depuis le 23 juin 2006, justifient d'une relation stable et intense et ont deux enfants ; la communauté de vie entre eux n'a jamais cessé ; M. A bénéficie d'une promesse d'embauche dans la Drôme et a actuellement la qualité d'agent intérimaire sur l'exploitation ; elle dispose d'un nouveau logement T4 à Saint-Paul-Trois-Châteaux ; leurs deux enfants bénéficient d'un document de circulation pour étrangers mineurs ;

- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'elle ne bénéficiait pas de ressources stables suffisantes, alors que le préfet dispose d'un pouvoir d'appréciation et peut assouplir la règle ainsi posée, notamment au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2009, présenté par le préfet de la Drôme, tendant au rejet de la requête de Mme A ; il soutient que le signataire de la décision du 16 mai 2007 était compétent, ayant reçu délégation à cet effet par arrêté préfectoral du 21 septembre 2006, publié le même jour au recueil spécial des actes administratifs ; que cette décision, qui comporte les considérations de droit et de fait sur le fondement desquelles elle a été prise, est suffisamment motivée au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; que Mme A ne disposait pas de ressources suffisantes au regard des exigences des articles L. 411-1, L. 411-4 et L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la demande a été présentée alors que M. A se trouvait en France, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que sa décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'à la date de cette décision, le mariage était relativement récent et que l'intéressée n'établit pas être dans l'impossibilité de vivre une vie conjugale et familiale normale, soit en Algérie, pays dont son époux est également originaire, soit en Espagne, où rien n'empêche son époux de demander le regroupement familial en sa faveur ; que le recours gracieux de l'intéressée a été rejeté par décision expresse du 28 mai 2008, alors que ses ressources n'atteignaient toujours pas le seuil prévu par la réglementation ; qu'une carte de séjour délivrée dans un autre Etat ne permet pas à son titulaire de s'installer sur le territoire ; que, pour les mêmes raisons que précédemment, cette décision ne porte pas à la vie privée et familiale de la requérante une atteinte excessive par rapport aux buts pour lesquels elle a été prise ; que les conclusions à fin d'injonction et à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ; que la demande à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être à tout le moins réduite comme manifestement excessive au regard de la requête présentée et, le cas échéant, subordonnée à la renonciation de la requérante au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

La requérante ayant été régulièrement avertie du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 2010 :

- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

Considérant que Mme Aïcha A, ressortissante algérienne née le 21 octobre 1975, entrée en France le 19 août 2001, en tant que conjointe d'un français qu'elle avait épousée le 9 septembre 2000, a divorcé de celui-ci le 13 juillet 2004 ; qu'étant titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 17 février 2012, elle a déposé le 1er août 2006 une demande de regroupement familial, au bénéfice de M. Taieb A, ressortissant algérien, qu'elle avait épousé le 23 juin 2006 ; que, par une décision du 16 mai 2007, le préfet de la Drôme a opposé un refus à cette demande, au motif que Mme A ne justifiait pas de ressources suffisantes ; que, Mme A ayant présenté, le 9 juin 2007, au Préfet de la Drôme, un recours gracieux contre sa décision du 16 mai 2007, une décision implicite de rejet lui a été opposée, puis une décision explicite de rejet, le 28 mai 2008 ; que Mme A fait appel du jugement, en date du 19 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 16 mai 2007, d'autre part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le même préfet a rejeté son recours gracieux formé contre la décision du 16 mai 2007 et à ce qu'il soit enjoint audit préfet d'examiner à nouveau sa demande et de délivrer en attendant une autorisation provisoire de séjour à M. A ;

Considérant qu'aux termes de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leur famille : Les membres de famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. / Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente. / Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1. Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance (...) ;

Considérant, en premier lieu, que Mme A ne conteste pas que ses ressources, à la date de la décision portant refus de regroupement familial, soit le 16 mai 2007, étaient sensiblement inférieures au montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance et ne pouvaient être regardées comme suffisantes au sens des stipulations susmentionnées ; qu'elle n'allègue pas qu'à la date de la décision implicite de rejet de son recours gracieux, intervenue le 9 août 2007, ou même à la date de la décision explicite de rejet de ce même recours, intervenue le 28 mai 2008, cette situation avait été modifiée ; que c'est dès lors à bon droit que le préfet lui a opposé l'insuffisance de ses ressources ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée te familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que, si la requérante fait valoir qu'elle justifie d'une relation stable et intense avec son époux et qu'ils ont deux enfants, nés le 19 septembre 2006 et le 31 janvier 2008, il ressort toutefois des pièces du dossier que son mariage, intervenu le 23 juin 2006, était relativement récent à la date des décisions attaquées et n'avait pas été précédé d'une longue période de vie commune ; que les époux n'avaient alors qu'un seul enfant en bas âge, de nationalité algérienne ; que la requérante n'apporte par ailleurs aucune précision sur les attaches familiales et privées qu'elle aurait en France ; qu'elle ne peut utilement faire valoir que son époux disposait lui-même d'un titre de séjour en Espagne et d'une promesse d'embauche dans la Drôme ; qu'elle n'établit pas être elle-même dans l'impossibilité de vivre une vie conjugale et familiale normale, soit en Algérie, pays dont son époux est également originaire, soit, le cas échéant, en Espagne ; qu'ainsi et alors même qu'elle disposerait désormais d'un nouveau logement de type T4 à Saint-Paul-Trois-Châteaux et que ses deux enfants bénéficient d'un document de circulation pour étrangers mineurs, les décisions attaquées n'ont pas porté à la vie privée et familiale de la requérante une atteinte excessive par rapport aux buts pour lesquels elles ont été prises et ne méconnaissent donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, les décisions attaquées ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et familiale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 19 mai 2009, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle a présentées à fin d'injonction et à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Aïcha A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2010, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

Mme Jourdan, premier conseiller,

M. Lévy-Ben Cheton, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 août 2010.

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N° 09LY01632


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01632
Date de la décision : 19/08/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : SCP CHEVILLARD-MENAHEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-08-19;09ly01632 ?
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