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09/11/2010 | FRANCE | N°09LY00267

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 09 novembre 2010, 09LY00267


Vu la requête, enregistrée le 10 février 2009, présentée pour la COMMUNE DE CRUSEILLES (74350) représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par une délibération du conseil municipal du 20 janvier 2009 ;

La COMMUNE DE CRUSEILLES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605581 du 8 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser une somme de 7 600 euros à Mme A en réparation des conséquences dommageables résultant de la chute dont cette dernière a été victime le 26 décembre 2003 ;

2°) à

titre principal de rejeter la demande de Mme A présentée devant le tribunal administratif ; à...

Vu la requête, enregistrée le 10 février 2009, présentée pour la COMMUNE DE CRUSEILLES (74350) représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par une délibération du conseil municipal du 20 janvier 2009 ;

La COMMUNE DE CRUSEILLES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605581 du 8 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser une somme de 7 600 euros à Mme A en réparation des conséquences dommageables résultant de la chute dont cette dernière a été victime le 26 décembre 2003 ;

2°) à titre principal de rejeter la demande de Mme A présentée devant le tribunal administratif ; à titre subsidiaire, de limiter l'indemnisation des préjudices de l'intéressée à une somme qui ne saurait excéder 7 600 euros ;

3°) de mettre à la charge de Mme A une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que sa responsabilité était engagée, à raison d'une carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police, notamment eu égard aux mesures mises en oeuvre après l'accident ; que, en effet, la commune, contrairement à ce que le Tribunal a estimé, n'a pas mis en place postérieurement aux faits litigieux une barrière de protection ou procédé à des travaux de sécurisation ; que par ailleurs le fait de mettre en place une signalisation après un accident ne vaut pas reconnaissance de sa nécessité ; que par conséquent les premiers juges ne pouvaient pas, en tout état de cause, déduire de l'existence d'une signalisation que l'obstacle excédait les dangers ordinaires ; qu'il n'est donc pas établi que la plaque de verglas à l'origine de la chute excédait les risques contre lesquels les usagers doivent normalement se prémunir ; que, dans ces conditions, elle n'était pas tenue de signaler l'obstacle ; que, au surplus, sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors qu'elle ne pouvait avoir connaissance du danger, la plaque de verglas étant invisible et sa formation provenant d'un écoulement, dont elle ignorait l'existence, des eaux pluviales d'un immeuble voisin ; qu'il n'est pas établi que la couche de verglas avait un caractère habituel ou qu'elle s'était formée depuis suffisamment longtemps pour qu'elle ait disposé du temps nécessaire pour intervenir ; qu'elle disposait d'un personnel restreint compte tenu de la date de l'accident ; que, subsidiairement, l'indemnisation de l'incapacité temporaire totale de la victime ne saurait être supérieure à 5 600 euros ; que la réparation du préjudice de la douleur ne devra pas excéder 1 500 euros ; que les conclusions de Mme A tendant à la réparation d'un préjudice professionnel doivent être rejetées dès lors qu'il n'est pas établi que son incapacité et son handicap, non justifié, soient imputables à l'accident litigieux ; que l'intéressée ne peut pas être regardée comme étant dans l'impossibilité d'exercer toute activité professionnelle ; que depuis le 9 mars 2006 elle n'est d'ailleurs plus en incapacité temporaire totale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 3 juillet 2009, le mémoire présenté pour Mme A qui conclut au rejet de la requête, à titre incident à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a limité à 7 600 euros la condamnation de la COMMUNE DE CRUSEILLES destinée à réparer ses préjudices, à ce que cette condamnation soit portée à la somme de 19 860 euros et à ce que soit mis à la charge de la commune une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens ; elle soutient que c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu l'entière responsabilité de la COMMUNE DE CRUSEILLES, sur le fondement de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales, à raison de la chute dont elle a été victime sur une plaque de verglas ; que cet obstacle était présent depuis de nombreux jours ; qu'une barrière de protection a été installée sur les lieux de l'accident postérieurement à celui-ci ; que le jour de sa chute la plaque de verglas n'était pas réellement visible car recouverte de neige ; que la couche de glace était très importante et excédait les risques que les usagers de la voie publique doivent normalement s'attendre à rencontrer ; que la commune ne pouvait ignorer l'existence de cet obstacle ; qu'elle ne saurait utilement se prévaloir du faible effectif du personnel communal à la date de l'accident ; qu'en première instance la commune n'a jamais contesté la mise en place d'une barrière de protection ; que les premiers juges pouvaient déduire du comportement de la commune, notamment des mesures prises après l'accident, que la plaque de verglas excédait les risques ordinaires ; que de nombreux habitants ont déjà été victimes de chutes au même endroit ; que la commune disposait du temps nécessaire pour faire disparaître ou signaler le danger ; que depuis les faits litigieux la commune a obstrué le passage sur les lieux de l'accident ; que la responsabilité de la commune est incontestablement engagée du fait de la carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police ; que les premiers juges ont fait une insuffisante évaluation de ses préjudices ; que l'incapacité permanente partielle qui l'affecte sera justement réparée par l'allocation d'une somme de 8 400 euros ; que le préjudice de la douleur justifie une indemnité de 2 000 euros ; que l'évaluation du préjudice d'agrément à la somme de 500 euros doit être confirmée ; qu'elle a été reconnue travailleur handicapé du fait de l'accident litigieux ; que ce dernier est à l'origine de son incapacité à reprendre l'activité professionnelle qu'elle exerçait antérieurement ; que sa nouvelle activité est moins bien rémunérée ; qu'elle connaît par conséquent une baisse de revenus directement imputable aux séquelles de sa chute ; que cette baisse aura des conséquences sur ses droits à pension de retraite ; que son préjudice économique est incontestable et doit être fixé à la somme de 8 960 euros ;

Vu, enregistré le 24 septembre 2009, le mémoire complémentaire présenté pour la COMMUNE DE CRUSEILLES qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle fait par ailleurs valoir que Mme A est tout à fait apte à exercer une activité de nature à lui procurer un revenu identique à celui perçu avant l'accident ; que ni la perte de revenus alléguée ni son lien avec l'accident litigieux ne sont établis ;

Vu la mise en demeure, adressée le 23 avril 2010 à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie, de produire ses observations, restée sans réponse ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Steck-Andrez, président-assesseur ;

- les observations de Me Spinella, avocat de la COMMUNE DE CRUSEILLES ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que le 26 décembre 2003, vers 10 heures du matin, Mme A a fait une chute sur un trottoir, situé dans le centre ville de la COMMUNE DE CRUSEILLES (74350), à l'origine d'un traumatisme vertébral ; qu'elle a recherché la responsabilité de la COMMUNE DE CRUSEILLES à raison de cet accident ; que cette dernière relève appel du jugement en date du 8 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser une somme de 7 600 euros à Mme A, outre une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 861,58 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie, outre intérêts au taux légal, ainsi qu'une somme de 910 euros au titre de l'indemnité forfaitaire et a mis les dépens, liquidés et taxés à la somme de 300 euros, à sa charge ;

Sur la responsabilité :

Considérant que l'accident dont a été victime Mme A est directement imputable à la présence d'une plaque de verglas recouverte de neige ;

Considérant que les risques de chute dus au verglas sont de ceux contre lesquels il appartient aux usagers de la voie publique de se prémunir en prenant toutes précautions utiles ; que, dans les circonstances de l'espèce, la présence de verglas sur un trottoir ne constituait pas un danger exceptionnel, compte tenu de la saison et de l'altitude ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la formation d'une plaque de verglas à cet endroit, provenant d'un dysfonctionnement de l'écoulement des eaux pluviales d'un immeuble voisin, ait eu un caractère habituel ni que cette plaque se soit formée depuis assez longtemps pour que la COMMUNE DE CRUSEILLES ait pu procéder au sablage des lieux ou mettre en place une signalisation adéquate ; que, dès lors, la présence de la plaque de verglas qui a provoqué la chute de Mme A ne peut être regardée comme constitutive d'un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ou comme révélant une carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police ; que, par suite, la COMMUNE DE CRUSEILLES est fondée à soutenir que cet à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à réparer les conséquences dommageables résultant de la chute accidentelle de Mme A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de Mme A et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie présentées devant le Tribunal administratif de Grenoble, ainsi que les conclusions d'appel incident de Mme A, doivent être rejetées ;

Sur les dépens :

Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais de l'expertise ordonnée en référé, liquidés et taxés à la somme de 300 euros, à la charge de Mme A ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la COMMUNE DE CRUSEILLES tendant à l'application de ces dispositions ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la COMMUNE DE CRUSEILLES, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser à Mme A une somme sur ce fondement ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Grenoble n° 0605581 du 8 décembre 2008 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme A et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie présentées devant le Tribunal administratif de Grenoble ainsi que les conclusions d'appel incident de Mme A sont rejetées.

Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de Mme A.

Article 4 : Les conclusions de la COMMUNE DE CRUSEILLES et de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE CRUSEILLES, à Mme Anne-Marie A et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Steck-Andrez, président,

MM. Picard et Stillmunkes, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2010.

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N° 09LY00267


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00267
Date de la décision : 09/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VIVENS
Rapporteur ?: Mme Frédérique STECK-ANDREZ
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : SELARL SPINELLA-REBOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-09;09ly00267 ?
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