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31/05/2011 | FRANCE | N°09LY01272

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 5, 31 mai 2011, 09LY01272


Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2009, présentée pour la SA DEVINASTE, dont le siège est Route d'Aurillac à Saint-Flour (15100) ;

La SA DEVINASTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 080417 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 mai 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision

du 31 janvier 2008 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Cantal a autorisé la SCI CJF à procéder à une extension de 1 231 m² du magasin Weldom situé sur le territoire de la commune d'Andelat, pour

une surface totale de vente de 3 575 m² ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de con...

Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2009, présentée pour la SA DEVINASTE, dont le siège est Route d'Aurillac à Saint-Flour (15100) ;

La SA DEVINASTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 080417 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 mai 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision

du 31 janvier 2008 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Cantal a autorisé la SCI CJF à procéder à une extension de 1 231 m² du magasin Weldom situé sur le territoire de la commune d'Andelat, pour une surface totale de vente de 3 575 m² ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de condamner la SCI CJF à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société requérante soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, la société CJF était dans l'impossibilité de solliciter, et donc d'obtenir, une autorisation d'extension de surface de vente ; qu'en effet, si cette société a obtenu le 14 juin 2004 une autorisation pour créer un magasin sur le territoire de la commune d'Andelat, elle a ensuite déposé une nouvelle demande et une nouvelle autorisation lui a été accordée, le 22 novembre 2004 ; que cette dernière a rapporté l'autorisation précédente du 14 juin 2004 ; que l'autorisation du 22 novembre 2004 a été annulée par le Tribunal, par un jugement du 7 février 2007 ; que la société CJF était donc, dès cette date, dépourvue de toute autorisation ; qu'en conséquence, elle ne pouvait déposer une demande d'extension d'une surface de vente précédemment autorisée ;

- elle a invoqué devant le Tribunal d'autres moyens, à savoir la méconnaissance de l'article R. 752-24 du code de commerce, l'irrégularité de l'arrêté fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial, la composition irrégulière de cette commission, la méconnaissance de l'article R. 752-9 dudit code et la violation des principes et critères fixés par les articles L. 751-1 et L. 751-6 du même code ; qu'elle maintient ces moyens en appel et joint les mémoires qu'elle a produits devant le Tribunal, auxquels elle entend se référer ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 mai 2010, présenté pour la SCI CJF, qui demande à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la SA DEVINASTE à lui verser une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SCI CJF soutient que :

- la requête, qui ne satisfait pas aux dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, est irrecevable ; qu'en effet, la requérante ne reprend qu'un des moyens invoqués devant le Tribunal, dans les mêmes termes que dans la demande de première instance ; que, pour les autres moyens, la SA DEVINASTE renvoie purement et simplement à ses écritures de première instance ; qu'aucun mémoire complémentaire n'a été produit dans le délai d'appel ;

- elle a mis en oeuvre l'autorisation qu'elle a obtenue le 14 juin 2004, le magasin ayant ouvert le 21 février 2006 ; que la demande d'extension qu'elle a présentée, à laquelle il a été fait droit le 22 novembre 2004, n'est pas susceptible d'entraîner la renonciation implicite à cette autorisation ; que, par suite, c'est à juste titre que le Tribunal a jugé que la demande d'extension n'a été assortie d'aucune renonciation à l'autorisation initiale et que cette dernière n'a pas été retirée, abrogée ou annulée ; que l'appelante ne peut discuter des droits qu'elle a acquis au titre de l'autorisation du 14 juin 2004, qui est devenue définitive ; que l'annulation de l'autorisation d'extension n'a pas remis en cause l'autorisation initiale ; qu'en tout état de cause, cette annulation effacerait l'éventuel retrait de cette autorisation ;

- s'agissant des autres moyens soulevés en première instance, elle s'en tient à l'argumentation qu'elle a développée devant le Tribunal ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 27 octobre 2010, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 novembre 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2010, présenté pour la SA DEVINASTE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La société requérante soutient, en outre, que :

- sa requête, qui ne constitue pas la reproduction intégrale de ses mémoires de première instance, est suffisamment motivée ;

- la SCI CJF a expressément renoncé, lors du dépôt de la nouvelle demande d'autorisation, au bénéfice de l'autorisation initiale ; que l'annulation par le Tribunal de l'autorisation qui a été délivrée à la suite de cette demande n'a pas eu pour effet de faire revivre la décision du 14 juin 2004 ; qu'aucune demande d'extension n'était donc possible ;

- les avis émis par la chambre de commerce et d'industrie et la chambre des métiers sont irréguliers, à défaut d'émaner de l'assemblée générale, seule compétente en la matière ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 novembre 2010, présenté pour la SCI CJF, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La SCI CJF soutient, en outre, que :

- elle n'a jamais pris le moindre engagement de renonciation à l'autorisation initiale et l'autorisation du 22 novembre 2004 ne précise pas qu'elle retire la décision précédente ;

- le nouveau moyen de forme, tiré de l'irrégularité des avis des chambres consulaires, est irrecevable, dès lors qu'aucun moyen de légalité externe n'a été présenté dans le délai d'appel ;

- la consultation des chambres consulaires n'est prévue par aucun texte, l'article

R. 752-19 du code de commerce prévoyant seulement que ces organismes communiquent leurs observations à la commission ; que les chambres consulaires n'ont donc pas à émettre une décision ou un avis, mais de simples observations techniques, dépourvues de toute valeur contraignante ; que, par suite, l'argumentation tirée de la prétendue compétence de principe de l'assemblée générale, en tant qu'organe décisionnaire, est dépourvue de toute pertinence ; qu'au surplus, aucun texte n'attribue une compétence générale et exclusive à l'assemblée générale, si ce n'est pour l'approbation du budget ; qu'enfin, en toute hypothèse, les chambres consulaires peuvent attribuer à ces commissions particulières la compétence pour formuler des observations sur les dossiers d'équipement commercial ; que la requérante ne démontre pas que de telles commissions n'auraient pas été constituées en l'espèce ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 30 novembre 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au

22 décembre 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 décembre 2010, présenté pour la SA DEVINASTE, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La société requérante soutient, en outre, que son nouveau moyen est recevable, des moyens de légalité externe aussi bien que de légalité interne ayant été invoqués dans le délai d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat ;

Vu le code de justice administrative, et notamment son article R. 613-3, en application duquel le mémoire produit le 28 mars 2011 pour la SCI CJF, après la clôture de l'instruction, n'a pas été examiné par la Cour ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2011 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les observations de Me D'Albert des Essarts, représentant la Selas Wilhelm et Associés, avocat de la SCI CJF ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- et la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;

Considérant que, par un jugement du 19 mai 2009, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de la SA DEVINASTE tendant à l'annulation de la décision du 31 janvier 2008 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Cantal a autorisé la SCI CJF à procéder à une extension de 1 231 m² du magasin Weldom situé sur le territoire de la commune d'Andelat, pour une surface totale de vente de 3 575 m² ; que la SA DEVINASTE relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ;

Considérant que, si, dans son mémoire introductif d'instance, la SA DEVINASTE a listé ses moyens de première instance en renvoyant à ses écritures devant le Tribunal, en joignant des copies des deux mémoires qu'elle a produits devant ce dernier, cette société a également repris l'un des moyens invoqués devant les premiers juges, sans se borner à reproduire littéralement les écritures qu'elle a consacrées à ce moyen en première instance ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la SCI CJF, la requête, qui répond ainsi aux exigences de motivation prévues par les dispositions précitées, est recevable ;

Sur la légalité de l'autorisation attaquée :

Considérant qu'en appel, la SA DEVINASTE invoque le nouveau moyen tiré de l'irrégularité de l'avis qui a été émis par la chambre de commerce et d'industrie du Cantal ; que la SCI CJF soutient que ce nouveau moyen, qui n'a été soulevé que dans le mémoire en réplique de la société requérante, après le délai d'appel, est irrecevable, aucun moyen de légalité externe n'ayant été présenté dans ce délai ;

Considérant que l'appelant doit énoncer, dans le délai d'appel, la ou les causes juridiques sur lesquelles il entend fonder son recours ; qu'il suit de là que, postérieurement à l'expiration dudit délai et hors le cas où il se prévaudrait d'un moyen d'ordre public, l'appelant n'est recevable à invoquer un moyen nouveau que pour autant que celui-ci repose sur la même cause juridique qu'un moyen ayant été présenté dans le délai d'introduction de l'appel ;

Considérant que, parmi les moyens que la SA DEVINASTE a simplement listé dans son mémoire introductif d'appel, en renvoyant à ses écritures de première instance jointes à ce mémoire, figurent des moyens de légalité externe ; que, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la requête, du fait de la reprise d'un autre moyen, non littérale par rapport aux écritures de première instance, est suffisamment motivée, lesdits moyens de légalité externe, même présentés dans ces conditions, doivent être pris en compte ; qu'en conséquence, contrairement à ce que soutient la SCI CJF, au moins un moyen se rattachant à la légalité externe ayant ainsi été invoqué dans le délai d'appel, la SA DEVINASTE est recevable à présenter, même après l'expiration de ce délai, le nouveau moyen précité de procédure tiré de l'irrégularité de l'avis de la chambre de commerce et d'industrie du Cantal ;

Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 712-1 du code du commerce : Dans chaque établissement public du réseau, l'assemblée générale des membres élus détermine les orientations et le programme d'action de l'établissement. A cette fin, elle délibère sur toutes les affaires relatives à l'objet de celui-ci, notamment le budget, les comptes et le règlement intérieur. Elle peut déléguer aux autres instances de l'établissement des compétences relatives à son administration et à son fonctionnement courant ; qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article R. 752-19 du même code : L'étude d'impact jointe à la demande est adressée (...) à la chambre de commerce et d'industrie et à la chambre de métiers et de l'artisanat dont les circonscriptions englobent la commune d'implantation du projet ; ces organismes disposent d'un délai de six semaines à compter de leur saisine pour communiquer leurs observations à la commission ; qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article R. 752-24 du même code : Huit jours au moins avant la réunion, les membres titulaires et suppléants de la commission départementale d'équipement commercial reçoivent (...) communication de l'ordre du jour, accompagné des rapports d'instruction de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que, le cas échéant, des avis de la chambre de commerce et d'industrie et de la chambre de métiers et de l'artisanat sur l'étude d'impact, du rapport et des conclusions de l'enquête publique ainsi que de l'avis exprimé par la commission départementale de l'action touristique ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 712-1 du code de commerce que le pouvoir d'émettre un avis sur une demande d'autorisation d'équipement commercial, qui ne relève ni de l'administration ni du fonctionnement courant de la chambre consulaire, appartient en propre à l'assemblée générale de l'établissement et ne peut être délégué à une autre instance de celui-ci ;

Considérant qu'en réponse à la demande d'observations qui lui a été adressée par

l'administration, la chambre de commerce et d'industrie du Cantal a communiqué au préfet du Cantal, le 29 novembre 2007, un document dans lequel, après une partie descriptive de la demande et des observations sur le projet de la SCI CJF, la chambre de commerce et d'industrie émet un avis favorable sur ce projet ; qu'il est constant que ce document, qui est notamment visé par l'autorisation attaquée, a été pris en compte pour l'instruction de la demande ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, qu'il résulterait d'une délibération de l'assemblée générale de la chambre de commerce et d'industrie ; que, dès lors, ledit avis a été émis dans des conditions irrégulières ; que la circonstance, invoquée par la SCI CJF, que l'article R. 752-19 du code de commerce ne prévoit formellement aucune décision ou avis, mais de simples observations de la chambre de commerce et d'industrie, est sans incidence ; que le fait, qu'invoque également cette société, que l'assemblée générale a pu déléguer sa compétence est également sans incidence, dès lors que, en tout état de cause, ainsi qu'il a été dit précédemment, aucune délégation n'est légalement possible en l'espèce ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la SA DEVINASTE, cette dernière est fondée à soutenir que la décision attaquée, par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Cantal a autorisé la SCI CJF à procéder à une extension du magasin Weldom situé sur le territoire de la commune d'Andelat, a été prise à la suite d'une procédure irrégulière et est entachée d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SA DEVINASTE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement, ainsi que la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SA DEVINASTE, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la SCI CJF la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la SCI CJF le versement d'une somme quelconque au bénéfice de la société requérante sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 mai 2009 est annulé.

Article 2 : La décision du 31 janvier 2008 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial du Cantal a autorisé la SCI CJF à procéder à une extension du magasin Weldom situé sur le territoire de la commune d'Andelat est annulée.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA DEVINASTE, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à la SCI CJF.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2011, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Bézard, président,

M. Fontbonne, président-assesseur,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers

Lu en audience publique, le 31 mai 2011.

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N° 09LY01272


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 09LY01272
Date de la décision : 31/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05-02 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Urbanisme commercial. Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SCP LESAGE ORAIN PAGE VARIN CAMUS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-31;09ly01272 ?
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